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Le déclic québécois

Publié le 8 septembre 2001
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Interne en pharmacie en troisième année, Marion Filippi est partie un mois en stage à l’hôpital Victoria de Montréal. Elle en revient séduite par un système où les études sont très orientées vers la pratique.

Pendant un mois j’ai travaillé comme résidente. Au Canada, c’est l’équivalent d’un interne dans un hôpital français. » Etudiante en 3e année d’internat à la faculté de Grenoble, Marion Filippi est partie cet été en stage dans le service de gériatrie de l’hôpital royal Victoria de Montréal. Une expérience marquante : « Ici, les pharmaciens ne sont pas responsables des dispositifs médicaux, de la stérilisation, des achats de médicaments ou de la pharmacovigilance. Il n’existe pas de pharmacie hospitalière centrale mais des pharmacies satellites dans les services, auxquelles sont rattachés des préparateurs. Ici le pharmacien est au chevet du patient et pratique les soins pharmaceutiques. »

Dans le service de gériatrie, qui comporte une trentaine de lits, Marion Filippi a eu l’occasion de suivre une dizaine de malades tout en étant encadrée par la pharmacienne senior, Louise Mallet. « Quand un patient était hospitalisé, j’étais chargée de faire son « histoire médicamenteuse », c’est-à-dire d’établir ses antécédents médicaux, les traitements en cours et les diagnostics précédents… Je prenais aussi contact avec le pharmacien d’officine pour intégrer ces données dans le dossier médical. En gériatrie, il est important de connaître tous les médicaments qu’utilise le patient car beaucoup sont inappropriés chez la personne âgée – des problèmes reliés à la pharmacothérapie, auxquels le résident est préparé à l’université (le patient reçoit un médicament différent de celui qu’il lui faut ; il reçoit le bon médicament mais à posologie trop élevée…) A la sortie de l’hôpital, l’officinal et le médecin traitant sont informés des changements effectués. »

« Le contact avec le patient est fréquent, s’enthousiasme Marion Filippi. On va le voir tous les jours pour suivre son évolution, les effets indésirables éventuels ou le bénéfice des modifications effectuées.» A l’hôpital, le pharmacien est intégré dans l’équipe médicale qu’il rencontre quotidiennement. Il a, vis-à-vis du patient, une vraie responsabilité comme le médecin. Il est chargé de mettre en place un plan de soins pharmaceutiques qui prévoit un programme d’automédication et des visites, pour vérifier si les soins prévus à l’hôpital sont applicables par le patient une fois à son domicile.

Ce n’est pas par hasard que Marion Filippi a choisi Montréal. L’étudiante grenobloise y avait déjà effectué sa 4e année d’études dans le cadre d’un échange universitaire et visité quelques hôpitaux. Ce projet de retourner au Québec pour exercer la pharmacie clinique est né après la visite de Louise Mallet, venue donner un cours à Grenoble dans le cadre d’une UV de pharmacie clinique. « L’enseignement universitaire est très orienté vers la pratique car les professeurs sont eux-mêmes cliniciens. Durant l’année passée à la faculté de Montréal, j’ai découvert un enseignement fondé sur l’étude de cas cliniques réels, ce que je n’aurais pu faire en France. Les études privilégient la pharmacologie, la physiopathologie, la microbiologie, la démarche pharmaceutique… On n’y trouve pas d’enseignement de mycologie, ni de botanique et peu de galénique, de biologie, de chimie… »

Séduite, Marion a donc voulu parfaire sa connaissance du système hospitalier québécois en retournant un mois en stage. Une durée trop brève à son goût : « Mais je ne bénéficiais que de 10 000 francs, grâce à une bourse créée par les anciens internes de la faculté de Grenoble. »

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Marion Filippi aimerait aujourd’hui développer ces idées en France, voire aider à modifier l’enseignement et l’exercice de la pharmacie clinique. « Pour évoluer vers les soins pharmaceutiques comme à Montréal, il faudrait sans doute une réforme plus profonde des études, que les pharmaciens soient présents dans les unités de soins, donc plus disponibles et dialoguent davantage avec le patient. »