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La collecte en officine, ça en jette
Avec la vaccination et la réalisation de tests antigéniques, les pharmacies ne sont plus seulement collectrices mais aussi productrices de déchets de soins. A ce jour, elles ne supportent pas le coût de leur enlèvement, ce qui pourrait bientôt changer. Au-delà de la question économique, la collecte des déchets n’est pas sans bénéfices pour l’officine.
En 2021, la pratique des tests antigéniques et la vaccination contre la grippe et le Covid-19 ont généré un surplus de 20 % de déchets d’activités de soins à risques infectieux (Dasri). Si la collecte est gratuite pour les patients en autotraitement, financée par les laboratoires, elle devrait être à la charge de l’officine concernant les déchets produits du fait de ses nouvelles activités. C’est déjà le cas pour les médecins et les infirmiers libéraux. Dans la situation d’urgence sanitaire, l’Etat a signé une convention avec l’écoorganisme Dastri concernant la prise en charge des déchets de l’officine. Cet arrangement temporaire va prendre fin et la question du financement est désormais sur la table.
La Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) a proposé un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022. L’idée était de mettre en place une opération neutre : la gratuité de la collecte contre celle de l’enlèvement des déchets des officines. Amendement non adopté. Le syndicat veut donc porter le sujet dans les négociations qui s’ouvrent avec l’Assurance maladie. Cela tombe bien : selon ses protagonistes, il faudra donner à la nouvelle convention pharmaceutique une tonalité écoresponsable. « Pour financer l’élimination des déchets de l’officine, je demanderai une somme de 300 € par an pour la collecte des Dasri que nous effectuons jusqu’ici de manière gratuite », défend Philippe Besset, président de la FSPF. Une somme pour contribuer aux frais d’enlèvement des déchets de l’officine par l’écoorganisme Dastri (qui fait appel à des sous-traitants) ou un prestataire spécialisé. Cette seconde option présente l’inconvénient d’un double circuit. La Collecte Médicale, un des leaders dans cette activité, évalue justement à 300 € le coût annuel de l’enlèvement. Il est établi sur une fréquence moyenne de collecte mensuelle ou trimestrielle.
A la tête de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), Pierre-Olivier Variot se tourne pour sa part vers le ministère des Solidarités et de la Santé. « Nous collectons et stockons les médicaments non utilisés et les Dasri. En cela, nous nous substituons aux collectivités territoriales qui ne font pas leur boulot, pointe le président de l’USPO. Il n’est pas question en plus de payer pour l’enlèvement de nos déchets. Une somme doit nous être allouée. Ce n’est pas tant une question de montant que d’entrer dans une logique. » Le représentant syndical précise au passage que l’avenant conventionnel sur la vaccination antigrippale mentionne l’élimination des seringues et des aiguilles mais ne la prévoit pas. « C’est écrit ainsi dans l’avenant, mais cela n’a pas été négocié comme ça », indique-t-il.
Utilité thérapeutique et image valorisante
Au-delà de ces considérations financières, il y a des retombées positives pour le réseau officinal. La collecte des médicaments non utilisés (MNU) est obligatoire et réalisée gratuitement depuis une trentaine d’années. « Elle fait apparaître la pharmacie comme un lieu où l’on se préoccupe des considérations environnementales », souligne Laurent Wilmouth, directeur général de Cyclamed. D’ailleurs, selon une enquête menée par l’institut BVA en 2021, les perspectives écologiques sont passées devant la sécurité sanitaire dans les motivations pour rapporter les MNU. Cette même enquête confirme la qualité du relais de communication de l’officine. Il est cité par 42 % des répondants, contre un score de 35 % pour la télévision. Les officinaux font passer des messages sur le tri à opérer, s’interrogent sur des médicaments non consommés. Ce qui ne serait pas possible avec un dépôt en self-service dans l’espace de vente…
Il en va de même pour les Dasri. Une borne à l’extérieur de l’officine présenterait en outre un risque de dépôts sauvages. Le système actuel garantit la sécurité du dispositif. Ainsi que sa qualité. « Le pharmacien est un acteur essentiel et unique puisqu’il propose un échange physique et personnalisé au patient. En centre de déchetterie ou dans les supermarchés, personne ne s’informe sur la manière dont vous prenez et vous vivez votre traitement », indique Laurence Bouret, directrice générale de Dastri.
