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L’Afssaps attend vos formules de préparations
On les avait enterrées un peu trop vite. Pourtant l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé n’entend pas laisser tomber les préparations officinales. Elle demande même aux pharmaciens de lui envoyer leurs formules afin d’actualiser le Formulaire national.
Une deuxième vie pour les préparations ? L’annonce de la modification du décret sur les préparations (voir Le Moniteur n° 2849) a levé les doutes concernant leur avenir. Une soixantaine de personnes, réunies à l’initiative d’An Lê, chef de l’unité Pharmacopée à l’Afssaps, se sont penchées sur leur cas le 17 septembre dernier. « Cette journée a été l’occasion d’échanges entre des officinaux de terrain, des personnes chargées de la réglementation, des sous-traitants, des universitaires ainsi que des pharmaciens inspecteurs », rapporte An Lê. Les officinaux qui y participaient en sont revenus convaincus de la volonté de l’Afssaps de faire avancer le dossier des préparations. Pour Pierre Cabret, pharmacien à Paris et secrétaire de la Société des officinaux sous-traitants des préparations (SOTP), le message de l’Afssaps est clair : « On continue les préparations, on vous aide et on est à l’écoute du terrain. »
« Les préparations font partie du monopole »
Le représentant de l’ordre des pharmaciens, Xavier Desmas, a redit l’attachement de l’institution au maintien des préparations, qu’elles soient magistrales ou officinales. Pour lui, toutes les officines doivent avoir un préparatoire aux normes, même si elles ne veulent plus faire de préparations. « L’absence de préparatoire est une faute professionnelle, rappelle-t-il. Il faut que la profession soit consciente de ses atouts et de ses obligations. » Elle doit également « prendre conscience de l’importance de la qualité et faire des efforts pour l’améliorer et respecter les bonnes pratiques de préparation ». Les préparations font « partie du métier et du monopole du pharmacien, même si la rentabilité n’est pas immédiate », a-t-il ajouté, soulignant que le problème actuel venait essentiellement de la désaffectation des prescripteurs et du fait qu’il y avait de moins en moins de formules au Formulaire. Voila pourquoi, conclut-il, « il faut élargir le Formulaire national et augmenter ainsi la possibilité de faire des préparations officinales afin de rentabiliser le préparatoire ».
La question de la rentabilité est justement un des arguments de Jean Kelber, président de Top Acto, association réunissant des officinaux réalisant des préparations, pour qui « autoriser la réalisation de préparations officinales permettrait de conserver un savoir-faire et de maintenir en état des préparatoires. Cela permettrait également la réalisation de préparations magistrales qui à elles seules ne rentabilisent pas le maintien de cette activité », et aussi de pouvoir réaliser des préparations en temps de crise, ce qui éviterait, par exemple, les problèmes posés par Tamiflu l’hiver dernier.
Intégrer de nouvelles formules dans le Formulaire national
Qui dit préparations officinales dit Formulaire national puisque, depuis l’ordonnance du 26 avril 2007, ce type de préparation correspond à « tout médicament préparé en pharmacie inscrit à la Pharmacopée ou au Formulaire ». Cette nouvelle définition avait été proposée par Pierre Deloménie, inspecteur de l’Inspection générale des affaires sociales, dans son rapport publié en 2006. « Toutes les propositions faites dans ce rapport sont réglementairement mises en place au fur et à mesure », remarque An Lê. C’est donc au tour du Formulaire d’être rénové afin, comme l’indique le rapport, de « mettre à disposition de l’ensemble des intervenants des formules éprouvées et validées et de standardiser les formules, les modes de fabrication, les contrôles voire les conditions d’emploi ».
A l’Afssaps, le groupe de travail sur le Formulaire est prêt à travailler. A un détail près : il ne lui manque que la matière, à savoir des formules de préparations. Voila pourquoi l’Agence demande à tous les pharmaciens de lui en envoyer pour étude, sachant que la commission de la Pharmacopée a décidé de ne pas élaborer de formules s’il existe une spécialité pharmaceutique équivalente. « C’est un travail très lent car il faut discuter les formules, faire des tests, les valider, réunir de la documentation, rédiger des monographies, définir des règles produit par produit, établir des fourchettes de doses, arriver à un consensus, rédiger les formules, les soumettre en enquête publique et enfin les faire passer en séance de la commission nationale de la Pharmacopée », assure le Pr Jean-Claude Chaumeil, membre du groupe de travail du Formulaire. C’est seulement à l’issue de tout ce parcours que les formules pourront être intégrées au Formulaire.
Dominique Martin-Privat, présidente de la SOTP, regrette cependant que « ce type de liste positive ne permette pas de réaliser d’autres préparations que celles qui y sont inscrites », citant le cas du gel hydroalcoolique dont la vente l’hiver dernier était autorisée dans tout type de commerce « avec des normes fantaisistes et sans aucun contrôle » alors que les pharmaciens n’avaient pas le droit d’en fabriquer.
