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Le pied diabétique
Les atteintes du pied diabétique sont principalement imputables à l’effet délétère du diabète sur les nerfs périphériques et/ou sur la circulation artérielle des membres inférieurs, et sont souvent aggravées par la survenue d’une infection. Une prise en charge précoce et coordonnée limite le risque d’amputation.
La maladie
Définition
• L’expression « pied diabétique » désigne toute infection, ulcération ou atteinte des tissus profonds du pied survenant chez une personne vivant avec un diabète, en lien avec une neuropathie et/ou à une artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI).
• Les plaies du « pied diabétique » peuvent toucher tout le pied mais environ la moitié concerne la face plantaire, orteils compris.
• La pathologie « pied diabétique » « concerne de la même manière les diabètes de type 1 et de type 2. Les dénominateurs communs sont les complications de la maladie, c’est-à-dire la neuropathie et l’artérite des membres inférieurs, et les déformations du pied », rappelle Georges Ha Van, médecin spécialiste en médecine physique et de réadaptation dans l’Unité de podologie du service de diabétologie de l’hôpital Pitié Salpê-trière à Paris (75).
• La pathologie est marquée par la survenue d’une ulcération et le risque d’amputation.
Physiopathologie
Les plaies du pied diabétique, toujours d’origine mécanique, sont aggravées par l’existence d’une neuropathie et/ou d’une artériopathie. L’infection n’est que secondaire à une prise en charge non optimale, notamment de la décharge.
La neuropathie (NP)
• Toutes les fibres nerveuses peuvent être touchées dans la NP, mais c’est l’atteinte sensitive qui est principalement en cause, avec une perte progressive de la sensibilité douloureuse superficielle, à la température et à la vibration.
Elle expose aux ouvertures cutanées par insensibilité et perte des sensations de défense ; les hyper-appuis se traduisant par des zones d’hyperkératose où les blessures passent inaperçues.
Cette atteinte est fondamentale dans la problématique du pied diabétique.« Le pied ne devient “diabétique” qu’avec la neuropathie et la perte de sensibilité », estime le Docteur Ha Van.
• L’atteinte motrice est responsable d’une amyotrophie distale touchant la musculature intrinsèque du pied. Il s’ensuit un déséquilibre entre fléchisseurs et extenseurs responsable à la longue de déformations (orteils en griffe ou en marteau…), zones sur lesquelles surviendront les ulcérations : en regard de la tête des métatarsiens, face dorsale des articulations interphalangiennes, pulpe des orteils.
• L’atteinte végétative ou neuropathie autonome entraîne :
→ des anomalies de la sudation responsables d’une sécheresse cutanée locale fragilisant le pied avec crevasses, fissurations ;
→ des œdèmes et des troubles vasomoteurs : shunt artério-veineux en amont des capillaires gênant la bonne oxygénation des cellules ; épaississement de la membrane basale des capillaires, avec un possible effet négatif sur la cicatrisation, avec une chaleur locale parfois augmentée, les pouls « bondissants » et la turgescence des veines du dos du pied.
→ des calcifications de la media des artères (médiacalcose) générant une rigidité artérielle gênant l’exploration et la revascularisation.
En fragilisant la peau, l’atteinte végétative facilite la survenue des ulcérations.
L’artériopathie
• La macroangiopathie (voir Dico+ p. 34) est une atteinte de l’intima des artères de gros et moyens calibres, responsable de l’AOMI. Ce rétrécissement des vaisseaux par des plaques d’athérome a des caractéristiques particulières chez le diabétique. Elle est plus fréquente chez ces patients, les deux sexes sont également atteints au lieu de quatre hommes pour une femme, avec un âge de survenue plus précoce, et elle est plus distale et plus diffuse.
• Elle est moins souvent symptomatique sous forme de claudication en raison de la neuropathie associée, et les douleurs de décubitus sont assez rares même si l’artérite est sévère.
• L’artériopathie conduit à un état d’ischémie chronique responsable d’une mauvaise trophi-cité tissulaire avec une sensibilité accrue aux traumatismes et d’une restriction du potentiel de cicatrisation. Toute hypoxie entraîne un ralentissement, voire un arrêt des processus de cicatrisation et favorise une infection locale.
• L’AOMI est la principale cause du retard de cicatrisation des plaies du diabétique. Sa prévalence chez le diabétique est de 10 à 40 %.
L’infection
L’infection fait la gravité de la plaie du pied. Elle aggrave les troubles trophiques, mettant en péril le(s) membre(s) et parfois le patient. » Dans l’immense majorité des cas, elle n’est pas la cause première d’une plaie mais une complication d’une plaie du pied diabétique à risque, c’est-à-dire avec neuropathie, AOMI et/ou déformation. Elle survient dans un contexte de plaie chronique souvent mal prise en charge car la décharge est le meilleur anti-infectieux au début d’une ulcération du pied diabétique », explique Georges Ha Van. L’infection serait plus fréquente chez le diabétique en raison du déficit des défenses cellulaires avec de nombreuses anomalies des polynucléaires aggravées par l’hyperglycémie. On distingue les infections superficielles, en général mono-microbienne à cocci Gram+ touchant la peau et tissu sous-cutané, profondes, exposant les tendons, aponévroses, fascia et, selon la sévérité, les infections modérées sans signe d’extension régionale ou générale et sévères avec syndrome systémique inflammatoire.
Étiologies
• Les plaies du pied ne sont pas dues au diabète lui-même mais à une association de facteurs mécaniques externes sur un terrain associant une perte de sensibilité protectrice cutanée et, de plus en plus souvent, une insuffisance de la perfusion cutanée. Le traumatisme externe est très souvent en lien avec les chaussures.
• L’hyperglycémie chronique est responsable de perturbations précoces de la microcirculation, mais on ne connaît pas encore bien les mécanismes liant l’hyperglycémie aux perturbations fonctionnelles et histologiques observées.
• Le diabète ne semble pas intervenir directement sur l’artériopathie, mais il potentialise les facteurs de risque d’athérosclérose ou aggrave l’athérome constitué. Il s’accompagne souvent de facteurs de risque vasculaire : HTA, hyperlipidémie, tabac. L’hyperglycémie s’associe à des anomalies qualitatives des lipoprotéines, pourrait favoriser les complications thrombotiques et être un agent causal de l’accélération du vieillissement de la paroi artérielle.
