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Prix du Moniteur Les résultats 2007

Publié le 1 décembre 2007
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les résultats

Le Prix du Moniteur 2007

Bravo à tous les participants pour leur investissement en temps et en énergie. Car, tous les membres du jury le soulignent, trouver le temps de rédiger un dossier, lorsqu’on est dans le rythme quotidien soutenu de l’officine, cela mérite d’être salué !

Les patients pensent parfois que le pharmacien est là simplement pour délivrer des boîtes de médicaments prescrites par le médecin. Vos 37 dossiers démontrent qu’il n’en est rien : vous êtes le spécialiste du médicament par excellence, vous intervenez à bon escient pour relever une interaction, mais, surtout, pour étudier et réfléchir à la meilleure solution de remplacement… Vous allez même plus loin en vous investissant dans l’accompagnement et l’éducation thérapeutique du patient de façon à ce que chacun bénéficie du traitement le mieux adapté à son cas. Bravo !

Le dossier gagnant

Cette année, le jury, de façon unanime, a choisi de récompenser un dossier remarquable consacré à l’éducation thérapeutique d’une patiente sous insuline. La Pharmacie Le Secq-Duval, à Saint-Georges-des-Groseillers (Orne), recevra un prix d’un montant de 2 000 euros. « Nous sommes pharmaciens non seulement pour analyser, dispenser ou valider une ordonnance, mais, quotidiennement et discrètement, nous oeuvrons aussi pour éduquer nos patients… » explique Marlène Petit, l’adjointe ayant rédigé le dossier.

Les 10 meilleurs dossiers

Parmi tous les dossiers reçus, les dix meilleurs ont été soumis à la délibération du jury. Tous démontrent la diversité et l’intérêt de vos interventions officinales.

Quatre dossiers finalistes ont particulièrement retenu l’attention du jury. Ils sont présentés en détail page 8 et suivantes. Voici un bref résumé des cinq autres.

Pharmacie du Néron Saint-Martin-le-Vinoux (Isère)

Une élévation subite de pression artérielle chez un patient de 79 ans est a priori du seul ressort du cardiologue. Ce dossier nous démontre le contraire : ce patient est depuis peu sous traitement antituberculeux comportant de la rifampicine, inducteur enzymatique qui accélère la dégradation de l’Amlor, d’où l’élévation de la pression artérielle… Le mécanisme de l’interaction est expliqué au médecin, ravi de la collaboration avec le pharmacien et de la proposition que lui fait ce dernier d’un antihypertenseur non métabolisé par le cytochrome P450 3A4.

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Pharmacie de l’Iris

Villeurbanne (Rhône)

Pour faire suite à la détection d’une contre-indication entre la fluoxétine et la sélégiline, IMAO-B prescrit chez un patient parkinsonien, l’équipe officinale a envisagé de façon rationnelle cinq solutions possibles avant d’appeler le médecin. Un très bon exemple de travail pharmacologique destiné à aider le médecin dans le choix de sa stratégie thérapeutique.

Pharmacie de l’Eglise

Wavrin (Nord)

Nul n’est à l’abri d’une erreur, et la prescription d’un TP-INR pour surveiller une héparinothérapie relève du lapsus d’un médecin probablement débordé. Lapsus qui aurait quand même pu coûter cher au patient. Ce dossier démontre l’intérêt à l’officine d’utiliser de façon systématique une grille de délivrance pour les médicaments à risque, ici celle proposée par Le Moniteur dans le « Cahier Iatrogénie » qu’il a consacré aux héparines de bas poids moléculaire.

Pharmacie mutualiste

Tours (Indre-et-Loire)

Un dossier sur la gestion d’une interaction Lipur-Novonorm qui met en avant une démarche qualité intéressante : à chaque intervention de l’officine sur une ordonnance, un avis pharmaceutique est archivé dans un classeur avec une photocopie de l’ordonnance, la démarche d’appel du médecin est notée dans un cahier de liaison et un commentaire est ajouté dans le dossier du patient.

Pharmacie Sevin

Clamart (Hauts-de-Seine)

Apparemment banale, une ordonnance de sortie d’hôpital dans laquelle « Isoptine 40, 1 cp trois fois par jour » a été modifié pour « 1 cp d’Isoptine 120/jour ». Mais toute modification de traitement doit pousser le pharmacien à s’interroger sur les motivations de ce changement : erreur de prescription ? modification volontaire ? dans quel intérêt ? Le contact avec un centre de pharmacovigilance et avec tous les laboratoires de génériques pour comparer la pharmacocinétique des diverses spécialités de vérapamil permet de dialoguer au mieux avec le médecin.

