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Les récepteurs bêta-adrénergiques

Publié le 26 septembre 2015
Par Denis Richard
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Les récepteurs bêta-adrénergiques sont la cible de nombreux médicaments indiqués notamment en cardiologie et en pneumologie.

Les récepteurs bêta-adrénergiques (récepteurs β) conditionnent, avec les récepteurs alpha-adrénergiques (voir Le Moniteur n° 3086), les réponses physiologiques aux catécholamines endogènes (adrénaline et noradrénaline).

Rôle physiologique

• Il existe plusieurs sous-classes de récepteurs β. Seuls les récepteurs β1 et β2 intéressent la pratique officinale.

• Les récepteurs β1, abondants dans le striatum, le cœur et le tissu adipeux, sont aussi sensibles à l’adrénaline qu’à la noradrénaline. Leur stimulation entraîne notamment des effets cardiaques inotrope, chronotrope (force et fréquence cardiaque), dromotrope et bathmotrope (vitesse de conduction et excitabilité cardiaque) positifs avec augmentation du débit cardiaque et des besoins en oxygène. Ils stimulent la sécrétion de rénine au niveau rénal.

• Les récepteurs β2 prédominent sur les fibres musculaires lisses des vaisseaux, de l’utérus et des voies aériennes. Leur stimulation induit une myorelaxation, notamment au niveau des bronches (bronchodilatation) et de l’utérus (relâchement utérin), et une dilatation des coronaires (augmentant l’irrigation du cœur). La stimulation de ceux exprimés sur le foie induit une glycogénolyse. Leur stimulation a un effet cardiaque inotrope et chronotrope positif faible en regard de celui induit par la stimulation β1.

Agonistes

Pneumologie. Les bêtamimétiques exercent une action bronchodilatatrice s’exprimant à la suite de la stimulation β2.

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• Les agonistes β2 d’action courte assurent une bronchodilatation rapide, significative et persistant pendant 4 à 6 heures. Inhalés, ils constituent le traitement symptomatique de référence des épisodes d’exacerbation de l’asthme et de la prévention de l’asthme d’effort : salbutamol (Airomir Autohaler ; Asmasal Clickhaler, Ventilastin Novolizer, Ventoline), terbutaline (Bricanyl). Ils sont également indiqués dans la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO).

En cas de crise d’asthme aigu grave, l’administration d’un agoniste β2 d’action brève par nébulisation ou en IV (salbutamol, terbutaline) est une priorité si la crise ne cède pas après inhalation de plusieurs doses du dispositif habituel. La bronchodilatation est obtenue en 5 minutes.

• Les agonistes β2 d’action prolongée constituent un traitement de fond de la maladie asthmatique et de la BPCO. Ils sont disponibles sous forme inhalée (1 ou 2 prises par jour) ou orale (1 ou 2 prises/j selon la molécule mais moins bien tolérée et proposée aux patients ne pouvant utiliser une forme inhalée) : bambutérol (Oxéol cp), formotérol (Asmelor Novolizer, Atimos, Foradil, Formoair), indacatérol (Onbrez Breezhaler dans la BPCO uniquement), salmétérol (Serevent), terbutaline (Bricanyl cp LP). Ils peuvent être associés à un glucocorticoïde inhalé dans l’asthme (Formodual, Innovair, Symbicort, Flutiform, Seretide).

Gynécologie. Les décontracturants utérins (tocolytiques) sont indiqués dans le traitement à court terme du travail prématuré sans complication (salbutamol : Salbumol, Salbumol Fort).

Antagonistes

Appelés aussi « bêtabloquants », les antagonistes des récepteurs β inhibent le tonus sympathique.

Cardiologie. Ils ralentissent le rythme cardiaque, diminuent le travail du cœur et réduisent ses besoins en oxygène, d’où leur usage prophylactique dans l’angor ; ils réduisent l’hypertension artérielle en diminuant le débit cardiaque et en inhibant la sécrétion de rénine. Leurs indications, variables selon les spécialités, sont l’hypertension artérielle, l’angor, l’insuffisance cardiaque : acébutolol (Sectral), aténolol (Ténormine), bétaxolol (Kerlone), bisoprolol (Detensiel, Cardensiel et Cardiocor indiqués dans l’IC), carvédilol (Kredex uniquement indiqué dans l’IC), céliprolol (Célectol), labétalol (Trandate), métoprolol (Lopressor, Seloken et Selozok indiqué dans l’IC), nadolol (Corgard), nébivolol (Nébilox et Temerit indiqués également dans l’IC), pindolol (Visken, Visken Quinze), propranolol (Avlocardyl), tertatolol (Artex), timolol (Timacor). Diverses spécialités associent un bêtabloquant à un diurétique ou à un inhibiteur calcique.