Situations à risque
Les facteurs déclenchants
À l’origine de la lésion, on trouve pratiquement toujours une blessure provoquée par des micro-traumatismes passés inaperçus : chaussures inadaptées, source de chaleur non ressentie, ongle agressif, hyperkératose fissurée, autopédicurie traumatisante… Bénigne chez le sujet normal, elle est catastrophique chez les diabétiques à risque podologique.
Les facteurs de risque
→ Antécédents d’ulcération chronique ou d’amputation.
→ Neuropathie périphérique : présente chez 90 % des diabétiques avec ulcération du pied.
→ Artériopathie des membres inférieurs, présente dans 50 % des ulcérations du pied diabétique.
→ Déformations des pieds consécutives à la neuropathie motrice ou non directement liées au diabète à type d’hallux valgus (déviation en dehors du gros orteil ou « oignon ») ou de quintus varus (saillie de la tête du 5e métatarsien).
→ Rigidité articulaire : la limitation des amplitudes articulaires semble impliquée dans le mécanisme de l’augmentation des pressions plantaires et dans la survenue des ulcérations. En cause, la glycation des protéines de la peau, des tissus mous et des articulations, conséquence de l’hyperglycémie chronique.
→ Autres : âge du patient et durée d’évolution du diabète multiplient par 2 à 4 le risque d’ulcération du pied, rétinopathie et/ou néphropathie, isolement, facteurs psychologiques (déni de la maladie, attitude négative…), mauvaise hygiène.
Signes cliniques
Il existe plusieurs tableaux cliniques des plaies. Les ulcères neuropathiques sont beaucoup plus fréquents que les plaies purement ischémiques, mais la majorité des plaies associent neuropathie et artériopathie périphérique et sont dites neuro-ischémiques.
En cas d’atteinte neuropathique
Le pied neuropathique est chaud, sec, « décharné », les veines du coup du pied (= du dessus) sont turgescentes, associées à un pouls qui donne l’impression de rebondir. Le pied est souvent très creux, avec une hyperkératose en regard de la tête des métatarsiens. La sensibilité est nettement diminuée voire abolie et les réflexes achilléens, souvent absents.
• Description. Le MPP est l’ulcération neuropathique par excellence, « un durillon qui a mal tourné », résume le Dr Ha Van. C’est une ulcération à l’emporte-pièce, non douloureuse, toujours entourée d’un halo d’hyperkératose et siégeant préférentiellement sous la tête des métatarsiens ou à la face plantaire des orteils. Le principal danger est l’infection se propageant rapidement aux parties molles et aux structures osseuses sous-jacentes.
• Mécanisme. En réponse à une hyperpression localisée et un cisaillement, la peau s’épaissit. Sous cette hyperkératose se développe une vésicule inflammatoire qui s’agrandit et dissèque le tissu environnant avec la persistance de l’hyperpression. Cette vésicule finit par s’ouvrir au milieu de la zone d’hyperkératose et par favoriser l’apparition d’une infection d’autant plus grave que la vésicule met en contact l’extérieur et les structures profondes du pied.
• Description. C’est une complication gravissime de la NP diabétique aboutissant à des déformations catastrophiques, source d’instabilité ostéo-articulaire et conduisant parfois à l’amputation. Relativement indolore et souvent unilatérale, cette atteinte osseuse peut toucher un ou plusieurs os du pied. En phase aiguë, elle passe inaperçue alors que bien traitée, elle est réversible à 100 %.
• Mécanisme. L’atteinte évolue en 2 phases :
→ phase aiguë réversible : signes inflammatoires locaux et œdème souvent volumineux et chaud aboutissant en l’absence de décharge à une lyse osseuse et articulaire avec fractures spontanées et subluxations en l’absence de décharge. À cette phase, le pied de Charcot ressemble à une algodystrophie, une fracture, une entorse, une crise de goutte ou une phlébite ;
→ phase chronique irréversible : au bout de 2 à 6 mois, une reconstruction osseuse pérennise les déformations importantes rendant le chaussage difficile, par exemple, pied en « tampon buvard » avec convexité de l’arche plantaire. Cela favorise l’apparition d’ulcérations sur la face plantaire du médio-pied, région qui normalement n’est pas en contact avec le sol lors de la marche.
En cas d’atteinte artérielle
Le pied ischémique est froid, dépilé, cyanotique, avec érythrose de déclivité (voir Dico+ p. 36) ; les pouls sont amortis, voire absents, et il n’y a pas d’hyperkératose.
• Description. Les ulcères ischémiques sont caractérisés par une plaie plus à risque d’infection qui, associée à l’ischémie, peut aboutir à une gangrène (voir Dico+ p. 37) sèche et limitée, ou à une gangrène humide avec extension vers les tissus profonds. La plaie ischémique peut être très douloureuse sauf en cas de cas neuropathie concomitante. Elle survient le plus souvent sur les faces dorsales ou latérales du pied ou des orteils. La perte de substance est bien limitée, atone parfois, avec une zone de nécrose entourée d’un halo érythémateux inflammatoire synonyme de gravité. Le fond est un tissu fibrinoïde jaunâtre et adhérent, douloureux lors des soins.
• Mécanisme. D’origine essentiellement mécanique, ces ulcères résultent pour la plupart d’un frottement excessif entre le pied et la chaussure, d’où leur siège de prédilection sur les bords du pied ou la face dorsale des orteils en cas de griffe ou d’ongle incarné ou de soins de pédicurie traumatisants. Le talon peut être touché : fissure hyperkératosique surinfectée ou en cas d’alitement, avec une hyperpression localisée sur un terrain d’insuffisance circulatoire.
• Mécanisme. L’association d’une infection des parties molles et d’une insuffisance circulatoire est responsable de nécrose tissulaire distale avec gangrène parcellaire portant le plus souvent sur un ou plusieurs orteils.
