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La fibromyalgie

Publié le 23 mai 2019
Par Thierry Pennable
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La fibromyalgie est une affection chronique qui peut être très invalidante. Les thérapies non médicamenteuses sont recommandées en 1re intention mais le recours aux médicaments est souvent incontournable. La prescription d’antidépresseurs à visée antalgique a parfois besoin d’être expliquée.

La maladie

Définition

• La fibromyalgie est une affection chronique caractérisée notamment par des douleurs diffuses et une fatigue persistante associées à de nombreux autres symptômes variables selon les patients. Elle a d’importantes répercussions sur la vie familiale, sociale et professionnelle.

• La fibromyalgie, qui fait encore parfois l’objet de controverses, a été identifiée comme une maladie à part entière dans la classification internationale des maladies de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le CIM-10, en 2006. Les femmes âgées de 30 à 55 ans sont les plus concernées, mais toute personne peut développer une fibromyalgie, y compris les enfants et les personnes âgées.

Physiopathologie

Alors que l’existence de la fibromyalgie est reconnue par l’OMS depuis 1992, ses manifestations n’ont à ce jour toujours pas d’explication physiopathologique. D’ailleurs, le terme fibromyalgie, créé en 1977 par deux médecins canadiens, composé de « fibro » pour fibrose, « myo » pour muscles et « algie » pour douleur, a été critiqué car il n’existe aucune fibrose des muscles à l’origine des douleurs.

Une origine « psychosociale » écartée

Un rapport de l’Académie de médecine de 2007 reconnaît que « l’absence de signes objectifs et d’examens complémentaires caractéristiques a fait penser que les troubles évoqués n’étaient que l’expression d’un mal-être psychologique et social », mais que si « les problèmes psychiatriques sont, certes, constants, avec des éléments dépressifs et anxieux, ils ne sauraient à eux seuls résumer ce syndrome »(1). Concluant que « le syndrome fibromyalgique est une réalité clinique qu’il faut admettre comme autonome ».

L’hypothèse neurobiologique prédomine

« Les explications biomédicales contemporaines mettent l’accent sur un dérèglement de la perception de la douleur au niveau du système nerveux central », précise un rapport de la Haute Autorité de santé (HAS) en 2010 (2).

• Deux types d’anomalies peuvent être observés par IRM :

→ une altération des voies de contrôle de la douleur au niveau du système nerveux central ;

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→ une perturbation des neurotransmetteurs.

• La principale conséquence de ces anomalies est une extrême sensibilité à la douleur caractérisée par une allodynie et une hyperalgésie (voir Dico+).

• Autres conséquences possibles : troubles du sommeil, fatigue, troubles cognitifs, anxiété et dépression, ces symptômes retrouvés dans la fibromyalgie pourraient aussi être dus à ces deux anomalies neurologiques.

Des facteurs impliqués

Facteurs déclenchants

Plusieurs facteurs sont évoqués sans être étayés par des preuves formelles. Dans de nombreux cas, la fibromyalgie apparaît après un choc émotionnel, un traumatisme physique, un épisode viral pseudo-grippal ou un déficit immunitaire. D’autres événements sont évoqués comme un stress psychologique tel que licenciement, harcèlement au travail, ou un événement affectif comme un divorce, une rupture ou un décès.

Facteurs prédisposants

Facteurs identifiés

De nombreux facteurs sont identifiés avec, par exemple :

• des douleurs longtemps présentes qui affectent le système de régulation de la douleur, par exemple une dorsalgie ;

• une insomnie chronique ;

• des antécédents de troubles anxieux ou d’épisodes dépressifs ;

• le stress ;

• certains facteurs hormonaux : par exemple, la protection par les œstrogènes baisse chez les femmes à la ménopause.

Pas de facteur héréditaire

La fibromyalgie n’est pas une maladie héréditaire ou génétique, même si des études montrent que certaines formes de gènes peuvent exposer à des douleurs diffuses et que chez les vrais jumeaux, lorsque l’un est atteint, l’autre a huit fois plus de risques de l’être aussi.

