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Quand le coronavirus resserre les liens

Publié le 4 juillet 2020
Par Adrien Renaud
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Valérie Caron est infirmière libérale à Lamorlaye, ville de l’Oise dont elle est par ailleurs adjointe au maire. Pour elle, la crise du coronavirus aura été éprouvante, mais elle aura au moins eu une vertu : faire émerger une réelle coopération entre les soignants du territoire.

Février 2020. La France est encore préoccupée par la réforme des retraites et par les élections municipales qui approchent, mais l’Oise vit déjà la réalité qui sera celle du pays pendant les mois suivants. Un premier foyer de coronavirus est identifié à Crépy-en-Valois, et des cas sont détectés dans les cités voisines de Creil, Vaumoise ou encore Lamorlaye. En ces temps d’incertitude, Valérie Caron, adjointe au maire de cette dernière ville de 9 000 habitants, en charge notamment de la qualité de vie, de l’environnement et de la santé et infirmière libérale, est sur tous les fronts.

« Ce qui est difficile à gérer, c’est la panique des gens », expliquait-elle alors, pointant le peu d’informations disponibles. Quelques mois plus tard, à l’heure des premiers bilans, elle estime que la ville s’en est plutôt bien tirée. « Le fait d’avoir été un cluster avant les autres nous a peut-être servi, et quand le confinement est arrivé, nous étions préparés », analyse-t-elle aujourd’hui.

« On a tourné sur des FFP2 périmés »

Bien sûr, tout n’a pas été facile. « On a eu quelques manques de matériel, mais heureusement des couturières se sont organisées et ont fabriqué des blouses et des masques », se félicite-t-elle, citant notamment le collectif « Lamorlaye Bienveillance » qui a été très actif pendant cette période. Ce qui n’empêche pas son cabinet d’avoir « tourné sur des FFP2 périmés », précise l’adjointe au maire.

Comme beaucoup de ses consœurs libérales, Valérie Caron a depuis le début de l’épidémie abandonné les soins au cabinet, et elle s’est coordonnée avec son associée. « On a fait deux tournées, dont l’une avec seulement les malades Covid », explique-t-elle. Globalement, la charge de travail est selon elle restée stable, mais elle s’est transformée : certains soins ont disparu, mais il y a eu plus de soins lourds, auxquels il a fallu ajouter tout le travail lié à la mise sur pieds d’une cellule Covid entre les libéraux du secteur.

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Un mal pour un bien

Valérie Caron remarque cependant que ce projet, ainsi que l’ensemble de la gestion de la crise, ont permis de dynamiser les collaborations entre les professionnels de santé de Lamorlaye. « Nous avons fait un groupe WhatsApp avec les infirmiers, les médecins, etc., et cette période nous a permis de resserrer les liens », note-t-elle. Voilà qui a eu un effet direct sur un projet de maison de santé pluriprofessionnelle (MSP) qui était dans les cartons de la mairie et de certains soignants, et qui peinait à démarrer.

« Nous devions trouver des médecins, et tout le monde était un peu frileux, se souvient l’infirmière libérale . Avant la crise, nous étions cinq ou six personnes dans le projet, et maintenant, nous sommes seize, dont trois médecins qui sont prêts à nous suivre. » Pour elle, pas de doute, ce sont les contacts liés à la faveur de la gestion de la pandémie qui ont « changé la donne ».

Reste que Valérie Caron ne voit pas tout à fait le futur en rose. « Nous craignons une grosse activité de soins post-opératoires cet été, soupire-t-elle. Les gens ont retardé leurs interventions, mais cela ne durera pas indéfiniment. » Et il y a la crainte de la fameuse deuxième vague Covid. « On va continuer à garder nos stocks de FFP2 et de blouses, on ne sait pas comment cela va se passer », glisse-t-elle. Une infirmière libérale avertie en vaut deux.