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Le MAD en pleine mutation
La France vieillit. Le nombre croissant de personnes en perte d’autonomie crée de nouveaux besoins. Le marché du maintien à domicile augmente au-delà du remboursable. Une opportunité pour l’officine !
Derrière ces trois lettres, MAD, se cache une réalité bien disparate. Le marché du maintien à domicile va du lit médicalisé à l’ouvre-boîte ergonomique, en passant par la machine anti-apnée du sommeil et le portage des repas. Il comprend tout ce qui aide une personne, après une opération, limitée par la vieillesse ou une maladie, à rester vivre chez elle. Soit du remboursable et du confort. Dans quelles conditions l’officine peutelle y trouver un levier de croissance ? Ces produits et services sont vendus en pharmacies, en magasins de matériel médical (Bastide, Cap Vital…), en supermarchés, via les prestataires de soin à domicile comme Orkyn… « La pharmacie doit représenter environ 15 % du marché total », évalue Gilles Riha, directeur général du prestataire de services de MAD Oxypharm (Astera). « On estime qu’il y a cinq pharmacies pour un revendeur d’un autre type », indique de son côté Romain Watremez, directeur commercial d’Alcura France. Dans cette nébuleuse multi-circuits dont le chiffre d’affaires n’est pas analysé dans sa globalité comme pour la parapharmacie par exemple, certains segments sont investis par des officines comme la location de lits, les pansements, l’incontinence, l’orthopédie… D’autres très peu, à l’image des aides respiratoires, des perfusions, du ménage des logements… Or les plus de 60 ans seront 20 millions en France en 2030. « Actuellement estimé à 12 Md€, ce marché est en devenir », résume Hervé Jouves, à la tête du réseau de pharmacies Lafayette Conseil. Et déjà, il est en pleine mutation du point de vue des consommateurs. « Depuis une quinzaine d’années, on assiste à un virage. Les personnes qui partent à la retraite anticipent la vieillesse. Ils s’installent souvent dans des maisons de plain-pied ou dans un appartement, s’équipent de WC suspendus, d’un lit à tête relevable… », remarque Romain Watremez. « Aujourd’hui, le premier passage en pharmacie pour du MAD intervient souvent après une chute, quand les proches se trouvent face à une difficulté » poursuit-il. C’est ainsi qu’Alcura a développé des formations pour les aidants et des diagnostics de domicile réalisés en binôme avec le pharmacien.
LES ATOUTS de la pharmacie
De fait, l’officine a des atouts pour répondre aux besoins des personnes en perte d’autonomie. Elle a la confiance des Français. Elle est proche de tous avec un maillage de près de 22 000 magasins. Le pharmacien est un professionnel de santé. Il a une vision globale du patient et peut gérer l’administratif concernant les remboursements. Malgré cela, Lafayette Conseil a fait un autre choix. Dans sa logique d’écosystème de santé, après avoir déployé un réseau de pharmacies et d’optique, le groupe lance l’enseigne Lafayette Médical. Hors des officines donc. « C’est un vrai métier », indique Hervé Jouves pour expliquer sa stratégie. Après un an de test, le dirigeant compte déployer sa chaine dans 50 villes d’ici à trois ans. Preuve qu’il croit dans le potentiel du marché. Cette enseigne sera aussi l’occasion pour le réseau à la croix occitane, d’investir en publicité – stratégie plus compliquée pour les officines.
LES CLÉS de la réussite
Dans une pharmacie, la communication est capitale pour faire connaitre son activité en MAD, car elle y est encore inhabituelle. « Il faut absolument montrer ce qu’on fait dans la surface de vente et communiquer auprès de son environnement », conseille Thierry Truschel vice-président communication du Syndicat des prestataires de dispositifs médicaux (UNPDM) et directeur général du fournisseur de matériel médical Providom (Haartman). Cela passe par des affiches, des écrans, et même des corners, comme proposé par Alcura par exemple. A l’extérieur, il s’agit d’entretenir un bon relationnel avec les prescripteurs : les infirmières, les établissements hospitaliers, etc. A la Pharmacie du Village Santé à Montpellier (lire encadré), la titulaire Marie-Hélène Orzalesi et son mari Marc assistent au repas mensuel des infirmières locales quand ils ont des nouveautés à leur présenter.
