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On trouve de tout dans le PLFSS 2011

Publié le 27 novembre 2010
Par Arnaud Cristinelli et Magali Clausener
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La commission mixte paritaire a tranché et livré sa version du PLFSS 2011. Plusieurs mesures concernent les officines : médicaments, dispositifs médicaux, expérimentation en EHPAD… Revue de détail avant l’adoption finale par le Parlement.

L’examen du PLFSS 2011 par l’Assemblée nationale et le Sénat aura connu plusieurs rebondissements. Les députés et les sénateurs ont, en effet, montré de nombreux désaccords sur différentes mesures. Dont certaines qui concernent directement les officines. Le texte de la commission mixte paritaire est donc le fruit de ces discussions. Et de concessions. L’adoption définitive du PLFSS est prévue pour décembre.

Médicaments

– L’article 20 introduit un seuil de taxation pour les médicaments orphelins dont le chiffre d’affaires hors taxes est supérieur à 30 millions d’euros. Jusqu’à présent, les médicaments orphelins étaient exonérés de taxes.

– L’article 19 fixe pour les industriels du médicament le taux K à 0,5 % pour 2011. Il s’agit du taux de croissance du chiffre d’affaires des médicaments remboursables au-delà duquel les laboratoires pharmaceutiques doivent verser des remises à l’Assurance maladie.

– L’annexe 7 au PLFSS 2011 prévoit une diminution de 5 points (de 35 % à 30 %) du remboursement des médicaments avec une vignette bleue dont le service médical rendu (SMR) est jugé modéré ou faible (soit 95 millions d’euros d’économies). Dans le cadre de la politique conventionnelle, des diminutions de prix, à hauteur de 500 millions d’euros, pour les médicaments sous brevet, les génériques et les dispositifs médicaux sont prévues.

– L’annexe 9 au PLFSS 2011 envisage des actions de maîtrise médicalisée sur certaines classes de médicaments (IEC, IPP, statines), comme un meilleur respect des recommandations de la Haute Autorité de santé.

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Génériques

– L’article 36 sexies élargit aux médicaments « quasi génériques » les conditions commerciales octroyées aux génériques (soit un plafonnement des remises à 17 %). L’économie attendue grâce à la substitution des « quasi-génériques », dont la forme galénique est différente de la spécialité de référence, est de 130 millions d’euros.

– L’annexe 9 souhaite un renforcement de la prescription dans le Répertoire des génériques par l’ensemble des praticiens sur la base des contrats d’amélioration des pratiques individuelles (CAPI) signés par 15 000 médecins.

Dispositifs médicaux

– L’article 36 octies oblige le pharmacien à délivrer les dispositifs médicaux selon les conditions prévues pour les médicaments (article L. 5123-7 du Code de la santé publique). Les officinaux sont donc tenus de délivrer, pour les dispositifs médicaux, le conditionnement le plus économique pour l’Assurance maladie. Quand un dispositif médical est prescrit pour plusieurs mois, le pharmacien doit délivrer mois par mois, sauf s’il existe un conditionnement trimestriel.

– L’annexe 7 prévoit une baisse de 5 points (de 65 % à 60 %) du remboursement des dispositifs médicaux (100 millions d’euros d’économies attendus) et l’instauration d’un forfait médicalisé de prise en charge pour les bandelettes de test de la glycémie pour les patients diabétiques de type 2 (économie estimée à 35 millions d’euros).

EHPAD

– L’article 43 quater prolonge l’expérimentation de réintégration des médicaments dans les forfaits de soins des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de deux ans, jusqu’au 1er janvier 2013.

– L’article 43 sexies reporte au 1er janvier 2013 la possibilité pour des groupements de coopération sociale et médicosociale de créer une pharmacie à usage interne (PUI). La partie II du même article prévoit cependant que, dans le cadre de l’expérimentation de réintégration des médicaments dans les forfaits de soins, un unique groupement de coopération sociale et médicosociale peut être constitué afin de disposer d’une PUI, et exercer cette activité pour le compte d’autres établissements. Concrètement, cela signifie qu’un seul EHPAD peut disposer d’une PUI.