Facteurs d’entretien

Certains facteurs prédisposants peuvent aussi contribuer au maintien des symptômes s’ils ne sont pas corrigés. Exemples : stress, anxiété ou un déconditionnement musculaire qui, par inactivité physique liée aux douleurs, entraîne une diminution de la masse et de la force musculaires.

Signes cliniques

Ils sont très variables d’un patient à l’autre, et d’un jour à l’autre chez un même patient.

Les principaux symptômes

Douleur

« J’ai mal partout, tout le temps », rapportent souvent les patients pour évoquer une douleur chronique qui entrave les gestes de la vie quotidienne. Dans la fibromyalgie, la douleur est (3) :

• diffuse, présente des côtés droit et gauche du corps, au-dessous et au-dessus de la taille ;

• migratrice, pas toujours localisée au même endroit pour une même personne ;

• variable, prenant, selon les moments, la forme de douleurs articulaires, musculaires, tendineuses, ou encore neurologiques de type fourmillements, engourdissements ou brûlures ;

• aggravée par les efforts, le froid, l’humidité, les émotions et le manque de sommeil ;

• maximale au réveil, associée à une raideur qui peut être aussi perçue dans la journée après le maintien prolongé dans une même position. Les muscles sont ressentis comme durs et sensibles à la pression et sont parfois le siège de spasmes. Une impression de gonflement articulaire est aussi rapportée ;

• parfois résistante aux antalgiques habituels : paracétamol, aspirine, AINS…

Fatigue

Une fatigue intense et chronique est exprimée par la quasi-totalité des patients sous forme d’asthénie peu améliorée par le repos et le sommeil, ou de fatigabilité à l’effort. Souvent prédominante le matin, elle se manifeste aussi après des efforts répétitifs, le maintien même bref d’une posture ou après un effort minime. La fatigue peut devenir invalidante. La gêne induite est aussi importante voire supérieure à celle liée aux douleurs (4).

Troubles du sommeil

Dans plus de 90 % des cas, le sommeil est décrit comme léger, instable, avec des difficultés d’endormissement et des réveils nocturnes, et non réparateur. Les troubles du sommeil confirmés par l’enregistrement électroencéphalographique (EEG) pourraient être en cause dans la fatigue chronique ressentie. Un syndrome des jambes sans repos et des périodes d’apnée du sommeil sont parfois associés. Une somnolence diurne compensatrice peut perturber la vie sociale et professionnelle.

Difficultés cognitives

Les signes cognitifs observés sont :

• des troubles de la mémoire, concernant surtout les faits récents ;

• des troubles de l’attention et de la concentration qui pourraient être liés à la présence d’une douleur chronique ;

• des difficultés ou une gêne dans les apprentissages.

Troubles anxieux et dépressifs

Les états d’anxiété sont marqués par une appréhension de l’avenir et des craintes quant à l’évolution et aux répercussions du syndrome douloureux. Les troubles dépressifs concernaient près de 60 % des patients (2). « Il est nécessaire de légitimer la présence de symptômes anxio-dépressifs, en expliquant qu’ils accompagnent tout tableau douloureux chronique, aux patients qui, souvent, n’osent pas en parler », souligne le docteur Dominique Perocheau, rhumatologue au Centre d’Étude et de Traitement de la Douleur (CETD) de l’Hôpital Cochin à Paris, « en précisant aussi que ce symptôme est atténué par une meilleure gestion de la douleur ». Si le symptôme persiste, l’avis d’un psychiatre peut être justifié.

Autres signes associés

Certains symptômes ne nécessitent pas forcément un traitement spécifique et peuvent s’améliorer avec la prise en charge de la douleur.

• Céphalée à type de migraine ou de céphalée de tension, maux de tête en casque, associés à une tension plus ou moins forte dans les muscles du cou.

• Troubles digestifs tels colites chroniques fréquentes avec douleurs abdominales diffuses, ballonnements et inconfort plus ou moins important. Des problèmes d’intolérance ou d’allergie médicamenteuses peuvent être à l’origine de colopathies.

• Troubles de la vessie : douleurs pelviennes et envies d’uriner impérieuses sont fréquentes. Un syndrome de la douleur vésicale est possible (voir Dico+).

• Sensibilité particulière à des stimuli extérieurs : bruit, lumière forte, odeurs, froid.