• Description. En l’absence de surinfection ou à la suite de son traitement, la gangrène est sèche et l’atteinte limitée. La partie nécrosée se dessèche et tombe spontanément, on parle d’auto-amputation par momification. En cas de surinfection, la gangrène est humide avec zone de nécrose entourée d’un halo inflammatoire voire purulent ; la nécrose peut s’étendre et nécessiter une amputation chirurgicale.
L’atteinte infectieuse
• Mécanisme. « L’infection survient le plus souvent après une plaie mal prise en charge. La plaie s’infecte dans un premier temps au niveau des parties molles puis, seulement dans un second temps après quelques semaines, au niveau de l’os, infecté par contiguïté avec le sepsis des parties molles » précise le Docteur Ha Van.
→ Les infections superficielles ne mettent pas en danger le membre inférieur. Le plus souvent c’est une cellulite limitée, sans lymphangite, ni abcès. Il n’y a pas de signes généraux (fièvre, hyperleucocytose), l’infection est le plus souvent monobactérienne (staphylocoque doré) et relève d’une antibio-thérapie probabiliste.
→ Les infections profondes. Cellulite extensive avec cordon lymphangitique, abcès profond, phlegmon des gaines (voir Dico+ p. 37). septicémie, ces infections non jugulées peuvent aboutir à une amputation. Elles en seraient la cause directe 1 à 2 fois sur 4 chez le diabétique. Ces infections profondes comportent le risque d’ostéite dont le diagnostic repose sur l’imagerie et le sondage (voir plus loin).
Diagnostic
La neuropathie
Le risque podologique lié à la neuropathie est recherché par le test au monofilament de Semmes-Weinstein de 10 grammes au moins une fois par an chez tous les diabétiques. Test simple et fiable, il se pratique avec un monofilament de nylon 5,07 de Semmes-Weinstein calibré pour exercer une pression de 10 g lorsqu’il est appliqué perpendiculairement à la surface de la peau, avec suffisamment de force pour le courber. Il s’applique au niveau des pulpes des gros orteils et de la tête des 1er et 5e métatarsiens à 3 reprises en dehors d’une zone d’hyperkératose. Deux erreurs sur trois sites de test signifient que le patient peut se blesser sans s’en apercevoir en raison de la neuropathie.
L’AOMI du diabétique
L’abolition des pouls pédieux et tibial postérieur est l’un des premiers signes cliniques. L’aspect du pied ischémique peut aussi orienter.
• Méthodes non invasives.
→ Détermination de l’index de pression systolique (IPS) qui est le rapport de la pression systolique mesurée à la cheville sur la pression systolique de bras avec deux décimales après la virgule.
– Si 0, 90 < IPS < 1,30 : normal ;
– Si IPS < 0,90 : AOMI ;
– Si IPS > 1,30 : ininterprétable en raison d’une médiacalcose fréquente chez le diabétique, calcification d’une partie des artères entraînant une rigidité artérielle excessive.
→ L’écho-doppler les membres inférieurs permet un bilan morphologique et hémodynamique complet pour le dépistage et le suivi de l’AOMI ou de la revascularisation.
• Méthodes invasives. L’artériographie permet un diagnostic lésionnel précis. Elle est indispensable avant toute revascularisation posée sur la clinique et l’écho-doppler.
L’infection
Son diagnostic est clinique et non microbiologique. Pour identifier la gravité, on utilise la classification de l’International Working Group on the Diabetic Foot (IWGDF) et l’Infectious Diseases Society of America (IDSA). La sévérité de l’infection est jugée selon la classification du Consensus international sur le pied diabétique (grades 1 à 4). En présence de signes d’infection locale de type rougeur, écoulement purulent, chaleur, tuméfaction, douleur, zone qui ressemble à un abcès, on réalise :
→ un prélèvement bactériologique ;
→ en cas de contact osseux, une radiographie diagnostique l’ostéite. L’IRM précise la présence et la localisation des infections profondes des tissus mous (tissu graisseux, muscles, tendons et ligaments, vaisseaux sanguins et lymphatiques, nerfs périphériques…) ;
→ une biopsie osseuse est le meilleur moyen d’isoler la bactérie responsable d’une ostéite avérée avant d’instaurer une antibiothérapie probabiliste ;
→ recherche d’une infection systémique, biologie, et hémocultures si température > 38,5 °C. Certaines plaies d’allure superficielle peuvent générer des atteintes osseuses sous-jacentes.
Suivi
Prise en charge du pied à risque
Elle repose sur le dépistage et l’évaluation du risque et la mise en œuvre de mesures de prévention. Après cicatrisation d’une lésion ou après une amputation, la prévention secondaire des lésions doit être particulièrement intensive compte tenu du risque élevé de récidive.
Prise en charge d’une lésion
Lorsqu’une lésion est constituée, l’origine multi-factorielle des ulcères du pied diabétique nécessite une coopération multidisciplinaire : avec diabétologue, pédicure podologue, podo-orthésiste, chirurgien, médecin de réadaptation physique, angiologue, diététicien, infectiologue, kinésithérapeute, infirmière… Le suivi est codifié (voir tableau p. 40). Objectif ? Une cicatrisation la plus rapide possible, sans séquelle ou avec le moins de séquelles possibles.
Prévention
La prise en charge commence par la prévention de la survenue d’une plaie des pieds à risque podologique, puis avec la prévention secondaire après la survenue d’une plaie.
Gradation du risque podologique
Médecins et pédicures-podologues évaluent le risque de survenue d’une ulcération chronique ou d’une amputation dans le but d’établir la gradation du risque podologique du patient (voir tableau) et de lui proposer une prise en charge et une prévention ciblée.
Tout diabétique doit bénéficier d’au moins un examen annuel des pieds à la recherche :
→ d’antécédent d’ulcération chronique du pied ou d’amputation ;
→ de neuropathie périphérique au moyen du test au monofilament de 10 g ;
→ d’artériopathie par la palpation des pouls périphériques et la mesure de l’IPS ;
→ de déformations des pieds.
Conduite selon le grade
En l’absence de neuropathie périphérique, il n’y a pas de conseil spécifique à donner, hormis des règles d’hygiène de base identiques à celle d’une personne non diabétique.
