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Medicrime, la nouvelle arme anticontrefaçon ?
Le Conseil de l’Europe adoptera en mai la première convention internationale sur la contrefaçon des produits médicaux. Medicrime doit renforcer la lutte contre la vente de médicaments potentiellement dangereux.
Très peu de pays sanctionnent la contrefaçon de médicaments. D’autres proposent des sanctions que l’on pourrait qualifier de ridicules compte tenu de la gravité des faits. Aujourd’hui, les organisations criminelles risquent moins à faire du trafic de médicaments que du trafic de drogues », explique Carlo Chiarmonte, chef de la division du droit pénal du Conseil de l’Europe. Un constat qui a incité, dès 2004, ce même Conseil à travailler sur le sujet. Et qui a abouti à l’élaboration de la première convention internationale : Medicrime. « Il s’agit d’harmoniser les législations des Etats, de renforcer la coopération nationale entre les différents services (police, douanes, autorités sanitaires) et la coopération internationale entre les pays, et de sanctionner la production, le transit et la commercialisation de produits de santé. La contrefaçon est, en effet, un problème mondial », détaille Carlo Chiarmonte.
Le projet de convention, qui devrait être adopté courant mai par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe, concerne non seulement les médicaments mais également les dispositifs médicaux lorsqu’ils sont soumis à une obligation de conformité. Il introduit aussi la notion de circonstances aggravantes, notamment en cas de décès d’une personne ou d’atteinte à sa santé physique ou morale, d’infraction commise dans le cadre d’une organisation criminelle ou de recours à « des procédés de diffusion à grande échelle », c’est-à-dire Internet.
Dans son rapport explicatif du projet, le Comité ad hoc, qui a travaillé sur la rédaction de la convention, « considère que l’utilisation de l’Internet […] constitue aujourd’hui l’un des aspects les plus graves et les plus préoccupants de la contrefaçon des produits médicaux et des infractions similaires », et que « des produits médicaux contrefaits, et donc dangereux, sont désormais diffusés partout dans le monde à un rythme alarmant ».
Un enjeu humanitaire et économique
Une fois adoptée, la convention sera ouverte à la ratification par les Etats membres de l’UE lors de la Conférence des ministres de la Justice qui se déroulera à Istanbul les 25 et 26 novembre 2010. Medicrime pourra par la suite être signée par des Etats non membres. Pour l’instant, il est difficile d’effectuer des pronostics. Mais la lutte contre la contrefaçon risque de s’avérer ardue si des pays comme la Chine ou l’Inde ne ratifient pas la convention. Les pays signataires s’engagent, en effet, à transposer les articles du texte dans leur propre législation et à appliquer des « sanctions effectives, proportionnées et dissuasives, y compris des sanctions pécuniaires pénales ou non pénales ». De fait, la convention prévoit un suivi par un Comité des parties chargé de surveiller l’application du texte.
Carlo Chiarmonte se montre optimiste, même s’il estime qu’il faudra faire le point dans un an : « Des Etats membres, dont la France, nous soutiennent. Nous travaillons également avec des organisations, des institutions et des fondations. Le sujet est important tant sur le plan humanitaire, puisque les médicaments contrefaits peuvent mettre en danger la vie des personnes, qu’économique. » La production et la distribution de médicaments contrefaits représenteraient en effet dans certaines parties de l’Europe des parts de marché de 6 à 20 %, et atteindraient plus de 50 % dans les pays en développement.
« Nous avons des confrères qui ne respectent pas la déontologie ? »
La France soutient activement Medicrime. Est-ce pour cette raison que Roselyne Bachelot a été si prompte à lancer des réunions de travail sur l’e-pharmacie ? La France n’a, en effet, aucune législation dans ce domaine. D’où la demande d’Isabelle Adenot de nettoyer Internet (voir Le Moniteurn° 2827). Et la présidente de l’Ordre des pharmaciens ne manque pas d’exemples de dérives : « Certains sites de pharmacie communiquent sur leurs prix, d’autres se présentent comme des sites de parapharmacie et n’indiquent pas que leurs produits sont vendus sous la responsabilité d’officinaux. On trouve aussi des sites de pharmaciens français rédigés en langue étrangère pour vendre à l’étranger, des sites panaméens ou russes rédigés en un français parfait dont le nom inclut le mot « pharmacie » et qui vendent des médicaments en grosses quantités. » Isabelle Adenot évoque aussi des sites de pharmaciens qui ont vendu leur officine. L’Ordre a ainsi entrepris des actions disciplinaires à l’encontre d’officinaux et des actions judiciaires pour des cas d’exercice illégal de la pharmacie.
« Nos moyens d’actions sont limités si nous ne possédons pas de législation. Nous avons des confrères qui ne respectent pas la déontologie. Il faut que cela se sache », conclut Isabelle Adenot.
M.C.
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