Pénuries : comment les pharmaciens renforcent leur veille

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Pénuries : comment les pharmaciens renforcent leur veille

Publié le 30 janvier 2025
Par Christelle Pangrazzi et Muriel Pulicani
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Face à l'aggravation des pénuries de médicaments, les pharmaciens s'organisent. Avec une augmentation de 30 % des signalements de ruptures entre 2022 et 2023, selon l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), l'urgence est palpable.

Cardiovasculaires, anti-infectieux, anticancéreux… Toutes les classes sont concernées, et 40 % des signalements ont nécessité des mesures correctives. Face à cette situation critique, les dispositifs de surveillance et de coordination s’intensifient.

Des mesures pour juguler la crise

Plusieurs initiatives ont été déployées pour contenir ces tensions :

– Le plan hivernal, pour anticiper les besoins en antibiotiques, corticoïdes et traitements contre l’asthme ou la fièvre.

– Une charte d’engagement, signée en novembre 2023 entre industriels, logisticiens et syndicats de pharmaciens, visant à garantir un accès équitable aux traitements.

– Une feuille de route 2024-2027, ambitionnant de renforcer la souveraineté industrielle.

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– Des sanctions accrues, inscrites dans le PLFSS 2025, contre les laboratoires et grossistes ne respectant pas leurs obligations de stock.

DP-Ruptures, un outil en pleine mutation

Développé par le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (Cnop), DP-Ruptures devient obligatoire pour tous les acteurs de la chaîne du médicament. Intégré aux logiciels d’officine, il signale toute absence de livraison sous 72 heures et permet d’activer une demande de dépannage d’urgence (DDU) pour les médicaments essentiels.

Actuellement connecté à 87 laboratoires (soit 84 % du marché) et 11 grossistes (98 % du marché), l’outil évolue : sa version 11, attendue à l’été 2025, offrira plus de transparence sur les stocks et les délais de réapprovisionnement. La version 12, prévue pour début 2025, améliorera l’ergonomie et l’accès à l’information.

Vers un système d’information centralisé

Au-delà de DP-Ruptures, un nouveau système d’information est en projet, inscrit dans le PLFSS 2025. Il vise à assurer un suivi exhaustif de la disponibilité des médicaments et pourrait être intégré aux logiciels d’aide à la prescription. « Un décret précisera sa mise en place. L’Ordre, l’Assurance maladie et l’ANSM collaboreront à sa conception », indique Carine Wolf-Thal, présidente du Cnop.

Vigirupture, une alternative collaborative

En parallèle, Vigirupture, lancé par Offisanté en 2019, offre une approche différente : collaborative et en temps réel. « Avec 9 500 pharmacies inscrites, 5 000 médecins et des hôpitaux entiers, nous réalisons jusqu’à 20 000 dépannages quotidiens », explique Nicolas Buglio, CEO de la plateforme. Son ambition ? Élargir son rôle en facilitant la livraison aux patients et en informant les prescripteurs des disponibilités en amont.

Entre obligation de transparence et coopération entre officines, la lutte contre les pénuries de médicaments se structure. Reste à voir si ces outils suffiront à apaiser une crise devenue systémique.