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- La longue marche
Contrôle des prescriptions, bon usage du médicament, pharmacovigilance, prolongement des campagnes de santé publique, prévention, conseil… Comment ces missions, quotidiennes, peuvent-elles être mises en évidence, mieux reconnues, juridiquement opposables et rémunérées ? Autant de questions fondamentales débattues lors du débat TV consacré à « l’acte pharmaceutique » et organisé par IMS Health. « Le pharmacien est trop discret dans son service rendu, il ne fait que lire l’ordonnance et tendre une boîte, estime Jean Calop, professeur, responsable du département pharmacie au CHU de Grenoble. Aujourd’hui, il doit donner de la valeur à l’ordonnance, c’est le but de l’opinion pharmaceutique. C’est en montrant la valeur ajoutée de sa dispensation et plus généralement de sa pratique professionnelle que le pharmacien pourra être rémunéré et préserver son existence. »
« L’opinion pharmaceutique c’est avant tout de la lisibilité, de la mémoire, de la traçabilité et de l’opposabilité, poursuit Henri Lepage, vice-président du conseil central de la section A de l’Ordre. Mais la seule manière de faire de l’opinion pharmaceutique de façon continue, c’est de constituer un dossier médical où le pharmacien pourra connaître l’historique médicamenteux de son patient et y consigner son avis motivé. » Et seulement après avoir construit un tel dossier médical, on pourra alors évoquer l’aspect rémunération.
Les paradoxes de l’opinion pharmaceutique
Le groupement IFMO a également interpellé les officinaux sur ce sujet lors d’une conférence au titre accrocheur : « Pharmaciens, comment vous rendre indispensables ? » Jean Luc Bury a rappelé les fondements du métier… et son paradoxe : le rôle d’acteur de santé du pharmacien devrait le pousser à délivrer moins de médicaments mais mieux utilisés, or l’économie de son entreprise repose sur le nombre de boîtes délivrées ! IFMO développe donc l’idée d’une évolution vers une marge non seulement commerciale mais aussi basée sur l’acte pharmaceutique. « On fait tous de l’analyse pharmaceutique sans le savoir… et surtout sans le faire savoir », souligne-t-il. Un acte qui s’appuie sur différents outils : opinion pharmaceutique, guide d’assurance qualité, déclaration de pharmacovigilance… « L’opinion pharmaceutique, argumente Jean-Luc Bury, n’est que la finalisation de ce qui existe déjà : elle ne bouleverse ni les méthodes ni les charges de travail. Et c’est un service au patient, au médecin, et à la collectivité. »
Alors adopter une rémunération à l’acte, oui. Mais comment ? Si les Suisses (lire encadré) y sont passés du jour au lendemain, les acteurs français du dossier semblent plus mesurés. « Toute la problématique est de savoir comment quantifier le service pharmaceutique rendu pour pouvoir le rémunérer, explique Jean Calop. C’est pourquoi je plaide pour la mise en place d’un observatoire des pratiques professionnelles qui permettra d’identifier puis d’étalonner chaque acte pharmaceutique. »
« Je préfère une adhésion plutôt qu’une révolution »
A pas comptés, c’est aussi le tempo voulu par l’USPO qui a fait de l’acte pharmaceutique son nouveau cheval de bataille syndical. « Nous devons y aller pas à pas, en confiant d’abord quelques missions très précises aux pharmaciens, détaille Gilles Bonnefond, son secrétaire général. Ensuite nous élargirons le cercle des actes ouvrant droit à rémunération. Je préfère une adhésion plus qu’une révolution. » Pour le Collectif national des groupements de pharmaciens, par la voie de Gilles Brault-Scaillet, le pharmacien doit devenir un « fournisseur de prestations et faire admettre que son conseil est une prescription pharmaceutique qui, en tant que telle, doit être rémunérée ».
Mais avec l’acte pharmaceutique, c’est une prestation intellectuelle que l’on rémunère et plus seulement une activité commerciale. Le changement des mentalités sera forcément long. Tout comme le chemin qui reste à parcourir…
Heureux suisses !