Les dix pharmacies dont le dossier a été sélectionné pour le jury final ont reçu l’ouvrage Le Conseil associé à une ordonnance de Fabiole Moreddu, paru aux Editions Pro-Officina.

le dossier gagnant

Education thérapeutique d’un diabétique de type 2

Une patiente de 61 ans, diabétique de type 2, sort de l’hôpital complètement perdue dans l’adaptation quotidienne de ses doses d’insuline. Marlène Petit, adjointe, et Maryline Le Secq, titulaire de la Pharmacie Le Secq-Duval à Saint-Georges-des-Groseillers (Orne), ont mis en oeuvre une véritable éducation thérapeutique au terme de laquelle la patiente a appris à gérer ses posologies d’insuline en fonction de ses résultats de glycémie. Bravo à ces deux pharmaciennes pour leur implication au service du patient, et pour leur investissement dans une formation continue permanente qui leur permet de réellement maîtriser le sujet !

LA « PROFESSION DE FOI » DES GAGNANTES

« A travers ce dossier, nous avons eu à coeur de montrer que l’intervention officinale autour d’une ordonnance ne se résume pas qu’à l’analyse d’une prescription pour en détecter les interactions, les incohérences ou les négligences. Il s’agit d’une étape primordiale et vitale pour les patients, mais une autre étape, qui n’en n’est pas moins importante, est leur éducation. En effet, le pharmacien a pour mission de leur expliquer leur traitement, de s’assurer qu’ils l’ont bien compris, pour qu’ils le suivent sans aucune hésitation et sans mettre leur santé en danger.

A l’heure actuelle, où l’on reconnaît la mauvaise éducation des diabétiques de type 2 et où l’implication du pharmacien d’officine dans l’éducation des patients souffrant de maladies chroniques est sur la sellette, voici un exemple concret du temps et des moyens mis en oeuvre par notre profession pour s’impliquer dans ces problèmes de santé publique, implication bien plus importante somme toute que la distribution de brochures informatives, rôle réducteur suggéré par l’ancien ministre de la Santé Philippe Bas… »

Maryline Le Secq et Marlène Petit

Le cas

Détection du problème

En décembre 2006, accompagnée de son mari, Mme D., que nous suivons depuis des années pour son diabète de type 2 insulinorequérant, sort d’une hospitalisation de trois semaines en service de diabétologie.

Son diabétologue souhaitant vivement stabiliser son diabète (échec de nombreux schémas thérapeutiques), Mme D. s’était résignée à l’hospitalisation, après un vif encouragement de la part de notre équipe officinale.

Sortie de l’hôpital, elle nous présente son ordonnance. Elle nous avoue qu’elle est perdue avec ses deux insulines. Malgré les exercices d’éducation réalisés à l’hôpital (pendant lesquels elle se sentait stressée), elle n’a pas bien compris comment ajuster ses doses d’insulines lente et rapide en fonction de l’heure de ses glycémies. « J’ai appris par coeur la phrase : « Si ma glycémie est trop haute (#gt; 1,50 g/l) à 11 h deux matins consécutifs, le troisième matin j’augmente ma rapide de 2 unités. » Mais quand le docteur m’a demandé ce que je ferais si ma glycémie était haute à 10 h et à 8 h, je n’ai pas su quoi répondre… Pouvez-vous me réexpliquer tranquillement tout ça ? »

Une telle question ne peut que nous interpeller. Par manque de compréhension de son schéma d’insulinothérapie intensifiée, Mme D. peut se retrouver en hyper- ou en hypoglycémie à n’importe quel moment (celles-ci pouvant arriver très rapidement avec l’insuline). Cela peut avoir des conséquences graves (acidocétose, comas) pouvant mettre en jeu son pronostic vital. L’éducation de cette patiente s’avère d’une nécessité absolue : elle doit sortir de notre pharmacie avec son traitement et tous les moyens pour lui permettre de le suivre correctement.

La patiente

Son profil

Mme D., retraitée, âgée de 61 ans, est diabétique de type 2 depuis 15 ans. Lors de la découverte de cette maladie, ses glycémies étaient supérieures à 3 g/l (elle note un maximum à 4,30 g/l). Mme D. présente également de nombreux autres facteurs de risque (obésité, hypercholestérolémie, hypertension artérielle).

