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Brukinsa, antinéoplasique inhibiteur de la tyrosine kinase de Bruton

Publié le 24 février 2024
Par Yolande Gauthier
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Le laboratoire BeiGene commercialise son premier médicament remboursé en France. Brukinsa (zanubrutinib) est indiqué dans le traitement de certaines hémopathies malignes. C’est un inhibiteur de la tyrosine kinase de Bruton tout comme Imbruvica (ibrutinib) et Calquence (acalabrutinib). Il a été approuvé dans un plus grand nombre d’indications que ces derniers.

 

Indications remboursées

Brukinsa est pris en charge :

– dans le traitement des patients adultes atteints d’une leucémie lymphoïde chronique (LLC) non précédemment traités. Uniquement chez les patients ne présentant pas de délétion 17p et/ou de mutation TP53 et inéligibles à un traitement à base de fludarabine à pleine dose ; et chez ceux présentant une délétion 17p et/ou une mutation TP53 ;- dans le traitement des patients adultes atteints de LLC ayant reçu au moins un traitement antérieur ;- en monothérapie dans le traitement de patients adultes atteints de lymphome de la zone marginale (LZM) ayant reçu au moins un traitement antérieur à base d’anticorps anti-CD20 ;- en monothérapie dans le traitement de patients adultes atteints de macroglobulinémie de Waldenström (MW) qui ont reçu au moins un traitement antérieur.

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Mode d’action 

Le zanubrutinib est un inhibiteur durable de la tyrosine kinase de Bruton (BTK). Il agit en formant une liaison covalente avec un résidu cystéine sur le site actif de la BTK. La BTK est une molécule de signalisation du récepteur d’antigène des lymphocytes B et des voies des récepteurs de cytokines. La signalisation de la BTK participe à l’activation des voies nécessaires à la prolifération, à la circulation, à la chimiotaxie et à l’adhérence des lymphocytes B.

Posologie

La dose quotidienne recommandée est de 320 mg, qui peuvent être pris 1 fois par jour (4 gélules) ou divisés en prises de 2 gélules 2 fois par jour.

Le traitement est poursuivi jusqu’à la progression de la maladie ou l’apparition d’une toxicité inacceptable.

Contre-indications 

Hypersensibilité à l’un des composants.

Grossesse et allaitement

Les femmes en âge de procréer doivent utiliser des méthodes de contraception hautement efficaces pendant le traitement et jusqu’à 1 mois après son arrêt. Celles qui utilisent une contraception hormonale doivent recourir en complément à une méthode de contraception mécanique.

Ne pas utiliser Brukinsa pendant la grossesse.

Arrêter l’allaitement durant le traitement.

Effets indésirables

Une infection des voies aériennes supérieures, des ecchymoses, une hémorragie ou des hématomes, une neutropénie, des douleurs musculosquelettiques, un rash, une pneumonie, de la diarrhée et de la toux sont les effets indésirables les plus fréquents.

Des infections urinaires, des vertiges, une hypertension, une fatigue, une thrombopénie ou une anémie sont également très souvent rapportés.

Interactions médicamenteuses

En cas de coadministration avec un inhibiteur puissant (voriconazole, kétoconazole, clarithromycine, ritonavir, etc.) ou modéré (érythromycine, diltiazem, vérapamil, jus de pamplemousse, oranges amères, etc.) du CYP3A, la dose de Brukinsa est réduite à 80 mg ou 160 mg par jour et les patients doivent être étroitement surveillés pendant la durée d’emploi de l’inhibiteur.

Eviter l’utilisation concomitante d’inducteurs puissants (carbamazépine, phénytoïne, rifampicine, millepertuis, etc.) ou modérés (éfavirenz, modafinil, notamment) du CYP3A en raison d’un risque de perte d’efficacité du traitement.

Ne pas administrer Brukinsa en même temps que la warfarine ou d’autres antagonistes de la vitamine K.

Prudence avec les médicaments à index thérapeutique étroit métabolisés par le CYP3A (ciclosporine, dihydroergotamine, fentanyl, tacrolimus, quinidine, etc.) ou par le CYP2C19 (oméprazole, par exemple) : réduction possible des expositions plasmatiques de ces médicaments.