• Troubles de l’articulation de la mâchoire : douleurs ressenties pendant la mastication ou spontanément.

• Troubles de la circulation : fourmillements au niveau des doigts ou extrémités refroidies, syndrome de Raynaud (voir Dico+).

• Angoisse, anxiété et stress sont fréquents, comme avec toute douleur chronique.

• Hypotension orthostatique.

Évolution

Elle est variable et dépend des mesures mises en œuvre.

• Les zones douloureuses et la fatigue restent assez constantes alors que les autres symptômes peuvent se modifier.

• L’intensité de la douleur et les troubles du sommeil persistent souvent sans aggravation.

• La fatigue est l’un des signes qui reste le plus constant.

En l’absence d’une prise en charge adaptée, les symptômes, de moins en moins bien supportés, sont à l’origine d’une grande souffrance.

Diagnostic

L’attente d’un diagnostic a longtemps été préjudiciable aux personnes fibromyalgiques. Aujourd’hui, la maladie est mieux connue et le diagnostic est posé plus précocement.

Examen clinique

Les symptômes doivent être présents depuis au moins 3 mois.

L’indice de douleur généralisée

Il vise à repérer les zones du corps dans lesquelles la douleur est ressentie parmi 19 zones identifiées (voir infographie p. 31). Depuis les critères définis par l’American College of Rheumatology en mai 2010, la notion de points douloureux déclenchés par la pression est remplacée par celle de zones douloureuses spontanément ressenties.

L’échelle de sévérité des symptômes

Cette échelle évalue :

• le niveau de sévérité de la fatigue, de la somnolence et des symptômes cognitifs : légers, modérés ou importants, intermittents ou persistants, handicapants au quotidien… ;

• l’existence d’une grande diversité de symptômes somatiques associés qui peuvent être absents, rares ou nombreux : syndrome du côlon irritable, nervosité, vision floue, fièvre, démangeaisons, urticaire…

Diagnostics différentiels

Le diagnostic implique aussi l’élimination de toute pathologie de l’appareil locomoteur, en particulier celles entraînant des douleurs diffuses chroniques. Sachant que ces pathologies peuvent parfois être associées à la fibromyalgie et expliquer la persistance des douleurs.

Suivi médical

• Les formes simples de fibromyalgie peuvent être prises en charge par les médecins généralistes, dans la mesure où ils connaissent la maladie et s’y intéressent.

• En présence d’une douleur résistante aux antalgiques habituels tels paracétamol, aspirine, AINS…, les patients ont intérêt à être orientés vers un CETD, un rhumatologue ou un neurologue spécialiste de la souffrance de l’appareil musculo-squelettique.

Le plus souvent, le médecin généraliste a recours à une consultation spécialisée pour une confirmation du diagnostic et pour une stratégie adaptée.

Son traitement

Objectifs thérapeutiques

Ils visent à soulager les symptômes, améliorer la qualité de vie du patient et maintenir ou reprendre rapidement les activités quotidiennes.

Stratégie thérapeutique

La prise en charge repose sur une combinaison de traitements médicamenteux et d’interventions non médicamenteuses adaptées, et, surtout, sur un accompagnement visant à aider les patients à gérer et à contrôler leurs troubles. La HAS préconise deux niveaux de prise en charge en fonction des symptômes et des situations individuelles (2).

• À un premier niveau, ne pas chercher à soulager tous les symptômes à la fois, mais traiter ceux qui gênent le plus le patient.

• Un second niveau d’intervention doit s’envisager en ambulatoire ou en établissement de santé :

→ si l’efficacité de la prise en charge de premier niveau s’avère insuffisante après 4 ou 6 mois ;

→ en présence d’un retentissement important des symptômes sur la vie quotidienne.

Les interventions non médicamenteuses

En 2016, l’European League Against Rheumatism (EULAR) a mis à jour ses recommandations pour la fibromyalgie (5).

L’exercice physique

Seule modalité thérapeutique « fortement » recommandée en première intention par l’EULAR, l’exercice physique est efficace contre la douleur et le handicap fonctionnel, et améliore aussi le bien-être (5). Il n’y a pas un type à privilégier, le patient a intérêt à se tourner vers une activité réaliste et réalisable qui lui plaît.