Son historique thérapeutique antidiabétique

Nous avons retracé succinctement les différentes thérapeutiques suivies par Mme D. : association de trois antidiabétiques oraux : Stagid 700 mg, Glucor 100 mg et Diamicron LP 30 mg depuis 1992. En 1997, passage à l’insulinothérapie en complément du traitement oral, devant les mauvais résultats glycémiques. Essais successifs de l’insuline Mixtard 10 Novolet Semilente (de durée d’action intermédiaire), insuline Lantus Optiset (insuline lente de durée d’action prolongée) puis Levemir, autre insuline lente de durée d’action prolongée. [NdlR : l’historique complet des traitements antidiabétiques est détaillé.] Malgré les essais de ces différentes insulines associées à trois antidiabétiques oraux, Mme D. ne réussit pas à améliorer son équilibre glycémique (Hb1Ac #gt; 7 %, glycémies variant de 1,5 à 3 g/l). Après de fortes hésitations, elle accepte l’hospitalisation.

Son objectif glycémique

Chez un adulte jeune, la normoglycémie est :

– à jeun : inférieure à 1,20 g/l, soit 6,6 mmol/l ;

– en postprandial (2 h après le repas) : inférieure à 1,40 g/l, soit 7,8 mmol/l.

Concernant Mme D., en raison de son âge, de ses facteurs de risque associés et de l’état initial d’instauration de l’insulinothérapie intensifiée, ses objectifs glycémiques sont les suivants :

– à jeun, la glycémie doit être située entre 0,8 et 1,2 g/l ;

– en postprandial, sa valeur doit être comprise entre 1,4 et 1, 8 g/l.

L’ordonnance

L’ordonnance de posthospitalisation en diabétologie date de décembre 2006.

Médicaments liés au diabète

– Insuline Lantus en cartouche pour Opticlik : cette présentation favorise l’injection de la dose du matin en une seule injection : 50 UI le matin (alors que la Lantus Optiset ne permet qu’une injection maximale de 40 UI).

– Insuline Apidra en stylo prérempli (insuline ultrarapide) 10 UI le matin, 6 UI le midi, 16 UI le soir.

– Stagid 700 mg : 3 cp/j.

Cette nouvelle ordonnance marque le passage à une insulinothérapie fonctionnelle ou intensifiée : une injection d’insuline d’action prolongée le matin associée à 3 injections d’insuline ultrarapide juste avant chaque repas.

Le diabétologue a supprimé deux antidiabétiques oraux (Diamicron et Glucor), ce qui permet de diminuer le risque d’effets secondaires et d’interactions médicamenteuses chez une patiente déjà polymédiquée.

Médicaments traitant les facteurs de risque ou les complications du diabète

– Triatec (ramipril) est un inhibiteur de l’enzyme de conversion à propriété antihypertensive et il est intéressant pour protéger le rein de la néphropathie diabétique.

– Tahor (atorvastatine) est un hypocholestérolémiant et hypotriglycéridémiant par inhibition de l’HMG-CoA-réductase.

– Vérapamil (générique de l’Isoptine) est un inhibiteur calcique sélectif à effets cardiaques directs. Il traite l’angor et les tachycardies paroxystiques supraventriculaires.

Autres médicaments

– Laroxyl (amitriptyline) constitue son traitement antidépresseur (IMAO non sélectif).

– Imovane (zopiclone), par son action hypnotique et sédative (apparenté aux benzodiazépines), lutte contre l’insomnie de madame D.

Nos moyens d’intervention

Grâce à nos connaissances dans ce domaine, que nous nous efforçons de mettre à jour régulièrement via notre participation aux réunions des réseaux Diabète, nous avons pu réagir vite aux questions posées par Mme D. Nous nous sommes installés avec son mari (qui doit aussi comprendre et s’impliquer dans la maladie de sa femme) dans notre bureau d’accueil confidentiel et nous avons passé plus d’une heure à lui expliquer son traitement. Nous avons utilisé des schémas et des fiches récapitulatifs.

Expliquer comment utiliser ses insulines

La Lantus (insuline glargine) : 50 UI le matin

Après injection, Lantus met 1 h 30 avant d’agir et agit ensuite pendant 20 à 24 heures (légère perte d’efficacité à la fin de cette période). Nous expliquons à madame D. que cette insuline va diffuser de la même manière tout au long de la journée pendant presque 24 h heures. Elle lui apporte l’insuline « basale » (on pourrait la baptiser l’« insuline pour vivre ») nécessaire à l’organisme au cours d’une journée, car son pancréas n’en sécrète pas suffisamment. Lors d’une glycémie faite à jeun, c’est la seule qui agira. La mesure de la glycémie à jeun pourra lui dire si cette insuline est bien dosée (voir le tableau ci-contre).

