Dispositif « article 51 », work in progress

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Dispositif « article 51 », work in progress

Publié le 22 février 2025
Par André Borg
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Le maillage officinal se fragilise. Depuis fin 2023, la création d’antennes pharmaceutiques est autorisée, mais est-ce suffisant pour éviter l’hécatombe ? D’autant que le dispositif « article 51 » manque de souplesse pour sécuriser le porteur d’un tel projet.

Créé par l’article 51 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018, puis enrichi par la loi d’accélération et de simplification de l’action publique (Asap) de 2020, et plus récemment par la loi Valletoux, le dispositif « article 51 » promeut, dans un cadre budgétaire restreint, des organisations innovantes et locales faisant appel à des modes de financement et d’organisation inédits. Son ambition est claire : la mutation du système de santé. L’apport de solutions sanitaires, économiques, techniques et juridiques est ainsi recherché lorsque le droit commun est inopérant. Ce dispositif permet aux populations des communes sous denses, dont la dernière officine a fermé sans repreneur, de bénéficier d’une desserte pharmaceutique grâce à la création d’une antenne par le pharmacien titulaire d’un établissement situé dans une commune limitrophe ou de l’officine la plus proche.  

Un dispositif « pertinovant »

Il est « pertinovant », expérimental, palliatif, reproductible si viable, à vocation rurale, doté d’une procédure d’autorisation collaborative et complexe, financé essentiellement par des fonds publics et limité dans le temps (cinq ans au maximum et quelques jours par semaine), l’espace et le nombre (une antenne par titulaire). Cette durée laisse la perspective à un (autre) officinal de réinstaller à terme une pharmacie. L’antenne fait partie de la même entité juridique que l’officine.

En premier lieu, le dispositif déroge aux dispositions du Code de la Sécurité sociale (article L. 162-31-1), concernant notamment les règles de facturation, de tarification et de remboursement. À cela s’ajoute un certain nombre de dispositions du Code de la santé publique, dont celles relatives au lieu d’implantation de la licence, au principe d’indivisibilité de la propriété et de l’exploitation, à l’exercice personnel de l’activité.

Les difficultés à prendre en compte

D’un point de vue juridique, il s’agit, pour le porteur, de monter un projet viable avec le risque, à terme, de se le faire subtiliser par un officinal au travers d’une création ou d’un transfert. En effet, le pharmacien ne peut être propriétaire ou copropriétaire que d’une seule officine. Dans l’hypothèse d’un transfert, la question se pose concernant l’unité géographique, le quartier, le seuil de population à considérer… Et en cas de vente, quel serait le chiffre d’affaires à retenir ? Sans compter que, sur le plan logistique, les capacités de recrutement sont restreintes, car les antennes ne sont ouvertes au public que quelques jours par semaine. Enfin, un bilan comptable annuel consolidé des deux structures, avec une distinction entre les exercices, est exigé. Le chiffre d’affaires de l’antenne doit être intégré dans celui-ci, tout en étant identifiable séparément. Finalement, l’article 51 est complexe à mettre en œuvre. D’autant que le Code de la santé publique autorise des installations par transfert ou regroupement uniquement dans les communes comptant au moins 2 500 habitants. Or, beaucoup de communes dotées d’une officine comptent justement moins de 2500 habitants. Si la pharmacie ferme, la loi empêche toute réouverture. En 2024, 290 pharmacies ont mis la clé sous la porte, ce qui représente plus d’une fermeture par jour ouvrable, selon les données du Gers Data. Il serait donc urgent d’agir, en envisageant déjà d’étendre le champ des dérogations de l’ « article 51 » et en précisant le statut juridique des antennes de pharmacie.

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