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Hémochromatose héréditaire de type 1
L’hémochromatose héréditaire se caractérise par une surcharge en fer de l’organisme. Sa forme la plus commune, dite « de type 1 », est la maladie génétique la plus fréquente dans la population blanche. En cause, une anomalie chromosomique responsable d’une absorption excessive du fer alimentaire. Le fer qui s’accumule progressivement dans les tissus et organes peut provoquer, après des années d’évolution insidieuse, des atteintes graves métaboliques et/ou viscérales. En France, 1 personne sur 300 est porteuse de cette anomalie génétique.
La maladie
PHYSIOPATHOLOGIE
Rappels de physiologie
Le fer→ Indispensable au bon fonctionnement des cellules, le fer intervient notamment dans la division cellulaire et l’oxygénation cellulaire via l’hémoglobine. En excès, il est cytotoxique ; il catalyse la formation de radicaux libres susceptibles de détruire les membranes cellulaires, les protéines ou l’ADN.
→ L’organisme sain contient en moyenne 3 à 4 g de fer, répartis en trois compartiments :
– fonctionnel : dans l’hémoglobine (60 % du fer), la myoglobine et certaines enzymes cellulaires (cytochromes…) ;
– transport : seul 0,1 % du fer organique se trouve dans le plasma, presque exclusivement lié à la transferrine, protéine de transport synthétisée par le foie ;
– réserve : environ 25 % du fer est stocké dans les hépatocytes et les macrophages sous forme de ferritine (protéine hydrosoluble facilement mobilisable) et d’hémosidérine (forme agrégée moins mobilisable).
Le métabolisme du fer
→ Il est essentiellement assuré par des échanges fermés entre ces trois compartiments. Environ 1 mg de fer est néanmoins éliminé chaque jour par les urines, la sueur, la desquamation cutanée (davantage lors des menstruations : 30 mg environ par cycle).
→ Les besoins quotidiens, pour pallier ces pertes, sont couverts par l’alimentation. Ils sont augmentés dans certaines situations : menstruations, grossesse, allaitement, enfance, adolescence.
→ Aucun système ne permet de réguler l’élimination du fer. Le maintien à l’équilibre des quantités de fer dans l’organisme est assuré par une régulation de son absorption intestinale. Sur 10 à 20 mg de fer apportés quotidiennement par une alimentation équilibrée, seuls 1 à 2 mg sont absorbés au niveau du duodénum via des transporteurs membranaires des entérocytes (appelés DMT1 et ferroportine). L’hepcidine, peptide synthétisé par le foie, agit comme une hormone de régulation : quand les besoins en fer de l’organisme sont comblés, la synthèse d’hepcidine augmente, induit une réduction de l’expression des récepteurs membranaires et stoppe ainsi l’absorption intestinale. A contrario, la synthèse de l’hepcidine diminue lorsque les besoins en fer croissent, relançant ainsi l’absorption du fer alimentaire.
L’hémochromatose héréditaire
→ Le terme hémochromatose héréditaire (HH) regroupe un ensemble de maladies de surcharge en fer d’origine génétique.
→ L’hémochromatose de type 1, dite aussi « classique » ou « primitive » ou « HFE1 », représente 95 % des cas. Elle est due à des mutations géniques qui impactent particulièrement la synthèse d’hepcidine. Elle atteint exclusivement les populations caucasiennes, chez qui elle est la maladie génétique la plus fréquente (45 % des cas).
→ D’autres types d’hémochromatoses héréditaires existent. Elles sont liées à d’autres mutations géniques : les hémochromatoses de type 2 (dite hémojuvénile car elle atteint les sujets jeunes), type 3 (mutation du gène TFR2 codant sur le récepteur 2 de la transferrine) et type 4 (mutation du gène de la ferroportine). Elles correspondent à des affections rares, voire exceptionnelles, dont l’expression clinique et le traitement peuvent différer, en particulier pour la ferroportine.
L’anomalie chromosomique
L’HH de type 1 est liée à une mutation génétique sur le gène HFE porté par le chromosome 6. Dans 90 % des cas, il s’agit de la mutation dite C282Y dans laquelle une cystéine est remplacée par une tyrosine en position 282.
