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les hypothyroïdies
Instauré le plus souvent à vie, le traitement de l’hypothyroïdie permet de rétablir un taux normal d’hormones thyroïdiennes et de faire disparaître les signes cliniques
Définitions
La glande thyroïde
La thyroïde est une glande endocrine qui sécrète des hormones riches en iode : la thyroxine (LT4) et la triiodothyronine (LT3). La LT4 est une pro-hormone métabolisée en sa forme active LT3. Les sécrétions de la thyroïde sont régulées par la TSH (thyréostimuline hormone), elle-même secrétée par l’hypophyse. Ces hormones interviennent dans de nombreuses réactions métaboliques comme la digestion, la fonction cardiaque, la température corporelle, le système de reproduction, la régulation de l’humeur ou du poids.
Les différentes hypothyroïdies
Une hypothyroïdie se caractérise par une insuffisance de production d’hormones thyroïdiennes. Trouble thyroïdien le plus fréquent, il touche plus particulièrement les femmes (10 % des plus de 65 ans).
• Classification selon le mécanisme d’apparition.
Les hypothyroïdies périphériques. Elles sont provoquées par une atteinte de la glande thyroïde. Ces hypothyroïdies périphériques sont les plus courantes. Chez les sujets adultes, il s’agit principalement des réactions auto-immunes avec présence d’anticorps antithyroïdiens (thyroïdite de Hashimoto, et thyroïdite de Quervain) ou des suites de l’ablation totale ou partielle de la glande dans le cadre de pathologies thyroïdiennes préexistantes. Chez l’enfant, l’hypothyroïdie congénitale est actuellement détectée dans les premiers jours de vie (voir encadré p. 20).
Les hypothyroïdies secondaires. Provoquées par une insuffisance ou un adénome (tumeur bénigne) hypothalamique ou hypophysaire, elles sont beaucoup plus rares.
• Classification selon les signes cliniques.
Les formes symptomatiques. Les symptômes, associés ou non, évoluent progressivement et sont peu spécifiques : asthénie physique et intellectuelle, dépression, lenteur motrice, prise de poids, frilosité, constipation, vertiges…
Les formes infracliniques frustres. Les signes cliniques sont absents, peu marqués et/ou isolés. Ces formes, touchant plus de 3 % des femmes, peuvent évoluer vers une forme symptomatique franche.
• Évolution. Traitées, les hypothyroïdies évoluent très favorablement. Non traitées, les signes s’aggravent et évoluent vers un myxoedème (infiltration cutanée avec oedème du visage et des membres, voix rauque, langue épaissie…). Ce myxoedème s’accompagne d’un ralentissement psychomoteur et cardiaque pouvant aboutir dans les cas extrêmes à un coma. Chez la femme enceinte, l’hypothyroïdie augmente le risque de trouble du développement du foetus, de prématurité et de détresse respiratoire néonatale.
Diagnostic
Clinique
Le diagnostic clinique est difficile à poser car les symptômes, nombreux et non spécifiques, entraînent quelques confusions avec d’autres pathologies ou bien sont attribuées au mode de vie (stress, fatigue).
Biologique
• Le dosage de la TSH. C’est l’examen de première intention, quelle que soit l’étiologie de l’hypothyroïdie. Dans la majorité des cas, la TSH est augmentée par réaction à la diminution des taux sanguins d’hormones thyroïdiennes. La valeur normale de la TSH varie de 0,15 mU/l à 5 mU/l.
• Le dosage de la LT4 libre. Il permet de différencier la forme clinique de la maladie. La valeur normale de la LT4 libre se situe entre 8,5 ng/litre et 17,1 ng/litre. La LT4 « libre » est la forme de LT4 non liée aux protéines plasmatiques, Plus facile à doser, elle reflète mieux l’activité de la thyroïde.
• Interprétations. L’hypothyroïdie est dite :
– « symptomatique » quand la TSH est élevée et la LT4 diminuée ;
– « infraclinique », si la TSH est augmentée et la LT4 normale ;
– « secondaire », quand la TSH est normale et la LT4 diminuée.
• Autres examens. Le diagnostic est précisé par le dosage des anticorps antithyroïdiens, ce qui permet la confirmation d’une thyroïdite autoimmune. Il est éventuellement complété par la recherche d’une anémie et le dosage du LDL-cholestérol pour évaluer le facteur de risque cardiovasculaire. Il est inutile de doser la LT3 : puisqu’elle est produite en partie à partir de la LT4, elle n’a pas de corrélation directe avec la fonction thyroïdienne.
