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“Restaurer l’estime de soi passe aussi par refaire alliance avec son corps”

Publié le 25 août 2021
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Valérie Sugg, psychologue spécialisée en cancérologie et autrice de Cancer : sans tabou ni trompette et Cancer : l’accompagnement, aux éditions Kawa.

Comment la maladie transforme-t-elle la vision que le patient a de lui ?

L’annonce du cancer est un traumatisme profond. La maladie est une épreuve qui entraîne une transformation physique et psychique. D’un point de vue physique, l’altération de l’image du corps est souvent moins le fait du cancer que des traitements. Ces derniers modifient concrètement le corps avec la tumorectomie par exemple, mais aussi l’image que chaque personne malade a de son corps. Le plus souvent, le cancer ne se voit pas et ne se sent pas et, de surcroît, ce sont les traitements qui peuvent rendre malade et provoquer nausées, douleurs, etc. C’est difficile à accepter alors qu’un traitement est censé améliorer notre état. Ce n’est pas facile d’appréhender le cancer quand on ne se sent pas malade au départ. Le patient se trouve aussi face à des contradictions. Il est souvent satisfait de ne pas avoir d’effets visibles de la maladie et, a contrario, si elle ne se voit pas, il n’est pas pris au sérieux par son entourage. Pour la société, si une chose ne se voit pas, elle n’existe pas.

Quels sont les changements physiques qui transforment le patient ?

Le corps est directement visuellement touché, mais le patient doit également vivre avec la fatigue, la douleur et les effets secondaires des traitements. Il a bien du mal à se reconnaître. Il y a également dans l’inconscient une part de colère contre ce corps qui les a trahis, qui ne fonctionne plus correctement, et dont l’image se dégrade. Ce qui conduit à un dégoût et à une envie de l’oublier, de s’oublier. On cache parfois ce corps meurtri. On s’isole.

Comment ce corps malmené peut-il se reconnecter à soi ?

Pour qu’un patient refasse alliance avec son corps, il faut qu’il lui fasse du bien, pour sortir de la vision de son corps médicalisé par les soignants. Il faut se le réapproprier en lui offrant autre chose que des soins médicaux. En cela, la socio-esthétique est une aide précieuse.

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