→ Transmission récessive. La transmission s’effectue sur un mode autosomique (indépendante du sexe car non portée par les chromosomes sexuels) et récessif (il faut deux gènes atteints) : les malades sont homozygotes, ils présentent l’anomalie sur chacun des chromosomes de la paire 6. Les personnes hétérozygotes (un seul chromosome anormal) sont des porteurs sains (voir encadré ci-contre).
→ Pénétrance faible. La pénétrance ou probabilité d’être atteint par la maladie quand on a le génotype à risque est très faible ; elle est estimée entre 10 et 50 % selon les publications. En d’autres termes, un pourcentage élevé de patients homozygotes ne développera pas de signes cliniques, mais il est impossible de le prédire.
→ Expression variable. L’éventuelle expression clinique est très variable selon les individus, tant au niveau des symptômes que de leur sévérité ou de leur âge d’apparition. Cette variabilité d’expression est liée au sexe (les hommes sont préférentiellement atteints et plus jeunes), à des facteurs génétiques qui conditionnent la sévérité de la surcharge en fer et à l’environnement : rôle aggravant d’une hépatopathie préexistante, alcoolisme, alimentation riche en fer, tabagisme, porphyrie cutanée tardive, syndrome dysmétabolique…)
Conséquences
Dans l’hémochromatose héréditaire de type 1, les mutations du gène HFE sont responsables d’une trop faible production d’hepcidine. Ainsi, la saturation de la transferrine – l’expression des transporteurs du fer alimentaire – est augmentée de façon inappropriée : normalement de 45 %, elle passe à 60, 80, voire 100 %. Conséquence : 5 à 8 mg de fer sont absorbés chaque jour. Les pertes n’étant pas accrues, le fer s’accumule dans les organes et les tissus, qu’il détruit progressivement (voir infographie en page précédente).
SIGNES CLINIQUES
Liés à l’accumulation progressive du fer dans les organes et les tissus, les signes cliniques apparaissent généralement entre 20 et 50 ans chez l’homme et après la ménopause chez la femme (retard dû aux menstruations car le fer en excès s’élimine dans le sang des règles). Dans l’ordre d’apparition, on retrouve :
→ Des atteintes hépatiques : 95 % des patients symptomatiques présentent une élévation des transaminases hépatiques et/ou une hépatomégalie. L’évolution possible vers une cirrhose ou un carcinome est responsable de 90 % des décès dus à l’hémochromatose.
→ Une asthénie, associée parfois à une dépression et à une perte de poids.
→ Des atteintes cutanées : peau fine, perte de cheveux, ongles cassants. La mélanodermie (coloration foncée de la peau) est un signe typique, particulièrement au niveau de la muqueuse buccale, des parties exposées (visage, cou, bras…) et des parties génitales.
→ Des atteintes endocriniennes : un diabète insulinodépendant lié à l’accumulation du fer dans le pancréas est retrouvé chez un quart des patients. L’hypogonadisme, lié à une accumulation du fer dans l’hypophyse, peut provoquer une impuissance masculine et, chez la femme, une aménorrhée, une perte de libido, une ostéoporose. La survenue d’hypothyroïdies est également plus fréquente que dans la population générale.
→ Des atteintes articulaires : l’accumulation de fer dans les articulations provoque des arthropathies dans 30 à 50 % des cas, la plus typique étant une arthrite chronique, touchant les deuxième et troisième métacarpophalangiennes dont le signe est une « poignée de main douloureuse ». Parmi les autres localisations : poignets, genoux, chevilles, épaules…
→ Des atteintes cardiaques : des anomalies de l’ECG sont retrouvées dans plus de 30 % des cas avec parfois des troubles du rythme, notamment une fibrillation auriculaire, potentiellement responsable d’un arrêt cardiaque.
DIAGNOSTIC
Il est important qu’il soit le plus précoce possible pour éviter l’apparition de complications irréversibles, idéalement dès 20-35 ans, avant que de fortes quantités de fer ne se soient accumulées.
Les circonstances
Manifestations cliniques ou biologiques évocatricesL’association d’une asthénie inexpliquée, d’arthralgies surtout des deuxième et troisième doigts et d’une hausse des transaminases est considérée comme évocatrice (règle des 3 A). Des troubles sexuels, une aménorrhée, un essoufflement au moindre effort sont également des signes d’appel.
