Economie : l’Assurance maladie réfléchit à une « juste régulation de la rémunération »

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Economie : l’Assurance maladie réfléchit à une « juste régulation de la rémunération »

Publié le 10 juillet 2023
Par Anne-Hélène Collin
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L’Assurance maladie se base sur la situation économique de l’officine pour proposer de nouvelles missions et interventions du pharmacien. Sauf que son analyse économique n’est pas du tout celle des syndicats pharmaceutiques.

Dans son rapport Charges et produits pour 2024, l’Assurance maladie fait la part belle aux pharmaciens en proposant de nouvelles mesures « métier », qui seront discutées lors du prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale : prescription d’antibiotiques à la suite d’un dépistage positif dans certains pathologies, nouveaux accompagnements, prévention cardiovasculaire… Ceci « afin d’améliorer l’accès aux soins et de renforcer encore le rôle central du pharmacien au sein du système de santé tout en dynamisant la rémunération des officines », explique l’Assurance maladie, jugeant la situation financière de l’officine « très favorable et renforcée par l’activité en lien avec le Covid-19 ». Ainsi, en 2022, la rémunération des officines sur les médicaments remboursés, les nouvelles missions et les rémunérations en lien avec le Covid-19 « s’élève à 8,5 Md€ en 2022 soit une rémunération moyenne de 386 000 euros par officine contre 315 000 euros en 2020 soit une hausse de plus de 70 000 euros par officine », estime l’Assurance maladie, qui consacre pas moins d’une dizaine de pages (sur 302) à la situation économique du réseau. « Une réflexion sur le financement de ces nouvelles missions au regard du dynamisme de la rémunération historique des pharmaciens en lien avec la délivrance de médicaments pourrait être menée afin d’assurer une juste régulation de la rémunération des officines », note encore l’instance.

Bien qu’il soit « totalement en phase » avec les propositions métier, Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) ne partage pas l’analyse économique de l’Assurance maladie. « La Fédération rappelle que l’activité exceptionnelle liée à l’épidémie de Covid-19 n’est plus d’actualité : de nombreuses officines voient leurs revenus s’éroder et risquent de s’ajouter aux fermetures connues depuis de trop nombreuses années », rappelle-t-il dans un communiqué du 7 juillet. Dans un communiqué commun, la FSPF et l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) contestaient déjà « le chiffrage de la Cnam sur la marge brute de dispensation au premier quadrimestre (2024, NdlR) qu’ils estiment surévaluée de 3,6 points. En réalité, sur le champ historique de l’activité de l’officine, elle est en baisse de 0,1 % ». « Janvier est un peu l’arbre qui cache la forêt », notait Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO, soulignant que la rémunération de ce début d’année est masquée par la triple épidémie de grippe/Covid-19/VRS et la hausse des dispensations de médicaments chers. « 4,8 ù d’augmentation de la marge brute – chiffre Cnam – face à une inflation de 12,47 % des charges : on est largement en deçà et on court derrière l’inflation pharmacie », faisait-il aussi remarquer.

Dans son rapport, l’Assurance maladie envisage par ailleurs de « poursuivre la désensibilisation de la rémunération des pharmaciens au prix des médicaments en ajustant le niveau du plafonnement des honoraires pour les médicaments les plus chers ». « La rémunération du pharmacien, qui, dans le cas des médicaments les plus chers, ne représente que 1 % du prix du produit, n’est une variable d’ajustement ni souhaitable, ni efficace pour rétablir les comptes sociaux », a réagi immédiatement la FSPF.

Accord tripartite pour les pharmacies rurales

Pour autant, l’Assurance maladie est sensible à la situation des pharmacies de proximité. Dans un contexte de désertification médicale, et « pour identifier les officines à soutenir pour préserver l’accès aux soins », elle propose la création d’un contrat tripartite entre l’officine en difficulté, l’Agence régionale de santé et la caisse primaire d’Assurance. « Cette gestion au plus près du territoire doit permettre de trouver des solutions adaptées à la situation de chaque zone géographique et de chaque officine », explique-t-elle, donnant rendez-vous aux syndicats représentatifs lors des prochaines négociations conventionnelles pour définir les modalités de ce contrat, notamment les critères pour le déclenchement d’une aide, ses modalités de calcul et les devoirs rattachés à ce soutien à l’activité officinale.

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