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La réforme de la 6e année officine n’aura pas lieu

Publié le 20 mai 2023
Par Anne-Hélène Collin
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Le retard pris dans la modernisation de l’enseignement destiné aux futurs officinaux « met en danger l’avenir de la profession », alerte l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France, soutenue par les doyens, les syndicats et les groupements.

 

Visant notamment à rapprocher la 6e année officine des conditions d’exercice du terrain et des nouvelles missions, la réforme du 3e cycle des études de pharmacie est « en péril », s’indigne l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (Anepf), dans un communiqué du 4 mai signé conjointement avec la Conférence des doyens des facultés de pharmacie, la Fédération des associations générales étudiantes (Fage), la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO), Federgy (la chambre syndicale des groupements et enseignes de pharmacies) et le Collectif national des groupements de pharmaciens d’officine (CNGPO). Débuté il y a sept ans – un délai plus long que le temps de formation pour un pharmacien d’officine –, le projet est aujourd’hui « au point mort », ajoute l’Anepf, pour qui le gouvernement n’a pas tenu ses promesses. 

Un nouveau statut en attente

 

La réforme se fonde sur la création d’un diplôme de pharmacien spécialisé – diplôme d’études spécialisées (DES) en officine –  qui se veut une approche par les compétences et non plus par la connaissance, et reposera davantage sur la pratique que sur la théorie. Le stage, actuellement de six mois, passerait à neuf mois et devrait se dérouler tout au long de l’année, avec des cours à temps plein en début d’année. Il est également prévu d’intégrer des séminaires à l’université avec des enseignements, des mises en situation, des retours d’expériences, tous les mois pendant le stage.

 

Ces changements en impliquent un supplémentaire : celui du statut de l’étudiant. Après de nombreuses discussions sur les différents statuts possibles (interne, apprenti, etc.), les étudiants et les ministères de la Santé et de de l’Enseignement supérieur et de la Recherche avaient trouvé un compromis, selon l’Anepf : l’étudiant bénéficierait du statut de résident avec une rémunération portée à 1 200 € par mois, partagée entre le maître de stage et l’Etat, à laquelle s’ajouterait l’obtention d’indemnités de transport et d’hébergement. Aujourd’hui, l’étudiant en stage de 6e année est rémunéré 550 € par mois.

 

« Fin mars, les conseillers ministériels nous expliquent qu’il n’y aura aucun statut rédigé pour les étudiants en 6e année, aussi bien du côté interne que du côté résident, ce qui signe un nouveau manque de considération pour les étudiants et la pharmacie », explique l’association, qui proteste contre ce « retour à la case départ ».

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Urgence économique

 

En plus du besoin de moderniser les études de pharmacie, « dans un climat de désaffection de la filière, il est plus que nécessaire de revoir le statut étudiant », lance l’Anepf. L’urgence est économique. « La faible rémunération actuelle de l’étudiant en 6e année officine […] couplée à la hausse des prix des besoins vitaux (logement, nourriture, etc.) ne permet plus de vivre sereinement cette dernière année », alerte encore l’association. Une problématique soulevée également dans un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) de juillet 2022 sur la qualité de vie des étudiants en santé, où la précarité financière des élèves, « dont les revenus sont limités et pouvant rarement être complétés par un emploi compte tenu de la densité croissante des cursus », apparaît comme l’une des causes de la « progression du mal-être de ces étudiants ».

 

Voilà qui n’est pas de nature à favoriser un regain d’intérêt pour la pharmacie, qui souffre déjà d’un manque d’attractivité avec près d’un tiers des places en 2e année non pourvues en 2022.

 

L’Anepf demande ainsi à rencontrer « au plus vite » les conseillers du président de la République et l’ensemble des acteurs et conseillers ministériels en charge de la réforme, afin qu’ils prennent des engagements concrets. Et qu’ils les respectent.