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Le nouvel eldorado
Les possibilités de carrière à l’hôpital, la rémunération, mais aussi les horaires de travail séduisent les préparateurs officinaux. L’exercice du métier à l’hôpital privilégie cependant la technique au relationnel avec les patients. Reportage dans les coulisses de la pharmacie de l’hôpital Bichat-Claude-Bernard.
Près de 85 % des collaborateurs de l’officine ont déjà pensé à une carrière hospitalière, selon les résultats de la dernière enquête flash sur le site Internet de Porphyre (voir page 19) ! Alors même que les hospitaliers sont plutôt moroses, déplorant le manque de moyens et la pénurie de personnel, l’hôpital public attire beaucoup de préparateurs. Et pour cause. Les rémunérations qui y sont offertes sont supérieures à celles auxquelles ils peuvent prétendre à l’officine. De plus, l’hôpital offre la possibilité d’accéder à des postes de cadre. Enfin, les horaires sont plus compatibles avec une vie de famille… Si les pharmacies hospitalières sont ouvertes vingt-quatre heures sur vingt-quatre, le gros de l’activité se fait généralement de 9 h 00 à 17 h 00, et les dimanches et gardes nocturnes sont assurés par les internes. Cependant, pour un officinal, travailler à l’hôpital c’est presque changer de métier.
Préparateur hospitalier, un autre métier
« Ces deux lieux d’exercice sont très différents, on ferme un livre et on en ouvre un autre. Ne serait-ce qu’au niveau des médicaments, les pathologies traitées à l’hôpital sont inconnues à l’officine », explique Patricia Meunier, préparatrice cadre de santé à la pharmacie de l’hôpital Bichat-Claude-Bernard (Paris). « C’est l’aspect technique du métier qui m’a attirée à l’hôpital. J’aime la concentration et le savoir-faire que demande par exemple la chimiothérapie », explique Doniscia. Cette jeune préparatrice travaille dans l’unité de reconstitution (la « bulle »). Isolés du reste de l’hôpital dans un grand espace sans fenêtre, les préparateurs fabriquent toute la journée des médicaments.
Préparations classiques, stériles ou chimiothérapies
« Nous fabriquons trois types de produits pour les services de soins, les préparations classiques telles que des gélules, des pommades, les préparations stériles et les perfusions de chimiothérapie », explique Béatrice Menneglier, pharmacienne responsable de la gestion et de l’informatique. Les préparations classiques, comme on en fabrique à l’officine, sont réalisées selon des règles d’hygiène strictes mais sans équipement particulier. Les préparations stériles nécessitent, elles, des précautions rigoureuses. Elles sont effectuées dans une pièce à atmosphère contrôlé par filtrage de l’air. Quand, après s’être lavé les mains, Guillaume y entre, masqué, ganté, coiffé d’une charlotte et vêtu d’une blouse, il y reste des heures durant. Le travail s’effectue en binôme, Guillaume reconstituant les perfusions, seringues et autres poches à alimentation parentérale, son collègue lui fournissant le matériel puis récupérant les produits pour les étiqueter. « Bien sûr, ce sont les infirmières qui réalisent la majorité des perfusions et autres injectables pour les mille malades de l’hôpital. Nous reconstituons les produits dangereux lors de la manipulation ou ceux nécessitant une asepsie rigoureuse et les produits coûteux pour éviter les pertes, continue Béatrice Menneglier. Par exemple, nous centralisons la reconstitution de Remicade, un médicament indiqué dans la polyarthrite rhumatoïde. Le flacon de 100 mg coûte 700 euros. Les dosages sont souvent de 350 ou 250 mg. Les 50 mg restants d’un flacon sont utilisés ainsi pour une autre prescription. » Autre poste de la « bulle », presque exotique pour les officinaux : l’isolateur, enceinte stérilisée par l’acide peracétique. Là, il s’agit de préparer stérilement et d’assurer une sécurité maximale pour le manipulateur. Démonstration. Doniscia se glisse dans une tenue étanche avec casque, tel un cosmonaute, pour s’introduire dans l’isolateur. Elle saisit ampoules, flacons, perfuseurs et les introduit dans un sas, prêts à être utilisés. Son collègue du jour, Christophe, interne en pharmacie, plonge les bras dans l’isolateur et reconstitue les médicaments anticancéreux. Sur trente préparateurs à la pharmacie, quatre sont affectés à l’unité de reconstitution. Dix autres sont polyvalents sur plusieurs pôles : pharmacie centrale, rétrocession des antirétroviraux, tandis que seize autres travaillent au sein des services de soins.
