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« Trop de pharmaciens frileux ! »
Kamal Midha, pharmacien d’origine indo-canadienne exerçant en Angleterre, a pris la succession de Jean Parrot à la tête de la Fédération internationale de la pharmacie. Nouveaux services, marge, dérégulation… Il répond à nos questions.
« Le Moniteur » : Que doivent faire les pharmaciens des pays développés pour montrer que le système de santé a besoin d’eux ?
Kamal Midha : Je suis persuadé qu’en France le patient est remarquablement pris en charge par les pharmaciens. Ils doivent bien évidemment continuer à délivrer les médicaments et à en être les experts quant à leur utilisation, mais ils doivent améliorer leurs services pour renforcer leur raison d’être. Notre formation de pharmacien et les compétences acquises doivent permettre de proposer des medication reviews [NdlR : analyse très complète du ou des traitements pour valider le bien-fondé de chaque médicament] et des drug consultations, tant sur les traitements alternatifs, holistiques que conventionnels, ainsi que des tests à l’officine, tels l’INR, la recherche de cholestérol ou de sucre dans le sang, la prise de tension… Ces orientations permettront d’éviter que notre profession perde de son influence. Malheureusement, trop de pharmaciens se montrent frileux dès qu’il s’agit de sortir de leur simple fonction de distributeur ! Pourtant, le développement du pharmaceutical-care dans de nombreux pays montre à quel point cela contribue à améliorer la santé publique et à mettre en lumière le rôle du pharmacien dans le système de santé.
Quels nouveaux services peuvent-ils proposer ?
Citons de nouveau les medication reviews, en associant médecins et pharmaciens afin de prendre en compte le profil médical du patient. Elles permettent de lutter plus efficacement contre la non-observance et une mauvaise utilisation des médicaments. Les medication reviews peuvent améliorer la qualité de vie des patients et réduire aussi bien les coûts hospitaliers que les coûts dus à l’absentéisme au travail. Proposer un tel service doit impérativement s’accompagner d’un programme de communication pour attirer l’attention sur cette contribution et sa valeur ajoutée pour les patients mais aussi pour les soignants, et en premier lieu les médecins. Les pharmaciens pourraient également s’investir dans le medicine profiling, plus particulièrement pour les médicaments prescrits pour la première fois afin de faire de l’éducation primaire du patient. Il s’agirait bien sûr d’une démarche de conseils beaucoup plus poussée que ce qui est fait couramment lors d’une délivrance. Mais il faudrait aussi leur donner la possibilité de prescription pour des maladies bénignes, en cas d’urgence ou encore dans le cadre du renouvellement de traitements chroniques, avec bien sûr la nécessité d’en informer le médecin. Ce droit à la prescription peut même être étendu, si c’est jugé nécessaire, dans les régions où il y a une pénurie de médecins. Même si j’ai bien conscience que cela peut générer des conflits avec la profession médicale qui risque de ne pas l’accepter facilement.
L’accessibilité des pharmacies d’officine en fait des centres idéaux pour diffuser des messages de santé publique et faire de l’éducation sanitaire. Mais à condition de prévoir une rémunération spécifique, payée par le gouvernement ou le public.
Enfin, la profession devra également être capable de conseiller les prescripteurs sur les doses appropriées de médicaments, basées sur le profil génotypique du malade. Actuellement, il en existe très peu mais dans le futur cela concernera beaucoup de médicaments.
Quel est le meilleur système pour rémunérer l’officinal ?
Continuer à rémunérer les pharmaciens uniquement avec une marge réduit leur fonction de délivrance à une simple transaction commerciale aux yeux du public. A une marge qui couvre le coût de stockage devraient être ajoutés, selon moi, des honoraires liés à l’analyse des prescriptions, l’écoute, le conseil…
Les pharmaciens français ont peur de la dérégulation. Pouvez-vous les rassurer ?
Même s’il serait préférable que les pharmaciens gardent le contrôle du capital, les futurs développements de la profession et l’escalade des coûts dans le futur pourraient rendre difficile cette éventualité. Les nouveaux services que devront proposer les pharmaciens nécessiteront en effet des investissements très importants en matière d’équipements notamment et un soutien financier pourra s’avérer nécessaire. En revanche, quelle que soit la structure du capital, il est hors de question que la régulation relative à l’attribution de licences et à l’enregistrement soit remise en question. Par ailleurs, l’ouverture du capital doit toujours être accompagnée de protections pour garantir l’intégrité et l’éthique des pharmaciens en matière de pratique professionnelle. C’est primordial. En aucun cas un propriétaire ou un de ses agents ne doit pouvoir imposer ses vues en la matière.
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