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Votre nouvelle mission, si vous l’acceptez, s’appelle ETP
Chargé en janvier d’une mission sur la mise en œuvre opérationnelle de l’éducation thérapeutique du patient, le député UMP Denis Jacquat a rendu ses conclusions au ministère de la Santé le 7 juillet. Rémunération au forfait, formation initiale, financement par l’Assurance maladie… Ses 19 propositions esquissent le visage de l’une des nouvelles missions du pharmacien.
On vous en parle depuis bientôt trois ans, époque à laquelle la Haute Autorité de santé publiait un guide méthodologique, et Le Moniteur vous enjoignait à ne pas louper le coche (voir Le Moniteur n° 2702). L’éducation thérapeutique du patient (ETP) n’est toujours pas devenue réalité mais, entre-temps, la loi Hôpital, patients, santé et territoires l’a tout de même définie, inscrite au rang de vos nouvelles missions et gravée dans le marbre législatif. En attendant les textes d’application réglementaire de la loi, dont la publication est prévue cet été, le député UMP Denis Jacquat (Moselle) a nourri leur rédaction en remettant à la ministre de la Santé, le 7 juillet dernier, 19 « propositions pour une mise en œuvre rapide et pérenne » de ladite ETP.
Deux options de montée en charge
Denis Jacquat estime que les cibles prioritaires du dispositif sont les 15 millions de patients souffrant d’une maladie chronique. Il recommande soit de proposer l’ETP à l’ensemble des « patients dont la maladie a été dépistée récemment », soit de privilégier les pathologies les plus fréquentes (diabète, maladies respiratoires, maladies cardiovasculaires, obésité, sida et maladies neurologiques ou mentales) « tout en maintenant l’offre existante pour les pathologies moins fréquentes, voire pour les maladies rares ». Le député chiffre le coût de la montée en charge des programmes d’ETP entre 50 et 375 M€ par an (voir encadré) et préconise d’assurer l’essentiel du financement sur le risque maladie, tout en encourageant les organismes complémentaires d’assurance maladie à participer au financement.
Denis Jacquat suggère par ailleurs de mettre en place une rémunération au forfait des professionnels concernés, dont les pharmaciens, « par leur participation à la conception et à l’animation d’ateliers relatifs aux traitements pouvant se dérouler à l’officine lors de la dispensation des médicaments ». Ce forfait reste encore à calculer mais il avoisine, dans le cadre d’expérimentations, 250 à 300e par programme d’ETP et par patient.
La L1 Santé, une « opportunité » de formation
Enfin, Denis Jacquat rappelle que la formation initiale des pharmaciens notamment « n’intègre pas la thématique alors que ceux-ci ont toute leur place dans le développement et la mise en œuvre de ces programmes ». Il juge donc indispensable d’introduire l’enseignement de l’ETP en formation initiale pour l’ensemble des professionnels de santé, idéalement via la mise en place de la nouvelle première année santé, commune aux chirurgiens-dentistes, médecins, pharmaciens et sages-femmes. La L1 santé « représente une réelle opportunité. En effet, […] il est particulièrement important que l’enseignement soit réalisé lors de sessions conjointes aux futurs professionnels de santé pour développer une culture commune. En outre, la maquette de l’enseignement en L1 santé n’étant pas encore totalement figée, il est encore possible de prévoir un enseignement de sensibilisation. »
Denis Jacquat souligne enfin que « l’ETP s’est développée en France depuis une vingtaine d’années de façon non structurée et non coordonnée, par l’initiative de professionnels convaincus de l’intérêt de tels programmes pour améliorer la qualité de vie des patients chroniques ». Espérons qu’ils seront encore plus nombreux une fois le dispositif mis en place.