Les préparateurs dans les services de soins
Singularité de l’hôpital Bichat, il a mis en place la dispensation journalière individuelle nominative (DJIN), ce qui signifie que ce ne sont pas les infirmières qui préparent les médicaments des patients mais les préparateurs. Seize antennes pharmaceutiques sont installées dans les services de soins de l’hôpital. Chaque antenne dispose d’un local réservé, qui permet au préparateur de gérer son stock de médicaments, de passer les commandes… Véronique, affectée à la réanimation, prépare chaque jour les chariots de médicaments qu’elle remet aux infirmières et passe dans le service pour récupérer les prescriptions, répond aux questions des uns et des autres. « Le préparateur doit faire une analyse critique de l’ordonnance, puisque c’est lui qui valide la dispensation par délégation pharmaceutique, souligne Patricia Meunier. Il y a cependant une double validation par l’infirmière qui administre le médicament. »
La pharmacie centrale, centre névralgique
Si la majorité des services disposent d’antennes, d’autres (bloc opératoire, anesthésie, consultation) s’adressent directement à la pharmacie centrale, véritable centre névralgique. Ici, des préparateurs déconditionnent les médicaments à l’unité afin de les emballer sous blister. Le téléphone y sonne sans arrêt pour des médicaments requis en urgence, sans compter les demandes faites par un système de pneumatique. « Cela peut être l’enfer parfois, lorsque nous devons répondre à plusieurs demandes en même temps », soupire Caroline, préparatrice. À côté de l’effervescence de la pharmacie centrale, une autre activité, plus confidentielle, occupe chaque jour préparateurs et pharmaciens, la rétrocession des médicaments hospitaliers. À Bichat, spécialisé dans le traitement de l’infection par le VIH, elle est très importante, une centaine de patients par jour. « Nos patients ne veulent pas aller en ville car les officines ne leur garantissent aucune confidentialité. De plus, ils viennent ici pour s’informer sur leur traitement, ils savent que nous prendrons le temps de discuter avec eux », indique Patricia Meunier. Les patients sont reçus individuellement dans des box pour assurer la confidentialité. « Les patients se confient beaucoup à nous, ils restent en général entre dix et trente minutes dans le box. J’aime beaucoup cette mission, même si c’est parfois un peu lourd », confie Sadata. « Ce sont souvent des personnes qui cumulent des problèmes, on voit beaucoup de misère et de solitude. Le préparateur doit faire preuve de psychologie et avoir une bonne écoute. Si le patient a du mal à prendre son traitement, c’est à nous de le diriger vers une consultation d’observance », ajoute Patricia Meunier.
Le préparateur, un professionnel de santé à part entière
À l’hôpital Bichat, le préparateur ne se contente pas de fabriquer et de dispenser le médicament, c’est un professionnel de santé intégré dans la chaîne de soins. C’est aussi un professionnel qui travaille en étroite collaboration avec les pharmaciens, même si ces derniers ont des responsabilités spécifiques. Par exemple, s’il y a un préparateur par unité de dispensation, un pharmacien à la responsabilité de trois unités. En outre, les pharmaciens coordonnent d’autres activités : stérilisation, dispositifs médicaux, essais cliniques, dispensation des médicaments dérivés du sang, pharmacovigilance… « Les préparateurs sont de véritables collaborateurs, estime Béatrice Menneglier, ils ont d’ailleurs une réelle autonomie, gérant les feuilles de commande, validant leurs dispensations et nous signalant les cas qui leur posent problème. »
Oü se former ?
Professionnels reconnus mais contractuels oubliés.
Et les préparateurs hospitaliers peuvent revendiquer une compétence spécifique. Ils ont obtenu l’homologation au niveau III du diplôme de préparateur en pharmacie hospitalière et le reclassement pour les titulaires en poste (décret du 7 septembre 2001). « Le brevet de niveau IV ne suffit pas pour exercer à l’hôpital, des connaissances plus approfondies sont nécessaires », explique Marie-Line Intilia, présidente de l’Association nationale des préparateurs en pharmacie hospitalière (ANPPH) et préparatrice cadre de santé à l’hôpital Antoine-Charial à Francheville (69), qui avait demandé la création de ce diplôme. À la rentrée 2004, grâce à l’ouverture de centres de formation à Metz et Tours, le nombre de préparateurs formés devrait être de 180 environ contre 130 l’année précédente. Un nombre probablement encore insuffisant. À Paris, il y a eu l’année passée 210 demandes. Une centaine de dossiers ont été examinés, les autres étant incomplets. Le nombre de sélectionnés a été de 30. « Le préparateur en pharmacie hospitalière est aujourd’hui un professionnel de santé au même titre que les autres professions médicotechniques que sont les manipulateurs en électroradiologie médicale et les techniciens en analyse médicale. Nous avons d’ailleurs le même déroulement de carrière avec la possibilité de devenir cadre de santé ou directeur des soins », ajoute la présidente Marie-Line Intilia. Le reclassement des titulaires s’est accompagné d’un changement d’indice dans les grilles et d’une rémunération plus avantageuse. La rémunération nette (au 1er mars 2002) commence à 1 363 euros en début de carrière et peut aller jusqu’à 2 900 euros pour un préparateur cadre supérieur de santé en fin de carrière. Si les titulaires et les jeunes diplômés ne peuvent qu’être satisfaits de leur nouveau statut, le problème n’est pas pour autant réglé pour les contractuels. Les jeunes âgés de moins de vingt-six ans ont la possibilité de se présenter au concours pour la formation de préparateur hospitalier. En revanche, ceux âgés de plus de vingt-six ans sont contraints de se satisfaire de leur statut de contractuel. « Je suis contractuelle à l’hôpital Bichat, j’ai tenté le concours l’année dernière sans succès, précise Sadata. Cette année, c’est ma dernière chance ! » Toutefois, il est prévu une validation des acquis de l’expérience pour les plus de 26 ans qui pourrait être opérationnelle à la fin 2004. Le syndicat CGT, qui a rencontré le ministère à ce sujet, précise que cette validation porterait sur un socle d’activités de trois ou cinq ans dans une pharmacie hospitalière. Une formation continue complémentaire, sa mise en place est prévue à la rentrée 2005, serait envisagée pour les activités non pratiquées habituellement…
En pratiqueComment devenir préparateur en pharmacie hospitalière ?
