Savoirs Réservé aux abonnés

Les antivitamines K

Publié le 1 décembre 2005
Mettre en favori

Les antivitamines K (AVK) sont des médicaments à marge thérapeutique étroite. Sous-dosés, ils présentent un risque de thrombose (formation d’un caillot sanguin) alors que leur surdosage peut entraîner un risque d’hémorragie.

L’objectif de la prescription

Les AVK sont prescrites lorsqu’il y a un risque de formation ou de migration d’un caillot de sang : phlébite (thrombose veineuse profonde), risque de phlébite suite à la chirurgie orthopédique, embolie pulmonaire (migration d’un caillot dans les poumons), certains troubles du rythme cardiaque, prothèses des valves cardiaques, infarctus du myocarde.

La durée du traitement varie, selon les situations, de plusieurs semaines (prévention de phlébite) à une prise à vie (suite d’infarctus).

L’objectif est d’atteindre l’INR cible, en général entre 2 et 3.

Au-dessous de 2, le traitement n’est pas efficace, il faut augmenter la quantité d’AVK. Au-dessus de 3, il faut la diminuer.

La mise en route du traitement

Les AVK se prennent toujours en une prise unique par jour, de préférence le soir.

La plupart du temps, les AVK sont prescrites en relais d’une héparine de bas poids moléculaire (HBPM) comme Fraxiparine ou Fraxodi qui assure un effet anticoagulant immédiat. Les AVK n’agissent qu’au bout de deux à quatre jours. Au début, elles sont associées à l’HBPM. Cette dernière n’est arrêtée que lorsque le traitement par AVK est équilibré, c’est-à-dire lorsque l’INR est dans la zone thérapeutique recherchée deux jours consécutifs. Les contrôles de l’INR doivent donc être très rapprochés pendant la phase de mise en route (tous les deux à quatre jours) puis espacés progressivement.

L’adaptation posologique

Elle se fait en fonction de l’INR par palier de un demi-comprimé pour Préviscan et Sintrom, et par comprimé entier pour Mini-Sintrom. Pour la Coumadine, très peu prescrite en France, l’adaptation posologique se fait par un demi-comprimé de 2 mg.

Publicité

Il arrive que pour obtenir l’INR cible, on soit obligé d’alterner des doses différentes d’un jour à l’autre. Il est important de s’assurer que le patient a bien compris la posologie.

L’INR doit être contrôlé au minimum une fois par mois.

Les signes de surdosage

Les signes évocateurs de surdosage peuvent être :

L’apparition d’un saignement, même mineur. Celui-ci peut se produire à différents niveaux : saignement des gencives, saignement du nez, hémorragie conjonctivale au niveau de l’oeil (oeil rouge), présence de sang dans les urines, règles anormalement abondantes, apparition d’hématomes, présence de sang rouge dans les selles, vomissements ou crachats sanglants, saignement d’une plaie difficile à stopper.

Si l’hémorragie est interne (fatigue, essoufflement anormal, céphalées, malaise), un contrôle de l’INR doit être pratiqué.

Les interactions médicamenteuses

Elles sont très nombreuses et entraînent un risque grave, notamment d’hémorragies.

Les médicaments formellement contre-indiqués sont les suivants :

– Millepertuis : la prise de cette plante baisse voire annule l’effet anticoagulant.

– Miconazole (Daktarin) sous toutes ses formes (y compris le gel buccal ) : risque d’hémorragie grave.

– Aspirine à dose supérieure à 3 g/jour : risque hémorragique lié à l’inhibition de la fonction plaquettaire et à l’agression de la muqueuse gastroduodénale. S’ajoute, à ces effets indésirables, l’action anticoagulante des AVK.

– Un AINS très peu prescrit : la Butazolidine.

Les médicaments déconseillés. Ils peuvent éventuellement être prescrits à condition que l’INR soit contrôlé. Au comptoir, toujours vérifier que le prescripteur est au courant du traitement anticoagulant et que le patient a une prescription d’INR dans les deux à quatre jours.

– AINS : majoration du risque hémorragique.

– Aspirine à dose moyenne (< 3 g/jour) : accroissement du risque hémorragique. En revanche, il est possible d'associer des doses faibles (100 à 250 mg/jour) d'aspirine à une AVK pour compléter le traitement anticoagulant.