Avant la communication, la priorité pour se donner les chances de succès passe par « l’implication du titulaire », insiste Thierry Truschel. Le MAD doit faire partie intégrante de la stratégie. Cela implique la formation de l’équipe. Dans le magasin, l’allocation d’une certaine surface à ce rayon est primordiale. « Au minimum 15 m2 », poursuit-il. Il existe des alternatives comme les catalogues et des bornes. « Nous incitons à la mise en place d’un comptoir dédié aux services à l’instar des caisses rapides en parapharmacie », précise Romain Watremez d’Alcura, société de Walgreens Boots Alliance. Autre clé de la réussite, selon les experts, les officines se doivent de cibler quelques services. Ils faciliteront la vente ou la location de matériel. Des exemples ? Le dépistage de pathologies (comme l’âge des artères chez Alcura) pour détecter d’éventuels problèmes de santé ou de mobilité des clients ; le diagnostic de domicile, la livraison… Ces solutions peuvent être proposées par l’équipe de l’officine (prévoir un véhicule) ou un de ces partenaires. Ainsi les clients d’Oxypharm peuvent recommander l’ADMR, son partenaire d’aide à domicile. L’importance de ces mises en relation n’a pas échappé à Lafayette. Le réseau a noué quantité de partenariats pour proposer une offre à 360°. Il s’est lié à la société de portage de repas Les Menus Services, au diagnostiqueur d’habitat Domus Prévention, à Alcura… Plus que jamais, sur ce marché en plein essor et très convoité, l’officinal a intérêt à jouer la carte de l’interprofessionnalité.
MerchandisingComme chez Ikea ?
Exit l’appartement reconstitué comme chez Ikea, place à un rayon classique. La Pharmavie du Village Santé à Montpellier a repensé ses 60 m2 alloués au MAD. Objectif : faciliter la prise en main d’un maximum de produits. Pour doper les ventes, Marc Orzalesi, le mari de la titulaire Marie-Hélène, a aussi rédigé des fiches comparatives. Dessus, quelques modèles de déambulateurs, de cannes, ou de rollators… présentés avec une photo et les caractéristiques des produits. Après un conseil, l’équipe imprime un flyer en couleur pour le client. Par ailleurs, deux préparatrices ont été formées, notamment chez le fournisseur Kimed. Un comptoir multimédia permet également au staff de surfer sur internet avec les patients, pour trouver les solutions adaptées à leur besoin. « Je ne m’inquiète pas pour les prix trouvés, nous sommes moins chers ! », explique Marc Orzalesi. Résultat, rien que chez Kimed, les achats sont passés de 42 k€ à 54 k€ entre 2016 et 2017.
L’ESSENTIEL
→ La population vieillit et l’etat encourage les seniors à rester chez eux : le MAD a un fort potentiel.
→ Le marché du MAD est éclaté tant par le type de produits et services inclus, que par ses circuits de distribution.
→ En officine, le MAD nécessite un espace pour présenter les produits, un personnel formé dédié et une communication importante.
→ Le MAD permet le suivi des patients au-delà de l’ordonnance, via les objets de confort, les services à domicile…
2,3 MILLIONS, C’EST LE NOMBRE
de personnes âgées dépendantes estimé à l’horizon 2060. Soit presque le double qu’en 2012 ! Leur prise en charge par les pouvoirs publics et les ménages est estimée à 34,2 Md€.
SORTIE D’HÔPITAL
Faut-il de nouvelles habitudes ?
Les pharmaciens n’ont pas le réflexe d’aller rencontrer les équipes hospitalières pour présenter leur offre de MAD. Résultat, ils sont court-circuités par les autres revendeurs et prestataires, meilleurs communicants, vers qui les établissements orientent leurs patients. Comment y remédier ? Inciter son partenaire, le fournisseur de MAD, à valoriser le savoir-faire de ses officines clientes auprès des hôpitaux, réagir face aux patients qui mentionnent une hospitalisation au comptoir, présenter son offre notamment aux généralistes, spécialistes, infirmiers et aux masseurs-kinésithérapeutes alentour… En espérant un retour d’ascenseur !
60 % C’EST LA PART
de marché des dispositifs médicaux à domicile vendus par l’officine.
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