L’Apidra (insuline glulisine) : 10 UI le matin, 6 UI le midi, 16 UI le soir

Il s’agit de l’insuline ultrarapide « bolus » ou de « correction » (on pourrait la baptiser l’« insuline pour manger et pour soigner »). Elle agit en 15 minutes et son action ne dure que 3 à 4 heures. Elle a pour but de diminuer la quantité de sucre dans le sang au moment des repas (le repas apporte des glucides simples et complexes, augmentant la glycémie). Donc, nous précisons qu’injecter cette insuline juste avant les 3 repas permet d’éviter les hyperglycémies postprandiales.

Nous attirons l’attention de Mme D. sur le fait que les doses d’insuline injectées avant chaque repas sont proportionnelles à ce qu’elle va manger. Si son alimentation varie par rapport à celle lors de son hospitalisation, les doses prescrites devront être corrigées. Si elle mange plus sucré, elle devra augmenter ses doses d’insuline rapide avant les repas (voir le tableau). Si elle veut avoir une dose fixe d’insuline rapide le matin (par exemple 10 UI), ses petits déjeuners doivent être équivalents en glucides tous les matins (pareil pour les déjeuners et les dîners).

Lors d’une glycémie faite 1 à 2 h après le repas (en postprandial), c’est l’insuline ultrarapide Apidra qui influe le plus sur la glycémie (même si Lantus diffuse aussi). La mesure de la glycémie en postprandial avertira Mme D. si elle a bien dosé son insuline rapide en fonction de son repas.

Nous informerons plus tard Mme D. (quand elle aura déjà bien acquis les bases) que si une glycémie postprandiale (au moins 2 h après le repas) est haute (#gt; 2 g/l), elle peut, si elle le souhaite, s’injecter 2 à 4 UI d’Apidra pour faire descendre la glycémie : c’est ce qu’on appelle l’insuline de correction. Mais on évite de recourir à ce procédé, car il est préférable de calibrer ses glucides à chaque repas, ses doses d’insuline ultrarapide et lente. Le patient s’y retrouve mieux.

Expliquer comment adapter ses doses d’insuline

Nous schématisons pour Mme D. les cinétiques de ses différentes insulines au cours de la journée afin qu’elle visualise quand elles agissent (voir ci-dessus).

A partir de ce schéma, nous pouvons lui expliquer comment adapter ses doses d’insulines (et laquelle : l’insuline ultrarapide ou la lente ?) en fonction de la journée et de ses glycémies.

Mme D. pourra se référer au tableau en cas de doute sur l’adaptation posologique.

Si les fluctuations glycémiques sont ponctuelles et non reproduites le lendemain, Mme D. ne devra pas modifier ses doses. Celles-ci ne sont changées qu’après deux jours consécutifs avec la même anomalie glycémique. Nous lui précisons qu’il est plus facile de modifier les doses d’Apidra car elle a une courte durée d’action.

Après avoir observé ces graphiques, Mme D. nous demande : « J’ai un souci : moi, je me lève habituellement à 9 h, alors qu’à l’hôpital on nous lève à 8 h ; je faisais mon injection d’insuline ultrarapide puis je prenais mon petit déjeuner tout de suite après. Est-ce que je vais devoir garder les horaires de l’hôpital ? Et pour le midi, moi, je mange plutôt à 13 h qu’à 12 h… »

Nous rassurons Mme D. : l’heure des injections d’insuline ultrarapide est plus souple (délai de une heure le matin, 2 voire 3 heures le midi et le soir), ceci permet à Mme D. de se lever plus tard un matin ou de manger plus tard un midi ou un soir… Elle veillera cependant à ce que ses deux premiers repas de la journée ne soient pas trop rapprochés. Ce schéma apporte plus de flexibilité et se calque mieux à la vie des diabétiques, au lieu que ce soit le diabétique qui se calque sur les cinétiques de ses insulines ! […/…]

Répercussions sur notre pratique officinale

Sensibilisation sur les complications immédiates du diabète

Le cas de Mme D. a permis de sensibiliser l’équipe officinale à l’insulinothérapie fonctionnelle ou intensifiée. Elle en a remarqué la complexité et les conséquences graves qui peuvent découler d’une mauvaise maîtrise de cette thérapeutique.

Nous n’hésitons pas à poser des questions aux autres patients diabétiques sur la bonne compréhension d’un traitement comparable. Nous leur demandons si leurs glycémies à jeun et postprandiales sont bien équilibrées en règle générale. Si l’équilibre atteint n’est pas satisfaisant, nous abordons ensemble l’explication de l’adaptation des doses et la modification des doses d’insuline rapide ou lente.

