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Délivrance sans souffrance
Julie Denjean est pharmacienne référente dans un réseau de soins palliatifs Avec d’autres professionnels de santé libéraux, elle participe à la prise en charge à domicile de malades en fin de vie. Elle est également membre d’une association dont l’un des objectifs est de créer un label pour les pharmaciens spécialisés en oncologie
C’est à la demande d’une patiente que le réseau m’a sollicitée pour participer à la prise en charge des personnes en fin de vie », raconte Julie Denjean. C’était en 2007, elle venait à peine de s’installer à Gannat, une commune de l’Allier proche de Vichy. Depuis, la titulaire travaille régulièrement pour le RASP03. Le Réseau d’accompagnement et de soins palliatifs de l’Allier a été créé en 2006 pour rassembler tous les acteurs du département impliqués dans l’accompagnement et les soins palliatifs à domicile : médecins généralistes, spécialistes, infirmières, kinésithérapeutes, pharmaciens, services d’aide à domicile, assistantes sociales, EHPAD… Son objectif est de permettre aux personnes atteintes de maladies graves et évolutives de rester à leur domicile, et cela dans les meilleures conditions possibles.
Une étroite collaboration entre professionnels de santé
Ce sont les patients qui choisissent d’adhérer à RASP03 à leur sortie de l’hôpital. Dès lors, le réseau les prend entièrement en charge et se met en contact avec l’équipe soignante (médecin, infirmière, pharmacien…) choisie par le patient afin d’organiser une réunion de coordination. « L’équipe formée par les divers professionnels de santé dresse un état des lieux à partir du dossier médical qui a été transmis par l’hôpital au médecin traitant. Chacun donne son ressenti et émet des propositions d’améliorations qui peuvent être apportées », explique Julie Denjean. Les personnes suivies par le réseau de soins sont toutes très malades et ont besoin d’une prise en charge globale. Le réseau connaît également la situation familiale du patient et gère les éventuels problèmes sociaux en apportant une aide budgétaire quand cela est possible, via le conseil régional.
Le malade reçoit quotidiennement la visite de l’infirmier et du kinésithérapeute. Le médecin et le pharmacien passent, eux, tous les deux ou trois jours. « Mais il m’est arrivé d’aller tous les jours chez un patient en fin de vie auquel il fallait augmenter la posologie de morphine », souligne la pharmacienne. Les professionnels s’arrangent également pour se rencontrer au domicile du patient. « Quand cela n’est pas possible, chacun note sur un cahier de liaison ses observations. » Dans les cas de souffrances très intenses, le malade retourne à l’hôpital car les posologies des traitements contre la douleur qui doivent alors être utilisées vont au-delà des possibilités de prescription légales.
Une adjointe et une préparatrice spécialement formées
Quand elle a adhéré au Réseau d’accompagnement et de soins palliatifs de l’Allier, Julie Denjean n’a impliqué aucun membre de son équipe. Mais, rapidement, elle décide de former une préparatrice et une adjointe. « Travailler en équipe permet de compléter un avis, d’avoir un meilleur conseil, explique-t-elle. Nous choisissons le matériel ensemble, nous en discutons. Un dossier a été créé où nous notons tout ce que nous faisons pour tout nouveau malade intégrant le réseau. » L’adjointe et la préparatrice se rendent également parfois au domicile du patient ou pour représenter la pharmacie aux réunions de coordination. Seule condition indispensable : il faut que la personne soit formée et compétente. C’est pourquoi Julie Denjean a fait suivre à ses collaboratrices des formations à Form’Utip et à l’université Pierre-Fabre de Sorèze. « Elles y ont acquis des connaissances autant sur le plan technique, avec les pathologies, les traitements et les prises en charge, que sur le plan humain, que ce soit vis-à-vis du malade ou vis-à-vis de sa famille. »
Un rayon diététique et nutrition très fourni