Stratégie thérapeutique
Traiter au cas par cas
La décision de traiter ou non l’hypothyroïdie se discute au cas par cas en fonction de plusieurs facteurs qui sont : la biologie sanguine, l’étiologie, la forme clinique, la sévérité, l’âge du malade, ainsi que les différents facteurs de risque cardiovasculaires associés. Voici quelques exemples de résultats de biologie sanguine :
– TSH > 10 mUI/l,
– TSH > 4 mUI/l et présence d’anticorps anti-thyroperoxydase spécifique des maladies auto-immunes thyroïdiennes (anti TPO),
– TSH > 4 mUI/l et surcharge iodée induite par exemple par certains médicaments.
Les formes frustres peuvent être prises en charge précocement malgré l’absence de symptômes « gênants », notamment en présence d’anticorps antithyroïdiens (facteur prédictif d’une forme clinique latente), de problèmes d’infertilité (l’hypothyroïdie perturbe l’ovulation), de grossesse en cours ou d’hypercholestérolémie.
Principe du traitement
Le traitement consiste à substituer les hormones thyroïdiennes manquantes par des hormones de synthèse pour faire disparaître les signes cliniques et prévenir les complications. Il est généralement poursuivi à vie. On utilise essentiellement la lévothyroxine sodique (Levothyrox, LThyroxine) par voie orale qui possède une demi-vie longue. C’est une prohormone qui ne sera véritablement active qu’après sa métabolisation en hormone LT3. Quand la lévothyroxine ne suffit pas, ou en cas d’hypothyroïdies menaçant le pronostic vital, on ajoute de la liothyronine. La courte demi-vie de la liothyronine permet un effet plus rapide, en quelques heures, mais induit des pics plasmatiques, d’où la nécessité de multiplier les doses quotidiennes.
Instauration du traitement
• Chez l’adulte jeune. Le traitement est instauré par palier hebdomadaire de 25 µg jusqu’à atteindre la dose efficace, en moyenne entre 75 µg et 150 µg par jour. L’efficacité des médicaments apparaît après un temps de latence de 15 jours à 6 semaines. Pour un résultat plus rapide, le traitement peut éventuellement être instauré d’emblée à 75 µg par jour.
• Chez le sujet âgé. En cas d’insuffisance cardiaque ou coronarienne ou de troubles du rythme, les doses sont minorées, les paliers plus progressifs et le début de traitement surveillé en milieu hospitalier. Dans certains cas, l’effet cardiovasculaire des hormones est limité en associant un traitement bêtabloquant ou en renforçant le traitement antiangoreux.
• Chez la femme enceinte. Les besoins en LT4 augmentent de 25 à 50 % à partir de la huitième semaine de gestation pour atteindre un plateau à la seizième semaine. Découverte pendant la grossesse, l’hypothyroïdie est traitée lorsque la TSH au premier trimestre est supérieure à 2,5 mUI/l. En cas de pathologie préexistante, la dose de lévothyroxine est augmentée d’un tiers.
• Chez l’enfant. Le traitement est urgent, surtout en période néonatale (voir encadré p. 21).
• Autres cas. Lorsque l’hypothyroïdie est provoquée par la prise de médicaments qui ne peuvent pas être remplacés, il est nécessaire d’administrer de la lévothyroxine (75 µg/j à 150 µg/j) (voir encadré p. 22). En cas d’hypothyroïdie d’origine centrale, on recherche et corrige d’autres déficits hormonaux éventuels avant de la traiter.
Adaptation
Les posologies sont adaptées selon les résultats du dosage de la TSH et de la LT4. Ces dosages sont réalisés une à deux fois par an. Une majoration de 25 % des doses peut être nécessaire en hiver, ou au moment de la puberté, ou encore au cours d’une longue maladie ou bien lors de la prise de contraceptifs oestro-progestatifs (qui inhibent la production de TSH).
Les médicaments
Les différents produits sont des hormones thyroïdiennes synthétiques, associées ou non entre elles. Toutes sont contre-indiquées en cas d’hyperthyroïdie, de cardiopathies, de coronaropathies et de troubles du rythme non contrôlés.