Une activité adaptée

Carole Robert, présidente de l’association Fibromyalgie France, préfère parler « de mise en mouvement », car « la recommandation de faire du sport parfois exprimée par les médecins est souvent mal perçue par des patients déjà sujets à d’importantes douleurs ». Les spécialistes recommandent des exercices physiques adaptés aux capacités individuelles. « Les personnes se basent trop souvent sur ce qu’elles étaient capables de faire avant la maladie alors que ce n’est plus possible », prévient le docteur Perocheau.

Bouger malgré la douleur

L’objectif est de maintenir une activité physique malgré un niveau de douleur jugé acceptable par des patients et d’interrompre l’effort lorsque la douleur devient trop forte. En pratique, il est préférable de fractionner l’activité en conservant deux tiers d’un exercice trop douloureux, par exemple 10 minutes de marche rapide plutôt que 15 minutes.

Réadaptation à l’effort

Fréquence, intensité et durée des exercices sont augmentées progressivement sous le contrôle d’un médecin, d’un éducateur sportif ou d’un kinésithérapeute. Des séances quotidiennes permettent de réinstaurer une routine d’exercices et d’améliorer les capacités physiques et le bienêtre global, ainsi que certains symptômes lorsque les exercices sont associés à d’autres interventions thérapeutiques.

La balnéothérapie

Ce traitement par les bains (eau chaude ou froide, à remous…), associé à une hydrothérapie sous forme d’exercices effectués dans l’eau, poursuit plusieurs objectifs : reconditionnement à l’effort, amélioration des sensations de mouvement pour « se réconcilier avec son corps », effet antalgique et décontracturant…

Gym douce

Gym douce et stretching-relaxation « à sec » poursuivent les mêmes objectifs que la balnéothérapie et peuvent être proposés en alternance ou en complément de celle-ci.

Relaxation

Les séances de relaxation sont assurées par des sophrologues, kinésithérapeutes, psychologues, professeurs de yoga ou infirmières spécialisées. Elles ne sont pas faites pour se relaxer mais pour diminuer la douleur, le stress, l’anxiété et la tension physique, et faciliter l’endormissement. La relaxation favoriserait aussi la participation du patient à sa prise en charge.

Suivi psychologique

Le recours à un psychologue permet de :

→ soutenir la démarche de reconditionnement à l’effort ;

→ préparer une thérapie cognitive et comportementale si besoin ;

→ mettre en œuvre une relaxation et éventuellement une hypnose.

Thérapie cognitive et comportementale (TCC)

Appliquées à la fibromyalgie, les TCC (voir Dico+) permettent de diminuer la douleur et d’améliorer le fonctionnement physique, la fatigue et l’humeur.

Physiothérapie

Avec un objectif antalgique, la physiothérapie regroupe diverses interventions comme l’électrothérapie, l’application de chaleur le plus souvent par des boues chaudes, les ultrasons, la neurostimulation électrique transcutanée (TENS), etc. La stimulation magnétique transcrânienne répétitive (ou rTMS pour « repetitive Transcranial Magnetic Stimulation »), technique visant à stimuler le cerveau de manière répétée et non invasive, est peu accessible aujourd’hui.

Massages

Réalisés par un kinésithérapeute, ils ont un objectif décontracturant et antalgique.

Hypnose

L’hypnothérapie pratiquée par des médecins, des infirmières et des psychologues formés à l’hypnose vise un apprentissage de la gestion des contractures musculaires douloureuses et des crises par le patient lui-même.

L’éducation thérapeutique du patient (ETP)

L’ETP est intéressante si le patient est prêt à devenir acteur de sa prise en charge. Elle peut être proposée par un CETD, tel le CETD de Cochin à Paris, ou en parallèle d’une cure thermale par certains établissements thermaux. Exemples : programme « Fibro-Algie » des Grands Thermes de Bagnères-de-Bigorre (65) ou « FIBR’eaux » dans les établissements thermaux de Dax (40).

Médicaments

Aucun médicament n’a l’indication fibromyalgie dans son AMM, toutes les demandes ayant reçu un avis négatif. Plusieurs classes thérapeutiques sont utilisées, avec une efficacité parfois contestée, surtout sur le long terme.