Dépistage familialLa Haute autorité de santé (HAS) s’est prononcée en faveur d’un dépistage génétique familial en 2004 pour les parents au premier degré (enfant/parent/fratrie au-delà de 18 ans) d’un sujet homozygote. Il ne peut être entrepris qu’avec le consentement éclairé de la personne, après consultation médicale génétique. Il est pris en charge par l’Assurance maladie.
Les étapes
Le bilan martialIl permet d’établir un diagnostic de présomption.
→ Le coefficient de saturation de la transferrine (CS-Tf) est le marqueur le plus sensible de la maladie ; le dosage se fait à jeun. La transferrine est normalement saturée à 30 %, le seuil d’alerte de dépistage d’une surcharge en fer est fixé à 45 %. Elle peut atteindre 80 ou 100 %.
→ La concentration plasmatique de la ferritine (ferritinémie), forme de stockage du fer, permet d’évaluer les réserves en fer de l’organisme. Son augmentation évalue surtout le stade évolutif de l’HH. On considère qu’une ferritinémie supérieure à 300 µg/l chez l’homme et à 200 µg/l chez la femme signe une surcharge en fer.
À retenir : la suspicion d’HH de type 1 est forte lorsque le CS-Tf est supérieur à 45 %, renforcée par l’élévation de la ferritinémie.
La recherche d’une mutation du gène HFEÀ partir d’un prélèvement sanguin, les principales mutations du gène HFE sont recherchées après séquençage de l’ADN. La découverte de mutations homozygotes signe le diagnostic d’hémochromatose de type 1.
À noter : si le bilan martial est normal chez un parent du premier degré dans le cadre d’un dépistage familial, une recherche génétique peut néanmoins être entreprise.
Le bilan généralIl permet d’évaluer le retentissement et d’adapter la prise en charge. On recherche notamment un diabète (en réalisant notamment une glycémie à jeun), des atteintes osseuses (radiographies articulaires), cardiaques (électrocardiogramme, échographie), endocriniennes (dosage de testostérone…) ou hépatiques (transaminases, IRM, biopsie hépatique…).
La classificationLes paramètres biologiques et cliniques permettent de classifier l’hémochromatose de type 1 en cinq stades de sévérité croissante.
→ Stade 0 : stade asymptomatique aux niveaux clinique et biologique avec CS-Tf < 45 % et ferritinémie normale.
→ Stade 1 : stade asymptomatique au niveau clinique, avec augmentation du CS-Tf (> 45 %) sans élévation de la ferritinémie.
→ Stade 2 : stade asymptomatique au niveau clinique, avec augmentation du CS-Tf > 45 % et élévation de la ferritinémie.
→ Stade 3 : signes cliniques pouvant compromettre la qualité de vie tels asthénie, impuissance, arthropathie, diabète, hépatopathie non cirrhotique, troubles du rythme cardiaque, mélanodermie, avec CS-Tf et ferritinémie augmentés.
→ Stade 4 : expression clinique pouvant compromettre le pronostic vital tels cirrhose, carcinome hépatocellulaire, diabète insulinodépendant, insuffisance cardiaque, avec CS-Tf et ferritinémie augmentés.
ÉVOLUTION
La maladie évolue de façon très variable selon les individus, selon la précocité du diagnostic et la sévérité des complications. Si la prise en charge est précoce, morbidité et mortalité rejoignent celles de la population générale. On estime qu’environ 1 % des sujets homozygotes évolueraient jusqu’au stade 4.
SUIVI
Le suivi recommandé dépend du stade de sévérité de la maladie (voir tableau récapitulatif en page 35).
→ Stade 0 : interrogatoire, examen clinique et bilan martial tous les trois à cinq ans en fonction de l’âge et des facteurs de risque.
→ Stade 1 : interrogatoire, examen clinique et bilan martial annuels.
→ Stade 2 : interrogatoire, évaluation clinique (incluant au minimum une vérification de la tension artérielle et du pouls, la bonne tolérance de la dernière saignée – voir « Traitement » – et le contrôle de l’absence de contre-indications) à chaque séance de saignée, ainsi que la ferritinémie et l’hémoglobinémie (marqueur d’une éventuelle anémie par carence martiale).
→ Stade 3 ou 4 : interrogatoire, évaluation clinique lors de chaque séance de saignée, bilan martial et hémogramme à fréquence variable en fonction de la phase de traitement, surveillance biologique bisannuelle des complications comprenant au moins transaminases et glycémie à jeun.