Nous proposons à tous nos diabétiques d’avoir un carnet de suivi et d’y noter régulièrement leurs glycémies afin de les montrer à leur médecin traitant et/ou diabétologue. Ce dernier pourra ajuster au mieux le traitement pour qu’il soit le plus efficace possible.

Sur les complications tardives du diabète

Pour que chaque patient diabétique prenne conscience des complications tardives importantes engendrées par un mauvais équilibre glycémique, nous leur distribuons une fiche de suivi. Celle-ci leur permet de dater leurs consultations avec l’ophtalmologue, le podologue et leurs bilans rénaux, ainsi ils peuvent mieux suivre la fréquence de leurs examens médicaux.

Le but est de les responsabiliser à surveiller les organes les plus touchés par le diabète afin de limiter les états graves.

4 dossiers sélectionnés

Un surdosage d’Agréal

Avec le retrait d’Agréal au 30 septembre 2007, toutes les officines ont été sensibilisées au fait que le véralipride, utilisé en traitement symptomatique des bouffées de chaleur, était un neuroleptique. En resituant cette délivrance en début d’année, il faut saluer l’opiniâtreté de l’équipe à ne pas délivrer cette posologie trop élevée de neuroleptique.

Pharmacie Sauvage

9, place du Maréchal-Joffre

69230 Saint-Genis-Laval

u Participants :

Blandine Duvillard, étudiante en 6e année

Sabine Duvillard, pharmacienne adjointe

Catherine Da Pozzo, préparatrice

Emilie Truffy, apprentie BP

Patrick Sauvage, pharmacien titulaire

LE CAS

– La patiente

Une patiente de 45 ans est suivie pour une rechute de cancer du sein, diagnostiqué en septembre 2006. Son traitement comporte Aromasine 25 mg 1 cp/jour, Zoladex 10,8 mg, un implant tous les trois mois, et Herceptin 300 mg en IV toutes les 3 semaines.

– Le contexte de prescription

L’association de ces trois médicaments induit une ménopause artificielle et entraîne chez cette patiente de fortes crises de bouffées de chaleur liées à la carence en estrogènes. Elle demande à son médecin oncologue de lui prescrire quelque chose de « léger » pour atténuer ces symptômes.

– L’ordonnance

Elle comporte de l’Agréal 100 mg à la posologie de 3 gélules par jour pendant 3 mois.

Quel est le problème ?

Posologie erronée

L’Agréal est un neuroleptique présentant une activité antagoniste de la dopamine et une activité antigonadotrope. Jusqu’à son retrait le 30 septembre pour une balance bénéfices-risques non favorable, le véralipride était utilisé dans le traitement des bouffées vasomotrices invalidantes de la ménopause confirmée, à la posologie de une gélule (100 mg) par jour, par cures de 20 jours par mois, pendant trois mois au maximum. La posologie prescrite ici (3/j) est donc beaucoup trop importante.

Risques encourus

Un surdosage en neuroleptique peut entraîner un certain nombre d’effets secondaires : sédation, somnolence, dyskinésies tardives, syndrome extrapyramidal ou syndrome parkinsonien. A l’époque (le dossier date d’avril 2007), Agréal avait déjà été retiré du marché dans de nombreux pays dont l’Espagne. En février 2006, le RCP avait été modifié en France pour être plus informatif sur les effets neuropsychiques du véralipride.

La gestion du problème

Appel du prescripteur

L’équipe se demande si le prescripteur n’a pas voulu en réalité prescrire de l’Abufène (L-alanine), inhibiteur non hormonal des bouffées de chaleur. De façon fort étonnante, le médecin contacté par téléphone confirme la prescription d’Agréal à la posologie de 3 par jour et affirme que cette posologie est nécessaire pour un minimum d’efficacité ! Même après rappel des effets secondaires potentiels, il refuse de modifier son ordonnance.

Contact d’un centre de pharmacovigilance

L’officine décide alors de contacter le centre de pharmacovigilance de Lyon. Celui-ci faxe le bulletin d’information du département de pharmacologie du CHU de Bordeaux daté de mai 2006, rappelant les modalités de prescriptions de l’Agréal ainsi que les recommandations de l’Afssaps.

Elaboration d’une opinion pharmaceutique

L’opinion pharmaceutique officialise le refus de délivrance de l’Agréal à cette posologie. Elle est envoyée au médecin.

Conseils à la patiente

Agréal est délivré à la posologie de une gélule par jour par cure de 20 jours par mois. Il est conseillé à la patiente de ne pas le prendre les jours où elle prend du Primpéran car les deux molécules sont des neuroleptiques.