Les Helvètes ont fait leur révolution pharmaceutique il y a presque un an, le 1er juillet 2001. Désormais, l’activité de conseil ainsi que l’exécution d’une ordonnance sont rémunérées non plus à travers le seul prix des médicaments, mais aussi sous forme de prestation des caisses. Ces dernières prennent en charge les conseils lors de l’exécution, d’une part, d’une ordonnance médicale (motivation de l’observance, informations sur les effets indésirables, assistance à la prise, contrôle des facteurs de risque, etc.) contenant au moins un des médicaments de la liste des spécialités concernées (80 % du marché), d’autre part, d’une ordonnance médicale en dehors des heures de travail usuelles et enfin du remplacement d’un princeps ou d’un générique prescrit par un générique plus avantageux.
La pharmacie se voit attribuer quatre points pour l’activité de conseil et d’exécution de l’ordonnance et sept points pour la tenue d’un dossier patient. La valeur du point, aujourd’hui de 1,50 franc suisse (soit 2,19 Euro(s)) fait l’objet de négociations entre les caisses et les pharmaciens. Une marge de 15 % sur le prix du médicament « sortie d’usine » permet au pharmacien de financer sa « prestation logistique » (gestion du stock et infrastructures). « L’acte pharmaceutique n’est plus caché par la marge commerciale. Nos concitoyens identifient mieux notre rôle, explique Michel Buchmann, pharmacien et parlementaire suisse, vice-président de la Fédération internationale de la pharmacie. Notre revenu n’a pas bougé. Dans ma pharmacie, la marge était de 36,89 % avant ce système, à ce jour elle est de 37,6 % ! » – N.F.
Si je vous dit pharmacien ?
Si je vous dis « médicament », « pharmacie », « parapharmacie »,
« pharmacien », vous pensez à quoi ? C’est avec ce court questionnaire que nos journalistes ont arpenté les allées de Pharmagora à la recherche des personnes extérieures à l’officine. Histoire de prendre la température. Voilà le résultat.
« Médicament » ? C’est sans aucun doute le seul mot négatif du questionnaire. La première évocation fut la maladie avec sa cohorte de contraintes et d’obligations. Vinrent ensuite les problèmes de remboursements. Ainsi cette serveuse d’un restaurant du salon qui répondit tout de go : « ça me fait penser que plus ça va et moins on rembourse alors qu’on paye toujours aussi cher la Sécu ! » Un enfant de six ans résuma son propos d’un « Mauvais goût ! », moue en prime. Enfin, un vigile d’origine africaine balaya le mot d’un revers de la main : « Je n’en prends jamais. Je ne me soigne qu’avec des plantes. »
Ensuite, le mot « pharmacie » évoqua d’abord le lieu, suivi de près par le conseil et l’écoute. Une hôtesse précisa même qu’elle n’hésitait pas à poser des questions qu’elle n’avait pas osé soulever avec son médecin. « Il est toujours pressé ! », conclut-elle. Un serveur de bar, la trentaine, associa au contraire ce mot à « industrie » et « laboratoires » avant de revenir à l’armoire à pharmacie de son enfance.
« Parapharmacie » fit d’abord penser à « soins pour bébé » à cette jeune mère rencontrée sur un stand : « J’achète tous les produits de toilette de mon bébé à la pharmacie car il a une nature très allergique. En pharmacie j’ai confiance ! » Mais la majorité des gens interrogés a répondu « grande surface », « beauté » ou « soins ».
Au mot « pharmacien », nos visiteurs ont surtout associé « blouse blanche », « conseil », pour terminer par « savoir » et… « notable ». Mais pour Julie Piétri (photo), la chanteuse aperçue sur le stand Delatex, c’est bien plus encore : « Les pharmaciens sont des professionnels sérieux. Ils connaissent leur métier, les réactions chimiques, les effets sur notre corps. J’ai une amitié de quinze ans avec ma pharmacienne de quartier. Elle est capable de me dire ce qui est bon pour moi. J’ai confiance en elle. Récemment, elle a su prendre la relève de mon médecin lorsque ma fille a été malade. Elle m’a donné les bons conseils au bon moment. » – N.F. et A.M.
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