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Sept solutions pour freiner les dépenses de santé
Comment enrayer la hausse des frais de santé ? Comment s’adapter à la dérive des dépenses ? Pas besoin d’être extralucide pour déceler la préoccupation essentielle qui émanait des questions évoquées le 8 novembre lors des Rencontres de « L’Argus de l’assurance » consacrées à la santé. Car les assureurs privés, sans perdre de vue les réalités financières, se disent prêts à suppléer l’assurance maladie.
Notre système de santé offre des résultats positifs, mais il est aujourd’hui confronté à des difficultés de financement et à des problèmes de qualité. Il faut donc clarifier le rôle des différents acteurs et donner aux assureurs un rôle plus important en matière de politique de santé. » Le décor est planté avec, dans le rôle du narrateur, Jean Azéma, directeur général de Groupama.
Les assureurs privés sont déjà bien présents dans le domaine. Ils financent 3 % des dépenses de santé, soit la bagatelle de 5 milliards d’euros et 20,5 % des soins ambulatoires. L’Etat doit-il déléguer la gestion de l’offre de soins ? Doit-il définir une orientation puis en déléguer la gestion à des opérateurs qu’il contrôlera ? Tels sont les scenarii envisagés. Jean Azéma ajoute que « les assureurs sont prêts à faire davantage pour une santé de qualité, au meilleur coût ». Comment donc ? « En cogérant véritablement le système de santé, donc en associant dès le départ les assureurs privés à la réflexion, en leur donnant accès aux informations sur les traitements. »
Les assureurs veulent un accès aux données de soins
Michel Charton, directeur technique santé individuelle chez Axa France, l’affirme : « Si l’on veut entrer dans une relation efficace avec nos clients, il nous faut cet accès aux données de soins. » Plus révolutionnaire encore, le directeur général de Groupama suggère même que « les assureurs puissent gérer la totalité de l’offre de soins. Il faudrait accepter des expérimentations ». Claude Le Pen, professeur d’économie à l’université Paris-Dauphine, rappelle cependant que si les complémentaires peuvent effectivement assumer les transferts de charge dès 2008, « qu’on ne s’y trompe pas, ces dépenses ne seront pas transférées au nom de la compétence, mais simplement au nom de l’allégement ». Enrayer la hausse des frais de santé ? L’expression fait bondir Claude Le Pen. « Aucun pays ne le fait. Au nom de quoi d’ailleurs ? Pourquoi empêcher les Français de se soigner ? De vieillir ? », s’insurge-t-il. En remettant les pendules à l’heure. « Les dépenses de santé ne croissent pas de manière incontrôlée. En 2006, pour la première fois depuis 25 ans, elles ont augmenté moins vite que le PIB. Il n’y a aucun pays riche où la santé croît moins vite que le PIB. Dire que les différentes politiques de santé ont été inefficaces, que le secteur est immobile et conservateur, c’est contraire aux faits. » D’autre part, le système de santé est aujourd’hui sous financé. « Il n’est pas en excédent de dépenses, mais en insuffisance de recettes et il n’y aucune raison que les dépenses s’effondrent de manière spectaculaire dans les 5 à 6 ans à venir. Et aucun boom économique n’est attendu », fait encore remarquer Claude Le Pen.
Christian Lajoux, président du Leem, renchérit : « Il n’y a pas de surconsommation de médicaments dans notre pays. C’est un faux débat. 45 millions de Français soignés aujourd’hui entraînent une croissance des dépenses de seulement 1 % ». Quant à l’ONDAM, selon Claude Le Pen, « il est devenu un instrument politique, volontairement irréaliste avec des objectifs inatteignables ».
Donc, d’un côté, il faut maîtriser les dépenses et, de l’autre, on les encourage (CMU, plans cancer, Alzheimer…). Sept solutions ont tout de même été évoquées.
