Savoirs Réservé aux abonnés

L’asthme

Publié le 1 juin 2002
Par Claire Manicot
Mettre en favori

Le traitement de l’asthme consiste à endiguer les crises et, au long cours, à les éviter.

Conditions de son efficacité : une prescription adaptée, une bonne observance et une maîtrise des techniques d’inhalation.

Épidémiologie

L’asthme, qui touche de plus en plus d’enfants en France, est une maladie encore mal prise en charge. Si la crise est généralement caractéristique (avec sensation d’étouffement), elle peut aussi se traduire par des quintes de toux sèche, des sifflements bronchiques la nuit ou encore un essoufflement permanent. L’asthme peut alors passer inaperçu, peu à peu évoluer vers un stade plus grave et se dévoiler lors d’une crise sévère, mettant parfois en jeu le pronostic vital.

Par ailleurs, dans le cas où l’asthme est diagnostiqué de façon précoce, il n’est pas toujours bien traité, pour différentes raisons. Le malade, notamment, ne perçoit pas toujours l’intérêt d’un traitement de fond puisqu’il retrouve un état normal entre les crises, redoute les effets secondaires de la corticothérapie (traitement essentiel dans l’asthme) ou utilise mal les aérosols doseurs.

Or l’asthme tue environ 2 000 personnes par an en France (dont un tiers des patients a moins de 35 ans) et constitue la pathologie chronique la plus fréquente chez l’enfant. En plus du facteur héréditaire, il semble que l’influence d’autres facteurs soit grandissante : pollution des grandes villes, pollution domestique (acariens, poils de chat ou chien), augmentation des allergies alimentaires…

Classification

On classe l’asthme en quatre paliers (voir ci-contre) selon la description des symptômes et la mesure du débit expiratoire de pointe (DEP). La mesure du DEP, réalisable par le patient lui-même, permet aussi de surveiller l’évolution de la maladie. Elle s’effectue à l’aide d’un petit appareil appelé débitmètre de pointe. Les valeurs normales sont, en moyenne :

• 600 l/min +/– 100 pour un homme ;

• 450 l/min +/– 85 pour une femme ;

Publicité

• 250 l/min +/– 50 pour un enfant de 10 ans.

Pour chaque individu, en fonction de son âge, de son sexe voire de son poids, le médecin établit une valeur théorique à laquelle on comparera la valeur du DEP obtenue. On étudie la variabilité du DEP sur la journée :

DEP soir – DEP matin × 100/DEP soir

Un traitement sera efficace, à condition d’être adapté à la sévérité de l’asthme. Le patient sous-estime parfois ses symptômes. Il sera du rôle de tout professionnel de santé de lui expliquer que son asthme s’aggrave s’il doit limiter ses exercices physiques (sport, marche), consomme davantage de médicaments ou présente des symptômes nocturnes plus fréquemment (toux, sibilances). Le préparateur, témoin privilégié de sa consommation médicamenteuse, incitera le patient à pratiquer régulièrement la mesure du DEP et consulter son médecin pour adapter, le cas échéant, le traitement.

But du traitement

On distingue le traitement de la crise. Ponctuel, il n’est généralement pas suffisant, hormis dans l’asthme léger intermittent. Le traitement de fond est en principe nécessaire pour éviter l’aggravation. Il s’agit de diminuer la fréquence et la sévérité des crises, de faire disparaître les éventuels symptômes permanents, en particulier nocturnes (dyspnée, toux, sifflements), et de normaliser la fonction respiratoire afin que le patient retrouve une vie normale et évite les complications dues au remodelage tissulaire. Les médicaments antiasthmatiques sont de deux types : des bronchodilatateurs qui augmentent le calibre des bronches, des anti-inflammatoires qui réduisent l’inflammation.

Lors de la crise, on utilise principalement des bronchodilatateurs. Au long cours, pour éviter la survenue des crises, on utilise surtout les anti-inflammatoires et parfois des bronchodilatateurs de longue durée d’action. La forme inhalée est le mode d’administration privilégié car elle réduit les effets secondaires.

Les médicaments

Les bronchodilatateurs

• Les bêta-2-mimétiques sont les bronchodilatateurs les plus puissants, généralement utilisés en inhalation (on les utilise parfois en injection sous-cutanée pour le traitement de la crise). On distingue :

– les bêta-2-mimétiques d’action rapide, indiqués dans la crise d’asthme ;

– les bêta-2-mimétiques de longue durée d’action, utilisés dans le traitement de fond et toujours associés aux anti-inflammatoires.

– les bêta-2-mimétiques de longue durée d’action, utilisés dans le traitement de fond et toujours associés aux anti-inflammatoires.

