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Le « naturel » revient au galop à l’officine
Que ce soit par conviction ou pour pallier les carences de l’offre de soins classique, de plus en plus de personnes se tournent vers les médecines dites non conventionnelles. À l’officine, les préparateurs s’adaptent à la demande. Certains y trouvent même des satisfactions personnelles.
Qu’on les nomme « médecines alternatives », « complémentaires », « douces » ou « naturelles », les « pratiques de soins non conventionnelles à visée thérapeutique », selon l’expression retenue par le ministère de la Santé, connaissent un développement croissant. Elles représentent plus de 400 pratiques très différentes, de l’homéopathie à l’acupuncture, en passant par la phytothérapie, l’hypnose, la chiropraxie. L’engouement qu’elles suscitent dans l’Hexagone reste mal évalué, mais l’essor du marché des plantes médicinales et la demande de soins non conventionnels dans les pays voisins laissent à penser que le nombre de Français recourant à ces pratiques est considérable (voir encadré p. 19). Cet essor s’illustre dans les officines, où les rayons d’aroma, de phyto et d’homéo s’exposent largement, tandis que les formations sur ces thèmes fleurissent.
Malgré leur hétérogénéité, les thérapies non conventionnelles peuvent être regroupées en trois familles(1) : celles fondées sur les produits naturels (plantes, minéraux, etc.), les thérapies du corps et de l’esprit (méditation, hypnothérapie, yoga…) et celles fondées sur la manipulation (chiropraxie, ostéopathie, shiatsu, réflexologie plantaire…).
Des pratiques qui intéressent les professionnels du soin
Les professionnels de santé semblent également s’y intéresser, soit par conviction, soit par désir de mieux répondre aux besoins des patients. C’est notamment le cas des infirmiers et des aides-soignants, confrontés de près à la détresse quotidienne de malades. Ainsi, au Royaume-Uni, 65 % des médecins généralistes considèrent que les médecines complémentaires ont une place dans la médecine « officielle ». La Suisse connaît, elle, l’une des proportions de thérapeutes en médecines non conventionnelles les plus fortes au monde, et 60 % des généralistes allemands intègrent ces médecines dans leur pratique quotidienne(2). En France, les médecins à exercice particulier – ayant une qualification reconnue ou pratiquant une discipline non sanctionnée par un diplôme officiel – sont passés de 5 374 en 1983 à 11 000 environ en 2012. Et de 25 à 30 % des médecins généralistes recourent occasionnellement aux thérapies non conventionnelles pour soigner leurs malades(3).
En l’absence de définition universelle, ces pratiques dites thérapeutiques sont souvent décrites en opposition à la médecine conventionnelle ou allopathique, qui emploie des médicaments produisant des effets contraires à ceux que fabrique la maladie. En Occident, la médecine conventionnelle est fondée sur une validation scientifique, par des essais cliniques et/ou un consensus de la communauté professionnelle(4). C’est le credo de la médecine dite fondée sur les preuves (ou Evidence based medicine, en anglais), qui suit des protocoles de soins standardisés.
À l’inverse, dans la très grande majorité des cas, les « pratiques de soins non conventionnelles » n’ont pas été scientifiquement validées. Et n’ont pas fait l’objet d’études scientifiques ou cliniques montrant leurs modalités d’action, leurs effets, leur efficacité, voire leur « non-dangerosité ». D’ailleurs, le ministère de la Santé réfute le terme de « médecines » pour des « pratiques » qui n’ont pas prouvé scientifiquement leur efficacité. Qui plus est, elles ont pour point commun « de ne pas être reconnues, au plan scientifique, par la médecine conventionnelle et donc de ne pas être enseignées au cours de la formation initiale des professionnels de santé », précise le ministère sur son site(5). De son côté, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) retient l’appellation « Médecines alternatives et complémentaires » pour définir « des approches, des pratiques, des produits de santé et médicaux qui ne sont pas habituellement considérés comme faisant partie de la médecine conventionnelle ». Médecines ou pratiques, peu importe le terme, elles sont prisées par Monsieur et Madame Tout-le-monde…
Des patients aux motivations variées
Le profil classique d’un public jeune, féminin, des classes moyennes et supérieures est en passe de devenir un stéréotype. Aujourd’hui, nombre de personnes s’intéressent à ces thérapies non conventionnelles, quels que soient leur âge, leur genre ou leur niveau socio-culturel. Les motivations varient selon le parcours des patients. Éviter la consommation de médicaments est toutefois la première raison avancée par les Français méfiants vis-à-vis de l’institution médicale et de l’industrie pharmaceutique(2). La « médecine naturelle » étant perçue sans risque, parfois à tort.
