- Accueil ›
- Thérapeutique ›
- Médicaments ›
- Recherche et innovation ›
- « Avez-vous 800 millions ? »
« Avez-vous 800 millions ? »
Les blockbusters sont de plus en plus rares alors que l’industrie investit jusqu’à 30 % de son chiffre d’affaires en recherche et développement. Les chercheurs sont-ils en panne ? Réponse de Régis Dioulo, « business development manager » chez ADIS Business Intelligence, une société qui propose une des plus importantes bases de données sur les molécules en développement.
« Le Moniteur » : Beaucoup disent que l’industrie pharmaceutique souffre de son manque d’innovation. Avez-vous ce sentiment ?
Regis Dioulo : Dans les années 80 et 90, l’industrie pharmaceutique pouvait se permettre d’investir lourdement dans la recherche sur des axes multiples et faire ainsi preuve d’innovation. Aujourd’hui, l’arrivée en masse des génériques, largement supportée par les pouvoirs publics pour des raisons évidentes de coûts, a bousculé son modèle économique. En moyenne, il faut une dizaine d’années pour développer et mettre sur le marché un produit. Le brevet qui protège cette molécule dans son application thérapeutique est de 20 ans. Mais on constate que la durée effective de commercialisation ne dépasse pas 8 ans en général avant que le brevet ne tombe dans le domaine public et soit produit et commercialisé à moindre frais par les génériqueurs. Cette situation amène donc l’industrie pharmaceutique à tenter de réduire au maximum le délai entre les phases de développement et la commercialisation. Ainsi les axes de recherches, les technologies sont à peu près toujours les mêmes, et ce au détriment de l’innovation qui réclame beaucoup plus de temps et d’argent.
Quel est le coût de R #amp; D d’un médicament ? Quelle part y consacrent les firmes ?
Selon la Pharmaceutical Research and Manufacturers of America, qui regroupe les principaux laboratoires pharmaceutiques américains, le coût de développement d’un nouveau médicament est passé de 54 millions de dollars en 1976 à 802 millions aujourd’hui. Les laboratoires pharmaceutiques y consacrent par an et en moyenne entre 20 et 30 % de leur chiffre d’affaires.
La R #amp; D est-elle toujours aussi prioritaire pour l’industrie pharmaceutique ?
Elle reste une de leurs priorités, mais aujourd’hui elle se doit de composer avec un souci de rentabilité et de retour sur investissement à moyen terme, ce qui peut nuire à l’innovation.
Qui innove le plus aujourd’hui ? les big pharmas ou les petites biotechs ?
Beaucoup de biotechs travaillent sur des niches thérapeutiques avec l’espoir de pouvoir apporter leur technologie aux grands laboratoires. C’est plutôt dans ce secteur d’activité que réside une véritable politique d’innovation. Cependant, là encore, ces sociétés sont extrêmement dépendantes des investisseurs pour pouvoir financer leurs projets et à terme devenir rentables.
Quelle est la part des biotechs dans les nouvelles molécules développées ?
Elle est difficilement quantifiable mais extrêmement présente, sachant qu’aujourd’hui les biotechnologies sont présentes à la fois dans la fabrication de protéines thérapeutiques mais également dans toute l’activité informatique liée aux méthodes de criblage pour évaluer les potentiels candidats. Il existait un rapprochement de fait entre les biotechs et l’industrie pharmaceutique ; il semble qu’aujourd’hui on assiste a une intégration structurelle comme par exemple la fusion entre Merck et Serono en 2006. Ce mouvement ne devrait pas s’arrêter là.
On a le sentiment qu’il y a de plus en plus d’alliances entre firmes pharmaceutiques pour développer des médicaments. Est-ce le cas et, si oui, pourquoi ?
Au vu de la situation avec l’arrivée des génériques et les recommandations de plus en plus rigoureuses des autorités sanitaires, on constate en effet un phénomène de regroupement, par des alliances, des fusions ou des accords commerciaux ou scientifiques au sein de l’industrie pharmaceutique. Ces différents accords mettent en place des synergies permettant la réunion de compétences financières, scientifiques et commerciales dans le but unique de soutenir leur modèle économique.
Quels sont les domaines thérapeutiques dans lesquels il y a le plus de besoins ?
Les maladies orphelines restent un secteur dans lequel il reste beaucoup à faire. Malgré une amélioration ces dernières années, peu de laboratoires se lancent dans une recherche thérapeutique soutenue dans ce domaine.
Quelles sont les avancées les plus prometteuses ?
Je crois que les avancées sur le sida ont été ces dernières années assez significatives, avec des traitements plus efficaces, moins contraignants qui amélioreront la vie des patients. Le but étant de faire du sida non plus une maladie mortelle mais une maladie chronique, et ce avant, pourquoi pas, de disposer d’un vaccin dans les 10 prochaines années.