Les effets indésirables, rares, sont décrits en cas de surdosage: tremblements, tachycardie, nausée… Si les médicaments inhalés sont appréciés pour leur rapidité d’action, leur mauvaise utilisation peut donner lieu à des effets indésirables : aggravation des crises (surtout si les prises sont trop fréquentes et si le syndrome inflammatoire n’a pas été traité), palpitation… L’emploi de doses supérieures aux doses thérapeutiques doit inciter à consulter un médecin afin de renforcer le traitement anti-inflammatoire.

Les atropiniques, moins puissants, sont utilisés lorsque les bêta-2-mimétiques s’avèrent inefficaces ou mal tolérés. Ils peuvent leur être associés. Les effets indésirables sont la sécheresse de la bouche ou l’irritation pharyngée (conseiller un verre d’eau après traitement).

La théophylline est un produit à faible marge thérapeutique qui s’utilise avec beaucoup de précaution, étant donné que les doses thérapeutiques sont proches des doses toxiques. De plus, de nombreux facteurs peuvent modifier le métabolisme (fièvre, interactions médicamenteuses…) et entraîner une augmentation de la théophyllinémie. Des contrôles sanguins (avant la prise du matin puis plusieurs heures après) sont pratiqués après six jours de traitement puis tous les six à douze mois. La théophyllinémie efficace se situe entre 8 et 20 µg/ml et la toxicité au-delà de 20 µg. Le patient doit signaler son traitement lors de toute consultation, éviter les boissons excitantes. En cas de fièvre, surtout chez l’enfant (> 38°C pendant plus de 24 heures), la posologie sera revue à la baisse par le médecin traitant. Un surdosage se traduit d’abord par des céphalées, irritabilité, nausée… et peut entraîner des arythmies cardiaques ou des convulsions.

Les corticoïdes

Ils agissent sur l’inflammation bronchique et évitent l’aggravation de l’asthme qui peut aller jusqu’à une invalidité respiratoire permanente. Ils sont indiqués par voie orale après la crise et en cas d’asthme persistant sévère. Pour les autres paliers de l’asthme, ils sont utilisés sous forme inhalée. Il faudra rassurer les patients ayant des préjugés au sujet des corticoïdes. L’administration par inhalation réduit les effets indésirables qui sont rarement systémiques (retentissement staturopondéral, cataracte) mais plutôt oropharyngés : raucité de la voix, toux, candidoses. On recommande le rinçage de la bouche et un verre d’eau après l’inhalation.

Autres

Les cromones sont prescrits en traitement de fond de l’asthme persistant léger. Les antileucotriènes sont indiqués en traitement de fond de l’asthme persistant léger à modéré (en association avec les corticoïdes et les bêta-2-mimétiques à la demande) et dans l’asthme d’effort.

Les dispositifs

Le préparateur doit bien connaître les dispositifs d’inhalation (toujours plus nombreux sur le marché, afin de pouvoir les conseiller. Il peut demander aux laboratoires des exemplaires démonstration qu’il pourra manipuler et faire fonctionner. Il sera attentif au changement thérapeutique qui naturellement inquiète le patient.

Les aérosols doseurs ou spray sont des flacons pressurisés permettant par voie buccale la pulvérisation de médicament dans les bronches. Une bouffée de produit correspond à une quantité déterminée. L’utilisation d’un aérosol doseur nécessite une bonne coordination des mouvements (pression de la main/inspiration). En effet, le patient doit appuyer sur l’aérosol doseur en tout début d’inspiration sans quoi la diffusion du produit est incertaine. Les aérosols doseurs sont souvent indiqués chez les jeunes enfants à partir de 4 ou 6 ans mais, à cet âge-là, la coordination n’est pas toujours possible. En pratique, le prescripteur devra vérifier la capacité de son patient à utiliser l’aérosol doseur. Par ailleurs, certaines précautions s’imposent. Si le gaz ne sort pas correctement, laver l’orifice de l’adaptateur ou celui de la cartouche à l’eau tiède. L’embout buccal doit être lavé régulièrement, rincé et essuyé.

Les dispositifs pour aérosols doseurs évitent la coordination main/ poumons.

• La chambre d’inhalation se place entre le spray et la bouche et s’utilise avec un embout buccal ou bien un masque chez le tout-petit. L’inhalation se fait en dix respirations, passives ou actives. Le patient « actif » insiste sur le temps inspiratoire (image de l’aspiration avec une paille), maintient une apnée de quelques secondes, puis expire doucement (image de la bougie que l’on souffle). Il répète l’opération autant de fois que de bouffées sont prescrites.

