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Allemagne : Les pharmaciens demandent grâce
Dans ce laboratoire expérimental européen des réformes de santé que constitue l’Allemagne, les pharmaciens innovent pour se défendre et s’investissent dans la maîtrise des dépenses. Pas suffisant pour éviter les coups. Lors de leur congrès, le week-end dernier, la profession a été déclarée en danger.
Jamais réforme de la santé n’aura autant mobilisé les pharmaciens allemands. Brandissant, lors de leur congrès annuel du 23 septembre, des panneaux « Attention danger ! », ils ont sommé Berlin de stopper immédiatement les travaux de la loi de réforme de l’assurance maladie (une par an ces derniers temps…), cherchant à tirer parti de la discorde au sein du gouvernement de Angela Merkel.
Les pharmacies rackettées.
Selon les plans du gouvernement, les pharmaciens seraient autorisés à exonérer leurs clients de ticket modérateur. Un instrument marketing qui renforcerait le dumping entre les officines dans un pays où l’installation est libre.
Le législateur prévoit aussi d’obliger chaque pharmacien à négocier des rabais auprès de chacun des fabricants. Si les quelque 21 500 pharmaciens allemands ne parviennent pas ainsi à « économiser » à hauteur de 500 millions d’euros par an, il leur reviendra de payer le complément sur leurs propres deniers. D’après Hermann Keller, président de la DAV, la fédération des pharmaciens allemands, ce poids pourrait alors atteindre 50 à 70 000 euros par an par officine, soit 80 % du revenu d’un titulaire !
Jusqu’à présent, les pharmaciens allemands ont résisté aux assauts du législateur contre leur monopole. La mise en service de leurs propres sites web et le portage de médicaments à domicile leur ont permis de contenir la vente sur Internet (1) à 1,5 % de parts de marché.
Par ailleurs, des mesures successives tels la substitution obligatoire (par un générique ou par un médicament situé dans le tiers le moins cher de la classe), le déremboursement complet des OTC ainsi que l’introduction d’un prix fixe de 8,10 euros (2) par boîte ont contribué depuis deux ans à ancrer les titulaires dans leur rôle de conseil. « Le forfait par boîte est un signal positif et va dans le sens d’une rémunération type honoraires pour le service rendu, la prestation de conseil et la documentation (reporting), commente Magdalene Linz, présidente de l’Ordre fédéral. La suppression des rabais en nature nous a confortés dans la reconnaissance de notre statut de professionnel de santé. Aujourd’hui, le gouvernement veut faire machine arrière : réintroduire les avantages en nature et nous soumettre à des négociations avec les fabricants. Nous redevenons des commerçants, dépendants de l’industrie. »
Paris observe Berlin.
Les pharmaciens allemands proposent maintenant aux pouvoirs publics qu’on les laisse négocier directement avec les caisses des « packages » destinés à certains groupes de patients. « Ces modèles, comme ceux du Canada avec les malades chroniques, prouvent que le pharmacien peut générer des économies », expose Magdalene Linz.
Par ailleurs, le spectre des chaînes de pharmacies se précise chaque jour davantage. Doc Morris, en Sarre (3), appuyé par les politiques et par les caisses, est un exemple de menace pour le monopole. Les officinaux ont certes gagné une bataille judiciaire en obtenant la fermeture de la pharmacie Doc Morris. Mais ce dernier ainsi que le ministre sarrois de la Santé ont décidé de faire appel, arguant du droit européen.
Espérons que ce type de raisonnement ne franchisse pas le Rhin, malgré les voyages répétés des politiques français en Allemagne pour étudier ces « réformes ».
(1) En décembre 2005, 1 420 officinaux détenaient une autorisation de vente par Internet.
(2) Dont 2 euros de rabais obligatoire accordés aux caisses.
(3) En juillet dernier, le gouvernement sarrois autorisait Doc Morris à ouvrir une officine à son enseigne. Suite aux plaintes des pharmaciens riverains, le tribunal administratif de Sarrelouis en a ordonné la fermeture le 13 septembre dernier.
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