Son traitement
Avertissement : le traitement exposé ici concerne l’hémochromatose de type 1, selon les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS) émises en 2005. Le traitement des autres types d’hémochromatoses héréditaires, maladies rares, est moins codifié et peut différer.
OBJECTIF
Il existe une relation bien établie entre l’importance de la surcharge en fer, le risque de survenue de complications et le surrisque de mortalité.
Le traitement a donc pour objectifs :
– d’éliminer l’éventuel excès de fer ;
– d’éviter que les stocks de fer se constituent ou se reconstituent ;
– la prise en charge des éventuelles complications viscérales et métaboliques.
STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE
Le niveau de prise en charge de la maladie dépend de son stade de sévérité (voir tableau récapitulatif en page 35).
→ Les stades 0 et 1 ne requièrent aucun traitement autres que des conseils préventifs.
→ À partir du stade 2 : un traitement de la surcharge en fer est mis en place afin d’obtenir un taux de ferritine entre 50 et 100 µg/l et de le maintenir.
→ À partir du stade 3 : mise en place de traitements des complications.
Traiter la surcharge en fer
Le traitement s’appuie majoritairement sur le traitement déplétif sanguin, c’est-à-dire sur la diminution du volume de sang dans l’organisme par saignées. Il s’effectue selon deux étapes :
– une phase d’induction avec saignées hebdomadaires jusqu’à objectif de ferritinémie compris entre 50 et 100 µg/l (désaturation de l’organisme en fer) ;
– une phase d’entretien avec saignées tous les deux à quatre mois pour maintenir cet objectif.
Traiter les complications
Le traitement curatif des éventuelles complications est instauré au cas par cas, selon des modalités identiques à des patients ne souffrant pas d’hémochromatose.
À noter : l’équilibre du diabète est plus difficile à atteindre en cas d’hémochromatose héréditaire et l’insuffisance gonadique, peu améliorée par le traitement, doit être compensée par un traitement hormonal substitutif.
La prévention
La stratégie préventive concerne tous les patients, symptomatiques ou non.
→ Limiter les apports en fer, mais ne pas faire de régime strict : supprimer les médicaments contenant de la vitamine C, car elle en favorise l’absorption.
→ Prévenir les complications : limiter les facteurs de risque, notamment l’abus d’alcool (cure de sevrage, prise en charge psychologique…) et les infections hépatiques (vaccination anti-VHB).
TRAITEMENTS NON MÉDICAMENTEUX
Les phlébotomies ou « saignées »
Les globules rouges étant très riches en fer (250 mg pour 500 ml), les saignées demeurent le traitement de référence de la surcharge. La synthèse réactionnelle de nouveaux globules rouges implique de puiser dans les réserves de fer en excès.
→ Bénéfices. Les saignées ont montré leur efficacité sur la survie des patients en permettant :
– d’éviter l’installation de complications (selon les degrés d’observance et l’âge, l’idéal étant 25-40 ans) ;
– la régression de certaines expressions cliniques (mélanodermie surtout) ;
– l’amélioration partielle des cardiomyopathies.
→ Modalités. Prélèvement de sang par ponction veineuse au niveau du pli du coude comparable à un don du sang, en position allongée ou semi-allongée, durant quinze minutes en moyenne. Le volume de sang maximal à prélever varie avec le poids (7 ml/kg), sans dépasser 550 ml par saignée. Il doit être adapté à la tolérance, à l’âge, et à l’état de santé (notamment la fonction cardiaque).
→ Lieux. Dans les établissements français du sang (EFS), à l’hôpital (en consultation) ou à domicile par IDE sur prescription médicale (lorsque la bonne tolérance est vérifiée par cinq saignées au moins en établissement de santé et qu’un projet thérapeutique est mis en place avec des procédures sécurisées).
→ Matériel. Dispositif stérile de recueil des saignées et accessoires, code LPPR 1198869, avec prix limite de vente au public de 10 € ; prise en charge à 100 % dans le cadre de l’ALD hémochromatose génétique (ALD n° 17).
→ Rythme. En traitement d’attaque, une saignée par semaine, poursuivi jusqu’à ce que la ferritinémie devienne inférieure ou égale à 50 µg/l, puis une saignée tous les deux, trois ou quatre mois (selon les patients) pour la maintenir entre 50 et 100 µg/l.
