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Les mycoses vaginales

Publié le 1 avril 2007
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Pathologies fréquentes, bénignes en soi et relativement faciles à traiter, les mycoses vaginales n’en restent pas moins source de gêne et de douleurs pour la plupart des femmes.

Définition

Les mycoses vaginales ou vulvo-vaginales sont le plus souvent dues à des levures microscopiques du genre Candida dont l’espèce albicans est responsable des manifestations pathologiques dans 80 à 85 % des cas. Il existe d’autres espèces : Candida tropicalis, Candida kruséï, Candida glabrata

Levure du tube digestif et des muqueuses sous forme de spores inoffensives, Candida albicans peut passer au stade parasitaire pathogène sous l’influence de facteurs favorisants. Il émet alors des filaments mycéliens qui pénètrent la paroi vaginale et entraînent une réaction inflammatoire à l’origine des démangeaisons.

Les mycoses aiguës

La mycose aiguë «accidentelle» est l’épisode unique, classique après une prise d’antibiotique, lors de la grossesse ou d’une immunosupression.

Les mycoses récidivantes

Les mycoses sont dites récidivantes, lorsque la femme présente au moins quatre épisodes par an. Elles sont sans raison apparente (absence de facteurs favorisants). On les distingue selon le pH vaginal (le médecin applique un peu de sécrétions vaginales sur du papier pH).

Les mycoses pures. On ne retrouve que du Candida albicans dans le prélèvement vaginal dont le pH est inférieur à 4. Chez certaines femmes, des défenses spécifiques contre Candida albicans ne fonctionnent plus.

Les mycoses mixtes. Outre le champignon Candida, on retrouve d’autres germes dans le vagin (colibacilles, streptocoques…) dont la flore est complètement déséquilibré. Le pH est ici supérieur à 5.

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Les facteurs favorisants

Le climat hormonal (estrogène et progestérone) : période du cycle, grossesse, certains traitements hormonaux trop dosés (pilule, traitement hormonal substitutif).

Les antibiotiques, notamment à spectre large (bêtalactamines, tétracyclines). Certains limitent les défenses au niveau vaginal, d’autres favorisent le développement des levures.

Les médicaments diminuant les défenses immunitaires (immunosuppresseurs, cortisone, certains anti-inflammatoires…).

Le diabète augmente le taux de sucre dans les muqueuses.

Autres : pathologies thyroïdiennes, infection au VIH…

Stratégie thérapeutique

Mycose aiguë

Un traitement local, ovule et crème ou émulsion pour le prurit vulvaire, suffit, accompagné d’un produit lavant adapté. Tout doit rentrer dans l’ordre dans les 72 heures.

Si ce n’est pas le cas, un prélèvement vaginal est effectué pour vérifier qu’il n’y a pas une autre infection et/ou que la levure n’est pas un Candida albicans.

Mycose récidivante

Mycose pure. On essaye de « désensibiliser » les femmes en leur donnant un antifongique par voie orale pendant plusieurs mois pour empêcher le développement de la levure et mettre les défenses immunitaires « au repos ». En parallèle, on donne le premier mois un traitement local pour éradiquer le champignon.

Mycose mixte. On peut donner un traitement de terrain pour développer les défenses naturelles, des prébiotiques, des probiotiques ou des estrogènes locaux qui vont « recharger » la muqueuse en glycogène. En effet, la production de glycogène est sous la dépendance des estrogènes.

Les traitements

Les médicaments antifongiques

Les antifongiques de référence dans la prise en charge des mycoses vaginales appartiennent à la classe chimique des azolés. Ils empêchent la transformation d’un des constituants de la membrane fongique, entraînant ainsi la détérioration du Candida.

Les antifongiques locaux. Aujourd’hui, huit molécules sont disponibles : butoconazole, éconazole, fenticonazole, isoconazole, miconazole, omoconazole, sertaconazole et tioconazole. Mode d’action : ils arrêtent la multiplication des levures responsables de l’infection. Les azolés ont de plus, une activité antibactérienne intéressante lors de surinfections par des bactéries Gram +. Il n’y a pas de résistance de Candida albicans aux azolés. Administration : un ovule ou une capsule par jour est prescrit pendant trois jours pour les formes simples, une seule administration pour les formes à libération prolongée. Il se place au fond du vagin, le soir au coucher, y compris pendant les règles. La forme émulsion fluide et crème sont appliquées localement deux fois par jour, en externe sur la vulve et/ou autour de l’anus en cas d’inflammations locales associées. Toujours se laver les mains avant de mettre l’ovule ou la crème. En raison des excipients, tous les ovules et capsules, excepté Fongarex et Fazol Z sont incompatibles avec l’utilisation de latex (préservatifs et diaphragme) et déconseillés avec l’usage concomitant de spermicide dont l’efficacité peut être altérée. Durant le traitement, éviter l’emploi de tampons hygiéniques qui peuvent adsorber le principe actif. Effets indésirables : sensations de brûlures ou d’irritation, prurit, érythème, possibles en début de traitement. Contre-indication : intolérance ou sensibilisation aux dérivés imidazolés ou à l’un des excipients.