• L’Autohaler (3M Santé) et l’Easi-breath (Ivax) sont des dispositifs intégrés au spray qui se déclenchent à l’inspiration. Technique : agiter, enlever le bouchon, (relever le levier, Autohaler), expirer, placer l’embout dans la bouche, inspirer profondément, retenir sa respiration dix secondes ; (fermer le levier, Autohaler), nettoyer l’embout avec un chiffon sec.

Les inhalateurs de poudre se déclenchent à l’inspiration, évitant également la coordination main/poumons.

• Technique : suivre la procédure (spécifique à chaque médicament) de chargement de la dose ; expirer; introduire l’embout dans la bouche, inspirer profondément, retirer l’inhalateur ; retenir la respiration dix secondes, puis expirer, nettoyer avec un chiffon sec (jamais à l’eau).

• Particularités : avec Clickhaler (Medeva Pharma) et Easyhaler (Orion Pharma), on appuie sur un bouton-poussoir (chargement) avant l’introduction dans la bouche. La présence de lactose dans le médicament procure la sensation de prise du médicament. Clickhaler est équipé d’un compteur de doses, d’une alarme visuelle décomptant les dix dernières doses et d’un système anti-double prise. Easyhaler visualise les doses restantes avec un compteur gradué de 5 en 5. Le Turbuhaler (AstraZeneca) se charge en tournant une molette à droite puis à gauche (dose prête lorsqu’on entend un clic). l’apparition de rouge dans une fenêtre signale qu’il ne reste que vingt doses hormis pour le dernier produit apparu sur le marché (Symbicort), pourvu d’un compteur de doses de 10 en 10. L’Aérolizer (Novartis Pharma) est un inhalateur pour gélules. Il se charge en appuyant sur deux boutons poussoirs. Les dispositifs de GlaxoSmithKline délivrent des doses précises : le Diskhaler présente un disque avec doses en cupules à percer avant chaque inhalation en actionnant le couvercle; le Diskus (60 doses sous plaquettes thermoformées), quant à lui, se charge en actionnant un levier.

Les solutions pour nébuliseur diffusent le médicament au plus profond des poumons grâce à un générateur pneumatique (nécessitant une source d’air ou d’oxygène) ou ultrasonique. On utilise :

– un masque si le patient a moins de 4 ans et/ou non coopérant ; respiration spontanée (inhalation passive) ;

– un embout buccal si le patient a plus de 4 ans et coopère : inspirations et expirations par la bouche, amples et régulières (inhalation active).

Le médicament est versé dans une cupule reliée à une tubulure, elle-même connectée à l’oxygène ou à l’appareil de nébulisation. L’inhalation varie de dix à quinze minutes.

Les broncho-dilatateurs seuls peuvent-ils traiter l’asthme persistant ?

Les bronchodilatateurs soulagent mais ne traitent pas l’inflammation qui, sans anti-inflammatoires, risque de s’aggraver.

Pourquoi les corticoïdes sont-ils boudés par les patients ?

Les asthmatiques craignaient les effets indésirables des corticoïdes mais ceux-ci sont limités grâce au mode d’administration adapté, l’inhalation.

Comment savoir s’il reste du produit dans un aérosol doseur ?

On immerge la cartouche dans un récipient d’eau. Si la cartouche est pleine, elle coule au fond. Vide, elle flotte horizontalement.

À moitié pleine, elle émerge légèrement, la tige de la cartouche regardant vers le bas.

À quoi sert une chambre d’inhalation ?

C’est un dispositif facilitant l’administration des aérosols doseurs qui nécessite une coordination pression de la main sur le spray et début d’inspiration)

La chambre d’inhalation est-elle réservée aux enfants ?

Non. Elle est certes surtout utilisée chez le tout-petit mais peut l’être également chez l’adulte ayant des difficultés à coordonner ses mouvements.

Quel est l’intérêt de l’inhalateur de poudre ? ;?

Contrairement à l’aérosol doseur, il ne nécessite pas de coordination des mouvements (main/poumons) et permet un contrôle de la quantité administrée. Mais il exige un effort inspiratoire important.

Utilisation d’une chambre d’inhalation

– Agiter l’aérosol doseur.

– Introduire dans la chambre d’inhalation l’aérosol doseur (fond de la cartouche vers le haut).

– Appliquer hermétiquement le masque de la chambre sur l’ensemble nez-bouche de l’enfant.

– Maintenir l’enfant de façon à ce qu’il respire de façon passive (quinze respirations), l’important étant qu’il soit calme.

– Répéter l’opération autant de fois que de bouffées sont prescrites.

– La chambre d’inhalation doit être nettoyée une fois par semaine par trempage dans une eau savonneuse ou dans un bac de stérilisation à froid puis rincée à l’eau claire et séchée.

Avec la collaboration d’Olivier Bourdon, pharmacien hospitalier, maître de conférences, Université René-Descartes, Paris.