Lévothyroxine sodique (LT4)
Mode d’action : la lévothyroxine sodique ou LT4 (Levothyrox, L Thyroxine Serb) augmente la consommation tissulaire d’oxygène, le métabolisme de base et le rythme cardiaque. Posologie : parfois, l’équilibre se situe « entre deux dosages » et le schéma thérapeutique peut alterner deux doses différentes un jour sur deux (par exemple, alternance du dosage 100 µg avec le dosage à 125 µg). Administration : prise le matin 15 à 20 minutes avant le petit déjeuner pour éviter une interaction avec les aliments ou d’autres médicaments. Les gouttes buvables, seule forme adaptée au nourrisson et au petit enfant, se conservent au réfrigérateur (2-8 °C), et sont administrées à la cuillère dans un peu d’eau ou du lait. Toute la dose doit être ingurgitée afin d’éviter un sous-dosage, mais inutile de redonner une dose similaire en cas de régurgitation. La forme injectable est utilisée en perfusion IV lente dans 250 ml de sérum physiologique.
Liothyronine (LT3)
Mode d’action : cette hormone thyroïdienne LT3 (Cynomel) entraîne une augmentation du métabolisme basal, une accélération du rythme cardiaque et une inhibition de la sécrétion de TSH. Posologie : l’instauration doit être très progressive, par paliers hebdomadaires et sous surveillance clinique et biologique (dosage de LT4 et TSH réguliers). Administration : prise quotidienne à jeun, chez l’adulte ou l’enfant de plus de 6 ans. La demi vie courte peut favoriser des hypothyroïdies sur une partie de la journée et exposer à des risques cardiovasculaires. Surveillance : nécessaire chez les sujets âgés en cas d’ostéoporose sévère (aggravation possible de l’ostéoporose).
Lévothyroxine sodique + liothyronine (LT4 + LT3)
Euthyral est une association des hormones synthétiques LT4 et LT3. Posologie : initiation à la posologie de 0,25 comprimé par jour (ou un demi en cas de traitement relais de Lévothyroxine à 50 µg par jour au moins), puis adaptation des doses par paliers hebdomadaires selon les résultats des dosages biologiques et signes cliniques. Administration : le matin à jeun chez l’adulte et l’enfant de plus de six ans.
Surveillance
Le traitement et la maladie nécessite une surveillance clinique et biologique.
Clinique à contrôler
Surveiller l’apparition d’éventuels signes cliniques de surdosage (tachycardie, tremblements, insomnie, excitabilité, sueur, amaigrissement rapide, diarrhée) ou de sous-dosage (réapparition des symptômes d’hypothyroïdies). Dans ce cas, faire réévaluer le traitement de façon transitoire ou définitive.
Suivi biologique
• Hypothyroïdie frustre et non traitée. Le premier contrôle de la TSH a lieu trois mois après le dosage initial, puis tous les six mois si la recherche d’anticorps anti TPO est positive ou tous les deux ans si elle était négative.
•Hypothyroïdie traitée. Si l’étiologie est périphérique, doser la TSH 6 à 8 semaines après avoir atteint la dose thérapeutique efficace. Si l’origine est centrale, seul le dosage de la LT4 est nécessaire. Ensuite, les contrôles sont réalisés tous les 6 à 12 mois (ou plus fréquemment en cas de grossesse, chez les personnes âgées…). Un contrôle de la TSH est nécessaire 2 mois après une adaptation posologique.
Vie quotidienne
Gérer son traitement
•Connaître son traitement. Le patient doit connaître certaines situations nécessitant une consultation :
Les signes de surdosage et de sous-dosage. Quand le patient dort mal, qu’il présente des diarrhées, des tremblements, un rythme cardiaque accéléré, une excitation permanente, penser à un surdosage. Si au contraire il se sent de nouveau ralenti, dépressif, s’il reprend du poids, se sent constipé, fatigué, il est manifestement en sous-dosage.
Circonstances d’adaptation des doses. Augmentation possible en période d’hiver, puberté, de grossesse, évolution « naturelle » de la maladie. Diminution en période de chaleur ou en cas de survenue de troubles du rythme cardiaque.
• Gérer les oublis. L’oubli ponctuel du traitement est sans conséquence. On peut prendre la dose hormonale au moment où l’on s’en aperçoit 12 heures au moins avant la prochaine prise, sinon mieux vaut la sauter. Pour la prise de comprimés de dosage différent un jour sur deux, le plus simple est de se baser sur les jours pairs et les jours impairs pour chaque type de dosage.
