Oxycodone : inquiétante progression en France
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Oxycodone : inquiétante progression en France

Publié le 23 mai 2023
Par Yolande Gauthier
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Très médiatisée par la crise des opioïdes aux Etats-Unis qui a entraîné le décès de quelque 600 000 personnes depuis 1999, l’oxycodone est de plus en plus utilisée en France. A tel point que le Centre régional de pharmacovigilance (CRPV) de Bordeaux (Gironde) et la Société française de pharmacologie et de thérapeutique (SFPT) tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme. 

L’usage de l’oxycodone a explosé en une vingtaine d’années. En 2019, un état des lieux de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) pointait une augmentation de + 738 % entre 2006 et 2017. Et la hausse se poursuit, notamment en région Nouvelle Aquitaine : « En 2021, grâce à l’analyse des données publiques et anonymes de l’Assurance maladie, on compte autour de 400 utilisateurs d’oxycodone pour 100 000 habitants en France. En Nouvelle Aquitaine nous sommes à presque 950 utilisateurs pour 100 000 habitants », détaille le professeur Francesco Salvo, responsable du CRPV bordelais. « Ce n’est pas du tout la même situation qu’aux Etats-Unis car nous avons des garde-fous, mais il y a un ensemble d’arguments qui nous ont incité à lancer l’alerte ».

L’oxycodone est indiquée dans la prise en charge des douleurs intenses ou insupportables. « La morphine reste à ce jour l’antalgique de palier 3 à privilégier », rappelle la SFPT. « L’oxycodone n’est pas un opioïde de première intention. C’est une alternative thérapeutique à la morphine, insiste le Pr Salvo. Elle a des interactions médicamenteuses plus nombreuses et surtout un effet dopaminergique bien plus important que celui de la morphine, ce qui pourrait expliquer un potentiel addictogène plus marqué ». 

L’analyse des données de consommation pour l’année 2022 devrait confirmer la tendance à la hausse de l’utilisation. « La prise en charge de la douleur aiguë en post-opératoire peut être complexe, mais cela ne justifie pas une prescription d’oxycodone en première intention, reposant en plus sur l’impression qu’elle est plus sûre que la morphine, notamment sur le risque de constipation. C’est tellement faux ! Et nous aimerions comprendre pourquoi cette molécule est autant prescrite dans notre région, mais aussi en France ».

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