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Dispensation à l’unité : les syndicats alertent, la Cour des comptes s’interroge
La dispensation à l’unité n’est pas nouvelle, mais sa généralisation revient régulièrement dans les débats politiques et budgétaires. Soutenue par le président de la République, elle est aujourd’hui examinée par la Cour des comptes, qui mène une instruction sur les avantages, les limites et les conditions de faisabilité du dispositif.
Le 20 mars, Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), a été auditionné pendant plus de deux heures. Il a exprimé une position très réservée : « La dispensation à l’unité, c’est la mauvaise réponse à deux bonnes questions : la lutte contre le gaspillage et l’amélioration de l’observance. »
Des dispositifs déjà en place
La DAU existe déjà dans certaines situations encadrées : stupéfiants, antibiotiques sous tension, ou encore quétiapine 50 mg depuis peu. Mais l’exemple de la quétiapine interroge. « Dans 90 % des cas, la quétiapine 50 mg est utilisée comme traitement de fond. Dispenser à l’unité un médicament prescrit à posologie fixe pendant un mois entier n’a aucun sens. »
Traçabilité et rappels de lots : un risque sous-estimé
Autre frein : la traçabilité. Contrairement à la dispensation en boîte, chaque médicament délivré à l’unité perd son numéro de lot une fois sorti de son conditionnement. « En cas de rappel de lot, l’officine ne peut pas identifier les patients concernés si elle ne scanne pas la boîte entière. C’est une perte majeure de sécurité. »
Un coût incompatible avec le modèle économique français
Pierre-Olivier Variot insiste également sur le surcoût logistique d’une DAU généralisée. Étiquetage personnalisé, ajout de notice, reconditionnement sécurisé… « Dans les pays qui ont généralisé la DAU la rémunération moyenne par ordonnance est de 25 à 28 euros, contre 11 euros en France. On comprend bien que c’est impossible quand la marge est aussi faible », note le président de l’USPO.
Aujourd’hui, aucune rémunération n’est prévue pour l’ensemble des tâches supplémentaires liées à la DAU. « Il faut imprimer une étiquette avec le nom du patient, le dosage, le numéro de lot, fournir une notice, assurer un conditionnement… et tout cela, c’est pour zéro. » Un point sur lequel, selon lui, la Cour des comptes a montré une certaine lucidité : « Ils ont bien compris que la DAU allait coûter beaucoup plus cher. »
Dispensation adaptée : une alternative abandonnée trop tôt
Plutôt que la DAU, l’USPO défend la dispensation adaptée, un dispositif interrompu après l’avenant 1 à la convention pharmaceutique. « C’était un système gagnant-gagnant. Il permettait d’éviter le gaspillage en discutant avec le patient. » Par exemple : « Un patient sous paracétamol trois fois par jour pendant un mois n’a peut-être pas besoin de 11 boîtes. En échangeant, on adapte. » Selon Pierre-Olivier Variot, cette approche mériterait d’être relancée. « Même la direction de la Sécurité sociale (DSS) regrette aujourd’hui sa suppression. »
Revoir les conditionnements industriels
Autre levier évoqué : adapter les tailles de boîte à la posologie. Exemple : pour l’amoxicilline, la prescription la plus fréquente est de 3 comprimés par jour pendant 7 jours, soit 21 comprimés. « Or, les conditionnements disponibles sont de 6 ou 14 unités. Pourquoi ne pas produire des boîtes de 7 ? » Des ajustements similaires ont déjà été réalisés pour le Tramadol ou le Zolpidem.
Une expérimentation sous conditions ?
À la question d’un éventuel retour de la DAU dans le cadre conventionnel, Pierre-Olivier Variot reste prudent. « Ce n’est envisageable que si on met en place une rémunération spécifique, avec des critères stricts. Et sans oublier les enjeux de traçabilité. » L’USPO suggère de réserver la DAU à des cas ciblés de santé publique, comme les stupéfiants ou les situations de pénurie.
Prochaine étape : un rapport d’évaluation à l’été
La Cour des comptes doit finaliser son rapport d’ici juin 2025. Il sera rendu public après adoption en séance. L’USPO, l’une des dernières parties auditionnées, attend des conclusions équilibrées. « Il ne faut pas se tromper de combat. La priorité, c’est l’efficience, pas la symbolique », conclut Pierre-Olivier Variot.
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