Thèse de doctorat : Un pas en avant vers l’« éducation thérapeutique »

Il y a ceux qui disent « y a qu’à-faut qu’on » et ceux qui se retroussent les manches et qui s’y frottent. Cinq étudiantes de l’université de Grenoble ont choisi comme sujet de thèse l’étude de la faisabilité de l’« éducation thérapeutique » à l’officine. Car si tout pharmacien fait du conseil au comptoir, bien peu se lancent dans une véritable démarche d’éducation.

De 20 à 45 minutes par séance.

« Il faut compter 45 minutes pour la première séance de « diagnostic » et 20 à 40 minutes pour les séances suivantes », précisent les cinq thésardes, qui ont travaillé chacune sur un thème : migraine, AVK, insuffisance cardiaque, asthme/BPCO et diabète de type II. Le « diagnostic », c’est celui des connaissances du patient : qu’a-t-il compris de sa pathologie ? de son traitement ? comment le gère-t-il au quotidien ? connaît-il les signes d’alerte qui nécessitent d’appeler le médecin ? de se rendre aux urgences ? Pour effectuer ce diagnostic et expliquer la pathologie au patient, tout est permis : du modèle de poumon construit avec des bouteilles en plastique et des ballons de baudruche, aux gommettes à coller sur une cible pour identifier l’objectif glycémique avant et après le repas…

« A la fin de la séance de diagnostic et en fonction de celui-ci, nous fixions avec le patient des objectifs à atteindre pour la séance suivante : faire un calendrier des crises de migraine, mesurer et noter le débit expiratoire de pointe régulièrement, savoir comment réagir en cas d’hypoglycémie ou d’hyperglycémie, gérer les signes d’alerte d’une insuffisance cardiaque au quotidien, adapter son alimentation en cas de traitement par AVK, repérer les signes précurseurs d’un risque hémorragique… »

95 euros par patient minimum.

L’idée sous-jacente est de mener les patients vers plus d’autonomie. En moyenne pendant l’étude, chaque patient a reçu trois séances d’éducation thérapeutique. 95 % d’entre eux en sont satisfaits. Pour autant, est-ce réellement faisable à l’officine ? Il existe trois points d’achoppement mis en évidence par le travail des cinq étudiantes grenobloises. Premièrement, l’éducation thérapeutique ne s’improvise pas. Cela nécessite une double formation, à la fois pointue sur la pathologie mais aussi sur les techniques de communication. Deuxièmement, cette nouvelle mission exige un espace de confidentialité. Troisièmement enfin, c’est un investissement considérable en temps, non rémunéré dans la structure actuelle, estimé par les étudiantes à un équivalent minimum de 95 euros par patient.

« La collaboration multidisciplinaire est indispensable pour développer un suivi éducatif cohérent. On pourrait envisager une labellisation de cet acte pharmaceutique pour des pharmaciens qualifiés, acte qui pourrait être prescrit par le médecin », concluent les cinq étudiantes.