« Pied insensible = pied en danger » est la maxime du diabète, mais les problèmes graves ne sont pas systématiques car le point de départ est presque toujours une blessure évitable.
• Chaque jour : laver les pieds en bien séchant entre les orteils avec du papier absorbant en évitant les bains de pieds prolongés ; changer de chaussettes ; choisir des chaussures confortables en cuir ou tissu souple ; faire des mouvements d’assouplissement des pieds de type flexion/extension au niveau de l’avant-pied, de la cheville et des orteils ; automassage en faisant rouler une balle de tennis sous les pieds en position assise ; hydrater les pieds secs avec un hydratant (Dexeryl, Alkidia, Pedimed, Alvadiem.) car la corne se fissure à la marche ;
• En cas de blessures superficielles : laver la plaie avec de l’eau et du savon de Marseille. Utiliser un pansement gras (Tulle gras, Adaptic, Jelonet…) et une compresse fixée par une bande. Ni sparadrap ni antiseptique coloré. Consulter en cas de plaie inflammatoire ou de cause inconnue. Vérifier la vaccination antitétanique.
• En cas de lésion des pieds (coupure, rougeur boursouflée…), avertir immédiatement le médecin, même en l’absence de douleur ; limiter la marche et ouvrir la chaussure en regard de l’ulcération.
• Chaque jour aussi.
→ Examiner ou faire examiner ses pieds avec un bon éclairage et un miroir assez grand à la recherche de : cor, durillon fissuré ou gonflé sur les orteils ou sous le pied, rougeur autour des ongles, fissures ou macération entre les orteils, plaie sur ou sous le pied.
→ Ne jamais marcher pieds nus, ni sans chaussette dans les chaussures.
→ Passer la main dans les chaussures pour rechercher un corps étranger ou une aspérité.
→ Prévenir les facteurs déclenchants. Combattre les six ennemis des pieds à risque.
→ Choisir ses chaussants. Les chaussures neuves, trop serrées ou ouvertes, voire usées sont à bannir. Une couture saillante ou le pli d’une chaussette frottant un pied fragilisé peuvent blesser. Porter des chaussettes, même en été. Préférer le cuir, souple sur le dessus, sauf à la pliure des orteils pour éviter que le pied ne frotte davantage sur le cuir du dessus, et une semelle épaisse et assez rigide. Privilégier les lacets et les tennis à semelle épaisse.
→ Enlever la corne. La corne se forme au niveau des points d’appui ou de frottement. Au niveau des talons, elle entraîne fissures et crevasse pouvant s’infecter. L’hyperkératose fait le lit du mal perforant. La corne se retire avec un instrument non agressif (pierre ponce), ni « fer », ni « chimie ». Hydrater la peau pour éviter son retour. Sinon, voir un pédicure-podologue.
→ S’occuper de ses ongles. Privilégier le pédicure-podologue. Épais, incarnés ou pouvant blesser les orteils voisins, les ongles sont coupés pas trop court et plutôt à angle droit avec des ciseaux à bouts ronds. On peut limer les coins, les raccourcir et les désépaissir régulièrement avec une lime en carton.
→ Éviter les mycoses, sources de fissure et donc de voie d’entrée pour les germes. Chasser les sources de macération : pas de bains de pieds > 5 minutes, séchage soigneux des pieds et des espaces interdigitaux, changement de chaussettes (coton à privilégier) tous les jours. Préférer des chaussons fermés à la maison aux mules. Préférer les antimycosiques en poudre.
→ Chasser les corps étrangers. Gravier, aiguille, des ennemis peuvent se glisser dans une chaussure même fermée. Toujours glisser sa main dans les chaussettes et les chaussures avant de les enfiler. Ne pas marcher pieds nus. Se baigner avec des chaussons de planche à voile.
→ Prévenir les brûlures. Un pied insensible peut être brûlé par une bouillotte, un radiateur soufflant, un cataplasme… Ne jamais utiliser d’objet chauffant sur des pieds. Se méfier des sources de chaleur (cheminée, radiateur.). Avant de plonger ses pieds dans l’eau, vérifier sa température avec un thermomètre ou la main.
→ En cas de blessure. La survenue d’une plaie chez un diabétique à risque, à partir du grade 1, doit conduire, dans un délai inférieur à 48 heures, à adresser le patient vers une équipe multidisciplinaire spécialisée ou à une hospitalisation immédiate. « L’orientation vers un centre spécialisé permet aussi de faire entrer les patients de grade 2, voire grade 1, dans un parcours de prévention », précise le professeur Ariane Sultan, du service Nutrition diabète du CHU de Montpellier (34). Cela est valable « même en présence d’un cor relativement facile à traiter » mais qui montre la non-acquisition des mesures de prévention.
Les soins de pédicurie
Parce que le rôle du pédicure-podologue dans le pied diabétique est essentiel, deux types de forfaits annuels de soins de prévention sont pris en charge sur prescription :
• pour les patients à risque podologique de grade 2 : 5 séances par an maximum ;
• pour les patients diabétiques à risque podologique de grade 3 :
→ en cas de plaie en cours de cicatrisation : 8 séances par an maximum ;
→ sans plaie du pied : 6 séances.
• Déroulé d’une séance : examen du pied et gradation du risque, soins de pédicurie-podolo-gie, éducation du patient, évaluation du chaussage et conseils sur le chaussage adapté.
• Diagnostic et suivi. Lors de la première séance, un bilan-diagnostic podologique initial est réalisé pour établir un plan de soins.
Au terme du traitement ou chaque année, une fiche de synthèse est transmise au médecin traitant qui peut intervenir sur le protocole thérapeutique. Le patient peut consulter ces documents.
• Conditions de remboursement. Séances prescrites par tout médecin et exécutées au cabinet ou à domicile ou établissement de soins.
• D’ici fin 2023-début 2024, tout pédicure-podologue pourra proposer et facturer une séance de gradation pour tout patient diabétique une fois par an sans prescription médicale.
Orthèses plantaires et chaussures thérapeutiques
Elles visent à diminuer l’hyperpression au niveau des sites de prédilection de l’ulcération. Ces mesures rencontrent trop souvent des obstacles pratiques et financiers avec un tarif souvent de 150 euros pour des semelles !
