Viol d’une infirmière, braquage d’une autre, toutes les pharmacies baissent le rideau en Guyane

© JODY AMIETAFP

Viol d’une infirmière, braquage d’une autre, toutes les pharmacies baissent le rideau en Guyane

Publié le 24 mars 2025 | modifié le 25 mars 2025
Par Christelle Pangrazzi
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Deux agressions violentes sont survenues en moins de 48 heures contre des infirmières libérales en Guyane. En signe de soutien, les pharmaciens ont décidé de fermer massivement leurs officines samedi 22 mars.

Le choc est immense dans la communauté soignante de Guyane. En moins de deux jours, deux infirmières libérales ont été violemment agressées dans le cadre de leur exercice professionnel. La première a été violée lors d’un déplacement pour un soin. La seconde, braquée à l’arme à feu à 5 h 30 du matin, alors qu’elle descendait de son véhicule après une collision délibérée.

« On va travailler la boule au ventre. Cela réveille des peurs, des angoisses. Certaines collègues envisagent d’arrêter le libéral », alerte Awatef Argoubi, présidente de la Fédération nationale des infirmiers (FNI) Guyane et référente sécurité auprès de l’URPS Infirmiers au micro de France Info première.

L’acte fait également écho au décès de Hélène Tarcy-Cetout, 34 ans, pharmacienne suite à une agression à l’arme blanche le 9 avril 2024 à Saint-Laurent-du-Maroni, une ville frontalière du Suriname.

Une mobilisation inédite des pharmaciens

En réaction, toutes les pharmacies de Guyane ont baissé le rideau samedi 22 mars, pour exprimer leur solidarité avec les victimes et dénoncer l’insécurité croissante à laquelle sont confrontés les professionnels de santé libéraux.

« On ne peut pas continuer à exercer dans ces conditions. Nous avons fermé la pharmacie jusqu’à ce que les auteurs soient interpellés », a déclaré Christian Martinez, pharmacien à Maripasoula, où une affichette placardée sur la porte indique : « Fermé jusqu’à ce qu’on retrouve les violeurs. »

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Cette mobilisation exceptionnelle a été saluée par les syndicats et associations professionnelles, qui dénoncent depuis plusieurs mois l’absence de réponse suffisante des pouvoirs publics face à la montée des violences.

Une profession féminisée, des cibles vulnérables

La présidente de la FNI Guyane rappelle que 320 infirmières libérales exercent actuellement sur le territoire. Majoritairement des femmes, souvent isolées dans leurs tournées, elles sont particulièrement exposées.

« Encore une fois, ce sont des femmes qui sont agressées. Nous sommes plus nombreuses dans la profession, et les agresseurs le savent. »

Boutons anti-agression : un déploiement encore limité

Récemment, 25 boutons anti-panique connectés ont été distribués à titre expérimental à Cayenne. Le test est concluant, mais le dispositif n’est pas encore généralisé à toute la Guyane, et reste inaccessible aux sages-femmes et autres professions libérales isolées.

« Il faut que ce dispositif soit étendu à tout le territoire, et pas uniquement pour les infirmières. Les sages-femmes sont elles aussi en première ligne », souligne Awatef Argoubi.

Une réunion d’urgence demandée à la préfecture

Dans un communiqué commun, le collectif des référents sécurité des professionnels de santé en Guyane appelle à la tenue urgente d’un comité de suivi à la préfecture. Objectif : renforcer les mesures de protection, notamment par la généralisation des boutons anti-panique dans les zones de gendarmerie.

La FNI Guyane a placé la sécurité en tête de son ordre du jour lors de son assemblée générale, qui s’est tenue vendredi soir, quelques heures seulement après l’annonce du deuxième acte de violence.

Une alerte sur l’attractivité du territoire

Ces violences risquent d’aggraver la crise d’attractivité déjà profonde que connaît la Guyane pour les professions de santé. « Comment attirer de nouveaux professionnels dans ces conditions ? » s’interroge un pharmacien de l’ouest guyanais.

Avec France Info Première