Entre 50 et 375 millions d’euros
Sur la base d’un coût de 250 euros par patient, calculé à partir des dispositifs similaires existant à l’hôpital, le déploiement de l’ETP pourrait se chiffrer à :
• 50 millions d’euros dans l’hypothèse où 100 % des nouveaux patients souffrant de maladies chroniques seraient pris en charge (200 000 patients par an, dont 75 % de diabétiques),
• 75 millions d’euros pour le cas où, sur une durée de cinq ans, 10 % des malades chroniques suivraient un programme d’ETP,
• et jusqu’à 375 millions d’euros si, pour une durée de cinq ans, la moitié des 15 millions de malades chroniques étaient inclus dans le dispositif.
Les 19 propositions de Denis Jacquat
1. Définir une politique nationale, adaptée régionalement, de montée en charge de l’ETP : former en premier lieu les professionnels, capitaliser sur l’existant, proposer à tous les nouveaux patients souffrant de maladies chroniques de suivre un programme d’ETP, définir des pathologies chroniques prioritaires pour toucher le plus grand nombre de patients sans disperser les ressources disponibles et étendre progressivement le dispositif à tous les patients, quelle que soit leur pathologie chronique.
2. Introduire, dans la formation initiale de tous les professionnels de santé concernés, un enseignement à l’ETP en privilégiant l’interdisciplinarité.
3. Développer la formation continue : sensibiliser à l’ETP tous les professionnels concernés, rendre obligatoire la formation à l’ETP pour les professionnels concevant, animant ou coordonnant des programmes d’ETP, tout en mettant en place un système de validation des acquis et de l’expérience, et prévoir une formation spécialisée pour les professionnels assurant la formation d’autres professionnels.
Publicité4. Accroître les programmes de recherche, notamment pour étudier les conditions de réussite de l’ETP chez les patients présentant des difficultés sociales d’accès aux soins et évaluer l’intérêt médico-économique de l’ETP à long terme.
5. Renforcer le recrutement des patients les plus à risque, notamment ceux issus des populations socialement défavorisées.
6. Développer l’ETP en ambulatoire afin d’offrir aux patients des programmes dans leur bassin de vie.
7. Donner au médecin traitant un rôle central dans l’orientation des patients souffrant de maladies chroniques vers un programme d’ETP adapté de proximité, ainsi que dans leur suivi au long cours.
8. Positionner les maisons et pôles pluridisciplinaires de santé comme des structures et lieux de référence de l’ETP.
9. Structurer l’offre hospitalière en ETP.
10. Améliorer la coordination ville hôpital : mentionner la participation aux programmes d’ETP dans le dossier du patient, notamment dans le futur dossier médical personnel, fournir au patient, à l’issue d’un programme d’ETP, un dossier complet comportant le diagnostic éducatif, le contenu du programme et l’évaluation finale, et mettre en place une coordination régionale de l’ETP.
11. Favoriser, lors de la création et/ou de l’animation des programmes d’ETP, une approche pluridisciplinaire large en associant les représentants des patients.
12. Préciser par voie réglementaire la notion d’entreprises proposant des prestations en lien avec la santé.
13. Positionner l’agence régionale de santé (ARS) au cœur du dispositif de l’ETP : donner à l’ARS l’entière maîtrise des financements publics de l’ETP (Etat et Assurance maladie)…
14. Coordonner et évaluer l’action des ARS dans la mise en œuvre de l’ETP.
15. Sanctuariser les crédits de prévention en finançant l’ETP par le risque maladie.
16. Inciter les assureurs complémentaires à participer au développement de l’ETP.
17. Conserver un partenariat actif avec l’industrie pharmaceutique et biomédicale, dans le strict respect des obligations prévues par la législation.
18. Prévoir une augmentation des crédits de l’Assurance maladie dédiés à l’ETP, pris sur le risque.
19. Mettre en place, en ambulatoire et en établissement de santé, après une évaluation à mi-parcours des expérimentations conduites actuellement, la rémunération au forfait des professionnels et structures concernés mettant en œuvre les programmes d’ETP.
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