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Médecins, pharmaciens et infirmiers : ont-ils vraiment envie de travailler ensemble ?

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Médecins, pharmaciens et infirmiers : ont-ils vraiment envie de travailler ensemble ?

Publié le 2 avril 2024
Par Magali Clausener
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L’interprofessionnalité est-elle l’avenir de la pharmacie ? Comment peut-elle s’inscrire dans l’exercice des professionnels de santé sur le terrain ? Des questions abordées lors d’un débat organisé par Le Moniteur des pharmacies au salon PharmagoraPlus, qui s’est déroulé les 9 et 10 mars à Paris.

Création de 4 000 maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) d’ici 2027, couverture de tout le territoire français par des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) fin 2023 : l’exercice coordonné se déploie rapidement en France. Mais comment cela se passe-t-il sur le terrain ?

« Le pharmacien est multifonction, multimodal. Si notre cœur de métier reste l’expertise du médicament, notre présence sur l’ensemble du territoire fait du pharmacien le premier hub santé pour les patients. Nous avons pour mission d’accueillir les patients en termes d’accompagnement, de dispensation, de prévention et d’optimisation du parcours de soins », a expliqué Eric Myon, pharmacien titulaire, président de la CPTS Paris 8 et secrétaire général de l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF), lors du débat « Pharmaciens, médecins, infirmiers : ça passe ou ça clash ? ». Problèmes communs de l’ensemble de ces professionnels : les pénuries mais aussi la démographie médicale en baisse et l’augmentation du nombre de patients chroniques. Dans ces conditions, il paraît difficile voire impossible de bien s’occuper des personnes dans « un modèle de 30 patients par jour », note Yohan Saynac, médecin généraliste à Pantin (Seine-Saint-Denis), co-président de la CPTS de Pantin, délégué régional Ile-de-France de MG France,

Comment bien s’occuper de 30 patients par jour ?

745 000 patients sont visités tous les jours à domicile par un Idel. « Nous ne sommes pas des sous-médecins, nous ne serons jamais médecins, en revanche nos prérogatives sont de nature à faire gagner du temps médical utile. Dans un contexte de désertification médicale, ce gain de temps médical pourra apporter des garanties plus importantes de pérennité à notre système de santé », a observé Daniel Guillerm, président de la Fédération nationale des infirmiers (FNI), rappelant le maillage est « serré » des Idel et le caractère essentiel de la profession pour assurer le « maintien à domicile voulue par le Gouvernement ».

Partage des compétences, oui mais

Le partage des compétences prôné par le président de la FNI n’est pas forcément plébiscité par les médecins. Ainsi, si les compétences des Idel en matière de plaies sont reconnues par le Dr Saynac, celui-ci estime que la vaccination en particulier par les pharmaciens ne fait pas gagner du temps aux médecins, d’autant que ces derniers ne savent pas toujours si le patient a été vacciné par un autre professionnel de santé. « Le partage des compétences suppose que l’on sache qui fait quoi et que cela soit tracé. Et c’est l’un des problèmes que nous avons. S’il y a une perte d’informations, cela peut avoir des répercussions pour le patient », a mis en avant le médecin généraliste.

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Encore des batailles corporatistes

Un argument qui peut se comprendre mais derrière les discours des trois intervenants, les corporatismes se font sentir. Les infirmiers rechignent à voir les pharmaciens se rendre au domicile des patients a fortioripour vacciner. Daniel Guillerm a d’ailleurs revendiqué l’importance pour les infirmiers d’avoir des vaccins à leur cabinet. S’il reconnait les expertises des pharmaciens et des infirmiers, Yohan Saynac a néanmoins laissé entendre que leur compétences pouvait difficilement être élargie. Du chemin reste à parcourir pour développer l’interprofessionnalité. Néanmoins, les trois professions du triptyque socle -médecins, pharmacien, infirmier- « ont le pouvoir de représenter un levier systémique de réorganisation du système de santé », a commenté Daniel Guillerm. Et d’ajouter : « Il faut qu’on responsabilise ce triptyque socle, qu’on fluidifie les relations entre ces professions Je pense que l’espace numérique de santé va permettre aux médecins d’avoir accès aux informations qu’ils demandent ».