Répercussions sur la pratique officinale

La procédure, déjà en place, est confortée : lorsqu’un prescripteur refuse de modifier son ordonnance alors qu’elle expose le patient à un risque, la délivrance est refusée. Une opinion pharmaceutique est réalisée et adressée au prescripteur.

Effet secondaire du Gardénal

Le rôle du pharmacien n’est pas de porter un diagnostic. En revanche, attirer l’attention du médecin sur un effet vraisemblablement iatrogène l’est tout à fait. C’est ce que démontre ce dossier qui présente un patient épileptique traité depuis des années par phénobarbital et qui souffre d’une douleur atypique de l’épaule.

Pharmacie Hoareau

175, avenue Ile-de-France

97440 Saint-André

u Participants :

M. Bernard Hoareau, pharmacien titulaire

Mme Pascale Alastor, pharmacienne adjointe

Mlle Sabrina Alcmeon, préparatrice

Mme Daniela Hoarau, préparatrice

Mme Nadine Moreau, préparatrice

M. Paul Dumas, stagiaire en 6e année

Avec la participation de la Pharmacie de la Trinité (Claude Marodon) à Saint-Denis.

LE CAS

– Le patient

Monsieur A., 45 ans, souffre d’une épilepsie partielle complexe. Il est traité par phénobarbital depuis de nombreuses années et est suivi à la pharmacie depuis longtemps.

– Contexte clinique

Depuis 15 jours, monsieur A. se plaint d’une douleur permanente au niveau de l’épaule qui le réveille la nuit. La prescription de paracétamol, 1 g trois fois par jour, et d’une orthèse fonctionnelle de stabilisation de l’épaule n’a pas amélioré la douleur.

– L’ordonnance

Elle comporte Tégrétol LP 400, Alepsal 100, Urbanyl 10, en traitement de fond de l’épilepsie, et, à la place du paracétamol, Di-Antalvic, Spifen 400 et Flector gel pour la prise en charge de l’épaule douloureuse.Q

Quels sont les problèmes ?

L’association Tégrétol-Di-Antalvic est déconseillée. Elle entraîne une augmentation des concentrations plasmatiques de carbamazépine avec signes de surdosage, par effet inhibiteur enzymatique du dextropropoxyphène sur le métabolisme de la carbamazépine.

Effet iatrogène caché ?

La douleur à l’épaule est atypique par sa durée et son intensité. Elle peut évoquer un effet indésirable dû à la prise au long cours de phénobarbital, et qui se traduit par une « capsulite rétractile » ou épaule gelée. C’est une affection bénigne de l’épaule consistant en un enraidissement douloureux progressif de l’articulation et qui peut persister jusqu’à 18 mois.

La gestion des problèmes

Appel du prescripteur

Le médecin reconnaît ne pas avoir pensé à l’éventualité d’un effet secondaire du Gardénal et souhaite revoir le patient dès le lendemain. En ce qui concerne l’interaction Tégrétol-Di-Antalvic, il décide de remplacer le Di-Antalvic par de l’Efferalgan 1 g à la posologie de 4 comprimés par jour.

Elaboration d’une opinion pharmaceutique

L’opinion pharmaceutique formalise l’échange en ce qui concerne la gestion de l’interaction dextropropoxyphène-carbamazépine.

Répercussions sur la pratique officinale

Réflexion sur la pharmacocinétique du Di-Antalvic

La gestion de cette interaction est l’occasion de faire le point sur la balance bénéfices-risques du dextropropoxyphène-paracétamol. La demi-vie du dextropropoxyphène et de son métabolite actif est très longue : 15 à 34 heures. Comme les prises de Di-Antalvic sont généralement espacées de 6 à 8 heures, il en découle une accumulation de dextropropoxyphène, en particulier chez le sujet âgé.

Message dans le dossier patient

Un message est intégré dans l’ordinateur. Pour chaque patient sous carbamazépine est rajoutée l’alerte suivante : « Association déconseillée carbamazépine-dextropropoxyphène ».

Point sur les interactions

Pour améliorer la qualité de la délivrance, les interactions cliniquement significatives en rapport avec les analgésiques sont revues grâce à l’article de la revue Prescrire « Eviter les effets indésirables par interactions médicamenteuses, comprendre et décider » (mise à jour 2007).

Fiche patient

Une fiche sur les AINS à destination des patients est rédigée par la pharmacie. Elle attire l’attention sur ce que sont l’inflammation, les contre-indications des AINS et les règles essentielles de prise.