• Certaines propriétés pharmacologiques nuancent leur action :

– l’activité sympathomimétique intrinsèque (« effet ASI ») se traduit par un effet stimulant direct partiel sur les récepteurs β (ex. : acébutolol, pindolol). Il s’avère utile chez un patient présentant une bradycardie importante car l’effet bêtabloqueur sur le cœur est légèrement diminué ;

– les bêtabloquants cardiosélectifs inhibent essentiellement les récepteurs β1 et respectent les β2. Ils limitent donc le risque de vasoconstriction, notamment au niveau des extrémités des membres et de bronchoconstriction (acébutolol, aténolol, bétaxolol, bisoprolol, céliprolol, métoprolol, nébivolol) ;

– l’effet stabilisant de membrane (acébutolol, propranolol) permet de ralentir les échanges ioniques transmembranaires. Cette activité, dite d’« anesthésique local », ou effet « quinidine-like », ralentit la vitesse de dépolarisation et est mise à profit dans certains troubles du rythme cardiaque.

• Contre-indications principales des bêtabloquants : bradycardie (< 50/min avant traitement), bloc auriculoventriculaire, asthme ou BPCO sévère, syndrome de Raynaud. En cas d’altération de la fonction myocardique et chez le sujet âgé, le bêtabloquant est instauré à faible dose et sous étroite surveillance.

Ophtalmologie. Les bêtabloquants diminuent la sécrétion de l’humeur aqueuse donc réduisent la tension oculaire en cas de glaucome à angle ouvert. Ils sont prescrits sous forme de collyres en première intention : bétaxolol (Betoptic), cartéolol (Cartéol, Cartéol LP), lévobunolol (Bétagan), timolol (Geltim, Ophtim, Timabak, Timocomod, Timoptol). Ces derniers peuvent entraîner les effets indésirables des bêtabloquants oraux et ont donc leurs contre-indications.

Autres. Certains bêtabloquants sont indiqués dans le traitement de fond de la migraine (métoprolol, propranolol), dans les symptômes associés aux hyperthyroïdies (tachycardie, tremblement) ainsi que dans d’autres indications plus marginales (tremblements essentiels…). Le propranolol s’utilise dans les manifestations fonctionnelles cardiaques à type de tachycardie et de palpitations au cours de situations émotionnelles transitoires (trac).

Sources : Adrenoreceptor pharmacology, Robinson E. & Hudson A. (2000) Tocris Reviews n° 8 ; Atlas de pharmacologie, Lüllmann H., Mohr K. Hein L. (2010), Flammarion ; Pharmacologie : des cibles vers l’indication thérapeutique, Landry Y., Gies J.-P. (2009), Dunod., Kester M., Karpa K.D., Vrana K.E. (2011) Elsevier’s integrated review pharmacology, Saunders.

IATROGÉNIE ET RÉCEPTEURS BÊTA-ADRÉNERGIQUES

Bêtamimétiques. Des effets traduisant le passage systémique des bronchodilatateurs inhalés peuvent parfois s’observer : tremblements des extrémités, crampes, tachycardie, nausées, céphalées, troubles du sommeil. Hypokaliémie et/ou dysglycémie restent exceptionnelles. Les éventuelles réactions locales suivant l’administration (toux, enrouement) sont limitées par un rinçage de la bouche après chaque usage.

Bêtabloquants (même en collyre). Les bêtabloquants réduisent les capacités physiques à l’effort (asthénie) et augmentent le délai de récupération après effort (en début de traitement notamment, les efforts physiques peuvent sembler difficiles). Ils masquent les symptômes d’hypoglycémie chez le diabétique (tachycardie, tremblements). Ils peuvent être à l’origine d’un syndrome de Raynaud, de troubles de l’humeur et du sommeil (insomnies, cauchemars, qui peuvent être réduits en utilisant une molécule hydrosoluble : aténolol, nadolol, sotalol), de troubles digestifs (nausées, diarrhées), de troubles de l’érection. Il ne faut jamais suspendre brutalement un traitement par bêtabloquant (effet « rebond » avec risque de troubles du rythme sévères).