Les antalgiques

Ils n’ont souvent qu’une efficacité modérée dans la fibromyalgie.

• Le paracétamol, pas toujours efficace, doit être prescrit à la bonne posologie, 3 g par jour, et pris de façon régulière.

• Le tramadol, avec une activité opioïde et noradrénergique, montre une efficacité au moins à court terme, comme l’association tramadol-paracétamol (Ixprim, Zaldiar). Pour plus d’information sur ses effets indésirables, lire Porphyre n° 552, mai 2019.

• La morphine, souvent sans effet, n’est pas adaptée au traitement prolongé d’une douleur chronique.

Les antidépresseurs

Ils sont utilisés pour leur action sur la douleur, les troubles du sommeil, la fatigue et les troubles de l’humeur, mais pas pour leur action antidépressive. La posologie, généralement plus faible que pour la dépression, est débutée le plus souvent par un comprimé journalier au dosage le plus faible. Le délai d’action est plus rapide que pour la dépression. Il peut être nécessaire d’essayer différentes molécules pour trouver le traitement le plus efficace.

• L’amitriptyline : Elavil, Laroxyl.

→ Effets indésirables : troubles atropiniques avec sècheresse buccale, constipation, troubles urinaires, troubles de la vision, etc., somnolences, céphalées, tremblements et divers troubles neurologiques, risque accru de comportement s suicidai res, troubles digestifs, hypotension orthostatique (causes éventuelles de chutes), troubles sexuels, hyponatrémies, parfois hypoglycémies. Ils entraînent un allongement de l’intervalle QT qui expose à des troubles du rythme ventriculaire graves, notamment des torsades de pointes.

• Les inhibiteurs spécifiques de la recapture de la sérotonine (IRS). La fluoxétine (Prozac) et le citalopram (Seropram) seraient plus actifs sur la fatigue, le sommeil, le bien-être, que sur la douleur. Leur efficacité est parfois contestée dans la fibromyalgie.

→ Effets indésirables : céphalées, nausées, diarrhée, constipation, sécheresse buccale, hypersudation, prise ou perte de poids, état fébrile, asthénie, anxiété, agitation, insomnie, cauchemars, troubles de la libido…

• Les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNA). La duloxétine (Cymbalta) aurait une efficacité sur les symptômes de la fibromyalgie et sur l’intensité de la douleur. Le milnacipran (Ixel) serait efficace sur la douleur, la fatigue, le bien-être, mais pas sur les troubles du sommeil. La prise biquotidienne est plus efficace sur la douleur que la prise unique.

→ Effets indésirables : nausées, sécheresse de la bouche, constipation, diarrhée, vomissements, dyspepsie, flatulences, fatigue, douleurs abdominales, douleurs musculo-squelettiques, tension musculaire, spasmes musculaires, baisse de l’appétit, perte de poids, dysfonction érectile, palpitations, bouffées de chaleur.

• La venlafaxine aurait des résultats similaires à ceux de la duloxétine.

→ Effets indésirables : nausées, somnolence, étourdissement, bouche sèche, insomnie, asthénie, sueur, troubles de l’éjaculation et de l’orgasme.

Les antiépileptiques

La gabapentine (Neurontin) et la prégabaline (Lyrica) sont indiquées dans le traitement des douleurs neuropathiques. Leur posologie doit débuter par un comprimé journalier au dosage le plus faible et être augmentée progressivement jusqu’à la dose efficace.

→ Effets indésirables : principalement neuropsychiques, troubles digestifs, prise de poids, œdèmes et atteintes hépatiques. La prégabaline peut parfois entraîner des effets indésirables oculaires, notamment du champ visuel, hématologiques, des insuffisances cardiaques et des réactions d’hypersensibilité.

→ Surveillance : en raison d’éventuelles idées suicidaires ou de risque de dépendance.

Les anxiolytiques

Les anxiolytiques, en particulier les benzodiazépines, auraient un effet sur les tensions musculaires et l’insomnie. Leur prescription doit être limitée dans le temps car ils peuvent induire des troubles de la mémoire et une dépendance.

