Pénuries de médicaments : du mieux, vraiment ?

Le 18 mars, Yannick Neuder, ministre chargé de la Santé et de l’Accès aux Soins, et Marc Ferracci, ministre chargé de l’Industrie et de l’Energie, ont présenté leur bilan annuel concernant la feuille de route contre les pénuries de médicaments lancée en février 2024.

Les données officielles semblent encourageantes : 3 825 déclarations de ruptures ou risques de ruptures enregistrées par l’ANSM en 2024, contre 4 925 en 2023, soit une baisse de 22 %. Un plan hivernal déployé dès octobre a également permis une « surveillance accrue des médicaments les plus à risque de tension ».

Mais sur le terrain, la perception est différente. Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), nuance ce constat : « Je n’avais pas l’impression qu’il y avait moins de ruptures, bien loin de là. Cependant, il est toutefois exact que les médicaments de l’hiver étaient beaucoup moins en tension. »

Une amélioration ciblée mais des problèmes persistants

Si la situation s’est améliorée pour certains antibiotiques comme l’amoxicilline, cela masque des tensions persistantes sur d’autres molécules essentielles.

« Nous devons faire face à beaucoup d’autres comme la quétiapine ou Trulicity », alerte le président de l’USPO,

Une charge de travail toujours conséquente pour les pharmaciens

Face à ces tensions persistantes, les équipes officinales consacrent encore une part importante de leur temps à la gestion des pénuries. « Deux fois par semaine, nous faisons le tour des médicaments en rupture, nous appelons les grossistes puis les laboratoires si nécessaire », explique Pierre-Olivier Variot, qui estime que le temps consacré à cette gestion reste comparable à celui de l’année dernière, c’est-à-dire une douzaine d’heures par semaine.

Des mesures concrètes déjà en place et à venir

Pour faire face à ces défis, plusieurs mesures ont déjà été mises en œuvre en 2024 :

– l’autorisation accordée à certaines pharmacies hospitalières de produire des médicaments en cas de rupture prolongée ;

– le déploiement de tests rapides d’orientation diagnostique (Trod) en pharmacie pour certaines pathologies courantes ;

– l’instauration prochaine d’un système d’information partagé obligatoire pour améliorer la visibilité sur la disponibilité des médicaments.

La coordination entre les différentes instances étatiques a également été renforcée grâce à la création d’un comité interministériel d’anticipation des pénuries.

Une nouvelle stratégie pour les dispositifs médicaux

Au-delà des médicaments, le gouvernement élargit son action aux dispositifs médicaux avec une nouvelle feuille de route 2025-2027 articulée autour de quatre axes :

– identification et surveillance des situations à risques de tensions ou ruptures ;

– prévention à long terme des situations à risque ;

– anticipation à court terme des situations à risque ;

– optimisation de la gestion en cas de rupture avérée.

« Cette feuille de route témoigne de l’engagement continu du Gouvernement afin de garantir aux patients un accès continu aux traitements et dispositifs dont ils ont besoin », affirme Yannick Neuder.

Marc Ferracci souligne quant à lui l’importance du « renforcement de nos chaînes de valeur, en France comme en Europe » comme « réponse structurelle aux pénuries constatées par le passé », rappelant que « plus que jamais, l’autonomie stratégique de l’Europe en matière sanitaire est clé ».

Si les premiers résultats sont encourageants, notamment sur les antibiotiques, l’ampleur du travail qui reste à accomplir exige une mobilisation continue de tous les acteurs de la chaîne du médicament, du fabricant jusqu’au comptoir.