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Détournement d’Ozempic : à qui la faute ?
L’utilisation de cet antidiabétique pour la perte de poids a pris des proportions inédites. En France, le taux de mésusage d’Ozempic était de 1 % entre octobre 2021 et septembre 2022. Patients, médecins, pharmaciens : à quelle étape du circuit de dispensation se trouvent les failles ?
Le 1er mars dernier, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et l’Assurance maladie annonçaient qu’Ozempic (sémaglutide) était placé sous surveillance renforcée pour cause « d’usage détourné chez des personnes non diabétiques dans un objectif de perte de poids ». Avec pour conséquences des tensions d’approvisionnement privant les patients diabétiques « de ce traitement essentiel ». Sur 215 000 dispensations d’Ozempic en France entre octobre 2021 et septembre 2022, 2 185 étaient destinées à des personnes non diabétiques, relèvent les autorités de santé. Soit un taux de mésusage estimé à 1 %.
A la source
Lorsqu’aux Etats-Unis, Wegovy, un médicament formulé lui aussi avec le sémaglutide, obtient en mai dernier une autorisation de commercialisation par la Food and Drug Administration (FDA) avec pour indication la perte de poids chez les patients souffrant d’obésité, Novo Nordisk est très vite confronté à des tensions d’approvisionnement. « Sur TikTok, des influenceuses ont compris qu’Ozempic pouvait lui aussi permettre de maigrir et en ont fait la promotion », explique Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Comme Ozempic coûte 935 $ par mois, contre 1 350 $ pour Wegovy, les détournements ont commencé, puis se sont propagés rapidement dans le reste du monde. Le 10 mars, le mot-clé #Ozempic comptabilisait plus de 637 millions de vues sur Tik-Tok.
« Nous avions alerté l’ANSM lors d’une discussion il y a deux ou trois mois lorsque nous avons commencé à voir arriver dans nos officines les premières ordonnances falsifiées, se souvient Pierre-Olivier Variot, qui admet que certaines ont pu passer sous les radars. « Surtout au début. Mais cela fait maintenant plusieurs semaines que la profession fait preuve de vigilance en appelant le prescripteur pour s’assurer de la véracité de la prescription. » Côté médecins, on reconnaît aussi qu’il y a pu y avoir des trous dans la raquette. « Mais si les prescriptions hors autorisations de mise sur le marché (AMM) ne sont effectivement pas acceptables d’un point de vue éthique, elles ne portent que sur 2 100 patients dans toute la France, relativise Jean du Breuillac, secrétaire général adjoint du Collège de la médecine générale. Les tensions observées depuis maintenant plusieurs mois sont donc probablement plutôt liées aux capacités de production du laboratoire qui n’arrive plus à répondre à la demande. »
Victime de son succès
De son côté, Novo Nordisk reconnaît à demi-mot que le médicament est victime de son succès. Sur les neuf premiers mois de 2022, les ventes d’Ozempic ont bondi de 86 %, à 5,7 milliards d’euros. « Des tensions d’approvisionnement dues à une demande plus élevée que prévue dans de nombreuses zones géographiques engendrent des limitations temporaires de capacité pour les spécialités Ozempic 0,25 mg, 0,5 mg et 1 mg », indiquait le laboratoire danois dans un communiqué le 1er mars dernier. Il précisait avoir déjà investi 3 milliards d’euros depuis un an afin de développer ses capacités de production, et que 3,6 milliards de dollars supplémentaires allaient être dégagés en 2023.
En attendant, Jean du Breuillac invite ses confrères « à respecter, dans la mesure du possible, le signal émis par l’ANSM afin de ne pas accentuer les tensions sur l’approvisionnement d’un médicament dont les patients diabétiques ont vraiment besoin. Chose qu’il faut d’ailleurs rappeler aux patients qui viennent dans nos cabinets en espérant se voir prescrire de l’Ozempic pour maigrir. Il faut toutefois éviter de les laisser sans alternative, en les orientant vers un nutritionniste, le sport santé ou l’activité physique adaptée… » Pierre-Olivier Variot invite lui aussi les pharmaciens à rester vigilants. « Dès qu’un patient arrive au comptoir avec une prescription d’Ozempic hors AMM ou sans autre traitement, il faut appeler le médecin afin de la valider. Il faut alors tracer l’ordonnance et ne pas mettre le médicament au remboursement. En cas de fraude, le pharmacien aura fait son travail. Ce sera au médecin de se justifier. »
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