Une monographie-cadre pour les plantes
Parmi les préparations officinales qui pourraient intégrer le Formulaire figurent essentiellement les préparations à usage pédiatrique et celles à base de plantes médicinales ou d’huiles essentielles. Les premières sont indispensables pour faire des adaptations de doses. D’ailleurs, « l’Afssaps s’est engagée à élaborer des règles pour homogénéiser les préparations pédiatriques et pour nous donner des outils, notamment sur les formes à libération prolongée, les excipients à utiliser en fonction des principes actifs, la qualité des matières premières ainsi que des listes de fournisseurs agréés », assure Pierre Cabret. Un cadre aux sorties d’hôpital va également être défini afin d’assurer le suivi de ces préparations entre l’hôpital et la ville, comme le fait d’utiliser le même traceur coloré et un excipient commun. Quant au second type de préparations, c’est une quasi-obligation de s’y pencher quand on sait l’engouement actuel des consommateurs pour les médecines naturelles. Les journaux féminins regorgent d’articles sur les vertus de telle ou telle plante, vantent les qualités curatives des huiles essentielles et donnent des recettes de tisanes que le pharmacien n’a pourtant pas le droit de réaliser puisque tout mélange de plantes lui est interdit.
Pour sortir de cette impasse, « nous allons élaborer une monographie-cadre qui permettra aux officinaux de préparer de nouveau des mélanges de plantes. Des formules spécifiques – que les pharmaciens pourront mélanger selon les besoins du patient – comprenant une dizaine de plantes vont être mises au point », explique An Lê. Pas question toutefois de laisser aux officinaux la liberté de créer leurs propres mélanges, ce que regrette Dominique Martin-Privat : « Le pharmacien est le premier recours, il fournit des conseils gratuits et pourtant c’est le seul acteur de santé à ne pas pouvoir prescrire. Nous revendiquons la reconnaissance officielle de notre rôle de prescripteur-conseil. Nous en avons la compétence et la demande. Les préparations conseil pourraient être limitées à certaines classes de produits pour une délivrance limitée dans le temps. Ce serait une opportunité pour le pharmacien de s’impliquer dans le cadre de la loi HPST. »
Une telle évolution pourrait bien voir le jour d’ici 2 à 3 ans, pense Fabien Bruno, vice-président de la SOTP : « Il y a un déroulement logique qui a débuté par la mise en place de procédures et de la traçabilité. Aujourd’hui, la question porte sur la protection et la formation du personnel. La prochaine étape sera celle de l’information à donner au patient. »
Le Formulaire belge érigé en exemple
« Il existe deux versions du Formulaire thérapeutique magistral belge, explique Jérôme Germanaud, directeur des ventes chez Fagron, fournisseur de matières premières d’origine belge. La première, conçue pour les pharmaciens, comprend le mode opératoire. La seconde version, destinée aux médecins, est une version allégée à usage de prescription qui décrit les propriétés thérapeutiques des formulations. » La version « pharmacien » fournit également des indications sur les produits utilisés, les précautions d’emploi, des fiches de pesée ainsi que des données sur le mode et la conservation du produit. La première édition du Formulaire thérapeutique magistral (FTM) (2003) ne concerne que la dermatologie. Une seconde édition est en cours de réalisation. Le FTM est publié par l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS), équivalent belge de l’Afssaps, et sa réalisation et sa diffusion sont financées par les officinaux qui payent une redevance et par l’industrie pharmaceutique et l’Etat. « Autre particularité, la commission du Formulaire accueille des prescripteurs, ce qui n’est pas le cas en France. Ces médecins valident, entre autres, l’intérêt thérapeutique des formules, commente Jérôme Germanaud. De plus, les officinaux qui souhaitent réaliser des préparations ont à leur disposition une liste du matériel et des ouvrages de référence qu’ils doivent obligatoirement détenir. » Ces dispositions font que la qualité des préparations s’est grandement améliorée en Belgique depuis la mise en place du FTM. De son côté, An Lê, chef de l’unité Pharmacopée à l’Afssaps, considère que « l’avantage de l’AFMPS est qu’elle bénéficie d’un réseau de pharmaciens d’officine reconnus et agréés qui font remonter les formules de préparations pour enrichir le Formulaire ». Quant à l’utiliser tel quel en France, ce n’est pas pensable car « les réglementations sont si différentes que les formules ne sont pas forcément transposables d’un pays à l’autre ».
Comment proposer vos préparations
Si vous souhaitez proposer une préparation au Formulaire, vous devrez remplir un dossier*t où devront figurer la formule qualitative et quantitative avec le nom précis des matières premières (substances actives et excipients) et des informations sur leur inscription à la Pharmacopée européenne ou française. Les noms des fabricants ou fournisseurs des matières premières, le mode opératoire de la préparation, le type et les matériaux de conditionnement, les conditions de stockage et les données de stabilité devront être précisés, mais aussi des indications sur les méthodes de contrôle des matières premières avec, le cas échéant, les bulletins d’analyses, ainsi que des indications sur les caractères organoleptiques et les méthodes de contrôle de la préparation terminée. Enfin, vous devrez noter les indications thérapeutiques de la préparation, les patients cibles, les conditions d’utilisation ainsi que les interactions médicamenteuses et les contre-indications. Pour finir, doivent figurer au dossier des renseignements sur la fréquence de préparation sur les trois dernières années, la taille des lots réalisés ainsi que des références bibliographiques.
* Le dossier d’inscription est disponible sur le site www.afssaps.fr
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