Les orthèses plantaires ou semelles orthopédiques sont amovibles, fabriquées sur mesure par des pédicures-podologues ou des podo-orthésistes et doivent pouvoir être placées dans une chaussure de série.
• Indications : correction de statique défectueuse ou anomalie du pied, soulagement des appuis plantaires excessifs par compensation ou correction des hyperpressions.
• Prise en charge : 14,43 € (> pointure 37) l’unité (dépassement possible), corrections à porter comprises, et 27,34 € pour la semelle « monobloc en résine coulée, moulage du pied » réservée aux affections neurotrophiques du pied.
Petite orthèse réalisée en élastomère de silicone et moulée directement sur le pied, une orthoplastie sert à corriger des déformations d’orteils, à protéger des frottements dans la chaussure ou à pallier l’absence d’un orteil. La prise en charge est symbolique, de 3,27 € pour une attelle de correction orthopédique de pied valgus ou varus. Un dépassement est possible. À ne confier qu’à un spécialiste du pied diabétique à risque selon le Dr Ha Van.
Ce sont des chaussures à tige en cuir ou tissu extensible comprenant un soufflet, des lacets élastiques, deux renforts – à l’avant et à l’arrière de la tige -, et d’une semelle. Le tour des malléoles comprend un bourrelet mousse et le talon, un dispositif antiglissoir. Exemples : Darco, Neut (Podartis Activity…), Podowell…
• Indication : pieds à risque, notamment pieds neurologiques, vasculaires et orthopédiques avec risque évolutif en termes de douleur et de raideur. ; chaussage impossible en chaussures de série avec orthèses plantaires.
• Prise en charge. Ces « chaussures thérapeutiques de série (CHTS) » à la LPP sont délivrées par paire, leur prise en charge est assurée pour une durée minimale d’un an pour les adultes, au tarif non réglementé de 71,65 € la paire. Éviter la surprescription aux patients sans risque.
• Indication. Les podo-orthèses de classe A sont indiquées en cas d’amputation, de trouble volumétrique non appareillable par des chaussures de série, thérapeutiques ou non.
Les classes B s’adressent aux patients diabétiques de grade 2 ou 3, avec pieds inchaussables en chaussures de série, avec orthèses plantaires, en prévention primaire et secondaire.
• Prise en charge. Deux paires à la première attribution, renouvellement non systématique. Tarif LPP de 737,04 € pour la classe A et de 808,94 € pour la B ; prix unitaires réglementés, donc pas de dépassement. Le coût du moulage et les réparations sont en sus.
La prise en charge des classes B destinées à obtenir la cicatrisation d’une plaie chronique du pied diabétique à risque est subordonnée à leur prescription par un diabétologue ou un service spécialisé et à une entente préalable.
Son traitement
Objectifs
La prise en charge vise à diminuer le temps de cicatrisation, le taux d’amputation et la mortalité et à améliorer la qualité de vie. Les soins locaux n’aboutiront pas à la guérison de la lésion sans une mise en décharge rigoureusement observée. La prévention secondaire est indispensable.
Stratégie thérapeutique
« Le parcours de soins tient compte de la plaie ou de la présence d’une atteinte artérielle, mais aussi des comorbidités et de l’évaluation globale de la personne », explique la Pr Ariane Sultan. « Toute plaie sur un pied diabétique à risque doit être vue dans un centre de référence du pied », complète le Dr Ha Van.
Évaluation générale
Devant une plaie, une évaluation recherche les comorbidités à haut risque telles que les insuffisances cardiaque et rénale, la précarité sociale et les troubles psychiatriques, ainsi que les antécédents médicaux (infarctus…), et s’accompagne d’examens clinique et biologique.
Évaluation des plaies
L’acronyme « MIDAS » rappelle les éléments de la prise en charge d’une plaie :
→ M pour métaboliques : obtenir un équilibre glycémique et lutter contre la dénutrition. Un état de dénutrition altère toutes les phases de la cicatrisation, peut expliquer un retard de cicatrisation et augmente le risque d’infection ;
→ I pour infections : antibiotique si et uniquement si des signes d’infection sont présents ;
→ D pour décharge : mise en décharge du pied atteint, ou du moins des troubles trophiques ;
→ A pour artériopathie : prise en charge de l’artériopathie des membres inférieurs ;
→ S pour soins locaux.
Le parcours à suivre
• Elle est définie par l’absence de signes d’infection, de nécrose et d’atteintes des structures profondes et la présence de pouls périphériques.
• À faire : mise en décharge et soins locaux. Le médecin généraliste prend contact avec une structure spécialisée (voir En savoir+ p. 42) afin de bénéficier d’une télé-expertise si besoin.
Au bout de 15 jours, la plaie doit avoir diminué de 25 % et montrer des signes de bourgeonnement ou une ré-épithélisation. Si c’est le cas, poursuivre le traitement en cours. Sinon, le patient est adressé à une structure spécialisée dans les 48 heures.
• Elle est définie par la présence d’une nécrose sèche, d’une mise à nu de l’os de l’articulation ou du muscle, de signes d’ischémie critique, de signes d’infection et d’un terrain à risque.
• À faire : orienter vers une structure spécialisée en moins de 48 heures.
• Elle est définie par la présence d’un abcès, d’une gangrène humide ou extensive, de signes de sepsis, d’une fièvre ou d’une ischémie critique douloureuse.
• À faire : hospitalisation en urgence dans une structure spécialisée car le pronostic vital et de la jambe est engagé.
Les traitements
Traitement de la neuropathie
Aucun médicament n’agit sur le mécanisme physiopathologique de la neuropathie qui peut être douloureuse au début. Souvent nocturnes, les douleurs aiguës sont à type de dysesthésies (sensations de brûlures, picotements, douleurs à l’effleurement), paresthésies (sensation d’aiguille, de pied dans la glace, engourdissement,…) et de douleurs musculaires. Le diagnostic est fait grâce au questionnaire DN4. La prise en charge fait appel aux antiépileptiques (prégabaline, lamotrigine, topiramate.) et aux antidépresseurs (amitriptyline.).