D’autres cherchent des solutions quand la médecine conventionnelle ne peut soulager une anxiété, des migraines ou une douleur chronique. Ou encore dans le cas de maladies dont le diagnostic est difficile (voir notre dossier fibromyalgie, Porphyre n° 495). Il peut s’agir aussi de maximiser les chances de rétablissement par un traitement complémentaire.
Certains cherchent un meilleur confort de vie. « Le bien-être, qui fonde la définition de la santé par l’OMS, est souvent négligé dans les systèmes de santé alors qu’il est au cœur des médecines non conventionnelles », précise la note du Centre d’analyse stratégique(2). Le recours à d’autres thérapies vise alors à atténuer les effets indésirables des thérapeutiques classiques. Autre critère qui interroge sur l’offre de soins en France, les patients cherchent à pallier la carence de prise en charge globale, physique ou psychologique, voire spirituelle, ainsi que le manque de temps d’écoute des soignants. Ce que confirme Cristel Sieurac, préparatrice à la pharmacie du Centre à Plaisance-du-Touch (31) : « Le conseil d’un traitement homéopathique peut prendre quelques minutes de plus qu’un conseil classique en allopathie. Par exemple, pour quelqu’un qui a “le nez qui coule”, il faut faire préciser si cet écoulement est clair ou épais, s’il s’accompagne de maux de tête ou d’éternuements. Les questions ne sont pas compliquées, mais font passer un peu de temps avec le client, ce qu’il apprécie ».
Phyto, aroma et homéopathie à l’officine
Autre motivation, les patients qui souhaitent de plus en plus être actifs dans leur prise en charge se tournent volontiers vers des pratiques non conventionnelles qui demandent souvent un effort personnel. Ils s’orientent parfois vers ces thérapies pour trouver un sens à leur maladie.
À l’officine, les équipes sont surtout concernées par la phytothérapie, l’aromathérapie – très en vogue – et l’homéopathie. La pharmacie s’impose comme un endroit privilégié pour assurer un usage en toute sécurité des thérapies complémentaires fondées sur les produits naturels (voir encadré p. 21). « Garantir la sécurité des produits est un peu compliqué, souligne Danielle Roux, pharmacienne, enseignante et directrice de la revue La phytothérapie européenne. Je recommande généralement de faire appel à des laboratoires pharmaceutiques connus qui ont l’habitude de travailler avec des médicaments. De petits laboratoires travaillent sérieusement, mais il faut les connaître. Ce sont souvent de petits producteurs qui vendent en direct parce qu’ils n’ont pas les moyens de passer par un système très onéreux ». Pour le patient, la pharmacie reste sécuritaire grâce à la présence de professionnels de santé formés et de laboratoires reconnus. À l’inverse, Internet est déconseillé. « En médecine, Internet manque de transparence, rappelle Danielle Roux. Il faut conseiller aux gens de passer par la pharmacie car il y a des risques avec des produits qui peuvent être falsifiés ». En témoigne la mésaventure d’un patient de l’hôpital Necker à Paris rapportée par le Journal international de médecine (JIM.fr). Cet homme de 24 ans, en rechute d’une leucémie aiguë, s’automédiquait avec de l’ortie achetée via Internet, sur le conseil d’un naturopathe et sans en aviser son hématologue. Devant une forte suspicion d’infection fongique invasive, les capsules de poudre d’ortie utilisées par le patient se sont avérées positives à Aspergillus. La contamination des plantes par ce champignon microscopique fréquent dans l’environnement est habituelle, mais dans ce cas, il s’agissait d’un défaut de stérilisation dans la fabrication des capsules. « Il vaut mieux passer par une pharmacie expérimentée en préparatoire, confirme Valérie Jubet, préparatrice à la pharmacie des Ternes à Paris, orientée depuis longtemps en phytothérapie et en aromathérapie. Des clients nous ont apporté des formules complètement aberrantes provenant d’Internet ».
