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Les pansements hydrocolloïdes

Publié le 2 février 2013
Par Christine Julien
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LA CICATRISATION

C’est quoi ?

Très complexe, la cicatrisation est l’ensemble des phénomènes de détersion, prolifération, migration et différenciations cellulaires et tissulaires qui aboutit à la reconstitution d’un tissu lésé. Schématiquement, elle se déroule en quatre phases : hémostase, phases détersivo-inflammatoire, de prolifération et de remodelage (ou détersion, bourgeonnement et épidermisation). En phase de détersion, la plaie est recouverte de fibrine et de nécrose dont il faut se débarrasser pour laisser place à la croissance du tissu de granulation et d’épidermisation. Il faut contrôler les exsudats pour éviter à certains de leurs composants (enzymes…) d’empêcher la stabilisation du tissu conjonctif propice à la cicatrisation.

Le processus de cicatrisation physiologique est orchestré par un ensemble d’acteurs : cellules, cytokines, médiateurs inflammatoires, facteurs de croissance, enzymes… De nombreux travaux (années 1960) ont montré que la cicatrisation est favorisée par le maintien d’un milieu humide sur le lit d’une plaie.

Les plaies

Une plaie chronique est une plaie dont le délai de cicatrisation est allongé en raison de cause(s) de retard ; une plaie est considérée comme chronique après quatre à six semaines d’évolution. Étiologies : ulcères de jambe, escarres, plaies du diabétique, moignons d’amputation.

Une plaie aiguë est une plaie dont le délai envisagé de cicatrisation est supposé normal, sans cause locale ou générale pouvant retarder la cicatrisation. Étiologies : brûlures, morsures, plaies postopératoires, greffe…

Le pansement idéal

Aujourd’hui, un pansement moderne ou actif permet à la cicatrisation physiologique de se dérouler dans les meilleures conditions physiques, chimiques et biologiques. Il facilite le retour d’une dynamique physiologique, mais n’est pas un « super-cicatrisant ».

Dans l’idéal, il doit créer un microclimat humide et chaud. Il est semi-occlusif, c’est-à-dire perméable de façon relative aux échanges gazeux, mais imperméable aux liquides et avec effet barrière aux bactéries. Conformable et stérile, il ne doit pas adhérer à la plaie. Il se change sans aucun dommage et permet le retrait de l’exsudat en excès et des composants toxiques.

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LES HYDROCOLLOÏDES

Description

Les hydrocolloïdes (HC) sont les « ancêtres » des pansements semi-occlusifs modernes de la cicatrisation en milieu humide. Ces dispositifs médicaux sont dits primaires car placés au contact de la plaie. Ils sont stériles et emballés individuellement.

COMPOSITION

Ils sont constitués de polymères absorbants, dont les propriétés physico-chimiques sont liées à la présence de carboxyméthylcellulose (CMC), une gomme de cellulose.

Les hydrocolloïdes comportent :

→ une couche interne constituée de CMC sodique « noyée » dans une masse adhésive avec d’autres composants parfois (gélatine, pectine…). Selon la nature de la couche, les gommes sont plus ou moins denses, cohésives, élastiques et adhésives ;

→ une couche externe constituée d’un film et/ou mousse de polyuréthane (PUR) et/ou compresses non tissées ; elle est imperméable aux liquides. Le film en PUR est semi-perméable ou occlusif avec effet barrière contre les micro-organismes extérieurs.

Adhésifs sur toute leur surface avec parfois un renforcement en périphérie, les hydrocolloïdes ne collent pas à la plaie. Malgré tout, certaines formes épaisses nécessitent un pansement secondaire (bande…) pour un meilleur maintien (chez l’enfant, zone mobile…).

Les formes

Ils existent sous plusieurs formes, dimensions et épaisseurs (voir tableau) :

→ plaques adhésives sur la surface au contact de la peau, opaques ou transparentes, de forme standard ou anatomique adaptée au sacrum, talon ou coude ;

→ plaques non adhésives ;

→ poudre et pâte avec une concentration de CMC ≥ 18 %.

