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Au nom de la loi de financement
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024 a été promulguée le 27 décembre 2023. Elle comporte de nombreuses mesures concernant les officinaux. Revue de détail de ce qui va évoluer, plus ou moins rapidement, dans l’exercice au comptoir cette année.
Après cinq 49.3 et une dizaine d’articles retoqués par le Conseil constitutionnel, la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2024 a été promulguée fin décembre 2024 pour une application au 1er janvier 2024. PLusieurs dispositions concernent la profession de pharmacien et auront des répercussions sur l’exercice officinal. Beaucoup nécessitent toutefois des textes réglementaires (décrets ou arrêtés) et ne vont pas être mises en œuvre rapidement.
Ces diverses mesures devraient également entraîner tantôt des économies pour l’Assurance maladie, tantôt des dépenses supplémentaires, selon l’étude d’impact remise au Parlement lors du dépôt du projet de loi.
Article 37 : campagne de vaccination contre le papillomavirus humain dans les collèges
L’article instaure la rémunération directement par l’Assurance maladie des professionnels de santé libéraux et des étudiants en 3e cycle des études pharmaceutiques participant à la vaccination dans les collèges.
Application Les tarifs des vacations seront fixés par arrêté.
Impact financier Le coût de la rémunération des professionnels de santé à la vacation est estimé à environ 25 millions d’euros avec les hypothèses suivantes : tarifs de 75 €/h pour les médecins, 48 €/h pour les pharmaciens et les sages-femmes et 37 €/h pour les infirmiers ; deux journées de vacation avec la présence d’un duo médecin/infirmier dans chacun des 7 000 collèges. Le coût total s’élève donc à 12,5 M€ pour une injection et à 25 M€ avec la deuxième injection.
Article 39 : délivrance gratuite sans ordonnance de préservatifs pour tous les jeunes de moins de 26 ans
L’Assurance maladie prend en charge les préservatifs internes et externes inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables (LPP) pour tous les assurés âgés de moins de 26 ans.
Application Un décret doit fixer la quantité de préservatifs délivrés ainsi que les catégories. A noter que la mesure a été mise en œuvre dès le 1er janvier 2023.
Impact financier Selon l’étude d’impact, les premières données de bilan fournies par la Caisse nationale de l’Assurance maladie (Cnam) « montrent le succès du dispositif ». Durant les 21 premières semaines de l’année 2023, les jeunes de moins de 26 ans ont bénéficié de 7,8 millions de préservatifs remboursés (1,543 M€) contre 1,6 million sur la même période en 2022 (0,422 M€).
Sur les 15 premières semaines de 2023, le coût de la mesure peut être évalué à 1,121 M€. Ramené en année pleine, il est estimé à 3,886 M€, sachant qu’il peut évoluer, notamment en fonction de « nouveaux industriels sur la LPP qui proposeraient des tarifs différents ». Ce chiffrage n’inclut pas les préservatifs internes, prévus dans le dispositif mais pas encore intégrés à la LPP. De plus, « la délivrance directe de préservatifs devrait permettre également une économie – qui n’est pas chiffrée – d’une partie des interruptions volontaires de grossesse (IVG), des délivrances de la contraception d’urgence et des soins liés aux infections sexuellement transmissibles ».
Article 40 : remboursement des différentes catégories de protections hygiéniques réutilisables pour toutes les personnes assurées de moins de 26 ans et pour les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire
Application Un décret fixera les catégories de produits pouvant être inscrits sur la liste, les modalités de leur référencement et de leur inscription et le nombre de produits pouvant être délivrés aux personnes assurées ayant leurs menstruations. L’étude d’impact envisage une entrée en vigueur au 1er septembre 2024.
Impact financier Il est estimé que les culottes de règles représenteront 95 % des délivrances et les coupes menstruelles 5 %. L’hypothèse tarifaire moyenne retenue à titre indicatif pour l’estimation du coût est de 19,60 € pour une coupe menstruelle et de 30 € pour une culotte de règles.
Le coût de la mesure est évalué à 94 M€ pour l’année 2024 et à 97 M€ en 2025.
La mesure prévoit la prise en charge d’un pack de trois culottes ou de deux coupes, puis le renouvellement d’une culotte ou d’une coupe par an.
Article 41 : évolution des rendez-vous « prévention » aux âges clés de la vie
Les tranches d’âge des bilans de prévention ont été modifiées : 18-25 ans (et non plus 20- 25 ans), 45-50 ans (et non plus 40-45 ans), 60-65 ans et 70-75 ans.
Application Un arrêté fixera la liste des professionnels pouvant réaliser ces bilans de prévention, ainsi que le montant de leurs tarifs, ces rendez-vous étant pris en charge à 100 % par l’Assurance maladie. Pour autant, une expérimentation a déjà eu lieu dans les Hauts-de-France fin 2023 avec une rémunération à 30 €. La généralisation est prévue à compter de janvier 2024 et le site ameli.fr présente les modalités et les outils dans l’espace professionnel des pharmaciens. Cependant, d’après les premiers retours sur l’expérimentation dont les résultats ne sont pas encore publics, « 30 € pour 45 minutes, ce n’est pas assez pour un médecin et pour un pharmacien ». En outre, peu de professionnels ont participé à ce test.
