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Mieux vaut trod que pas assez
Le premier autotest pour dépister le VIH arrivera en septembre en officine. Se former est utile et conseillé pour accompagner les usagers et adopter la bonne attitude pour mieux vivre cette dispensation parfois « sensible ». Contribuer au dépistage des séropositivités ignorées est un objectif de santé publique.
Son arrivée était prévue en ce mois de juillet. Elle a été repoussée à la mi-septembre. Le premier autotest sanguin de dépistage du VIH sera bientôt disponible dans les pharmacies et sur leurs sites de vente en ligne. L’Autotest VIH est un dispositif médical de diagnostic in vitro. C’est le premier autotest à obtenir un marquage CE en France. Il permet de savoir en quinze minutes si une personne est porteuse du virus VIH du sida grâce à un petit prélèvement de sang au bout du doigt, comme pour un autocontrôle glycémique. Vendu sans ordonnance, y compris pour les personnes mineures, il devrait coûter 28 €. Le ministère de la Santé et les acteurs de la lutte contre le sida comptent sur le professionnalisme officinal. Les croix vertes ont décidé de relever le défi.
Les enjeux de ce test à la portée de tout le monde sont clairs et les chiffres, sans appel. 30 000 personnes en France sont porteuses du VIH et ne le savent pas. Et chaque année, il y a entre 7 000 et 8 000 nouvelles contaminations, dont près des deux tiers seraient dus à des séropositifs qui s’ignorent.
Un outil de dépistage complémentaire
Connaître sa séropositivité permet de protéger ses partenaires et de se traiter plus tôt, donc de vivre plus longtemps. « Cet autotest est un outil de dépistage du VIH complémentaire aux tests classiques et aux autres tests rapides d’orientation diagnostique (trod, lire encadré p. 8) », précise Jean-Marc Polesel, coordinateur du Corevih Paca Ouest-Corse (voir lexique p. 8). « C’est amener un outil d’orientation au dépistage quasiment à la porte du domicile », complète Julie Langlois, pharmacienne et secrétaire de la commission Médicaments-pharmaciens de la Société française de lutte contre le sida (SFLS), en charge du projet Guide pratique de l’Autotest VIH à l’officine.
À public varié, offre variée
Types de tests, structures, l’offre de dépistage du VIH est large en France. Alors, qui est susceptible de venir acheter son autotest en pharmacie ? « Des gens qui ne vont pas ou plus dans les centres de dépistage ou les associations. Qui pour certains ne se reconnaissent pas dans les publics qu’elles prennent en charge le plus souvent, homosexuels ou usagers de drogues injectables », explique Jean-Marc Polesel. Il y a aussi des hommes mariés à une femme qui ont des relations sexuelles avec des hommes mais ne se considèrent pas comme homosexuels ». Le test intéresse également des hommes ou des femmes qui prennent des risques occasionnellement ou régulièrement et qui en ont assez d’aller dans les centres de dépistage et préfèrent se contrôler régulièrement à la maison… « La pharmacie peut être un lieu où informer sur le dépistage et la prévention du VIH des personnes jamais dépistées par ailleurs, confie Julie Langlois. L’officinal, en raison de sa proximité locale et de sa couverture du territoire national, est un acteur de plus en plus missionné dans son rôle de santé publique dont il ne faut pas se priver ». Le public est aussi varié que ses demandes et ses inquiétudes. C’est d’ailleurs ce qui interroge plusieurs officinaux. Et si le test est positif, je fais quoi ? Que dois-je savoir pour vendre ce test (lire Les mots pour p. 54) ?
Le défi est de taille. Et sollicite des connaissances sur le VIH, les traitements, la transmission, la contagiosité et les structures locales de soins et d’accompagnement. Sans oublier un certain savoir-faire psychologique, tout jugement de valeur étant à proscrire. D’ailleurs, l’arrivée de l’autotest en officine aurait été retardée par l’entreprise fabricante AAZ afin que « tous les acteurs de santé puissent se former à la dispensation de l’autotest VIH ainsi qu’à l’accompagnement des personnes qui s’auto-dépisteront ».
Tous les acteurs se mobilisent
Bruno Laurandin est d’accord : « Il faut être prêt pour accueillir les personnes et leur poser les bonnes questions. Pour ne pas se tromper d’objectif, qui n’est pas de vendre des autotests mais de dépister s’il faut dépister, orienter s’il faut orienter et rassurer si besoin. Il faut donner la bonne information aux différents types de population ». Ce titulaire à Suresnes (92) est membre de la commission Médicaments-pharmaciens de la SFLS sur la formation du pharmacien et de son équipe.
Marseille, Toulon, Orléans…, des officinaux ont commencé à se former grâce au dispositif mis en place sous l’égide de la Direction générale de la santé. Documents de la Haute autorité de santé rédigés avec des institutions publiques (ANSM, Inpes…), des organismes de lutte contre le sida (Sida info service, Aides, Médecins du monde, SFLS) et de l’ordre des pharmaciens… Formations par les Corevih, fiche du Cespharm, tout est fait pour que pharmaciens et préparateurs puissent informer a minima?: « On ne va pas dire du jour au lendemain aux gens de venir en officine pour leur dépistage, mais s’il y a une demande, nous devons pouvoir y répondre », soutient Marcelline Grillon, titulaire dans le Loiret et vice-présidente de la section A qui a travaillé sur ces projets pour l’Ordre.