Outre la fourniture des médicaments, les aides au confort de vie et le matériel médical – matelas antiescarres, coussins de positionnement en microbilles… –, l’équipe a également développé un rayon spécifique pour la nutrition hyperprotéinée. « Nous proposons des plats salés, des crèmes ou encore des jus de fruits, mais aussi des compléments alimentaires pour aider les malades à surmonter les chimiothérapies,explique Julie Denjean,également titulaire d’une licence de diététique et de nutrition. Je conseille par exemple de prendre Desmodium pour nettoyer et régénérer le foie entre deux cures. Je donne aussi des conseils hygiénodiététiques tels que faire une cure de fruits et légumes crus mixés trois jours avant une chimiothérapie ou une chirurgie. Cet apport vitaminique important permet de mieux supporter les traitements. »
L’officine attache également beaucoup d’importance à la dermatologie. Par exemple, Julie Denjean conseille d’appliquer un mélange d’huiles essentielles de niaouli et d’arbre à thé deux heures avant de commencer une séance de radiothérapie afin de diminuer les brûlures, quand elles surviennent. Ou certaines crèmes pour soulager les sécheresses, irritations ou douleurs provoquées par les traitements de chimiothérapie par voie orale. Sans oublier les problèmes d’ongles cassants ou dédoublés, de sécheresse de la bouche, les problèmes urinaires nécessitant l’emploi de sondes et de protections…
Créer un label pour les officines spécialisées en oncologie
La prise en charge d’un malade en fin de vie nécessite un savoir-faire que Julie Denjean, qui est aussi titulaire d’un DU d’oncologie, souhaite faire reconnaître. « Je fais partie du Cercle des pharmaciens*, une association regroupant une quarantaine de confrères. Nous travaillons sur un cahier des charges afin de créer un label, “Oncologie-Suivi du patient cancéreux à l’officine”, pour les pharmaciens spécialisés en oncologie. Notre objectif est de montrer aussi bien à la patientèle qu’aux hospitaliers et aux réseaux que les pharmaciens peuvent prendre en charge des patients, qu’ils sont formés et peuvent être coordinateurs. Tout pharmacien sollicitant le label devra s’engager notamment à être formé, avoir un local personnalisé, proposer du matériel médical et offrir des prestations telles que la fourniture de prothèses mammaires ou des soins dermatologiques appropriés. »
Le dossier est presque terminé. Il n’y a plus qu’à le faire connaître. Voilà pourquoi Julie a pris son bâton de pèlerin pour venir à Pharmagora au mois de mars. « Je vais contacter les réseaux d’oncologie, l’ordre des pharmaciens et l’Institut national du cancer pour recueillir leur avis et faire valider notre dossier. Notre objectif est de le finaliser d’ici fin 2010. » Une certitude la porte : toutes ces aides sont importantes pour les malades et pour leur famille. « Des études l’ont montré, assure la titulaire. L’espérance de vie du malade s’allonge quand lui et sa famille sont pris en charge par un réseau de soins. »
* http ://cercledespharmaciens.net/
Envie d’essayer ?
LES AVANTAGES
• Etre au cœur du réseau de soins avec les médecins, les infirmières et les kinésithérapeutes.
• Professionnaliser l’activité.
• Faciliter la mise en place à l’officine d’une politique de conseils et de suivi des patients.
• Utiliser l’expérience et la formation acquises dans les relations avec les autres clients, notamment les personnes âgées.
• Suivre le malade jusqu’au bout.
LES DIFFICULTES
• Devoir faire la preuve de sa compétence au sein du réseau.
• Montrer que l’on peut répondre rapidement à certains besoins.
• Le suivi d’un patient prend beaucoup de temps.
• La tâche n’est pas rémunérée.
LES CONSEILS
• Renseignez-vous localement sur l’existence d’un réseau de soins.
• Adaptez-vous aux pathologies traitées par le réseau choisi. Certains réseaux sont axés sur le diabète ou l’oncologie, d’autres sur l’insuffisance rénale ou la mémoire pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.
• Formez-vous à la maladie et au traitement.
• Formez-vous aussi sur le plan humain pour pouvoir gérer le relationnel avec le malade et la famille.
• Suivez ensuite les formations proposées par les réseaux pour être à jour dans vos connaissances.
• Informez l’équipe officinale et formez un ou deux membres pour pouvoir échanger et avoir un relais auprès des malades.
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