Naturel mais pas sans risque
La note du Centre d’analyse stratégique du ministère de la Santé(2) met surtout en garde contre la confiance abusive faite à ces thérapeutiques et le risque de prise en charge tardive par la médecine conventionnelle dans le cas de maladies graves, le cancer par exemple. Par leurs appellations – « médecines douces » ou « naturelles » –, ces thérapies sont facilement opposées aux moyens « agressifs » et « artificiels » tels que la chirurgie et la chimiothérapie dans la médecine conventionnelle. Elles représentent un espoir d’échapper au désagrément des effets indésirables médicamenteux et aux risques d’un geste chirurgical. Du coup, le ministère rappelle régulièrement que ces « médecines » sont propices aux escroqueries et dérives sectaires qui mettent en danger des patients, notamment en cas de substitution aux traitements conventionnels. Dans les pathologies graves, ces thérapies doivent être utilisées en traitement complémentaire. « Le but n’est pas de traiter le cancer, mais de pallier les effets indésirables des anticancéreux : nausées, vomissements, fatigue, baisse des plaquettes. Et soutenir l’organisme du malade sans altérer l’effet pro-oxydant des anticancéreux. Il vaut mieux prendre un traitement associé plutôt que d’arrêter un traitement anticancéreux insupportable. C’est d’ailleurs reconnus en milieu hospitalier », argumente Danielle Roux. Ainsi, plus de quinze traitements complémentaires différents sont utilisés dans les hôpitaux de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) dont l’hypnose, la relaxation, l’ostéopathie et les traitements issus de la médecine chinoise, dont l’acupuncture(6). Ces mêmes thérapies alternatives et complémentaires sont présentes dans la plupart des autres CHU et investissent tous les services, de la néonatalogie aux soins palliatifs en passant par les services de gastro-entérologie ou les consultations anti-tabac.
Non conventionnel et confidentiel ?
« Plus de 75 % des patients ne mentionnent pas à leur équipe soignante qu’ils se tournent vers ces médecines, par peur de déplaire ou de se les voir déconseiller, ce qui peut poser des problèmes d’interaction entre les traitements », rapporte la note du Centre d’analyse stratégique(2). C’est une situation fréquente selon le Dr Aline Mercan, médecin généraliste à La ? Grave (05) qui s’est exprimée au Congrès de la médecine générale en juin 2013 : « Selon les sources, le recours à ces thérapies concerne 30 à 50 % des patients atteints d’une pathologie chronique. Or la plupart n’abordent pas spontanément le sujet avec leur médecin traitant. Cela fait partie de leur sphère intime, ils ne ressentent pas toujours la nécessité d’en parler au médecin, ou peuvent parfois se sentir gênés de le faire ». Alors le préparateur doit-il inciter l’utilisateur à le signaler à son médecin ? « Je ne vois pas pourquoi il ne le ferait pas », répond François Roux, titulaire à Plaisance-du-Touch et auteur d’ouvrages en homéopathie. Ce pharmacien est conscient que le sujet reste passionné. « Il y vingt ou trente ans, certains se soignaient par homéopathie et d’autres par allopathie. Aujourd’hui, cette frontière n’existe plus. Les idées ont évolué d’abord chez le public, ensuite à la pharmacie et maintenant chez les médecins ». Le changement des mentalités se fait aussi dans le cadre des pathologies lourdes. « Il y a trente ans, certains pensaient soigner le cancer par l’homéopathie, ce qui a fait beaucoup de tort, comme pour l’ensemble des médecines non conventionnelles. Aujourd’hui, l’homéopathie s’inscrit clairement dans les soins de support pour limiter les effets indésirables de la chimio ou de la radiothérapie. C’est un discours plus clair et mieux accepté par les oncologues. Il faut le dire au médecin. La crainte n’a pu lieu d’être ». Pourtant, le risque de tomber sur un médecin réfractaire persiste. « Le problème du signalement systématique au médecin est que le patient peut tomber sur un médecin qui ne connaît pas les plantes et qui va avoir une réaction de rejet », précise Danielle Roux.
Un conseil comme un autre
Le conseil en thérapies non conventionnelles est le même qu’en allopathie. Il nécessite de prendre toutes les précautions pour s’assurer que les conseils de posologie, de contre-indications et autres ont bien été compris par l’utilisateur. Pour certains préparateurs, la phytothérapie est plus accessible que l’aromathérapie, qui nécessiterait une formation plus poussée. « Le préparateur peut conseiller l’aromathérapie s’il est formé. Dans la formation continue, on reprend la physiologie, la pathologie et la pharmaco. Ce qui permet de bien cerner la pathologie et son traitement avant de donner un conseil, suggère Danielle Roux. C’est quasiment une obligation de se former à l’aromathérapie au vu de la demande croissante. Sans formation, il faut rester sur des huiles essentielles basiques. Les petits livrets explicatifs remis par les laboratoires sont suffisants pour des huiles peu toxiques, les plus connues et les plus utilisées. Pour d’autres, plus sophistiquées, qui permettent des traitements plus ciblés, on prend des risques si on n’est pas formé ».