Adapter le rythme des retraits
Les déchets à l’officine, ce sont aussi des problématiques de stockage et d’encombrement. Pour les MNU, la collecte a régressé ces dernières années. Son rythme est moins soutenu. C’est une conséquence des baisses de volume de vente des médicaments, d’un tri optimisé et des efforts portés sur l’adhésion thérapeutique. « Actuellement, en France, la collecte représente en moyenne 72 cartons par officine et par an. Ce sont donc moins de deux cartons qui sortent chaque semaine d’une pharmacie », estime le directeur général de Cyclamed. Pour les Dasri, les enlèvements sont davantage espacés. Dès 2022, la collecte va également concerner les déchets issus des équipements électriques ou électroniques associés à des dispositifs médicaux perforants. Soit certains capteurs de glucose en continu et les pompes patch à insuline. C’est un nouveau carton, de couleur violette, qui les recevra. L’écoorganisme fait en sorte d’adapter la fréquence des retraits. Ils s’effectuent à un rythme semestriel (soit la fréquence réglementaire au regard des quantités présentes en officine), mais aussi trimestriel ou mensuel. « La grande majorité des officines collectent moins de 180 kg de Dasri perforants par an. Cependant, nous appliquons la fréquence réglementaire pour seulement la moitié d’entre elles. Nous avons en effet fait le choix d’augmenter cette fréquence pour certaines pharmacies, notamment à Paris où les surfaces sont réduites », précise Laurence Bouret. Des pistes sont à l’étude pour alléger les contraintes de la collecte. Pourquoi pas une réutilisation des boîtes de Dasri par les patients ? « Nous aimerions pouvoir l’expérimenter dans le cadre de notre prochain agrément, sous statut dérogatoire, dans la mesure où cela n’est pas encore autorisé en France. » Et comme en milieu hospitalier, une évaluation du risque infectieux par le pharmacien d’officine pourrait être mise en œuvre avec un impact sur le circuit d’élimination des déchets. Loin d’être anecdotique ou simplement une contrainte, la gestion des déchets de soins et des traitements relève de plus en plus d’une qualification officinale.
UNE ZONE DE STOCKAGE À DÉLIMITER
L’Ordre des pharmaciens a proposé en 2014 un document sur l’aménagement des locaux de l’officine. La zone de stockage des Dasri (moins de 180 kg par an) doit être :
– spécifique et adaptée à la quantité de déchets ;
– identifiée par une affiche ;
– située à l’écart de sources de chaleur ;
– nettoyée de manière régulière et chaque fois que nécessaire ;
– placée à distance du passage du public.
Les boîtes qui s’y trouvent sont fermées définitivement et placées en vrac dans de grands contenants.
Pour l’association Pharma Système Qualité (PHSQ), qui propose une certification des officines, il est essentiel de définir ces emplacements et de désigner, lorsque l’équipe est conséquente, un responsable de cet entreposage. « Une pharmacie écoresponsable est un projet d’entreprise fédérateur pour l’équipe », soutient Laëtitia Hible, présidente de PHSQ.
À RETENIR
– Les officines vont devoir soutenir le coût des déchets qu’elles produisent dans le cadre de la vaccination et de la réalisation de tests antigéniques.
– Les syndicats de pharmaciens refusent que ce coût incombe aux pharmacies. Ils demandent une compensation financière si cela devait être le cas.
– Toute valorisation économique mise à part, les actions de collecte renforcent toutefois le suivi thérapeutique et l’image écoresponsable de l’officine.
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