Les différentes formes :

→ épaisses, pour une absorption maximale ; utilisables à tous les stades de la cicatrisation ;

→ minces et extra-minces, souvent transparentes : pour un contrôle visuel de la plaie mais une moindre absorption ; réservées aux plaies moins exsudatives, superficielles, plutôt au stade d’épidermisation ;

→ bordées ou renforcées par des ailettes, pour zones mobiles ou soumises aux frottements grâce au renforcement de l’adhésif en périphérie ;

→ triangulaires…, adaptées aux escarres sacrées, du talon ou du coude ;

→ pâtes, pour combler les plaies infractueuses (creuses).

COMMENT ÇA MARCHE ?

Les hydrocolloïdes favorisent la cicatrisation naturelle en maintenant un milieu humide sur la plaie et en drainant les exsudats. Ils se transforment en gel en absorbant l’exsudat (interaction CMC/exsudat) et produisent une substance « pus-like » ou « odeur de pus », malodorante, qui nécessite de prévenir les patients. Ce gel peut également entraîner une macération des berges de la plaie.

La couche externe, imperméable au liquide et semi-perméable aux gaz autorise l’apparition d’un milieu chaud et humide relativement riche en CO2 et pauvre en oxygène.

Emploi

→ Utilisation : à tous les stades de la cicatrisation pour les plaies faiblement à modérément exsudatives : plaies superficielles, brûlures des 1er et 2e degrés, escarres, ulcères… En pratique, ils le sont surtout dans les plaies chroniques aux stades de détersion et de prolifération (bourgeonnement). Il faut adapter l’épaisseur au stade ; les épais pour les plaies exsudatives, les formes plus minces en fin de cicatrisation ou dès l’apparition de rougeurs.

Remarque : les HC sont utilisés aussi en protecteurs cutanés pour les soins de stomie et en podologie (ampoules…).

→ Contre-indications : nécrose sèche, plaies infectées, ulcères artériels, eczéma péri-lésionnel, allergie ; contre-indication relative dans les artériopathies de stade IV, diabète avec lésions nécrotiques.

→ Fréquence de changement : elle est fonction de la saturation du pansement, de 2 à 3 jours en phase de détersion ; de 7 jours en phase d’épidermisation avec une forme mince.

Le pansement est changé à saturation uniquement (formation d’une bille de gel due à l’interaction CMC/exsudat et décollement du pansement).

LÉGISLATION

Prescription

Elle est autorisée pour les médecins et les infirmiers.

Prise en charge LPPR

Les hydrocolloïdes sont inscrits sous description générique sur la liste des produits et prestations remboursables (LPPR, disponible sur www.ameli.fr.). Seules les formes plaques et anatomiques sont prises en charge.

→ Le tarif LPPR est basé sur la surface en centimètres carrés. Exemple : une base de remboursement LPPR 50 et 63 cm2 correspond à une plaque de 7,5 cm × 7,5 cm ; 100-120 cm2 = 10 cm × 10 cm ; 225-300 cm2 = 15 cm × 15 cm.

→ Des prix limite de vente sont fixés, sauf pour les formes cavités, talon et coude, pour lesquelles un dépassement à faire payer au patient est autorisé (mais pas souhaitable…).

→ La prise en charge est liée à des indications, elle est assurée pour les plaies chroniques sans distinction de phase ou en phase d’épidermisation en cas de traitement séquentiel. Les plaques adhésives minces et transparentes sont également prises en charge en cas d’escarres chez l’adulte et chez le sujet âgé pour protéger la peau au stade de la rougeur.

Mémento délivrance

→ Prescription sur ordonnance, à part des médicaments, d’une durée d’un mois maximum.

→ Substitution de marque interdite sauf autorisation du prescripteur.

→ Délivrer le plus petit conditionnement en l’absence de précision.

→ S’assurer du format de la plaie ; le pansement doit déborder de 3 cm environ.

→ Ne pas co-délivrer d’antiseptique ; une plaie se lave au sérum physiologique et les hydrocolloïdes sont contre-indiqués sur plaie infectée.

→ Ne pas superposer deux pansements actifs.

→ Vérifier l’adhésivité. S’il n’adhère pas, il faut un pansement secondaire (bande de gaze…).

→ Dépassement tarif LPPR pour les seules formes anatomiques.

→ Douches/bains autorisés.