Traitement de l’artériopathie
• Prise en charge des facteurs de risque : tabac, dyslipidémies, HTA, surpoids et sédentarité.
• Traitement médicamenteux. Il est de faible efficacité. Sont utilisés les antiagrégants plaquettaires (aspirine à faible dose, clopidogrel…), les statines contre le cholestérol.
• Traitement chirurgical. L’angioplastie et le pontage distal sont les principales techniques de revascularisation (voir Dico+ p. 41). Leurs indications varient selon l’état du patient, la valeur de l’IPS et la clinique.
Traitement des infections
L’antibiothérapie vise à contrôler l’infection clinique. Les antibiotiques sont adaptés aux germes des prélèvements, au degré de l’infection, au patient, au type de plaie, à leurs propriétés de diffusion… La durée de traitement varie de 2 à 12 semaines selon l’infection : superficielle, simple, modérée à sévère et ostéite.
Traitement des plaies
Il associe décharge et soins locaux (voir ci-bas).
Traitement de la plaie
La mise en décharge
« Une plaie non déchargée est une plaie non traitée », souligne la Pr Ariane Sultan. L’efficacité de la prise en charge de la plaie dépend de la diminution des contraintes mécaniques qui entretiennent l’inflammation et freinent le processus de cicatrisation. « La décharge est le maître mot pour une plaie qui est toujours d’origine mécanique », insiste le Dr Ha Van. En l’absence de décharge, le risque d’infection de la plaie est majeur. La pression réalisée par l’appui provoque une exsudation de la plaie qui est un « nid à microbe ». Les contraintes mécaniques entretiennent une « démolition » permanente des tissus et finissent par mettre à nu des tendons, des capsules articulaires, des cartilages, des ligaments ou des aponévroses et, au pire, de l’os, structures peu vascularisées incapables de se défendre contre l’infection.
• Les chaussures thérapeutiques à usage temporaire (CHUT) sont souvent prescrites en cas de lésions et choisies en fonction de la localisation de la plaie. Il existe des CHUT à décharge de l’avant-pied et de l’arrière-pied (lire Porphyre n° 537, novembre 2017) : Barouk (Mayzaud), Podalux WPS (Neut), Sanidiab (Mayzaud)… Pour l’arrière-pied : TeraHeel (Podartis), HeelWedge (Darco)… Elles permettent une déambulation raisonnable pour les actes essentiels du quotidien et nécessitent un apprentissage de la marche, voire une aide technique, canne ou déambulateur.
• Bottes amovibles. En matériau léger et rigide, elles ressemblent un peu à des chaussures de ski que le patient peut retirer la nuit (Aircast…). Le caractère amovible pose des problèmes d’observance. Présence d’une infection, d’une ischémie, d’œdème, de déformations importantes, de plaies multiples les contre-indiquent.
• Botte plâtrée ou en résine. C’est le dispositif de référence recommandé par les sociétés savantes pour la décharge de l’ulcère neuropathique. Son caractère inamovible permet la guérison dans 73 à 100 % des cas entre 30 et 63 jours
• Autres techniques de décharge.
→ L’alitement, est réservé aux cas sévères et aux plaies bilatérales. Il est difficile à faire accepter, surtout sur des périodes prolongées, et doit être évité au maximum.
→ Canne de marche, béquilles ou déambulateur sont parfois difficilement envisageables compte tenu des troubles proprioceptifs liés à la neuropathie. Ils présentent aussi un risque d’ulcération de l’autre pied à cause des contraintes mécaniques accrues.
→ Le fauteuil roulant peut être utile en cas de lésions sur les deux pieds ou en l’absence d’autre solution. Être attentif sur le risque d’appui sur le pied atteint lors des transferts.
Le soin de la plaie
Il est semblable à celui de toute plaie chronique (voirPorphyre n° 548, déc 2018-Janv. 2019).
Le lavage de tout le membre atteint à l’eau savonneuse est privilégié, avec un savon doux, liquide, sans parfum ni conservateur. Rincer, puis sécher doucement et minutieusement y compris entre les orteils pour prévenir le risque de macération.
La détersion est indispensable pour favoriser la reprise du processus cicatriciel avec un double objectif :
→ le parage de la plaie, c’est-à-dire la préparation du lit de la plaie par le nettoyage des fragments de tissus dévitalisés présents dans la plaie qui bloquent le processus cicatriciel et entraînent un risque infectieux important ; nettoyer la plaie au sérum physiologique
→ le maintien d’un milieu humide stimulant la prolifération de tissus sains.
• Détersion mécanique. « Pas de détersion mécanique sur une plaie sans accord médical, et sans connaître l’état vasculaire du membre atteint » insiste Ariane Sultan. L’hyperkératose sur le pourtour de la plaie doit être retirée, après avoir été ramollie si besoin.
• Détersion autolytique. Beaucoup moins efficace que celle mécanique, la détersion auto-lytique repose sur l’utilisation de pansements actifs qui renforcent la détersion enzymatique naturelle en maintenant un milieu humide.
• Choix du pansement. Il dépend de la phase de cicatrisation, de l’importance des exsudats, du coût et doit faire l’objet d’une alliance thérapeutique. Pansement quotidien s’il y a des signes d’infection et ou des exsudats, puis tous les 2 jours. Hors momification :
→ plaie à deterger : hydrogel qui apportera l’eau nécessaire ; il peut être recouvert d’un tulle, d’une interface ; Hydroclean est un hydrogel « irrigo-absorbant » avec solution de Ringer.
→ peu exsudative : alginate, hydrogel ;
→ très exsudative : alginate, hydrocellulaire superabsorbant, hydrofibre ;
→ infectée : alginate, hydrofibre, pansement au charbon ou à l’argent.
Le pansement UrgoStart, grâce à son imprégnation d’octasulfate de sucrose, inhibe les métallo-protéases, enzymes présentes dans la plaie qui retardent l’épidermisation. Il raccourcit le délai de cicatrisation des ulcères neuro-ischémiques n’atteignant pas la structure osseuse, sans signe d’infection (Étude Eplorer, HAS 28 juillet 2028).
→ au stade d’épithélialisation : tulle, interface, hydrocellulaire.