Les hypnotiques

La zopiclone (Imovane) ou le zolpidem (Stilnox) sont préférés aux anxiolytiques pour les troubles du sommeil. Ils sont utilisés selon les conditions de leur AMM.

Les agonistes de la dopamine

Le pramipexole (Sifrol) utilisé dans la maladie de Parkinson est recommandé par l’EULAR pour diminuer la douleur dans la fibromyalgie avec des bénéfices qui restent à confirmer. Il faut respecter un certain délai pour que le produit montre une efficacité. La posologie efficace est évaluée par le médecin.

→ Effets indésirables : nausées, constipation, vomissements, vertiges, dyskinésie, somnolence, céphalées, troubles du contrôle des impulsions (hyperphagie, achats compulsifs, hypersexualité, jeu pathologique), confusion, hallucinations, insomnie, altération de la vision notamment diplopie, vue trouble et acuité visuelle diminuée, hypotension, fatigue, œdème périphérique, perte de poids, diminution de l’appétit.

Les antagonistes du récepteur NMDA

La kétamine a montré une efficacité, mais peut être mal tolérée chez certaines personnes, en déclenchant en particulier des hallucinations. En pratique, l’utilisation d’anesthésiques (lidocaïne, kétamine) reste très limitée en raison du risque d’effets secondaires graves qui justifient une administration en service de réanimation. Les modalités d’administration, de posologie et de rythme de délivrance sont en cours d’étude.

Les antagonistes des récepteurs 5-HT3 à la sérotonine

L’ondansétron (Zophren), habituellement utilisé contre les nausées et vomissements, a montré des effets bénéfiques sur la douleur, la fatigue, et le sommeil à faible dose.

→ Mécanisme d’action : il bloque les récepteurs 5-HT3 à la sérotonine qui jouent un rôle dans le dérèglement de la modulation de la douleur au cours de la fibromyalgie.

→ Effets indésirables : céphalées, bouffées de chaleur ou flush, constipation.

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens

Leur effet antalgique n’est pas démontré dans la fibromyalgie. Ils sont parfois prescrits en début de prise en charge pour éliminer d’autres maladies accompagnées de manifestations inflammatoires.

Conseils aux patients

Observance

Les antidépresseurs sont encore souvent associés à la dépression et à un risque de dépendance par des patients qui ne comprennent pas leur prescription pour une fibromyalgie. « Il est important de bien expliquer que les antidépresseurs sont prescrits pour leur effet sur la douleur. Et d’avertir de la survenue possible des principaux effets indésirables, en précisant qu’ils ne sont pas systématiques et que la plupart seront transitoires et s’amélioreront avec la poursuite du traitement », souligne le docteur Dominique Perocheau. L’utilisation des antidépresseurs dans le traitement des syndromes douloureux est loin d’être négligeable. Ils sont prescrits en priorité dans le cas de neuropathies périphériques ou d’étiologies traumatique, métabolique, infectieuse, toxique ou invasive, puis dans les douleurs centrales, et enfin dans les céphalées et les migraines (6).

Automédication

« Par expérience, il y a peu de risque d’abus médicamenteux chez les patients fibromyalgiques, qui ont tendance à ressentir des effets indésirables et des intolérances avec les médicaments. Ils sont plutôt en retrait vis-à-vis des traitements médicamenteux, ce qui entraîne davantage une réticence qu’un risque de surconsommation », observe la rhumatologue.

Vie quotidienne

Rappeler les règles d’hygiène du sommeil

• Une activité physique modérée améliore le sommeil. Pratiquée après 19 h, elle peut retarder l’endormissement.

• Dormir dans une pièce calme pas trop chaude, environ 20 °C.

• Éviter la prise d’excitants le soir (café, thé, vitamine C, cola), l’alcool et les repas trop copieux.

• favoriser des activités relaxantes comme la lecture et/ou un bain tiède au moins 2 heures avant le coucher.

Proposer des techniques de relaxation

Les douleurs chroniques exposent particulièrement au stress.

• Un bain tiède après une journée fatigante permet de se détendre.

