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Vont-ils plomber les prochaines négociations ?

Publié le 3 décembre 2022
Par Francois Pouzaud
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Avec un trou de 26 milliards d’euros en 2021, l’Assurance maladie enregistre le deuxième déficit le plus élevé de son histoire. Les syndicats pharmaceutiques sont prévenus. La revalorisation des honoraires de dispensation, seul levier pour assurer la pérennité et l’intégrité du réseau officinal, est loin d’être acquise en 2023.

Le marché des médicaments remboursables délivrés en officine a crû, pour la quatrième année consécutive, de 8,4 % en 2021 à 21,1 Md€, soit un taux de croissance bien supérieur à celui des années précédentes, y compris en neutralisant l’effet de la crise sanitaire liée au Covid-19, dixit la commission des comptes de la Sécurité sociale dans son dernier rapport. Une hausse qui risque d’être du même acabit en 2022.

Déficit et revalorisation ne font pas bon ménage

« Il ne faut pas que la pharmacie se retrouve dans une seringue qui comprime marge et rentabilité », déclare Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), car l’Assurance maladie pourrait prétexter un déficit record de ses comptes pour renâcler dans les négociations à revaloriser marge et honoraires sur le médicament. Au motif aussi que la crise sanitaire – donc l’implication des officines dans la lutte contre la pandémie – a été un effet d’aubaine qui leur a rapporté 1,445 Md€ sur les 8,180 Md€ recoltés par le réseau en 2021 (+ 19,2 % par rapport à 2020).

Dans son programme aux élections aux unions régionales des professionnels de santé (URPS), la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) avait tablé sur 800 M€ de revalorisation sur cinq ans. Son président, Philippe Besset, estime que la difficulté à recruter n’est pas un facteur suffisamment pris en compte par les pouvoirs publics : « Notre branche professionnelle est en concurrence avec d’autres. Aussi, pour pouvoir recruter, il est indispensable de renouveler et de pérenniser les budgets pharmacie 2021 et 2022 de l’Assurance maladie ». Ces nouveaux moyens permettraient, selon lui, à toutes les officines de s’engager dans les nouvelles missions.

« L’Assurance maladie confond ce qu’elle a payé pendant la crise sanitaire et ce qu’il reste comme bénéfice dans l’officine après avoir acheté les tests antigéniques, les équipements de protection individuelle, réglé ses charges et frais de personnel en forte croissance car il a fallu embaucher des personnes supplémentaires pour la réalisation des tests antigéniques et de la vaccination », rétorque le président de l’USPO.

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CONTRIBUTEURS

PHILIPPE BESSET

(FSPF)

PIERRE-OLIVIER VARIOT

(USPO)

L’analyse

Alors que l’heure des comptes de la crise sanitaire a sonné et que la fin de la partie du « quoi qu’il en coûte » a été sifflée, la dynamique du marché du médicament remboursable reste forte (+ 12,96 % en 2021 contre + 9,61 % en 2020). La part des médicaments pris en charge à 100 % au titre d’une affection longue durée (ALD) s’envole avec une croissance de près de 20 %. La chute de 30,43 % des médicaments remboursés à 15 % soulage peu les comptes de l’Assurance maladie, en raison de sa très faible part dans les remboursements. Le poids des remboursements de l’Assurance maladie est augmenté également par l’ampleur croissante des dépenses de médicaments de la rétrocession hospitalière : le montant des rétrocessions s’élève à 2 318 M€ (+ 6,43 % par rapport à 2020) ; sa part dans la dépense totale de médicaments est de 9,2 % en 2021 contre 9,8 % en 2020.