• Autres techniques : pression négative, facteurs de croissance…
Hormis cas très particuliers, bannir : antiseptique, colorant (éosine, Bétadine…) pouvant retarder la cicatrisation et masquer l’infection, hydrocolloïdes et hydrocellulaires sur plaies ischémiques, adhésifs sur peaux fragilisées.
Les conseils aux patients
Adhésion thérapeutique
• Le maître mot est la décharge. Insister et revenir sans arrêt sur l’intérêt de la décharge qui est le « vrai pansement de la plaie ». Même en cas de momification, de nécrose, on ne marche pas !
• En cas de port de chaussure de décharge, la mettre même pour faire un mètre dans son domicile, notamment la nuit pour faire pipi.
Automédication
Ni fer ni coricides
Banni le « fer » sur les pieds (lame, ciseaux pointus, râpe métallique.), et tout corricide, pansement ou solution sur un pied à risque, sauf accord du médecin ou du pédicure-podologue. Certains pédicures utilisent une vaseline salicylée à 10 % sur des talons très fendillés en alternance avec la vaseline, mais c’est du ressort de spécialistes.
Ne pas conseiller d’hydrocolloïde pour une ampoule, contre-indiqué en cas d’infection.
Face à une plaie
En cas de plaie même minime chez un patient diabétique, lui demander quel est son grade ou s’il a une neuropathie. Sans réponse, l’orienter vers le médecin ou un pédicure-podologue pour qu’il soit gradé et conseillé.
Vie quotidienne
Cibler les conseils
Attention de ne pas surcharger de conseils inutiles les patients diabétiques qui ne sont pas à risque ! Aucun conseil particulier hormis ceux d’hygiène de base pour les grades 0. Pour les patients avec neuropathie et artérite, sans déformation, adaptez vos conseils (voir Prévention p. 37). Si le patient n’est pas gradé, orientez-le vers un pédicure-pédologue qui assurera la gradation et les premiers conseils d’hygiène.
Les orthoplasties
Exceptionnellement, un pédicure-podologue peut faire des petites orthoplasties en présence de petites griffes d’orteils congénitales ou en raison de chaussures pointues, ou proposer des orthèses Epitact ou autres en silicone. Ne pas les conseiller en présence de neuropathie « parce que si l’orthoplastie roule sous le pied, le patient ne le sentira pas », explique Véronique Labbé-Gentils, pédicure-podologue, enseignante, spécialiste des plaies et du pied diabétique.
Le chaussant
Conseiller des chaussures de série à tous les patients de grade 0 qui n’ont pas d’orteil en griffe, pas de zones d’hyperpression…
Une bonne chaussure, selon Véronique Labbé-Gentils « est dotée d’un talon de 3,5 à 4 cm maximum pour éviter de reporter les pressions sur l’avant-pied et les têtes métatarsiennes et que les orteils se mettent en griffe. Sa largeur doit être celle de la largeur des têtes métatarsiennes (= au niveau de lhallux valgus). Il faut une bonne semelle, antidérapante, un peu surélevée derrière. La chaussure doit être souple quand on plie l’avant et l’arrière. Alterner un jour sur deux avec une autre paire pour les laisser respirer et sécher ».
En cas de pieds difficilement chaussables, orienter vers un pédicure-podologue pour des conseils de chaussage.
(1) « Importance de la décharge dans le traitement des lésions du pied diabétique », Revue médicale suisse, juin 2011.
Avec l’aimable participation de la Pr Ariane Sultan, service Nutrition & diabète du CHU de Montpellier (34), du Dr Georges Ha Van, médecine physique et de réadaptation, unité podologie en diabétologie à la Pitié Salpêtrière à Paris (75), président du groupe « Le pied diabétique » de la Société francophone du diabète, et de Véronique Labbé-Gentils, podologue et consultante plaies à l’hôpital Avicenne et Jean Verdier (93), enseignante à l’Institut national de podologie et au DU Pied diabétique.
Dico+
→ La macroangiopathie diabétique est une atteinte des artères musculaires allant de l’aorte jusqu’aux petites artères distales ; d’un diamètre supérieur à 200 µm.
Info+
→ Une neuropathie est constatée dans au moins 60 % des plaies du pied diabétique ; en l’absence de neuropathie, une artérite est observée dans 15 % des cas ; une artérite est associée à une neuropathie dans 25 % des cas, on parle alors de plaies neuroischémiques.
(1) « Guide Parcours de soins – Diabète de type 2 de l’adulte », Haute Autorité de santé, mars 2014.
Entretien “L’âge et les comorbidités sont des facteurs associés au pronostic de la plaie”
Pr Arian Sultan, professeur des universités et praticien hospitalier dans le service Nutrition et diabète du CHU de Montpellier (34).
La prise en charge du pied diabétique est-elle codifiée ?
Le parcours de soins du patient « pied diabétique », validé par la Société francophone du diabète (SFD), tient compte non seulement de la plaie ou de la présence d’une atteinte artérielle, mais aussi des comorbidités et de l’évaluation globale de la personne. L’âge de plus en plus avancé et les comorbidités sont des facteurs associés au pronostic de la plaie. Un patient qui a des antécédents d’infarctus, traduisant un diabète évolué, est plus à risque d’amputation que celui qui n’en a pas. Un des gros travaux de la SFD est de recenser les centres experts « Pied diabétique ». Nous sommes en train de finaliser l’enquête pour savoir qui répond aux critères de centre expert. Cet annuaire des centres experts est en lien avec le parcours de soins et nous mettons tout en œuvre pour que ce parcours devienne faisable afin d’améliorer le pronostic des patients avec plaie du pied. Le référentiel de la SFD « Pied diabétique » est en cours de mise à jour, avec une publication prévue début 2024.
Info+
→ Neuropathie, rétinopathie et glomérulopathie diabétiques sont les complications spécifiques du diabète, regroupées sous le terme de microangiopathie diabétique. Elles sont souvent associées.
→ Une mycose interdigitale ou unguéale peut se surinfecter et engendrer secondairement une plaie qui prendra rapidement une allure nécrosante sur un pied artéritique.
