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Les sulfamides hypoglycémiants

Publié le 19 mai 2017
Par Maïtena Teknetzian
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Les sulfamides (ou sulfonylurées) représentent les antidiabétiques oraux historiquement utilisés. Du fait de leur mode d’action pancréatique, leur effet indésirable principal est l’hypoglycémie. Le sujet âgé et l’insuffisant rénal y sont particulièrement exposés.

MÉCANISME D’ACTION

Des « insulinosecréteurs »

Les sulfamides se fixent au niveau des récepteurs SUR (sulfonylurea receptor) des cellules bêta du pancréas, conduisant à une exocytose d’insuline, indépendante de la glycémie. Ils sont ainsi capables d’abaisser l’hémoglobine glyquée (Hb A1c) de 1 % environ. Ils présentent également un intérêt en termes de réduction des microangiopathies (notamment glomérulaires), mais n’ont pas d’effet démontré sur les macroangiopathies (artères coronaires, cérébrales et des membres inférieurs).

Tous ont une efficacité globalement similaire.

INDICATIONS

En deuxième intention

Les sulfamides sont utilisés dans le diabète de type 2, en deuxième intention, en cas de contre-indication ou d’intolérance à la metformine, ou en association à cette dernière si l’objectif glycémique n’est pas atteint. Leur mode d’action est complémentaire à celui de la metformine qui augmente la sensibilité des tissus périphériques à l’insuline.

PHARMACOCINÉTIQUE

Métabolisme hépatique et élimination rénale

Les sulfamides s’administrent par voie orale, juste avant un repas, en une prise unique (glimépiride, gliclazide LM, glipizide LP), ou jusqu’à 2 à 3 prises journalières (glibenclamide, glipizide, glicazide).

Ils sont métabolisés au niveau hépatique, puis éliminés majoritairement dans les urines.

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Ils ont une forte affinité pour les protéines plasmatiques (taux de liaison de 50 à 99 %) d’où des interactions possibles, par déplacement de la liaison à l’albumine, avec d’autres médicaments à forte affinité pour l’albumine (notamment antifongiques azolés, sulfamides antibactériens, AVK).

Les sulfamides passent la barrière placentaire et sont tératogènes chez l’animal à doses élevées.

EFFETS INDÉSIRABLES

Risque d’hypoglycémie

Du fait de leur mode d’action, les sulfamides sont pourvoyeurs d’hypoglycémie dose-dépendante. Ce risque est accru chez les patients âgés, dénutris ou insuffisants rénaux, ou par certaines associations médicamenteuses. Pour éviter une hypoglycémie, leur administration doit être suivie d’un repas et d’un apport régulier en glucides dans la journée. Si le repas doit être sauté, il ne faut pas prendre le sulfamide.

Les sulfamides peuvent être responsables d’une prise de poids (2 à 5 kg en moyenne au cours du traitement).

Plus rarement, à l’instar des sulfamides antibiotiques, ils peuvent induire des éruptions cutanées de type urticaire, voire des toxidermies sévères de type syndrome de Lyell, ainsi que des troubles hématologiques.

PRINCIPALES INTERACTIONS

Surtout avec les inhibiteurs enzymatiques

L’association aux inhibiteurs du CYP 2C9 ou 3A4 (antifongiques azolés, érythromycine, clarithromycine, fluoxétine…) augmente le risque d’hypoglycémie. Le miconazole est contre-indiqué (risque de coma). L’association aux autres azolés inhibiteurs enzymatiques impose de renforcer l’autosurveillance glycémique.

L’association aux sulfamides antibactériens est susceptible de provoquer des hypoglycémies et celle aux AVK, d’augmenter l’INR ou d’induire des hypoglycémies.

Le danazol est déconseillé (effet diabétogène). L’association à d’autres médicaments susceptibles d’élever la glycémie (corticoïdes, chlorpromazine…) nécessite de renforcer la surveillance glycémique.

Le glibenclamide et le glipizide, en particulier, peuvent être responsables d’effet antabuse en cas d’association avec l’alcool, dont la consommation est déconseillée.

CONTRE-INDICATIONS

Grossesse et allaitement

Les sulfamides sont contre-indiqués en cas de diabète de type 1, d’acidocétose, d’hypersensibilité aux sulfamides (y compris antibiotiques ou diurétiques), d’insuffisance rénale ou hépatique sévère, de grossesse et d’allaitement. Pendant la grossesse, le traitement hypoglycémiant repose sur l’insuline*.

Le glipizide LP est contre-indiqué chez le patient de plus de 65 ans (risque d’hypoglycémie prolongée).

SURVEILLANCE

Poids et hypoglycémie

Une surveillance du poids et de la survenue d’hypoglycémies est de mise. Le patient doit apprendre à en reconnaître les signes (sueurs, asthénie, tremblements, tachycardie, nervosité), et les circonstances favorisantes (consommation d’alcool, effort physique, repas sauté ou insuffisant).

Attention aux bêtabloquants (même en collyre) qui masquent les symptômes d’hypoglycémie : renforcer alors l’autosurveillance glycémique.

* Selon le CRAT, l’utilisation du glibenclamide est envisageable aux 2 e et 3 e trimestres de la grossesse (hors AMM).
  • Sources : Talbert, Willoquet, Gervais, Guide Pharmaco clinique ; Thésaurus ANSM ; Dictionnaire Vidal ; pharmacomédicale.org : Sulfamides hypoglycémiants ; Le Guide Prescrire : Patients sous sulfamides hypoglycémiants ; Recommandation de bonne pratique HAS et ANSM de janvier 2013 : Stratégie médicamenteuse du contrôle glycémique du diabète de type 2.

ALLER PLUS LOIN

– Le répaglinide (Novonorm) est également un antidiabétique oral insulinosécréteur, de mode d’action voisin des sulfamides. Sa demi-vie courte impose une administration en plusieurs prises quotidiennes, mais expose à un risque moindre d’hypoglycémie.
– Il constitue ainsi une alternative aux sulfamides, notamment chez des patients pour qui la prise alimentaire est irrégulière.