Pour d’autres préparateurs, c’est l’homéopathie qui est plus compliquée, ce que François Roux tient à corriger : « Il faut démystifier la complexité du conseil en homéopathie et ne plus penser qu’il est long, compliqué, et réservé à des experts. Les équipes officinales sont désireuses de faire du conseil et la demande du public s’accroît régulièrement ». D’ailleurs, François Roux a rédigé un ouvrage pratique avec des protocoles clairs sur 43 situations cliniques fréquentes à l’officine (voir encadré ci-dessous). « Le but est de fournir un outil et de montrer qu’on n’est pas obligé d’avoir un DU ou d’avoir fait dix ans d’homéopathie pour faire un conseil. On n’est pas obligé non plus de passer trois quarts d’heure pour un conseil au comptoir », précise le pharmacien spécialisé. De plus, les frontières s’estompent peu à peu. « Aujourd’hui, il n’y a pas un conseil homéopathique et un conseil allopathique, il y a un conseil officinal. Les règles et les limites sont les mêmes. La première question à se poser est : puis-je faire quelque chose ou dois-je l’adresser à un médecin ? Il faut ensuite se demander ce qui est le plus légitime pour cette personne : l’homéopathie, l’allopathie ou une combinaison des deux », propose François Roux. Et d’ajouter qu’« il faut être formé pour prendre une position de “référent homéopathie” dans une officine. Il y a alors une reconnaissance des clients et de l’équipe qui valorise l’activité professionnelle du préparateur ». Les pratiques alternatives ou l’autre façon de se spécialiser pour un préparateur…
(1) D’après le National Center for Complementary and Alternative Medicine (NCCAM), centre gouvernemental américain créé en 1991 pour évaluer les médecines non conventionnelles.
(2) « Quelle réponse des pouvoirs publics à l’engouement pour les médecines non conventionnelles ? », note du Centre d’analyse stratégique (institution d’expertise auprès du Premier ministre), octobre 2012.
(3) Rapport n° 480 du Sénat, avril 2013, « sur l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé ».
(4) Les consensus professionnels sont obtenus après plusieurs années de recul, avec l’accord et l’expérience de la majorité des professionnels de la discipline concernée.
(5) www.sante.gouv.fr/pratiques-de-soins-non-conventionnelles
(6) « Médecines complémentaires à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris », rapport, mai 2012.
Lire aussi : « Principes méthodologiques généraux pour la recherche et l’évaluation relatives à la médecine traditionnelle », Organisation mondiale de la santé, 2000.
témoignageVanessa Terry, préparatrice spécialisée en aromathérapie, pharmacie de l’Horloge, Nice (06) « L’aromathérapie est une discipline très technique »
Je suis préparatrice depuis dix ans et ma spécialisation en aromathérapie est un peu le fruit du hasard. Tout a débuté en suivant un cours de deux jours d’initiation, financé par l’OPCA-PL, il y a cinq ans. Initialement, j’étais sceptique. Mais suite à cette expérience, j’ai commencé à tester et à conseiller les huiles essentielles. J’ai constaté par moi-même et avec l’expérience des patients qu’elles étaient d’une aide précieuse sur les maux du quotidien, comme les rhumes, les douleurs ou l’eczéma. Avec le temps, je me suis de plus en plus impliquée dans ce domaine, en suivant deux formations de perfectionnement : une de deux jours, puis une de six jours par le Dr Dominique Baudoux, un an après. Depuis 2012, j’ai entamé les spécialisations : grossesse, pédiatrie et gynécologie.
Depuis deux ans, j’ai intégré une officine qui souhaitait développer son rayon d’aromathérapie. J’y travaille en temps plein mais avec des horaires aménagés, car j’assure en parallèle des formations pour le compte d’un laboratoire spécialisé dans les huiles essentielles (Pranarôm). À l’officine, j’ai plusieurs responsabilités : gérer le rayon ainsi que le préparatoire, où nous réalisons beaucoup de préparations magistrales à base d’huiles essentielles, préparer des fiches conseil, former les collègues… C’est très motivant et prenant. Chaque membre de l’équipe est d’ailleurs spécialisé dans un secteur : phyto, micronutrition, pédiatrie… Nous échangeons constamment entre nous et tout le bénéfice est pour le patient.