Dico+
→ Cellulite : inflammation aiguë, extensive, diffuse des tissus pleins, caractérisée par une hyperémie, une infiltration leucocytaire et un œdème sans nécrose cellulaire, ni suppuration.
Due le plus souvent à Streptococcus pyogenes à la suite d’une blessure, elle concerne la peau et des structures sous-cutanées.
→ Érythrose de déclivité ou « signe de la chaussette » concerne la teinte rouge des téguments au niveau de la cheville et du pied s’arrêtant au milieu du mollet, observée en cas d’AOMI, lorsque le malade laisse pendre la jambe atteinte.
Dico+
→ Gangrène ou nécrose : processus morbide caractérisé par la mortification des tissus et leur putréfaction.
→ Lymphangite : inflammation des vaisseaux lymphatiques.
→ Phlegmon : inflammation du tissu conjonctif superficiel ou profond périviscéral.
Point de vue
Georges Ha Van, médecin spécialisé en médecine physique et de réadaptation et responsable de l’unité de podologie en diabétologie de l’hôpital Pitié Salpêtrière » de Paris (75) ; directeur I d’enseignement du DU « Le pied diabétique » à la faculté de ! médecine de Paris et président du groupe de travail « Le pied diabétique » de la Société francophone du diabète, auteur du Syndrome du pied diabétique. Prise en charge multidisciplinaire.
Est-ce que tous les patients diabétiques sont condamnés à souffrir de lésions ?
Non. Si une personne diabétique équilibre son diabète toute sa vie, elle peut très bien vivre sans aucun problème aux pieds.
Le patient ne sent vraiment rien avec une neuropathie ?
Il peut mettre le pied dans le feu ou se faire enlever un orteil sans anesthésie, il ne sent rien. S’il a une ampoule, il ne la soigne pas. Et quand on lui dit de ne pas marcher sur sa plaie, il marche quand même car il ne sent pas, donc rien ne l’empêche de le faire.
En l’absence de contrôle glycémique, une plaie peut-elle cicatriser ?
Oui. Un diabétique à haut risque, avec une NP totale, qui fait une plaie du pied aujourd’hui, s’il arrête d’appuyer sur sa plaie à 100 %, n’a plus de plaie dans 8 jours. S S’il a une artérite, on lui fait un doppler aujourd’hui, on lui débouche ses artères « demain si c’est possible », dans les 2-3 mois qui suivent il n’a plus de plaie. Et personne ne s’infecte et personne n’est amputé. La vraie raison de ne pas cicatriser c’est l’artérite. La décharge, c’est l’immobilisation tissulaire totale stricte et permanente de la plaie, c’est-à-dire qu’il ne faut même pas appuyer sur le pied. En cas de plaie, le patient ne doit plus marcher, donc pas sortir de chez lui et porter la chaussure de décharge pour aller aux toilettes trois fois par jour, c’est tout. Ça marche à tous les coups, mais qui arrive à obtenir ça des patients ? La décharge, c’est conflictuel ! Si la décharge ne marche pas, c’est que le patient marche trop.
Que dire aux officinaux ?
La décharge est un traitement monstrueusement important. S’ils parviennent à en remettre une couche sur la décharge, oui, cela va nous aider. Ils peuvent dire : « Vous savez, je connais bien le sujet. Les gens qui portent leur chaussure gardent leur pied, les autres le perdent… » Essayer d’obtenir rapidement une chaussure de décharge car parfois cela est très long. Et se former, notamment sur la décharge !
Info+
→ Suspicion de neuropathie sans grader.
L’Ipswich Touch Test consiste à tester la sensibilité épicritique du patient durant 1 à 2 secondes au niveau de trois sites : pulpe de l’hallux, des troisième et cinquième orteils des deux pieds. L’examinateur teste ces zones avec le bout de son index, sans presser ni taper, le patient ayant les yeux fermés. La présence d’une neuropathie est probable s’il existe une insensibilité sur deux sites ou plus.
Interroger. Une personne diabétique doit consulter si elle ne sent pas bien la chaleur de l’eau ou la fraîcheur du sol avec ses pieds ou ne repère pas tout de suite un corps étranger dans la chaussure ou une couture blessante ou ne sent pas tout de suite si des chaussures neuves sont trop petites ou serrées ou si elle s’est déjà blessé les pieds sans l’avoir perçu. Idem en cas de « sensations bizarres » dans les pieds : fourmillements…
Info+
→ Toute amputation, même mineure, ne doit jamais être décidée sans avoir réalisé au préalable un bilan vasculaire par artériographie pour évaluer la possibilité d’une revascularisation.
Une plaie chronique ischémique ne cicatrisant pas n’est pas synonyme d’amputation systématique !
Dico+
→ L’angioplastie consiste à dilater les artères rétrécies notamment celles situées au niveau du bassin et de la cuisse à l’aide d’un ballonnet et à mettre en place, si nécessaire, un stent pour maintenir le résultat de la dilatation.
→ La revascularisation chirurgicale, réalisée via pontage, consiste à placer un pont – greffon tissé ou veineux -, qui court-circuite la partie malade.
→ La thrombo-endartériectomie consiste, après un abord direct de l’artère, à retirer sa paroi interne pour éliminer les plaques athéromateuses. Source : www.fedecardio.org
En savoir+
→ Le syndrome du pied diabétique – Prise en charge multidisciplinaire, de Georges Ha Van, Elsevier Masson, 2019. Cette « bible » d’un éminent spécialiste s’adresse à tous les professionnels de santé qui œuvrent pour améliorer la prise en charge et l’éducation thérapeutique. Excellent.
En savoir+
→ Suivi du diabète, consultation podologique… www.has-sante.fr, dans les onglets « Toutes nos publications » ou « Professionnels » Actualités > Affections podologiques.
→ La Société francophone du diabète propose de nombreux documents dont les recommandations de l’International working group on the diabetic foot dans l’onglet « Recommandations ». www.sfdiabete.org
→ Le laboratoire Urgo propose un annuaire des unités multidisciplinaires sur le pied diabétique.
En attendant celui de la SFD : https://urgomedical.fr/wp-content/ uploads/2023/03/URGO-Annuaire-BUP-2022-VF.pdf
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