4 dossiers sélectionnés

Héparine et insuffisance rénale

La délivrance des héparines reste un sujet sensible en officine. Les ordonnances doivent être vérifiées avec un soin tout particulier car l’enjeu en termes d’effets iatrogènes est de taille. Simple mais efficace, la procédure qualité décrite dans ce dossier est ici mise en pratique pour un patient de 82 ans souffrant d’insuffisance rénale sévère.

Pharmacie Gabriel Péri

94-98, avenue Gabriel-Péri

38400 Saint-Martin-d’Hères

– Participante :

Emilie Bouchet-Marquis, pharmacienne adjointe

LE CAS

– Le patient

Monsieur G. a 82 ans. Lui et sa femme sortent de chez le médecin. Ils ne sont jamais venus à la pharmacie. Il n’y a pas d’historique médicamenteux.

– Contexte clinique

Monsieur G. souffre d’une phlébite compliquée d’une embolie pulmonaire. Son traitement nécessite la mise en place d’une héparinothérapie à doses curatives.

– L’ordonnance

Elle comporte de l’Innohep 10 000 UI anti-Xa/0,5 ml : 1 boîte de 10 seringues/0,5 ml, sans précision de posologie. Monsieur G. n’a pas d’autre ordonnance, en particulier pas de prescription de surveillance plaquettaire.

Quels sont les problèmes ?

Absence de surveillance plaquettaire

Lors d’un traitement par HBPM ou héparine non fractionnée, la surveillance des plaquettes doit être faite deux fois par semaine en début de traitement pour vérifier l’absence de thrombopénie induite par l’héparine.

Ici, elle n’est pas prévue.

Contre-indication chez l’insuffisant rénal

Enquête faite auprès de monsieur G, celui-ci vient juste d’aller chercher des résultats au laboratoire d’analyses. Sa clairance à la créatinine est de 27 ml/min, ce qui signe une insuffisance rénale sévère. Or les HBPM (comme Innohep), du fait de leur élimination rénale, sont contre-indiquées en cas d’insuffisance rénale sévère.

La gestion des problèmes

Appel du prescripteur

Le prescripteur n’avait pas connaissance des résultats de la clairance à la créatinine au moment où il a rédigé son ordonnance. Le pharmacien lui propose de remplacer l’Innohep par de la Calciparine (dont l’élimination n’est pas rénale), avec un schéma à deux injections par jour à compléter par une surveillance des plaquettes et du TCA. Le médecin remercie le pharmacien pour son intervention et approuve le remplacement de l’Innohep par la Calciparine. Il souhaite revoir le patient le lendemain matin pour organiser la surveillance des plaquettes et du TCA. Il confirme que le relais par AVK est prévu et sera fait dès que possible.

Conseils au patient

Monsieur G. est informé de tous les changements effectués et de la nécessité de reconsulter le médecin le lendemain. C’est une infirmière qui va faire les piqûres de Calciparine, il n’y a donc pas lieu d’expliquer la technique d’injection.

Répercussions sur la pratique officinale

Devant la complexité et le niveau de risque des prescriptions d’héparine, les pharmaciens, suite à leur formation en assurance qualité, décident de mettre en place un protocole de délivrance des HBPM.

Grille d’aide à la délivrance

La grille d’aide à la délivrance publiée dans le « Cahier Iatrogénie » du Moniteur consacré aux HBPM ainsi que le tableau de posologie des HBPM sont plastifiés et restent en permanence à côté du tiroir où sont rangées les formes injectables.

Procédure qualité

Une procédure de délivrance des héparines est élaborée. Elle précise en particulier que la délivrance doit systématiquement faire intervenir deux personnes dont un pharmacien. Elle reprend le déroulé de la délivrance : analyse de l’ordonnance, facturation et conseils au patient.

Opinion pharmaceutique

C’est également l’occasion de mettre en place l’opinion pharmaceutique. Auparavant, les appels au médecin étaient inscrits dans un cahier avec le motif de l’appel et les solutions apportées à la suite de l’entretien téléphonique, accompagnés d’une copie de l’ordonnance. Dorénavant, les opinions pharmaceutiques, le double des ordonnances et éventuellement le double des analyses biologiques sont répertoriés dans un classeur spécial.

Une délivrance quotidienne

Face à une patiente dépressive, en quête continuelle de boîtes supplémentaires de médicaments psychotropes, un titulaire et un préparateur décident de s’investir dans une délivrance journalière et à domicile des médicaments. Un beau travail d’accompagnement du patient.

