Socioprofessionnel Réservé aux abonnés

Antalgiques derrière le comptoir : mort du libre accès ?

Publié le 12 octobre 2019
Par Yolande Gauthier
Mettre en favori

L ’annonce a fait sensation jeudi 3 octobre aux aurores : l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) dévoilait son souhait de ne plus voir les médicaments per os à base de paracétamol, d’ibuprofène et d’acide acétylsalicylique disponibles en accès direct. Retour derrière le comptoir donc et surtout, pour l’Association française de l’industrie pharmaceutique pour une automédication responsable (Afipa), retour 10 ans en arrière : «   Alors que l’ANSM s’était inscrite dans une logique de construction avec l’Afipa au service des pharmaciens, ce revers est un camouflet pour les pharmacies   », s’indigne-t-elle. Bien au contraire, estime l’ANSM, arguant de sa volonté de renforcer et valoriser le rôle de conseil du pharmacien. «   Cette mesure renforce la possibilité d’échange avec le pharmacien, qui met tout en œuvre pour guider le patient et lui conseiller le meilleur médicament adapté à sa situation   », souligne le Dr Philippe Vella, directeur des médicaments antalgiques à l’agence. Après le pictogramme sur les boîtes de paracétamol, un pas de plus est donc franchi vers la sécurisation de ces médicaments qui, mal utilisés, peuvent être à l’origine de lésions hépatiques ou, pour l’ibuprofène, de complications infectieuses graves et rénales.

Du côté des laboratoires, la circonspection est de mise. Sanofi «   veillera à ce que les mesures les plus appropriées soient prises afin de limiter les risques liés à un surdosage du paracétamol et des AINS   ». Upsa «   soutient toute mesure de santé publique visant à renforcer la sécurité des patients. A ce titre, nous considérons que le conseil du pharmacien au comptoir est essentiel au bon usage du médicament.   » Pascal Brossard, directeur général de Zambon, a un avis plus tranché. Pour lui, cette mesure ne résoudra pas le manque de connaissance des patients et porte un coup sensible à l’automédication. «   Retirons tout ! Mettons tout derrière le comptoir, y compris les compléments alimentaires, les dispositifs médicaux et même certains cosmétiques !   », ironise-t-il. Pour l’instant, l’ANSM ne cible pas d’autres molécules de la liste des médicaments en libre accès. Mais après la radiation des substituts nicotiniques pour cause de remboursement, puis celle des antalgiques pour renforcer leur bon usage, le concept même de l’automédication « en libre service » aurait-il du plomb dans l’aile ? Réponse en janvier 2020, date à laquelle l’ANSM espère l’entrée en vigueur de sa mesure. §

Publicité