Impact financier Le coût total de la mesure pour une rémunération de 30 € et avec un taux de recours de 10 % est estimé à 7,624 M€ et, avec un taux de recours de 15 %, à 11,436 M€.
Article 52 : élargissement des compétences des pharmaciens en matière de prescription d’antibiotiques après un test rapide d’orientation diagnostique (Trod) angine ou cystite
Application Les négociations actuelles entre les syndicats de pharmaciens et l’Assurance maladie portent sur la rémunération de cette nouvelle mission. Mais l’article prévoit que, dans l’attente de l’entrée en vigueur de nouvelles dispositions conventionnelles, un arrêté fixe la tarification de la prescription de ces nouveaux actes.
Impact financier dans l’hypothèse d’un recours à 100 %, il est attendu 80 M€ d’économies pour les cystites et les angines par an. « L’estimation de l’impact financier de cette mesure est réalisée avec une hypothèse de 20 % de taux de recours au dispositif en 2024, puis augmentant de 10 % tous les ans jusqu’à 50 % d’ici à 2027 », explique l’étude d’impact.
Article 53 : délivrance à l’unité en officine
La mesure concerne certains médicaments lorsque leur forme pharmaceutique le permet, mais elle prévoit aussi la limitation à la durée du traitement de la délivrance de dispositifs médicaux et des produits de santé autres que les médicaments.
Application Un arrêté établira la liste des médicaments, des dispositifs médicaux et des produits de santé concernés par cette disposition. Un décret fixera « les modalités particulières de conditionnement et d’étiquetage de ces médicaments, de ces dispositifs et de ces produits de santé, d’information de l’assuré et de traçabilité des délivrances ».
Impact financier Cet article étant issu d’un amendement au Sénat, l’étude d’impact n’a pas chiffré une telle mesure.
Article 54 : substitution de tous les biosimilaires
Le pharmacien pourra substituer un médicament biologique de référence prescrit par un médecin par son biosimilaire, deux ans après la commercialisation du premier biosimilaire du même groupe.
Application Un arrêté doit autoriser le pharmacien à remplacer un médicament de référence par un médicament biologique similaire, « sauf avis contraire de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé publié avant la fin de cette période », précise l’article. L’avis de l’agence peut comprendre, le cas échéant, des conditions de substitution et d’information et des mises en garde de nature à assurer la continuité du traitement en vue du changement éventuel.
Impact financier Pas de chiffrage, car l’article est issu d’un amendement du gouvernement.
Article 59 : report de la mesure prévue dans la LFSS 2023 relative à l’intégration des produits de contraste dans les forfaits techniques en imagerie médicale
Application 1er mars 2024. Un décret paru le 2 janvier 2024 acte la distribution des produits de contraste hors officine.
Impact financier Pas de chiffrage du gouvernement.
Article 71 : préparations officinales spéciales dans le cadre du plan blanc
L’article crée un statut de préparations officinales spéciales. Celles-ci sont réalisées selon une monographie publiée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et ne peuvent être délivrées que sur prescription médicale.
Application C’est un décret qui autorisera de telles préparations, à titre exceptionnel, « pour faire face à la rupture de stock d’un médicament d’intérêt thérapeutique majeur ou à l’arrêt de sa commercialisation ou pour faire face à une menace ou à une crise sanitaire grave et pour garantir la qualité et la sécurité d’utilisation des produits ». Un arrêté fixera le tarif de remboursement par l’Assurance maladie et le prix de vente.
Impact financier Le coût du remboursement des préparations officinales spéciales par l’Assurance maladie est évalué à 1 M€. Ce chiffrage s’appuie sur une estimation annuelle de 180 000 préparations (nombre constaté en 2022-2023 pour l’amoxicilline).
Article 72 : renforcement des leviers d’épargne de médicaments en cas de rupture d’approvisionnement
L’article prévoit deux mesures dans cette situation : recours à des ordonnances conditionnelles avec réalisation d’un Trod et délivrance à l’unité (DAU) de certains médicaments, notamment des antibiotiques.
Application Un arrêté permettra de mettre en œuvre ces deux dispositions.
Impact financier L’économie attendue avec l’obligation de DAU d’amoxicilline et d’amoxicilline/acide clavulanique est estimée à environ 6 M€.
Concernant les ordonnances conditionnelles, elles entraîneraient une dépense supplémentaire globale de 3,3 M€ en prenant en compte la réalisation des Trod en officine (6,50 € par test) et les économies réalisées grâce à la non-prescription et la non-délivrance d’antibiotiques.
Article 73 : recours obligatoire à un formulaire pour vérifier la pertinence des prescriptions de médicaments à fort enjeu de santé publique ou financier
L’article stipule que « ce document est à présenter au pharmacien ou, le cas échéant, à un autre professionnel de santé en vue de la prise en charge ou du remboursement par l’Assurance maladie du produit de santé et de ses prestations éventuellement associées ».
Application L’article ne prévoit pas de textes réglementaires.
Impact financier Pas de chiffrage, l’article ayant été ajouté par le Sénat et retenu par l’Assemblée nationale.
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![Bilans de prévention : pas si simples !](https://www.lemoniteurdespharmacies.fr/wp-content/uploads/2024/07/article-defaults-visuel-680x320.jpg)