• Prendre un temps pour détendre les muscles du cou : assis(e) bien droit(e), faire des ronds avec la tête, lentement, sans remonter les épaules et en veillant à ce que les muscles du cou soient totalement relâchés ; pour le dos, en position assise, se pencher en avant avec les bras posés sur les genoux, puis relâcher la tête en faisant le dos rond et en respirant profondément.

• Les gymnastiques douces comme le yoga ou le tai chi sont particulièrement recommandées.

Impliquer les proches

Certains conjoints sont épuisés de vivre avec quelqu’un qui a toujours mal et qu’ils ne peuvent pas aider. Encourager le conjoint ou les proches à se rendre avec le patient à au moins une consultation médicale permet d’entendre un discours médical qui ne soit pas relayé par le malade et de poser éventuellement des questions. Cela permet de lutter contre l’incompréhension et parfois le scepticisme dont souffrent certains patients de la part de leur entourage.

Prévenir le charlatanisme

En l’absence de thérapeutique 100 % efficace, la fibromyalgie est un terrain propice pour certaines pratiques non conventionnelles. Rappeler qu’il n’existe aucun produit miracle pour cette maladie, en mettant en garde contre les promesses de tel ou tel produit vanté dans des journaux ou sur Internet.

(1) « La fibromyalgie », rapport de l’Académie de médecine, janvier 2007.

(2) « Syndrome fibromyalgique de l’adulte », Haute Autorité de santé, juillet 2010.

(3) « Fibromyalgie », sur ameli.fr

(4) « Fibromyalgie », Dr Perochau, sur www.larhumatologie.fr

(5) « EULAR revised recommendations for the management of fibromyalgia », publié dans la revue Annals of The Rheumatic Diseases le 4 juillet 2016.

(6) « Antidépresseurs : les points essentiels », Collège national de Pharmacologie médicale (pharmacomedicale.org).

Avec l’aimable participation du Dr Dominique Perocheau, rhumatologue au CETD de l’hôpital Cochin à Paris.

Dico +

→ Allodynie : perception douloureuse de stimulations habituellement indolores comme un simple toucher.

→ Hyperalgésie : perception anormalement importante des stimulations douloureuses.

Dico +

→ Syndrome de la douleur vésicale ou cystalgies à urines claires : état douloureux chronique de la vessie avec pollakiurie, brièvement soulagé par la miction.

Avis du spé

“Les antalgiques sont le plus souvent indispensable”

Docteur Dominique Perocheau, rhumatologue au centre d’étude et de traitement de la douleur de l’hôpital Cochin à Paris.

Le traitement de la fibromyalgie doit privilégier la mise en place d’interventions non médicamenteuses. Elles visent à développer chez le patient des stratégies lui permettant de gérer ses symptômes à long terme. Les prescriptions d’antalgiques simples, de palier 1 ou 2, restent le plus souvent une aide indispensable pour abaisser l’intensité douloureuse, au moins au départ de la maladie. Ces antalgiques sont considérés comme efficaces dès qu’ils abaissent l’intensité de la douleur de 30 %. Cette amélioration de la douleur favorise l’accès aux interventions non médicamenteuses, notamment aux activités physiques. L’objectif suivant est de pouvoir progressivement se passer des médicaments au profit des autres stratégies thérapeutiques.

Dico +

→ Syndrome de Raynaud : trouble vasomoteur qui touche les extrémités, caractérisé par une ischémie brutale des artérioles des doigts et des orteils, se manifestant par une pâleur, un refroidissement et une douleur.

Dico +

→ Les TCC sont des thérapies brèves qui visent à remplacer les idées négatives et les comportements inadaptés par des pensées et des réactions en adéquation avec la réalité.

Témoignage

“La cure thermale me fait énormément de bien”

Marie Desgouttes, 62 ans, infirmière responsable d’une unité d’hémodialyse, retraitée depuis peu.

Comment s’est manifestée votre fibromyalgie ?

Après un parcours professionnel assez fourni à l’hôpital, j’ai été infirmière responsable d’une unité d’hémodialyse. Les derniers temps, j’avais de plus en plus de tendinites, j’avais de plus en plus mal partout. Je ressentais aussi une fatigue que j’attribuais à la ménopause qui venait d’arriver. J’étais obligée de me lever de plus en plus tôt pour « démarrer » avant de partir au travail et j’étais épuisée vers midi-13h. J’étais aussi devenue un peu « brouillon » alors que j’avais toujours été très méthodique.