Conditions d’accès
• Avoir moins de 26 ans à la date de signature du contrat d’apprentissage.
• Être titulaire du BP de préparateur en pharmacie.
Sélection des candidats
• Présélection sur dossier : CV, lettre de motivation, copies du baccalauréat, des notes obtenues en BP. Se renseigner auprès des centres, les dossiers incomplets n’étant pas examinés.
• Entretiens de motivation : avec l’équipe pédagogique organisés en juillet pour une rentrée début octobre.
• Critères de sélection : un baccalauréat scientifique, de bonnes notes au BP sont des éléments déterminants. La plupart des centres de formation demandent aux futurs préparateurs hospitaliers d’avoir trouvé un terrain d’accueil.
Organisation de la formation
• Durée d’un an, soit 1 300 heures au total.
• Organisation par la voie d’apprentissage.
• Alternance établie sur la base de quatre semaines en centre de formation/ quatre semaines en centre hospitalier.
Enseignement théorique
Treize modules d’une durée de 660 heures : biologie cellulaire et moléculaire (40 heures) • pharmacologie et thérapeutiques hospitalières (40 heures) • hémobiologie-produits sanguins labiles (10 heures) • dispositifs médicaux stériles (70 heures) • hygiène hospitalière (60 heures) • vigilance (20 heures) • travaux pratiques d’analyse et de contrôle appliquée à la PUI (80 heures) • stérilisation (50 heures) • les procédés de fabrication (90 heures) qualité (60 heures) • législation et économie de la santé (60 heures) • expression et communication (20 heures) • les radiopharmaceutiques (60 heures).
Enseignement pratique
Stages d’une durée de vingt semaines effectués en pharmacie hospitalière et dans l’industrie pharmaceutique.
Rémunération des apprentis
98 % du SMIC (GMR4), soit 1 130 euros environ.
Évaluation des candidats
• Contrôle continu des enseignements théoriques (coefficient 28).
• Soutenance d’un rapport de fin de stage (coefficient 22).
Formation
Content« Je me sens reconnue par les autres cadres »
« Je suis très heureuse de faire le métier de préparateur en pharmacie hospitalière, et je ne regrette absolument pas mes huit années d’officine. La diversité des activités, notre grande autonomie, nos responsabilités sont autant d’avantages que nous avons à l’hôpital. Nous avons en général de très bonnes relations avec les pharmaciens, qui nous considèrent comme leurs plus proches collaborateurs. Ancienne préparatrice (classe fonctionnelle), je suis passée depuis le 1er janvier dernier préparatrice cadre de santé. Si ce nouveau statut n’a pas changé grand-chose au niveau des missions qui me sont imparties, je me sens aujourd’hui reconnue à part entière par les autres cadres médicotechniques. »
Marie-Line Intilia, présidente de l’ANPPH et préparatrice cadre de santé
Pas content« Où est l’égalité des chances ? »
« Je suis actuellement préparatrice dans un centre hospitalier depuis plus d’un an, contractuelle car je n’ai plus l’âge requis pour effectuer cette formation. J’ai donc droit de travailler à l’hôpital, mais surtout pas celui d’être titulaire. Le métier de préparateur hospitalier me plaît beaucoup, mais cela reste du provisoire qui dure avec des contrats de trois mois en trois mois. Comment peut-on fermer une porte à tout les préparateurs âgés de plus de 26 ans qui veulent devenir hospitaliers ? Où est l’égalité des chances ? Des négociations devaient se mettre en place pour organiser une formation continue, mais elles sont reportées en septembre 2004, voire 2005. La pénurie de préparateur à l’hôpital se fait grandement ressentir, il est grand temps d’agir !
Annie, 35 ans, préparatrice
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