Amvuttra, médicament orphelin dans l’amylose héréditaire à transthyrétine
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Amvuttra, médicament orphelin dans l’amylose héréditaire à transthyrétine

Publié le 13 avril 2024 | modifié le 5 décembre 2024
Par Yolande Gauthier
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Amvuttra (vutrisiran) est le quatrième médicament pour traiter l’amylose héréditaire à transthyrétine avec polyneuropathie, une maladie rare. Il s’ajoute à Vyndaqel (tafamidis), Tegsedi (inotersen) et Onpattro (patisiran). Faute d’études comparatives avec les deux premières molécules, la Haute Autorité de santé le classe en traitement de seconde intention, après Onpattro. Leur rythme et mode d’administration diffèrent.

Indications

Traitement de l’amylose héréditaire à transthyrétine chez les patients adultes atteints de polyneuropathie de stade 1 ou 2. Pour empêcher le développement d’une invalidité, le traitement doit être démarré le plus tôt possible après l’apparition de la maladie.

Mode d’action

Le vutrisiran est un petit acide ribonucléique interférent double brin de nouvelle génération, chimiquement stabilisé. Il cible spécifiquement les ARN messagers mutés et sauvages de la transthyrétine (TTR). Il provoque la dégradation catalytique de l’ARNm de la transthyrétine dans le foie. Il diminue ainsi les taux sériques de protéine TTR mutée et sauvage et les dépôts amyloïdes de TTR dans les tissus affectés.

Posologie

La posologie recommandée est de 25 mg administrés par injection sous-cutanée par un professionnel de santé 1 fois tous les 3 mois.

L’injection se fait dans l’abdomen (en évitant la zone qui entoure le nombril), les cuisses ou les bras. Amvuttra ne doit pas être administré dans des zones de tissu cicatriciel, rougies, enflammées ou gonflées.

Amvuttra entraîne une diminution des taux sériques de vitamine A, car la TTR sérique agit comme un transporteur pour une protéine qui transporte elle-même la vitamine A dans le sang. Afin de réduire le risque de symptômes oculaires dus à une carence, une supplémentation en vitamine A à la dose d’environ 2 500 UI à 3 000 UI par jour au maximum est associée au traitement.

Contre-indications

Hypersensibilité grave à l’un des composants.

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Grossesse et allaitement

Des taux de vitamine A trop élevés ou trop faibles augmentent le risque de malformation fœtale. Amvuttra ne doit donc pas être utilisé pendant la grossesse. Les femmes en âge de procréer doivent utiliser une méthode de contraception efficace.

En cas de désir d’enfant, Amvuttra et la supplémentation en vitamine A doivent être interrompus. Les taux sériques de vitamine A doivent être contrôlés et revenus à la normale avant la tentative de conception. Les taux de vitamine A peuvent rester faibles pendant plus de 12 mois après la dernière dose d’Amvuttra.

Le traitement sera interrompu en cas de grossesse non planifiée, et le fœtus sera étroitement surveillé, en particulier durant le premier trimestre.

On ne sait pas si le vutrisiran est excrété dans le lait maternel. La décision d’interrompre l’allaitement ou le traitement devra tenir compte des bénéfices pour l’enfant et pour la femme.

Effets indésirables

Les effets indésirables le plus souvent observés sont des douleurs aux extrémités et des arthralgies.

Des réactions au site d’injection, une dyspnée et une augmentation de la phosphatase alcaline sanguine sont fréquentes.

Interactions médicamenteuses

Aucune étude clinique d’interaction n’a été réalisée, mais le vutrisiran ne devrait pas causer d’interactions ou être influencé par des inhibiteurs ou des inducteurs des enzymes du cytochrome P450, ni moduler l’activité des transporteurs.

Surveillance particulière

Evaluation de tout symptôme ou signe oculaire dû à une carence en vitamine A avant l’instauration du traitement.

Exclure toute grossesse avant de le commencer.

Conservation 

A conserver à une température ne dépassant pas + 30 °C.

Fiche technique

Vutrisiran 25 mg en solution injectable incolore, boîte de 1 seringue préremplie de 0,5 ml avec aiguille, 66 596,25 €, remb. SS à 65 %, AMM : 34009 302 604 9 4. Commande directe à : serviceclients@alnylam.com.

Alnylam : 01 87 65 09 21

Les prix sont mentionnés hors honoraires de dispensation.

Dites-le au patient

– Une dose oubliée doit être administrée dès que possible. L’injection sera ensuite reprise tous les 3 mois à compter de la dernière dose. – Si Amvuttra a été placé au réfrigérateur, laisser la boîte se réchauffer à température ambiante pendant environ 30 minutes avant l’administration. – Une consultation ophtalmologique est recommandée en cas de vision nocturne réduite ou de cécité nocturne, de sécheresse oculaire persistante, d’inflammation oculaire, d’inflammation ou d’ulcération de la cornée.

L’avis de la HAS

– Service médical rendu important

– Pas d’amélioration du service médical rendu (ASMR V)

– Population cible estimée à 500 patients Délivrance

– Liste I

– Médicament soumis à prescription hospitalière

– Prescription réservée aux spécialistes en neurologie 

Amylose héréditaire à transthyrétine

Avec plus de 700 patients diagnostiqués en France en 2014, dont 500 symptomatiques, l’amylose héréditaire à transthyrétine (TTR) est une polyneuropathie rare. L’anomalie génétique se transmet selon le mode autosomique dominant. Il existe une autre forme, plus fréquente, d’amylose à TTR, où celle-ci n’est pas mutée et qui touche principalement les hommes de plus de 50 ans : il s’agit de l’amylose sénile, peu symptomatique.

A quoi est-elle due ? L’amylose héréditaire à TTR est due à une mutation au niveau du gène codant pour la synthèse de la TTR. Cette dernière, auparavant appelée préalbumine, est une protéine de transport dont le gène se trouve sur le chromosome 18 et dont la synthèse a lieu principalement au niveau du foie. La TTR permet le transport de la thyroxine, hormone thyroïdienne circulante, et du rétinol. Une mutation du gène codant pour la synthèse de la TTR entraîne la formation de dépôts amyloïdes qui s’accumulent au niveau des nerfs, du cœur, des reins…  Parmi la trentaine de mutations recensées, la V30M est la plus fréquente ; elle est associée à un début précoce de la maladie, c’est-à-dire avant l’âge de 50 ans, mais également à un meilleur pronostic.

Comment se manifeste-t-elle ? Ce sont les dépôts amyloïdes qui sont responsables des symptômes de la maladie : douleurs intenses et paresthésies des pieds, hypotension orthostatique, troubles digestifs, dysurie, amaigrissement… L’atteinte cardiaque, fréquente, se manifeste par un ralentissement cardiaque et un essoufflement à l’effort (insuffisance cardiaque). D’autres troubles, rénaux (protéinurie, insuffisance rénale) et/ou oculaires (gêne visuelle) peuvent également survenir. Si l’âge de début de la maladie est très variable, les sujets d’origine française ont déclaré en moyenne la maladie vers 50 ans. Sans traitement, les symptômes augmentent jusqu’à entraîner des handicaps et la mort après une dizaine d’années d’évolution.

Par Delphine Guilloux