Un antifongique systémique. Le fluconazole par voie orale (Béagyne) est le traitement de référence pour traiter les mycoses récidivantes. Il est aussi une alternative aux antifongiques locaux dans le cas d’une mycose aiguë (meilleure acceptabilité du traitement). Administration : 150 mg une fois par mois durant 3 à 6 mois. Une administration en une fois en cas de mycose aiguë. La prise se fait indifféremment par rapport au repas. En cas de traitement au long cours, une surveillance des enzymes hépatiques est envisagée selon les patients, ainsi que le recours à une contraception efficace en raison d’un éventuel risque tératogène. Effets indésirables : hépatiques (élévation des transaminases, voire atteintes hépatiques sévères justifiant une surveillance) ; gastro-intestinaux (nausées, flatulence, douleurs abdominales, diarrhées) ; cutanés (rashs, réactions cutanées sévères…) ; céphalées. Contre-indication : grossesse, allaitement.

Autres traitements

On utilise d’autres médicaments uniquement dans les mycoses récidivantes mixtes.

Les prébiotiques (Geliofil, Prévégyne comprimés vaginaux). Ce sont des acidifiants. Cela semble contraire avec le fait que la levure se développe mieux en milieu acide (inférieur à 4,5). Or, dans 50 % des cas de mycose récidivante, ce n’est pas ce que l’on constate. Ils sont administrés une semaine par mois après les règles, là où le pH est le plus haut.

Les probiotiques. Ce sont des lactobacilles utilisés pour restaurer la flore, mais pas n’importe lesquels. En effet, parmi les lactobacilles présents dans la flore de Doderleïn, seuls trois ou quatre semblent efficaces pour la production de peroxyde d’hydrogène qui empêche le développement de germes pathogènes dans le vagin. Florgynal en tampon ou Mycoress en gélules vaginales semblent les plus efficaces. Citons aussi Florgynal en gélules vaginales ou Trophygil.

Les estrogènes locaux (Gydrelle, Trophicrème, Colpotrophine…). Utilisés en crème durant deux ou trois mois.

Autres mesures

Lutte contre les facteurs favorisants

S’il est difficile d’agir sur un traitement immunosuppresseur ou d’équilibrer un diabète, par contre, il est possible d’intervenir sur le traitement hormonal. Il est démontré que la pilule ne favorise pas les mycoses, cependant on constate parfois l’arrêt des épisodes de mycose en changeant de pilule.

Soins locaux

Proscrire les antiseptiques. Interdire les antiseptiques et les douches vaginales sauf sur prescription médicale et en cas d’infections bactériennes.

Calmer les démangeaisons. En cas de démangeaisons et sur une courte période, conseiller un lavant adapté antiprurigineux tel Gyn-Hydralin, Saforelle, Saugella au thym…

Vie quotidienne

Vie sexuelle

Les candidoses ne sont pas des infections sexuellement transmissibles. Rien ne contrecarre la poursuite des rapports sexuels si ce n’est la dyspareunie (douleurs lors de la pénétration) et la contre-indication du latex des préservatifs avec la plupart des traitements locaux en raison des excipients. Seuls Fazol Z et Fongarex sont compatibles avec les préservatifs.

Activité nautique

Contrairement à ce que l’on croît, les bains ou la piscine ne favorisent pas les mycoses. Pour les femmes souffrant de mycoses récidivantes avec une vulve très irritée, conseiller l’application de Bépanthène crème sur la vulve pour la protéger de l’irritation du chlore trop dosé de certaines piscines.

Vêtements

Éviter de traumatiser vos patientes en imposant la culotte Petit Bateau en coton et un lavage à 70 °C. Par contre, il est vrai qu’en présence de mycose, des sous-vêtements synthétiques très collants peuvent irriter davantage le sexe. Les vêtements serrés ne « provoquent » pas de mycose.

Hygiène corporelle

Bain autorisé. Hormis pour des motivations écologiques, il n’y a aucune raison d’interdire les bains au bénéfice des douches.

Un lavant adapté. En l’absence de démangeaisons, recommander l’utilisation d’un savon surgras ou d’un produit spécifique (Lactacyd Femina, Saforelle, Saugella…) pour l’hygiène intime. Il n’y a pas de bon pH pour ces produits. En effet, le pH de la vulve va de 4,5 à l’entrée du vagin à plus de 7 sur les grandes lèvres… Tous les produits dont le pH est compris entre 4,5 et 7 conviennent.

Pas de décapage vulvovaginal agressif. Le sexe n’est pas sale. Il est inutile de le décaper avec des antiseptiques. Bien au contraire, on doit respecter l’écosystème vaginal et le traiter avec respect. •

Tous nos remerciements à Jean-Marc Bohbot, andrologue, spécialisé dans les infections sexuellement transmissibles, Institut Fournier, Paris.

Chez l’homme ?

Les candidoses génitales sont beaucoup plus rares. Elles se manifestent par une balanite : érythème du gland et de la face interne du prépuce. Elles s’effacent spontanément en quelque jour en l’absence de rapports sexuels. Le plus souvent, à l’origine, on retrouve une configuration anatomique particulière comme un prépuce long et serré, voire un défaut d’hygiène.