Comment gérez-vous votre fibromyalgie ?

J’ai toujours bien réagi en maintenant beaucoup d’activité physique. C’est un paradoxe car j’ai des crampes partout. L’activité physique, qi gong et marche entre autres, m’a peu à peu aidée à surmonter et masquer mes handicaps. Chaque année, je fais une cure thermale de 3 semaines qui me fait énormément de bien et dont les bénéfices se font sentir presque jusqu’à la cure suivante. Ce temps de la cure me permet de couper avec les préoccupations du quotidien et l’entretien d’une grande maison où il y a toujours quelque chose à faire. Lors d’une cure dédiée à la fibromyalgie, un rhumatologue m’a dit que j’avais « une gestion remarquable de la maladie » et que j’étais vraiment actrice de ma prise en charge.

Dico +

→ Récepteurs NMDA (acide N-méthyl-D-aspartique) : ce sont des récepteurs du glutamate, neurotransmetteur excitateur qui intervient dans la transmission du message douloureux et joue notamment un rôle important dans les douleurs neuropathiques.

En savoir +

→ Document

La fiche santé « Fibromyalgie » de l’Assurance maladie depuis 2017 avec 4 rubriques : « Comprendre la fibromyalgie », « Symptômes et diagnostic », « Traitement » et « Vivre avec une fibromyalgie ». Sur www.ameli.fr

En savoir +

→ Associations

Fibromyalgie France : agréée au niveau national par le ministère de la Santé et reconnue d’intérêt général. Elle repose sur la volonté de malades bénévoles et propose rencontres, permanences et autres activités, par le biais des délégations régionales et départementales. Sur : www.fibromyalgiefrance.org

Fibromyalgie SOS : créée en mai 2005 afin d’informer, de faire connaître et reconnaître la fibromyalgie, et de sortir les malades de leur isolement. Une liste des Groupes Locaux et Permanences, et des activités proposées en région (groupes de parole, sophrologie…) est disponible sur www.fibromyalgiesos.fr

À RETENIR

SUR LA MALADIE

→ Il n’y a pas d’explication physiopathologique à la fibromyalgie.

→ L’hypothèse retenue est celle d’un dérèglement de la perception de la douleur au niveau du système nerveux central.

→ Le diagnostic clinique vise à repérer des zones du corps douloureuses parmi 19 zones identifiées.

→ Les autres symptômes principaux de la fibromyalgie sont la fatigue, la somnolence et des troubles cognitifs.

→ Les symptômes doivent être présents depuis au moins 3 mois.

SUR LE TRAITEMENT

→ La prise en charge de la fibromyalgie repose sur une combinaison de traitements médicamenteux et d’interventions non médicamenteuses.

→ Outre le soulagement des symptômes, le traitement vise à améliorer la qualité de vie du patient et à maintenir ou reprendre rapidement les activités quotidiennes.

→ Aucun médicament n’a l’indication fibromyalgie dans son AMM.

→ Les médicaments utilisés n’ont qu’une efficacité relative. Les antidépresseurs sont utilisés pour leur action antalgique.

→ Les thérapies non médicamenteuses sont préconisées en première intention.

→ Un exercice physique adapté améliore la douleur, le handicap fonctionnel et le bien-être.

→ L’objectif est de maintenir une activité physique malgré un niveau de douleur jugé acceptable.

SUR LE PATIENT

→ La fibromyalgie étant de mieux en mieux reconnue, le diagnostic est plus précoce mais les prises en charge adaptées font parfois défaut.

→ Inciter les proches à assister à au moins une consultation médicale avec le patient permet de dissiper un éventuel scepticisme.

→ Les personnes atteintes de fibromyalgie montrent plutôt une réticence à la prise de médicaments qu’un risque de surconsommation.

→ Parler de « mise en mouvement » peut rassurer des patients réticents à l’idée de « faire du sport » à cause de leurs douleurs.

→ Douleur et fatigue chroniques peuvent être à l’origine d’une dépression.