• Surveiller l’automédication. Être vigilant face à l’automédication, car certains médicaments comme les sels de fer, les topiques gastro-intestinaux et les antiacides, peuvent diminuer l’absorption des hormones ou bien présenter des interactions. Toujours stipuler la prise d’hormones thyroïdiennes et demander conseil.
Alimentation
Même si le traitement tend à réguler le surpoids causé par l’hypothyroïdie, un excès de poids peut persister. Adopter une alimentation équilibrée, pauvre en graisse et sucres rapides, pour aider à la perte de poids. Des aliments riches en fibre et un apport hydrique suffisant (un litre et demi quotidien au moins) permettent de corriger la constipation induite. Si celle-ci persiste, administrer un laxatif osmotique doux. En France, l’enrichissement en iode des sels de table a limité considérablement les carences d’apport. Au cours de la grossesse et de l’allaitement, les besoins en iode sont augmentés en moyenne de 50 µg/jour (les besoins journaliers se situant entre 150 et 200 µg/jour) : recommander en premier lieu de consommer plus d’aliments iodés comme les oeufs, le lait, les poissons. N’utiliser une supplémentation médicamenteuse qu’en cas de risque carentiel avéré, et sur avis médical.
Vie sociale
Avant le diagnostic, les personnes atteintes d’hypothyroïdie souffrent d’une incompréhension de leur entourage qui les considère comme dépressifs, versatiles ou ayant mauvais caractère. La mise en place du traitement régularise les signes cliniques et tend à estomper la fatigue et le retentissement moteur, permettant de retrouver une activité normale. Malgré tout, il perdure des variations hormonales qui induisent de temps en temps des sautes d’humeur ou bien un état légèrement dépressif pouvant influer considérablement sur la qualité de vie et les relations des patients. Préconiser de consulter en cas de répercussion importante sur la vie quotidienne.
Activité physique
Si l’hypothyroïdie ne contre-indique pas une activité physique régulière, elle entraîne parfois une fatigue invalidante et des douleurs à la mobilisation, même si l’hypothyroïdie est traitée et équilibrée. La pratique intensive d’un sport est autorisée, mais les douleurs et un ralentissement passager peuvent influer sur les résultats et les performances.
Vie sexuelle
Les symptômes de l’hypothyroïdie entraînent un ralentissement psychomoteur et une baisse de la libido. La vie amoureuse des femmes notamment est perturbée car le désir de l’autre est diminué et il résulte des incompréhensions entre les partenaires. Le désir d’enfant et la fertilité ne sont pas modifiés lorsque le taux d’hormones est équilibré. •
L’hypothyroïdie congénitale ou « crétinisme »
L’hypothyroïdie congénitale se caractérise par un hypofonctionnement de la glande entraînant un retard mental lorsqu’elle n’est pas traitée. Cette hypothyroïdie peut être permanente ou transitoire.
• La prévalence : une naissance sur 3 500.
• Les causes : trouble héréditaire de la synthèse des hormones, absence ou position anormale de la thyroïde, anomalie de l’hypophyse.
• L’évolution : non traitée, elle induit un retard de croissance, un retard mental et des acquisitions psychomotrices (crétinisme). L’enfant traité mène une vie tout à fait normale.
• Les signes cliniques : à la naissance, ictère prolongé, troubles de la déglutition, constipation, tonus musculaire insuffisant, macroglossie (langue hypertrophiéd), hypothermie et infiltration cutanée.
• Le dépistage : systématique au quatrième jour de vie grâce au test de Guthrie (voir question), sauf celles d’origine centrale qui ne pourront être repérées que plus tard.
• Le traitement : il est instauré dans les 7 à 10 premiers jours de la vie à forte dose (50 µg par jour), puis équilibré à 6 µg/kg/jour au cours de la première année. Ensuite, la posologie est de 3 µg/kg/jour.
• Le contrôle biologique : régulier, une fois par mois chez le bébé, une fois tous les 3 mois chez l’enfant.
gros planMédicaments et hypothyroïdies
Certains médicaments peuvent provoquer une hypothyroïdie. Le plus souvent transitoire, celle-ci peut être définitive. Le trouble thyroïdien est souvent sous jacent et le traitement médicamenteux est un accélérateur. Il apparaît dans les 18 premiers mois. Les signes cliniques sont en général peu marqués.
D’autres médicaments sont plus rarement responsables : l’interféron bêta, les antithyroïdiens de synthèse, les topiques iodés, les produits de contraste iodés, les sulfamides antibactériens et antidiabétiques, l’isoniazide et la phénylbutazone.
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