Le minimum à connaître
Quelques points de savoir sont incontournables pour l’équipe officinale. « Comprendre ce que va détecter le test et être capable d’expliquer clairement au patient comment l’utiliser pour obtenir un résultat fiable. Si un préparateur sait cela, il conseillera correctement », explique Julie Langlois. Comme pour tout trod, « l’autotest est une photographie du statut sérologique qui date de trois mois. Les prises de risque de moins de trois mois n’apparaîtront donc pas », insiste Jean-Marc Polesel. Si la personne a pris un risque dans les dernières 48 heures, un traitement post-exposition est indiqué et il faudra l’orienter vers un service d’urgence. Si le risque date de moins de six semaines, un test Elisa est indiqué, comme en cas de résultat positif de l’autotest. La fiche du Cespharm à paraître résume cette chronologie. Connaître les coordonnées locales d’un centre de dépistage anonyme et gratuit (CDAG), d’un service spécialisé ou d’une association d’écoute telle que Sida info service est également indispensable. « Après, il y a les informations apportées pour l’accompagnement du patient qui vont dépendre de la connaissance des structures locales par le pharmacien ou le préparateur », complète Julie Langlois. Et de leur sensibilité…
Juste un petit mot
Il ne s’agit pas de faire une consultation pré- et post-test, ni de devenir expert de la prévention ou de la consultation d’annonce d’une séropositivité. Julie Langlois tient à rassurer : « Dans la boîte de l’autotest, il y a une notice bien détaillée avec une ligne d’aide à distance gérée par Sida info service qui assistera patients et professionnels ». Le Corevih de l’arc alpin propose, lui, une brochure « Et si mon résultat était positif » (ci-contre), avec conduite à tenir et adresses de soutien, que l’on peut donner avec le test. Car certains ne voudront pas dialoguer sur la prise de risque ou un éventuel test positif. « C’est un réel traumatisme psychique d’apprendre une séropositivité, même si tous les discours sont particulièrement rassurants », confirme Nadine Trocmé, vice-présidente de la SFLS, psychologue clinicienne et psychothérapeute à l’hôpital pédiatrique Trousseau (Paris). Aux patients taiseux et aux officinaux peu à l’aise, elle conseille de « glisser un petit papier en disant ‘‘En cas de besoin, téléphonez à telle association ou à tel hôpital qui peut vous prendre en charge’’ ».
Restent à préciser d’ici septembre quelques points comme son élimination via l’éco-organisme Dastri ou sa vente par des associations. Pour l’instant, il relève du monopole pharmaceutique et se place derrière le comptoir. En attendant, informez-vous !
Lexique
→ Corevih : coordination régionale de lutte contre le VIH.
→ Cegidd : centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic. Ils vont remplacer les CDAG et les Ciddist au 1er janvier 2016.
→ Ciddist : centre d’information de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles.
→ CDAG : centre de dépistage anonyme et gratuit. Ils sont implantés depuis 1988 dans les établissements de santé ou des dispensaires.
→ Caarud : centre d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques chez les usagers de drogues.
→ SIS : Sida info service au 0 800 840 800.
Quel test à quel moment ?
• Les tests dits classiques
Un test Elisa de quatrième génération détecte les infections récentes via une prise de sang. Un test négatif indique que la personne n’est pas contaminée à condition qu’elle n’ait pas pris de risque dans les six semaines précédant la réalisation du test. Si Elisa est positif, un test Western-Blot permet de confirmer la présence du virus dans l’organisme. Où le faire : laboratoire d’analyses privé ou public (prescrit par un médecin, il est pris en charge à 100 %, sinon coûte environ 15 €), CDAG, Ciddist et centres de soins pour les plus démunis (gratuit dans les trois structures).
• Un trod
Un test rapide à orientation diagnostique de dépistage (trod) détecte également les anticorps anti-VH1 et VH2 comme Elisa, mais c’est un test unitaire, à lecture visuelle simple en 30 minutes. Il ne peut être interprété négatif que si la prise de risque date de plus de trois mois. Positif, il doit être confirmé par un test classique. Il peut se réaliser sur le sang, le plasma, le sérum ou le fluide gingival selon les marques.
Où le faire : CDAG, Ciddist, chez certains médecins, centres de soins pour les plus démunis, Caarud, associations de lute contre le sida.
• Le nouvel autotest VIH Cet autotest de dépistage de l’infection par le VIH (ADVIH) est un trod réalisable dans un environnement domestique par un utilisateur profane. Le prélèvement du sang (au doigt) et l’interprétation sont effectués directement par l’intéressé. Un résultat positif doit être confirmé par un test Elisa. Comme les autres trods, un résultat négatif ne peut être interprété que si la prise de risque remonte à trois mois au moins. Où le faire : chez soi, voire dans les pharmacies consentantes.
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