Et celles concernant les recherches en cours ?
Le cancer, Alzheimer, le sida et les maladies cardiovasculaires accaparent pour le moment une très grande partie de l’activité de recherche et développement
Pourquoi ?
Parce que ce sont les maladies, hormis le sida, les plus fréquemment diagnostiquées dans le pays occidentaux. Les probabilités de rentabilité étant plus élevées au vu de la population et des politiques d’aides publiques, les laboratoires ont tout intérêt à investir dans ces domaines thérapeutiques.
Pour vous, parmi les recherches actuelles, quelles sont celles les plus innovantes, que ce soit en termes de molécule, de domaine thérapeutique ou encore de techniques ?
Disons que la thérapie génique représente une approche futuriste du traitement thérapeutique en mettant en place un schéma de prévention a contrario du schéma classique de soin. Le décryptage du code ADN d’un individu peut fournir des informations sur d’éventuelles mutations de ses gènes pouvant occasionner une maladie. Il sera donc traité pour éviter son déclenchement. Malheureusement, il reste beaucoup de développements, notamment sur notre compréhension sur les gènes humains et leurs fonctionnements. Par ailleurs, d’un point de vue économique, il n’y a que des politiques publiques qui peuvent prendre le risque d’investir sans prendre de risque financier. Malgré tout, l’approche conceptuelle de la thérapie génique est à l’heure actuelle la plus innovante, peut-être un peu trop d’ailleurs !
Qu’est-ce qui a marqué l’année 2007 ?
Je pense que ce sera les faux espoirs suscités autour de la commercialisation de l’Acomplia (Zimulti) aux Etats-Unis, lequel était annoncé comme un blockbuster. Cela traduit également des difficultés et des contraintes de plus en plus grandes des laboratoires pharmaceutiques à innover sans risquer le couperet fatidique des autorités sanitaires d’un pays
23 000 molécules « fichées »
A dis (Australian Drug Information Service) a été créé il y a près de 40 ans en Nouvelle-Zélande. Editrice de revues scientifiques au départ, cette société s’est depuis tournée vers la constitution de bases de données dans le domaine de la recherche et du développement de médicaments. Son fleuron, « Research #amp; Development Insight », est une base internationalement reconnue qui a vu le jour en 1995. Elle propose une analyse de toutes les molécules en développement avec une mise à jour quotidienne sur Internet. Plus de 23 000 principes actifs sont recensés et suivis. Pour ce faire, une équipe de 30 personnes compulsent 1 300 publications, épluchent les rapports d’activité de plus de 3 100 firmes, instituts de recherche et universités et vont à la pêche aux infos sur le web ainsi que dans les congrès et symposiums. Chaque molécule est présentée sous forme d’une fiche indiquant la firme concernée, la phase de recherche, l’indication étudiée, le mécanisme d’action, avec un texte explicatif et une évaluation de l’intérêt de la molécule par rapport à l’environnement thérapeutique existant ainsi qu’une bibliographie.
ADIS en chiffres
– 23 000 molécules suivies
– 140 nouveaux profils ajoutés chaque mois
– 1 230 mises à jour
– 8 891 structures chimiques détaillées
– 3 454 laboratoires pharmaceutiques couverts
– 1 283 indications identifiées
- Tramadol et codéine : les points clés de l’ordonnance numérique sécurisée
- Analogues du GLP-1 : le conseil constitutionnel impose au médecin d’informer de la non-prise en charge
- Petit récap des nouvelles règles sur le tramadol et la codéine au 1er mars 2025
- Rupture de stock de Iopidine : par quoi le remplacer ?
- Quétiapine : pas de retour à la normale avant l’automne
- [VIDÉO] Arielle Bonnefoy : « Le DPC est encore trop méconnu chez les préparateurs »
- [VIDÉO] Le service de livraison en ligne : « Ma pharmacie en France » disponible dès juin
- [VIDÉO] Négociations, augmentations, ancienneté… Tout savoir sur les salaires à l’officine
- [VIDÉO] 3 questions à Patrice Marteil, responsable des partenariats Interfimo
- [VIDÉO] Quand vas-tu mettre des paillettes dans ma trésorerie, toi le comptable ?
![[VIDÉO] Arielle Bonnefoy : « Le DPC est encore trop méconnu chez les préparateurs »](https://www.lemoniteurdespharmacies.fr/wp-content/uploads/2025/03/bonnefoy-dpc-680x320.png)
![[VIDÉO] Le service de livraison en ligne : « Ma pharmacie en France » disponible dès juin](https://www.lemoniteurdespharmacies.fr/wp-content/uploads/2025/03/grollaud-sans-680x320.png)