Le zanubrutinib peut augmenter la concentration des substrats oraux de la P-gp à index thérapeutique étroit comme la digoxine.

Surveillance particulière

Recherche du statut du VHB chez les patients avant l’instauration du traitement. Détection d’éventuels signes et symptômes de l’infection.

Surveillance de la numération formule sanguine complète des patients et des signes et symptômes de saignement pendant le traitement.

Surveillance des signes et symptômes de fibrillation et de flutter auriculaires.

Test de grossesse recommandé avant l’instauration du traitement pour les femmes en âge de procréer.

 

 

Fiche technique

Zanubrutinib 80 mg pour une gélule blanche, flacon de 120, 4 750,87 €, remb. SS à 100 %, AMM : 34009 302 423 9 1.

BeiGene : 08 05 54 32 92

Les prix sont mentionnés hors honoraires de dispensation.

 

Le lymphome de la zone marginale

Le lymphome de la zone marginale (LZM) est une hémopathie maligne qui représente 5 à 15 % des lymphomes non hodgkiniens. Ces derniers sont des cancers qui se développent à partir des lymphocytes B dans 85 % des cas ou des lymphocytes T dans 15 % des cas. Les LZM, qui se développent à partir des lymphocytes B, surviennent principalement chez les sujets âgés de plus de 60 ans et ont un bon pronostic avec une survie de 96 % à 1 an et de 88 % à 5 ans.

Quelles sont les trois formes de la maladie ?

On distingue les lymphomes extraganglionnaires (70 %), spléniques (20 %) et ganglionnaires (10 %). Les lymphomes extraganglionnaires atteignent fréquemment l’estomac (lymphome gastrique ou du Malt) mais peuvent également toucher les poumons, la peau ou encore l’œil. La prolifération concerne respectivement les follicules lymphoïdes secondaires de la rate dans les lymphomes spléniques, et les cellules des ganglions lymphatiques dans les lymphomes ganglionnaires. La présence d’agents infectieux tels qu’Helicobacter pylori dans les formes gastriques, de Chlamydia psittaci pour les formes oculaires, de Campylobacter jejuni pour les formes touchant l’intestin grêle et/ou l’existence d’une pathologie auto-immune (syndrome de Sjögren, thyroïdite d’Hashimoto, etc.) participeraient à l’apparition d’un LZM.

Comment se manifestent les trois formes de LZM ?

Les LZM sont dits « indolents », c’est-à-dire qu’ils évoluent lentement, plusieurs années pouvant s’écouler entre le début de la maladie et l’apparition des premiers symptômes. Le lymphome gastrique se manifeste par du reflux gastroœsophagien, de l’anorexie, des douleurs et/ou de l’inconfort épigastrique, voire des diarrhées intermittentes. Le lymphome splénique se caractérise quant à lui par une splénomégalie et, au niveau sanguin, par une anémie et une thrombocytopénie. Le lymphome ganglionnaire entraîne chez une minorité de patients des « symptômes B », qui peuvent associer de la fièvre, des sueurs nocturnes ou encore une perte de poids.

Delphine Guilloux

Dites-le au patient

– Avaler les gélules avec ou sans nourriture avec de l’eau, sans les ouvrir ni les mâcher.

– Pendant le traitement, consommer avec prudence le pamplemousse et les oranges amères (risque d’interaction médicamenteuse).

– En cas d’oubli d’une dose au moment prévu, prendre la suivante selon le calendrier normal.

– Utiliser une protection solaire pour prévenir le cancer de la peau.

L’avis de la HAS

– Service médical rendu faible dans la macroglobulinémie de Waldenström, important dans les autres indications

– Pas d’amélioration du service médical rendu (ASMR V) ou amélioration du service médical rendu mineure (ASMR IV) selon les indications remboursées

– Population cible estimée à environ 584 patients dans le lymphome de la zone marginale, environ 2 510 patients par an dans la leucémie lymphoïde chronique et 45 à 124 patients dans la macroglobulinémie de Waldenström

Délivrance

– Liste I

– Médicament soumis à prescription hospitalière

– Prescription réservée aux spécialistes en hématologie ou aux médecins compétents en maladies du sang

– Surveillance particulière pendant le traitement