Solution n° 1 : la participation des usagers
« Eh bien non, la santé n’est pas gratuite, fait remarquer Claude Le Pen. La participation des usagers au coût des soins n’est pas une aberration. Et que l’on arrête d’appeler franchises ces montants de 50 centimes. Ce ne sont que de petits tickets modérateurs forfaitaires. » Ses opinions sont tout sauf politiquement correctes. « Il faut introduire la notion de condition de ressources et ne pas rembourser à l’identique un patient riche et un patient pauvre. De toute façon, il y a aujourd’hui des situations très inégales devant la maladie lourde. Le financement obligatoire ne suffit pas à payer l’intégralité de la dépense. Alors, si les riches paient un peu plus en cotisation publique, pourquoi le reste à charge ne serait-il pas lui aussi plus important ? L’idée qu’une telle mesure va affaiblir la solidarité nationale n’est pas recevable. L’équité n’est pas l’égalité. La solidarité n’est pas l’exact reçu de ce que l’on donne. » Avec un petit bémol, comme le souligne Michel Charton : « Les ménages français ont aujourd’hui un réel problème de financement de leurs dépenses de santé et les complémentaires ne sont pas un régime obligatoire de substitution. »
Solution n° 2 : l’automédication
En se plaçant dans une approche de santé publique et non uniquement économique, un petit milliard d’économies est à la clé. Oui, mais comment procéder avec des milliers de spécialités déremboursées ? Tarifs de responsabilité, accords sur les prix entre laboratoires et assureurs ont été évoqués. Et même, d’une façon plus générale, la déréglementation du prix des médicaments. Selon Christian Lajoux, « le prix réglementé maintient artificiellement un tarif trop élevé des médicaments ».
Solution n° 3 : le créneau de la prévention
« Il faut répondre aux besoins des assurés qui demandent un remboursement de leurs dépenses et qu’on les aide à rester en bonne santé. La prévention est pour eux un service », constate Norbert Bontemps, directeur santé individuelle chez Groupama. « Depuis trois ans, on ne peut plus être sur le marché sans proposer une offre de prévention à nos clients, confirme Michel Charton, qui ajoute avec ironie que « la prévention, c’est le développement durable de notre métier ».
Solution n° 4 : l’ALD
« 8 millions de Français en ALD représentent près de 60 % des dépenses de l’assurance maladie et entraînent une croissance de 9 % en moyenne par an », s’enflamme Christian Lajoux. Les pouvoirs publics peuvent décider de modifier les taux de remboursement des ALD de 100 à 95 ou 90 % et, là, les complémentaires risquent de le payer très cher. « Il est clair qu’il faut revoir de fond en comble le système, confirme Claude Le Pen. C’est dans ce domaine qu’il y a une vraie gestion du risque à mener et les complémentaires ont un rôle à jouer. Elles pourraient même prendre en main le risque ALD. »
Solution n° 5 : une meilleure gestion de la prescription hospitalière
D’après Christian Lajoux, 20 % des prescriptions en officine émanent de l’hôpital. Or, elles ne sont pas forcément bien contrôlées à la source.
Solution n° 6 : aider les adhérents à choisir les meilleurs soins
En publiant des listes d’établissement. De quoi accélérer le mouvement pour ceux à fermer.
Solution n° 7 : les génériques ?
Eh bien non, justement, pour le président du Leem. Selon lui, les génériques « fragilisent gravement le secteur économique de la santé et la création de valeur ». Tiens, tiens.
Christian Lajoux défend la thèse que plus la consommation de médicaments sera développée, plus l’assurance maladie et les assureurs privés feront des économies. En évitant les arrêts de travail, les hospitalisations, les récidives, les actes chirurgicaux.
Finalement, avec une telle démonstration, le véritable épargneur de coût, c’est le médicament ! Mais, déjà, les assureurs privés considèrent que leur légitimité leur permet d’aller bien au-delà du simple remboursement.
Baisse des ventes de médicaments en 2008
IMS Health annonce une décélération de la croissance des ventes mondiales de médicaments en 2008, avec une progression de seulement 5 à 6 %. La faute à qui ? A la montée en puissance des génériques. Les laboratoires devraient aussi s’engager de plus en plus fréquemment à rembourser aux assurés des dépenses de soins si les traitements s’avéraient inefficaces.
Vers une Europe de la santé
Représentant permanent de la Mutualité française à Bruxelles, Romain Fanchon a annoncé que la fameuse directive santé devrait être approuvée le 20 novembre. L’Europe de la santé se construit petit à petit, même si les différents systèmes de santé ne sont pas exportables. Avec des patients jouant de plus en plus la carte de la mobilité, le marché est en train de s’ouvrir. Par force.
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