Hydroxychloroquine : le chant du cygne ?

© hydroxychloroquine, coronavirus, Covid-19, Plaquenil, Raoult, ANSM - Matthieu Vandendriessche

Hydroxychloroquine : le chant du cygne ?

Publié le 15 mai 2020
Par Anne-Hélène Collin
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Nouvelle alerte pour l’hydroxychloroquine dans le traitement de la covid-19. L’Agence espagnole des médicaments et produits de santé (AEMPS) rappelait le 14 mai que la molécule était également connue pour provoquer, en plus des troubles cardiaques graves, des troubles neuropsychiatriques. L’Espagne, confrontée comme la France à des prescriptions d’hydroxychloroquine hors AMM dans le traitement de la covid-19, associée ou non à l’azithromycine, a relevé de rares cas de troubles neuropsychiatriques, « notamment des symptômes aigus de psychose, une tentative de suicide ou un suicide complet », y compris chez des patients sans antécédent. Les troubles sont apparus principalement au cours des premiers jours de traitement. « Presque tous les patients ont reçu une dose initiale de 800 mg le premier jour, suivie d’une dose de 400 mg par jour », explique l’AEMPS, qui n’exclut pas que ces troubles soient dus à l’infection virale elle-même. « On ne sait pas s’il s’agit d’effets indésirables dose-dépendants », précise-t-elle également.

En France, ces effets seront donc surveillés de très près par les promoteurs et les investigateurs d’essais cliniques intégrant l’hydroxychloroquine dans la covid-19. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) publie chaque semaine les résultats d’enquêtes de pharmacovigilance concernant les médicaments impliqués dans le traitement de la covid-19. Depuis le début de la crise sanitaire, les CRPV ont recensé 174 cas d’effets d’effets indésirables graves liés à l’hydroxychloroquine, essentiellement cardiaques, et 7 décès. 

Deux exemples d’études peu concluantes

Si le risque de l’hydroxychloroquine dans la covid-19 tend à s’affirmer, son bénéfice reste encore à prouver. Plusieurs études cliniques sérieuses viennent de démontrer l’absence d’intérêt de la molécule, qu’elle soit associée ou non à l’azithromycine. Le 14 mai, le BMJ publiait une étude chinoise (contrôlée randomisée en ouvert) incluant 150 patients atteints principalement de formes légères à modérées de covid-19 (dont 2 souffrant d’une forme grave), la moitié des patients ayant reçu l’hydroxychloroquine (1 200 mg par jour pendant trois jours puis 800 mg par jour pour une durée totale de deux à trois semaines). Le critère d’évaluation était la négativation de la virémie à 28 jours (85,4 % avec hydroxychloroquine, 81,3 % dans le groupe contrôle). Le 7 mai, le New England Journal of Medicine (NEJM) publiait une étude américaine (rétrospective) qui démontrait l’absence de bénéfices pour l’hydroxychloroquine seule (600 mg deux fois par jour le premier jour, puis 400 mg par jour pendant une médiane de 5 jours) ou associée à l’azithromycine chez 1 376 patients hospitalisés.

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Bien que ces deux exemples n’apprécient pas l’effet de l’association hydroxychloroquine-azithromycine chez les patients malades présentant les premiers symptômes, selon l’intuition du Pr Raoult, leurs conclusions sont tranchées : l’hydroxychloroquine n’a pas plus d’effet que le groupe contrôle, mais plus d’effets indésirables.