Les précautions d’emploi. Il y en 43 recensées (voir le Vidal ou , rubrique « Interactions médicamenteuse », site de référence gratuit) ! La prescription est possible mais sous contrôle rapproché (tous les quatre jours au minimum) de l’INR.

L’alimentation

Certains aliments contiennent une quantité non négligeable de vitamine K : brocolis, choux, choux de Bruxelles, choux-fleurs, épinards, laitue, tomates… Cet apport peut déséquilibrer le traitement par AVK. Ils est inutile de supprimer ces aliments, mais il ne faut pas en manger de grandes quantités .

L’oubli de prise

Une prise médicamenteuse oubliée peut être rattrapée dans un délai de huit heures après l’heure habituelle d’administration. Passé ce délai, il est préférable de sauter cette prise et de prendre la suivante à l’heure habituelle, le lendemain.

Par exemple : en cas d’oubli au dîner, la prise est possible jusqu’au coucher (même jusqu’à 4 heures du matin si le patient se réveille en sursaut à cause de cet oubli !). Au-delà, sauter la prise. Dans tous les cas, il ne faut jamais prendre deux prises d’antivitamine K dans la même journée (risque d’hémorragie).

La vie courante

• Porter sur soi en permanence une carte mentionnant le traitement par antivitamine K ou une copie de la dernière ordonnance d’antivitamine K.

• Éviter les sports violents qui entraînent facilement des chutes ou des coups (susceptibles de déclencher une hémorragie).

• Prudence en bricolant ou en jardinant. Manipuler avec précaution les objets tranchants. Il faut éviter de se couper en raison du risque d’hémorragie.

• Attention aux injections intramusculaires susceptibles d’entraîner un hématome !

• Signaler la prise d’antivitamine K à tout personnel soignant (dentiste…).

• En cas d’infection (grippe, gastroentérite…), consulter un médecin et lui signaler le traitement par AVK : l’infection risque de déséquilibrer le traitement.

Le carnet de suivi

Destiné aux patients, le carnet de suivi comprend des informations pratiques et un tableau à remplir avec les valeurs d’INR. Il peut être commandé par le pharmacien au Comité d’éducation sanitaire et sociale de la pharmacie française (Cespharm) : 4, avenue Ruysdael, 75008 Paris, fax : 01 56 21 35 09, e-mail : cespharm@ordre.pharmacien.fr).

repères

Les AVK fluidifient le sang en s’opposant à l’action de la vitamine K. Leur effet anticoagulant est progressif et devient maximal au bout de deux à quatre jours. Quatre antivitamines K sont commercialisées : Sintrom 4 mg, Mini-Sintrom 1 mg (équivalent d’un quart de comprimé de Sintrom), Coumadine 2 mg et 5 mg, Préviscan 20 mg.

L’INR, ou international normalized ratio, permet la surveillance de la fluidité du sang. Cet examen a aujourd’hui remplacé la mesure du TP (taux de prothrombine) dont les résultats variaient selon les laboratoires d’analyses. L’INR déterminé par le médecin est en général compris entre 2 et 3. Plus l’INR augmente, plus le sang est fluide.

questions à poser

En début de traitement

Avez-vous un carnet de suivi pour votre anticoagulant ?

En cas de réponse négative, en commander au Cespharm et conseiller au patient de le remplir très régulièrement.

Connaissez-vous la posologie ?

Prendre le comprimé le soir. Ne jamais prendre deux prises dans la même journée.

Connaissez-vous les signes de surdosage ?

Les saignements même minimes peuvent être un signe de surdosage.

À chaque renouvellement

Quand date le dernier INR ?

Un INR doit être pratiqué tous les mois.

Avez-vous de nouveaux médicaments prescrits ?

Vérifier systématiquement les interactions médicamenteuses.

Quatre antivitamines K sont commercialisées

Préviscan 20 mg : fluindione cp quadrisécables à 20 mg.

Sintrom 4 mg : acénocoumarol cp à 4 mg.

Mini-Sintrom 1 mg : acénocoumarol cp quadrisécables à 1 mg.

Coumadine 5 mg : warfarine cp blancs sécables à 5 mg.

Coumadine 2 mg : warfarine cp roses sécables à 2 mg.