Prescriptions des établissements de santé

– Un article additionnel après l’article 36 envisage une extension de la maîtrise des dépenses de prescriptions hospitalières en ville à l’ensemble des établissements de santé (hôpitaux publics et établissements de santé privés).

– L’article 42 quinquies met en place un programme de qualité et d’« efficience » pour dresser un bilan des actes, prestations et médicaments prescrits dans les établissements de santé et dont le coût pèse sur l’enveloppe de soins de ville.

Patients

– L’article 18 prévoit la revalorisation sur 2 ans du plafond de ressources de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS). Ce plafond sera celui de la CMU complémentaire majoré de 26 % en 2011 et de 30 % en 2012 (contre 20 % actuellement). Le coût supplémentaire de cette mesure est estimé à 23 millions d’euros en 2011 et à 64 millions d’euros en 2012.

– L’annexe 7 exclut du dispositif des affections de longue durée (ALD) les patients atteints d’HTA non compliquée. Les patients déjà admis en ALD au titre de cette pathologie ne sont cependant pas concernés L’économie estimée pour l’assurance maladie est de 20 millions d’euros par an.

Regroupements

– L’article 36 quinquies stipule que le nombre de licences prises en compte suite à un regroupement est le nombre d’officines regroupées, et ce au minimum pendant 5 ans. La nouvelle licence de la pharmacie issue du regroupement n’est plus comptée.

Les mesures les plus débattues

Les dispositions les plus discutées à l’Assemblée nationale et au Sénat concernent les taxes sur les médicaments orphelins, les quasi-génériques, les EHPAD et les PUI. Ainsi, les députés voulaient taxer les médicaments orphelins à partir d’un chiffre d’affaires compris entre 30 et 40 millions d’euros. Les sénateurs ont opté pour le bas de la fourchette, soit 30 M €. L’article sur les quasi-génériques adopté par l’Assemblée nationale avait été supprimé par le Sénat. Finalement, la commission mixte paritaire l’a rétabli. La possibilité pour des groupements de créer des PUI a été largement discutée au Sénat, puisqu’un amendement prévoyait de ne pas reporter cette possibilité au 1er janvier 2013 alors qu’elle avait été votée par les députés. De fait, si on peut dire que les députés ont eu finalement gain de cause, les sénateurs également : un seul EHPAD peut créer une PUI à titre expérimental avant le 1er janvier 2013. Il faut dire que les parlementaires n’ont pas disposé des recommandations de l’IGAS (voir Le Moniteur n° 2855 et l’article page 10).

M.C.

Jean qui rit et Jean qui pleure

Mis à part les baisses des prix des médicaments et les baisses de remboursement et, bien sûr, la création de PUI par un seul EHPAD, certaines mesures satisfont plutôt les syndicats de pharmaciens. Il en est ainsi des conditions de remise sur les « quasi-génériques ». La FSPF « se félicite » de l’adoption de cet article qui harmonise les conditions commerciales de l’ensemble des spécialités inscrites au Répertoire des génériques. « Cette modification d’ordre technique présente une grande importance pour le développement de la substitution », précise la FSPF dans un communiqué en date du 19 novembre. En revanche, elle estime « inopportune » la modification du mode de comptabilisation des licences après regroupement d’officines. L’UNPF et l’USPO sont, en revanche, satisfaites que, désormais, « un plus un égal deux et non trois ». « C’est un retour à la version initiale, qui avait été modifiée parce qu’un pharmacien souhaitait empêcher l’arrivée d’une nouvelle officine », note Claude Japhet, président de l’UNPF. Gilles Bonnefond, président délégué de l’USPO, va même plus loin : « On allait envoyer toute la loi de répartition géographique au contentieux au niveau européen à cause d’un “copinage”. La situation est maintenant clarifiée, alors qu’elle était explosive. »

M.C.