→ Incidents. Il s’agit essentiellement de malaises hypovolémiques et de veinite au point de ponction. Pour prévenir la douleur, on peut utiliser un patch Emla dix minutes avant la ponction.
→ Surveillance. Contrôle de la réduction de la surcharge martiale : un dosage de la ferritinémie (réalisé en début de saignée sur la tubulure de la poche de prélèvement) mensuel en phase d’induction jusqu’à atteindre 300 µg/l chez l’homme et 200 µg/l chez la femme, puis deux fois par mois en dessous. Contrôle de l’anémie par carence martiale : si l’hémoglobinémie est < 11 g/dl, les saignées sont interrompues jusqu’à correction (qui ne peut bien sûr être réalisée par supplémentation en fer). La fréquence de son dosage n’est pas codifiée en phase d’attaque. En entretien, il est réalisé dans les huit jours précédant la saignée.
→ Prévention et prise en charge des incidents immédiats : avant et après chaque saignée, surveillance de la fréquence cardiaque, de la tension artérielle et de l’état clinique du patient. Un médecin doit être présent ou directement joignable, en particulier si le patient a déjà présenté un malaise. Lorsqu’ils se répètent, une compensation veineuse volume à volume par un soluté macromoléculaire est envisagée.
L’érythraphérèse
C’est une méthode d’aphérèse, c’est-à-dire une extraction sélective d’éléments sanguins via un circuit extracorporel.
→ La technique. Le prélèvement sanguin se fait par ponction veineuse comme pour la saignée, mais un séparateur de cellules par centrifugation permet d’individualiser les globules rouges, qui sont extraits en priorité.
→ Avantages. Cette technique, qui permet d’extraire un volume d’hématies plus important, est plus efficace que la saignée classique ; elle désature l’organisme en fer plus rapidement et permet donc de réduire le nombre de séances.
→ Inconvénients. Nécessité d’un plateau technique important, coût élevé.
→ Indications. En deuxième intention pour les patients qui sont éloignés géographiquement du lieu de prélèvement, peu disponibles et/ou inobservants.
TRAITEMENT MÉDICAMENTEUX
Chélateur du fer
→ Mode d’action. La déféroxamine (Desferal), seul produit ayant une AMM dans cette indication, est un agent chélateur des ions ferriques Fe 3+ et Fe 2+ qui fixe le fer libre du plasma ou des cellules et, dans une moindre mesure, le fer lié à la ferritine (mais pas celui de l’hémoglobine). Le complexe formé, dit « ferrioxamine », est éliminé par les urines et les selles.
→ Indications. Du fait du risque d’effets indésirables et du mode d’administration, les chélateurs sont une alternative de seconde intention en cas de contre-indication ou de réseau veineux insuffisant pour des saignées.
→ Modalités. La dose journalière moyenne, entre 20 et 60 mg/kg, est adaptée individuellement. L’administration est parentérale, recommandée dans cette indication par voie sous-cutanée lente, au moyen d’une perfusion nocturne ou via une pompe à perfusion miniaturisée portable, pendant une période de 8 à 12 heures et jusqu’à 24 heures, cinq à six fois par semaine (la dose journalière doit alors être adaptée sur cinq jours).
→ Effets indésirables. Sont fréquemment décrits des urticaires, arthralgies, myalgies, réactions au point d’injection (douleur, tuméfaction, ulcérations…), fièvre, nausées et céphalées.
L’utilisation au long cours réclame une surveillance accrue d’effets plus rares : augmentation du risque infectieux (notamment colites en entérocolites), atteintes auditives (acouphènes, surdité…) et visuelles (vision floue, cataracte…). C’est pourquoi ce traitement est rarement utilisé.
→ Présentation/conservation. Desferal poudre et solvant pour solution injectable 100 mg/ml, boîte 1 flacon poudre 500 mg + 1 ampoule 5 ml ou boîte 1 flacon poudre 2 g + 1 ampoule 20 ml, conservation à température ambiante ne dépassant pas 25 °C, utilisation immédiate après reconstitution ou au maximum dans les 24 heures.
Conseils aux patients
DÉPISTAGE
Une fatigue anormale, des arthralgies ou des troubles sexuels chez un sujet jeune sont les signes d’appel. Insister sur la nécessité d’un diagnostic précoce dès l’âge de 20 ans, âge où un traitement déplétif peut être mis en place, avant l’apparition des complications.