Pharmacie Gambetta

45, rue Lazare-Bernard

59220 Denain

– Participants :

Jean-Philippe Vesin, pharmacien titulaire

Jean-Jacques Ruelle, préparateur

LE CAS

– La patiente

Une femme de 62 ans dépressive, divorcée depuis 10 ans. Elle vit seule, le volet de sa maison donnant sur la rue est toujours fermé et un autocollant « absente » a été collé sur la sonnette.

– Contexte clinique

La patiente ne sort presque plus de chez elle, complexée par une prise de poids considérable. La désocialisation s’est installée. Pourtant, il y a quelques années, cette patiente, enseignante, retraitée s’était investie dans des cours de rattrapage scolaire au sein d’une association de bénévoles. A la pharmacie, la demande de boîtes de psychotropes supplémentaires se fait de plus en plus pressante.

– L’ordonnance

Elle comporte des médicaments psychoactifs : Témesta 2,5, Deroxat, Prothiaden 75, Noctran 10, et plusieurs autres médicaments : Iperten 10, Lévothyrox 50, Fludex LP, Kardégic 75, Lipanthyl 145, Inexium 20.

Quel est le problème ?

La patiente est dans un état de solitude extrême. Elle est très dépressive et angoissée. Au fil du temps, l’observance du traitement s’est dégradée. Il est difficile de savoir si les demandes de dépannage sont dues à des boîtes égarées ou à des médicaments consommés en trop. Le risque d’accident iatrogène est réel aussi bien en dépannant cette patiente qu’en refusant de la dépanner.

La gestion du problème

Mise en place d’une délivrance quotidienne

Celle-ci débute en octobre 2006. Un pilulier journalier est apporté chaque jour au domicile de la patiente. Parfois, l’ensemble des médicaments est consommé en une seule fois, mais les risques sont néanmoins plus limités.

Passage à une délivrance trihebdomadaire

Elle démarre en décembre, au moment des fêtes, car la patiente se sent mieux. Les médicaments sont donnés pour deux jours. Début janvier, la patiente prend deux jours de traitement en une prise, avec de l’alcool. Le lendemain, elle souffre d’un syndrome de manque et parle de suicide. Le médecin contacté prescrit de l’Aotal.

Délivrance bihebdomadaire

Janvier 2007 : la pharmacie passe à deux visites à domicile par semaine. Mais la patiente n’est pas bien : elle passe beaucoup de temps assise dans le noir. Seuls les passages de la pharmacie soulagent un peu la sensation d’oppression.

Appel au GREID

Le Groupe d’écoute et d’information sur la dépendance est contacté. Il préconise de rester à deux délivrances par semaine, mais en alternant délivrance à domicile et délivrance à l’officine. Depuis avril, la patiente va mieux. Elle entreprend un régime, recommence à sortir et à voir du monde. Elle adresse à la pharmacie une lettre de remerciement.

Répercussions sur la pratique officinale

Cycle de Prochaska

La pharmacie fait le parallèle entre l’évolution de cette patiente et le « cycle de Prochaska » appliqué à l’évolution naturelle du tabagisme : le fumeur indécis envisage d’arrêter de fumer, décide d’essayer, essaie d’arrêter, arrête, éventuellement recommence, envisage d’arrêter…

Dans la cas de cette patiente dépressive, la pharmacie considère avoir bouclé une partie du cycle.

Il reste un long travail d’accompagnement et des problèmes à venir, en particulier liés à la fermeture de l’officine prévue cet été.

Contexte législatif

La pharmacie conclut en espérant qu’un jour sera créé un contexte législatif de prestations d’accompagnement thérapeutique.

Le prix du Moniteur 2008

Plus simple, plus rapide, mais toujours ouvert à vos interventions pharmaceutiques, le Prix 2008 fait peau neuve !

Plus simple

A partir de janvier 2008, remplissez le dossier en ligne en vous connectant sur http://www.WK-pharma.fr, rubrique « Formation ». L’ordonnance et éventuellement les autres documents (opinion pharmaceutique, documents des centres de pharmacovigilance, documents distribués aux patients…) pourront être joints au dossier au format PDF ou envoyés par courrier au Moniteur.

Plus rapide

Un document à remplir en direct avec des cases à cocher pour le type d’intervention et des espaces libres pour présenter votre intervention.

Plus de récompenses

Un premier prix d’une valeur de 2 000 euros pour le gagnant. Des ouvrages pour les quinze meilleurs dossiers.

Du 1er janvier au 30 juin 2008, connectez-vous sur http://www.WK-pharma.fr et participez au Prix du Moniteur dans le cadre des Prix Initiatives de la pharmacie.