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Pharmacien régulateur, une orientation possible

Publié le 1 avril 2023
Par Matthieu Vandendriessche
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La pharmacie comme « gare de triage » qui oriente son patient dans les soins de premiers recours : c’est l’objet de l’expérimentation Osys lancée en Bretagne en 2021. Elle entre dans sa deuxième phase et s’étend à d’autres pharmacies.

 

Osys est l’acronyme d’Orientation dans le système de soins. Cette expérimentation menée depuis l’automne 2021 en Bretagne s’appuie sur le modèle de l’article 51* de la loi de financement de la Sécurité sociale de 2018. Elle permet aux pharmacies situées dans des zones en sous-densité médicale d’orienter vers une consultation médicale, un service d’urgence ou de s’en tenir au conseil officinal dans 13 situations de premier recours bien définies : douleur à la miction, rhinite, céphalée, diarrhée, conjonctivite, plaie ou brûlure, etc. 

 

En pratique, l’orientation des patients est encadrée et sécurisée par des arbres décisionnels auxquels les participants ont été formés. Les unions régionales des professionnels de santé (URPS) des pharmaciens et des médecins libéraux sont parties prenantes. Trois médecins généralistes ont ainsi été mobilisés pour bâtir les protocoles avec les officines. Avec l’accord du patient, le médecin traitant est informé de l’avancement. Un budget de 400 000 € est alloué à ce dispositif. Le pharmacien est rémunéré 15 € pour chaque orientation effectuée.

 

Au terme de sa première phase, cette expérimentation livre quelques résultats. Tout d’abord, sur une cinquantaine d’officines embarquées, 37 ont été réellement actives dans le triage. Les autres n’ont pas pu suivre la formation d’une journée en présentiel imposée par le cahier des charges du projet (10 %) et, en majorité, elles manquaient tout simplement de temps. « Il fallait aussi pouvoir mettre à disposition un espace de confidentialité, qui a été fortement sollicité ces derniers temps », ajoute Martine Costedoat, directrice générale de Pharma Système Qualité (PHSQ), l’association à l’origine du projet.

 

Parmi les 37 pharmacies engagées, une dizaine a assuré les trois quarts des triages. Ceux-ci ont été au nombre de 1 500 en 18 mois et ont concerné principalement six situations : plaies simples, piqûres de tiques, douleurs mictionnelles, brûlures du premier degré, angine et conjonctivite. Dans le cas des piqûres de tiques, une dérogation a été accordée au pharmacien pour lui permettre d’enlever la tique et d’effectuer un suivi de l’évolution de la morsure jusqu’au 21e jour. « D’autres situations, dont trois qui concernent les troubles digestifs (diarrhée, constipation, dyspepsie fonctionnelle), ont eu tendance à être prises en compte dans le cadre d’une conseil officinal traditionnel », explique Martine Costedoat. 

De nouveaux pharmaciens dans le dispositif

 

De manière générale, les trois quarts des patients qui envisageaient de se rendre aux urgences ont été principalement pris en charge au cabinet médical (37 %) ou à l’officine (38 %). Inversement, le quart des situations pour lesquelles les patients sollicitaient un recours au comptoir en automédication ont donné lieu à une orientation vers un médecin (20 %) ou les urgences (5 %).

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L’expérimentation se poursuit dans une seconde phase prévue pour durer 12 mois. Elle doit intégrer une quarantaine de nouvelles pharmacies, soit un total de 74 officines en Bretagne (après le départ de 20 participantes). Pas moins de six régions se sont montrées intéressées par l’opération. Trois seront finalement désignées pour élargir le dispositif. « La poursuite de ce projet doit nous permettre de renforcer l’interprofessionnalité et la communication auprès des médecins. Les officines qui procèdent au triage doivent en effet être facilitatrices d’accès à la consultation médicale. Cela sous-entend que les médecins aient suffisamment confiance dans le triage et dans la pertinence de la consultation », appuie la directrice générale de PHSQ.

  • * En référence à l’article 51 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018 qui autorise ce modèle de nouvelles expérimentations dans le domaine de la santé.