Le diagnostic familial doit être encouragé ; seuls les patients, et non leur médecin, peuvent informer leur famille de leur maladie et de la nécessité du dépistage.
OBSERVANCE
Du traitement
L’efficacité des saignées dans la prévention des complications dépend du degré d’observance des patients. Si la chronicité les effraie, insister sur le fait qu’elles s’espacent en phase d’entretien et ne représentent plus qu’une à six séances annuelles, réalisables à domicile par une infirmière libérale. Elles peuvent même être arrêtées lorsque le taux de ferritine reste stable entre 50 et 100 µg/l.
Lors d’une grossesse, le traitement de surcharge en fer est interrompu pendant neuf mois sans qu’aucun risque majeur n’ait été montré.
Automédication
Ne pas prendre de médicaments qui contiennent du fer, ni de la vitamine C, qui favorise l’absorption du fer en aidant à la transformation dans l’estomac du fer Fe3+ en Fe2+ assimilable par l’intestin. Attention notamment aux complexes vitaminés qui en contiennent fréquemment et peuvent faire l’objet d’une demande pour répondre aux symptômes de fatigue ou de perte des cheveux.
VIE QUOTIDIENNE
Les saignées
Pour éviter les malaises, les céphalées et les « coups de fatigue », la saignée est réalisée de préférence l’après-midi, après un bon repas.
Avant et après, boire un volume de boisson de quantité équivalente au volume ponctionné. Après, se reposer, limiter les efforts physiques.
L’alimentation
Un régime alimentaire pauvre en ferIl est conseillé pour optimiser le traitement et éventuellement espacer le rythme des saignées. Les aliments naturellement riches en fer facilement assimilable à limiter sont le vin, le boudin noir, les abats, les viandes rouges, les coquillages, les fruits oléagineux (amandes…), le cacao et les légumes secs (lentilles…). Les aliments enrichis ou supplémentés en fer ne devraient pas être consommés ; il s’agit essentiellement de certaines céréales, boissons et barres énergétiques qui contiennent parfois de grandes quantités de fer.
La vitamine CSous forme de médicament ou autre présentation (compléments alimentaires…), la vitamine C doit être évitée. Les fruits et légumes frais qui en contiennent ne doivent pas être écartés car ils sont les constituants essentiels d’une alimentation équilibrée (la cuisson réduit la teneur en vitamine C). Éviter par contre les aliments industriels enrichis en vitamine C : boissons énergisantes, jus de fruits…
Les taninsLes tanins (polyphénols), que l’on retrouve notamment dans le thé ou, dans une moindre mesure, dans le café inhiberaient l’absorption intestinale du fer non héminique (fer présent dans les céréales, les fruits ou les légumes). Traditionnellement, on conseille aux patients de boire une ou deux tasses de thé bien infusé au cours du repas.
L’alcoolIl doit être limité en raison notamment de sa toxicité hépatique et cardiaque, ce qui risque d’aggraver ou de favoriser les complications.
La contraception
L’adoption d’un moyen de contraception qui diminue ou stoppe les menstruations (dispositif intra-utérin hormonal, implant…) n’est recommandée que si les règles sont très abondantes et si, associées aux saignées, ellespeuvent entraîner une anémie. Si une patiente opte pour ce choix, il peut être nécessaire d’adapter la fréquence des saignées en conséquence. C’est pour cela aussi que certaines femmes découvrent leur maladie seulement à la ménopause, quand les saignements ne sont plus là pour éliminer le fer en excès.
Un carnet de suivi
Un carnet de suivi de l’hémochromatose conçu par des experts de l’hémochromatose,l’Établissement français du sang et les associations de malades, sous l’égide de la caisse nationale de l’Assurance maladie, facilite la communication entre les patients et les équipes médicales. Il contient notamment le projet thérapeutique, une courbe de désaturation du fer, les dernières analyses biologiques.
Ce carnet de suivi peut être téléchargé sur : www.hemochromatose.org/wp-content/uploads/2012/11/Carnet-de-suivi-2011.pdf
Avec l’aimable participation du docteur Henri Michel, professeur honoraire de la faculté de médecine Montpellier-Nîmes, médecin honoraire des hôpitaux.