Se former en autodidacte en aromathérapie ? C’est sans doute possible, mais difficile, car les huiles essentielles sont des mélanges complexes de plus de 200 molécules ! Pour un conseil personnalisé et efficace, il faut bien connaître les caractéristiques, dénominations, chémotypes, contre-indications… Les conseils courants peuvent être assurés par une équipe « peu formée », et certaines situations physiologiques ou pathologiques nécessitent une formation plus poussée, notamment sur les contre-indications d’utilisation.
Dans mon expérience, passer par la case des formations spécialisées me permet de gagner un temps précieux, car c’est finalement une discipline très « technique », et d’assurer un conseil personnalisé au patient.
Des données en France davantage estimées que chiffrées
Les limites
Les chiffres figurant dans la stratégie 2002-2005 de l’Organisation mondiale de la santé pour les médecines traditionnelles indiquent que 49 % de la population française a eu recours au moins une fois à ces pratiques. Ces données ont toutefois plus de dix ans et aucune statistique officielle n’est venue l’actualiser. Le rapport du Sénat(3) indique que le chiffre « 4 Français sur 10 » issu du sondage Ipsos 2007 n’est qu’une estimation et que les données manquent…
Quelques chiffres cependant
→ 39 % des Français ont eu recours à une forme de médecine naturelle dans les douze derniers mois (sondage Ipsos, 2007).
→ 56 % utiliseraient des médicaments homéopathiques ; soit une hausse de 17 % depuis 2004 et de 3 % depuis 2010 (sondage Ipsos pour Boiron, 2012).
→ 60 % des patients atteints d’un cancer avaient recours aux médecines complémentaires ; 45 % d’entre eux n’en parlent pas à leur médecin traitant (étude MAC-Aerio sur 850 patients, 2010).
→ Près de 2 Français sur 3 estiment que les approches non conventionnelles sont importantes en complément des traitements médicaux (Viavoice pour l’Institut Curie, 2013).
→ Marché des plantes médicinales en forte croissance depuis dix ans (de 5 à 18 % par an) ; produits homéopathiques et de médecine anthroposophique (+ 20 % entre 2003 et 2007).(2)
Le point sur l’aroma, l’homéo et la phyto thérapie
Aromathérapie
Huiles essentielles et monopole
La vente d’huiles essentielles (HE) est libre, à l’exception d’une liste de quinze huiles réservées au monopole pharmaceutique en raison de leur toxicité. Elles peuvent entrer dans la composition d’une préparation magistrale.
Leur qualité
Plusieurs huiles essentielles (mais pas toutes) sont inscrites à la pharmacopée, qui définit précisément leurs caractéristiques. La conformité à la pharmacopée n’est nécessaire que dans le cadre d’une utilisation en tant que matière première pour les préparations. Pour la vente en l’état, la composition des huiles essentielles n’est pas soumise à des contrôles de qualité standardisés et officiels. Les labels officiels (Bio, Ecocert, AOC) certifient les modes de fabrication, mais ne garantissent pas la composition finale. D’autres labels non officiels (« huile 100 % pure et naturelle », « huile essentielle botaniquement et biochimiquement définie (HEBBD) », « huile essentielle chémotypée (HECT) »…) sont des auto-certifications des fournisseurs. Les huiles essentielles sont vendues en tant que matières premières, produits cosmétiques ou compléments alimentaires.
En pratique
→ Parmi les éléments indispensables à l’identification d’une huile essentielle figurent le nom botanique, la partie de la plante utilisée, le mode d’extraction, la provenance géographique et le chémotype, qui renseigne sur les espèces chimiques majoritaires.
→ Il faut toujours s’assurer que la dispensation s’adresse à un patient averti des précautions d’emploi (voie d’administration, quantités, conditions de stockage…). Les intoxications accidentelles, les mésusages et certains effets indésirables dus aux huiles essentielles (sensibilisation, photosensibilité, allergies) peuvent être minimisés par un conseil approprié.
Homéopathie
Le monopole
Les médicaments homéopathiques relèvent du monopole pharmaceutique et peuvent faire l’objet de publicité auprès du grand public pour ceux qui ne sont pas remboursés. Les souches pour les préparations homéopathiques sont inscrites à la pharmacopée.
