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La version 5 du décret sur les centrales d’achats crispe toujours le Collectif

Publié le 14 février 2009
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Après analyse de la version 5 du projet de décret sur les centrales d’achats, en partance pour le Conseil d’Etat, le Collectif des groupements persiste et signe. Selon lui, ce texte est truffé d’incohérences et source d’insécurité.

Le ministère de la Santé a communiqué, pour information, aux professionnels l’ultime version du décret sur les centrales d’achats avant son envoi au Conseil d’Etat. Mais cette version, la cinquième, est peu différente de celle que Le Moniteur présentait le 31 janvier (n° 2764). Elle suscite pourtant de nouvelles difficultés d’interprétation. Principale nouveauté : les dépositaires s’ajoutent aux grossistes-répartiteurs en tant qu’acteurs susceptibles de « se livrer, d’ordre et pour le compte de pharmaciens titulaires d’officine ou des structures [de regroupement d’achats] […], à la commande et au stockage de médicaments [non remboursables] ». Logique. On peut considérer qu’il s’agissait sans doute d’un oubli dans la version précédente, compte tenu de la teneur du texte.

Les dépositaires entrent dans la danse

Autre modification, les dépositaires, mais aussi les grossistes et les centrales d’achats, pourront se livrer « à la commande et au stockage de médicaments » pour le compte des pharmaciens, alors que l’on parlait auparavant d’« achat » et de stockage de médicaments. Avec une grosse ambiguïté, puisque le texte dit un peu plus loin que les structures de groupement d’achats (des centrales « light » en quelque sorte) pourront confier les opérations « d’achats, de stockage et de distribution » aux dépositaires, grossistes-répartiteurs ou centrales d’achats. On passe donc en quelques paragraphes de la commande aux achats…

« Tout le monde devient tout et n’importe quoi »

Le Collectif des groupements, hostile à cette version du texte, a donc fait valoir d’ultimes réserves au ministère, notamment le fait, source de confusions, que les centrales d’achats puissent se livrer, d’un côté « à l’achat et au stockage », et d’un autre « à la commande et au stockage », « d’ordre et pour le compte de pharmaciens ».

« La centrale se comporte tantôt comme un grossiste, tantôt comme un simple centralisateur de commandes, commente Pascal Louis, président du Collectif. Sans compter les incertitudes pour les laboratoires qui ne sauront plus ce que deviennent leurs produits et n’auront plus de garantie de paiement, car la commande n’est qu’une simple offre d’achats… L’objectif initial des centrales d’achats était bon, à savoir donner la possibilité au pharmacien de mieux acheter pour vendre moins cher. Le problème réel au fil des différentes versions de ce décret, c’est que tout le monde devient tout et n’importe quoi et fait le métier d’un autre, le texte laissant désormais la place à la libre interprétation de chacun. Et, encore une fois, on voit mal des centrales d’achat créées ex nihilo s’adapter aux contraintes de stockage, de locaux et d’embauche d’un pharmacien responsable, avec les mêmes facilités que les grossistes. »

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Et pourquoi pas les GMS ?

« Rien n’empêcherait des GMS de créer des centrales d’achats pharmaceutiques pour certaines catégories de médicaments destinées à leurs pharmacies, par exemple. Ce qui leur donnerait de fait un pouvoir en termes de choix de produits et de politiques de prix sur ces zones de chalandise, stigmatise Pascal Louis, président du Collectif. Je ne sais pas si c’est l’intention des GMS, mais rien dans ce texte ne les en empêcherait. Cela illustre de façon très pratique l’un des risques liés à ce texte. »

Comme l’avait précisé le ministère aux représentants de la profession, la réserve de propriété du capital des centrales aux titulaires d’officine a été retirée du texte final car elle aurait été jugée « illégale » au regard des exigences européennes de libre concurrence et de liberté d’établissement, car tous les établissements pharmaceutiques (groupements, dépositaires, grossistes-répartiteurs…) ont des capitaux ouverts… sauf l’officine. « Mais la possibilité d’un contrôle des instances dirigeantes par les officinaux aurait dû être maintenue, ou peut-être n’eût-il pas fallu faire appel à la notion de centrales d’achats, si bien maîtrisée par la GMS ? », conclut Pascal Louis.