Info+
Une autre mutation du gène HFE a été décrite dans des cas d’hémochromatose de type 1 : la mutation H63D (remplacement, en position 63, d’une histidine par un acide aspartique). Elle peut être impliquée dans l’apparition de la maladie en cas d’association à la mutation C282Y chez des hétérozygotes composites C282Y/H63D. Pour certains, elle est encore discutée, mais quoi qu’il en soit, elle est le plus souvent bénigne.
Info+
Autres causes de surcharges en fer (acquises) :
– hépatopathies chroniques : hépatites C et B ou alcooliques ;
– stéatose (accumulation de graisse) hépatique dans le cadre d’un syndrome métabolique (surpoids, HTA, diabète…) ;
– porphyrie cutanée (anomalie de l’hémoglobine) ;
– transfusions sanguines répétées (thalassémie, anémies…) ;
– hémosidérose africaine subsaharienne.
TémoignageJe me suis battu trente ans avant le diagnostic
Jean-Luc Anglès, 73 ans, retraité, Indre (36), auteur de L’hémochromatose génétique, trop de fer c’est l’enfer. Histoire vécue, disponible au prix de 13,50 €, frais de port inclus, bénéfices reversés à l’association Hémochromatose France. Commande : 02 54 28 63 49 ; j.l.angles@orange.fr
Les premiers signes sont apparus à l’âge de 38 ans. Je souffrais d’une grosse fatigue, d’hypertension artérielle paroxystique et j’ai été opéré d’un cancer de l’intestin par un chirurgien qui a évoqué une surcharge en fer. En plus de la fatigue, sont ensuite apparus les douleurs aux mains et le diabète. J’ai vu plus d’une vingtaine de médecins. J’évoquais à chaque fois le fer, mais par méconnaissance totale, voire par déni de la maladie, ils traitaient uniquement les symptômes. En 2010, suite à un AVC ischémique, on découvre des kystes sur l’hypophyse et la thyroïde, mais toujours pas de diagnostic… Par hasard, je suis tombé sur un tract d’Hémochromatose France qui m’a mis la puce à l’oreille. Sur les huit symptômes décrits, j’en avais sept ! J’ai exigé des dosages, le coefficient de transferrine était à 105 %, la ferritinémie à 1 941 µg/ml… !
J’ai enfin été pris en charge par une spécialiste de l’hémochromatose. Les examens ont montré une saturation majeure du foie (290 µmol/g), des kystes sur le foie, le pancréas, le rein droit et une ferritinémie à 2 418 % µg/ml. Les saignées ont été mises en place plus de trente ans après les premiers symptômes ! D’abord, une par semaine, puis au coup par coup, selon dosages de la ferritinémie, en raison de troubles cardiaques et du risque d’anémie. Mais les dégâts sont irréversibles. Je souffre de diabète, d’hypertension, d’arthrose aux mains, aux chevilles et aux coudes, parfois de vertiges, de malaises… Je suis fatigué une heure après le lever. Sur une échelle de capacité de 10, je me sens à 3 ou 4. C’est une vraie galère au quotidien.
Info+
Prise en charge
L’hémochromatose figure sur la liste des affections de longue durée bénéficiant d’un remboursementà 100 % après demande du médecin. Sont concernés les traitements de la maladie et les affections qui en découlent. Sur demande d’accord préalable et sous certaines conditions, les frais de transport liés au déplacement pour effectuer les saignées sont pris en charge.
Principales contre-indications des traitements de surcharge
Saignées/érythraphérèse : les contre-indications permanentes sont essentiellement les anémies d’origine centrale (non liées à une carence), la thalassémie majeure, les cardiopathies sévères dues ou non à l’hémochromatose. Les temporaires sont : l’anémie par carence martiale, l’hypotension artérielle, l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI), les antécédents d’accident thrombotique d’un membre ou d’AVC de moins de six mois, une fréquence cardiaque à 100 battements par minute, la grossesse, les veines du bras inaccessibles, l’altération temporaire de l’état général.
Déféroxamine : insuffisance rénale sévère, infection bactérienne en cours, grossesse.
Info+
Donner son sang lors d’une saignée est possible
L’hémochromatose génétique n’est pas une contre-indication au don de sang, qui peut être couplé à la saignée depuis un arrêté de 2009, à condition d’être réalisé avec l’accord du patient, dans un EFS (établissement français du sang) comprenant un centre de santé, en collaboration avec l’équipe médicale qui suit le patient et selon les critères d’éligibilité habituels.
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