Des remous réglementaires
Jusqu’en 1998, la mise sur le marché de médicaments homéopathiques faisait l’objet d’une procédure « allégée » auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Depuis cette date, un décret issu de l’application d’une directive européenne parue en 1992 a fixé un nouveau cadre réglementaire. Les spécialités pharmaceutiques doivent ainsi procéder à un enregistrement homéopathique (EH) pour les souches à partir de la 2 CH ou de la 4 DH, et à une demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM) dans les autres cas. Le dossier d’AMM est adapté à la spécificité du médicament homéopathique et à son usage traditionnel. Le demandeur est dispensé d’études pharmacologiques, cliniques et toxicologiques dès lors qu’il peut fournir un dossier bibliographique documentant un usage établi et l’innocuité du produit. La mise en conformité a commencé en 2001 et s’étendra jusqu’en 2015 pour les souches remboursables, selon un calendrier préétabli, et devrait ensuite s’élargir aux souches non remboursables.
En pratique
L’étude des dossiers par l’ANSM a conduit jusqu’à présent à l’examen de moins de 200 souches, dont 27 ont été retirées de la vente. Pour les souches en cours d’instruction, la commercialisation peut être suspendue en l’attente d’une décision finale par l’ANSM.
Phytothérapie
Le monopole
Une liste de 365 plantes médicinales figure à la pharmacopée (liste A) et fait partie du monopole pharmaceutique. Une deuxième liste recense 123 plantes dites « libérées », qui peuvent être vendues sous différentes formes (plantes en l’état, poudres, extraits secs aqueux), y compris sous la forme de mélanges, dans tout commerce, mais sans indication thérapeutique.
Médicaments ou compléments alimentaires ?
→ Les médicaments de phytothérapie sont autorisés à la vente après délivrance d’une AMM par l’ANSM, ou d’une autorisation simplifiée lorsqu’un usage traditionnel a pu être documenté depuis trente ans, dont quinze ans au sein de l’Union européenne. Ils peuvent revendiquer des indications thérapeutiques. Les éventuels effets indésirables relèvent de la pharmacovigilance (notification à l’ANSM).
→ Les compléments alimentaires relèvent de la réglementation des produits alimentaires et ne sont pas soumis à une AMM. Leur mise sur le marché est autorisée par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), qui peut solliciter un avis scientifique de la part de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Une liste de 540 plantes entrant dans la composition des compléments alimentaires est actuellement à l’étude au sein de l’ANSM. Les indications ne peuvent pas être thérapeutiques, ce sont des « allégations santé ». Ces produits ne sont en effet pas conçus pour soigner, mais pour contribuer à l’optimisation de certaines fonctions physiologiques ou à un état de santé général « dans le cadre d’un régime alimentaire équilibré ». Les éventuels effets secondaires relèvent de la nutrivigilance (notification à l’ANSES).
En pratique
Le personnel officinal peut délivrer des plantes ou mélanges de plantes à visée thérapeutique, sous réserve qu’elles proviennent d’établissements pharmaceutiques ou que le fournisseur prouve leur conformité à la pharmacopée.
De même, les médicaments de phytothérapie, les dispositifs médicaux ou les compléments alimentaires à base de plantes sont autorisés à la vente en officine. Il est judicieux de faire la distinction entre les différentes catégories, car les propriétés revendiquées ne sont pas les mêmes (thérapeutiques ou pas).
Livres
Homéopathie et prescription officinale, 43 situations cliniques,
Michèle Boiron et François Roux, éditions Similia, 2008.
Cet ouvrage synthétique répond aux situations cliniques les plus courantes rencontrées à l’officine. Chacune est présentée sous la forme d’une fiche « contexte » et d’un arbre décisionnel. C’est un support précieux pour le débutant en homéopathie et un aide-mémoire pour les plus aguerris. Un CD-Rom permet d’imprimer le conseil officinal au nom de la pharmacie.
Conseil en aromathérapie,
ouvrage coordonné par Danielle Roux, Éditions Pro-Officina, 2e édition, 2008.
Rédigé par une équipe d’experts et coordonné par Danielle Roux, cet ouvrage de référence en matière de conseil permet de répondre concrètement aux attentes des clients. Il se divise en quatre grandes parties : historique et place de l’aromathérapie dans l’arsenal thérapeutique actuel ; principales voies d’administration des huiles essentielles ; actions des huiles essentielles en fonction des pathologies et conseils à fournir ; développement et animation d’un rayon dédié à l’officine.
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