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Le déremboursement aura sans doute des conséquences économiques
L’homéopathie ne sera plus prise en charge par l’Assurance maladie en 2021, après une phase transitoire au taux de 15 % afin de laisser un temps d’adaptation aux industriels, aux patients et aux prescripteurs.
Le suspense a enfin pris fin, le 9 juillet 2019. Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, a annoncé que l’homéopathie sera déremboursée. Elle a suivi la Haute autorité de santé (HAS) qui, dans son avis du 26 juin, concluait à « une efficacité insuffisamment prouvée » des produits homéopathiques et recommandait leur déremboursement. Cela se fera en deux temps. Au 1er janvier 2020, les médicaments homéopathiques seront remboursés à un taux de 15 %, au lieu de 30 % actuellement, et au 1er janvier 2021, ils ne seront plus pris en charge. La baisse du taux à 15 % est « une étape intermédiaire […] pour permettre aux patients, aux industriels et aux prescripteurs de s’adapter », précise le ministère. Cette décision a suscité la colère des laboratoires Boiron, Lehning et Weleda, ainsi que celle des médecins homéopathes.
Des granules cher payés
Le déremboursement de l’homéopathie aura des conséquences économiques. D’abord pour le portefeuille des patients, notamment ceux qui « consomment » pour plusieurs centaines d’euros par an. Les tarifs augmenteront, car la TVA passera à 10 % au lieu de 2,1 % aujourd’hui, et parce qu’en général, les prix des médicaments déremboursés, progressent toujours dans un premier temps. Notons que l’Assurance maladie a déboursé environ 129 millions en 2018. Selon le Syndicat national des médecins homéopathes français (SNMHF), cette décision « entraînera un déplacement de la consommation vers des médicaments plus lourds, présentant des risques iatrogéniques plus élevés, engendrant de nouvelles dépenses pour l’Assurance maladie ». Un argument repris par 45 députés réclamant le maintien du remboursement dans Le Journal du Dimanche du 25 juillet. Ce qui est loin d’être démontré. Dans son avis, la HAS avance qu’il n’y a « pas d’impact attribuable aux médicaments homéopathiques sur la consommation d’autres médicaments, la diminution du mésusage, le nombre d’hospitalisations, les retards à la prise en charge ou sur l’organisation des soins et donc sur la santé publique en général ».
Selon Le Monde du 20 juillet, qui a recueilli 300 témoignages, « dans leur très grande majorité, les répondants assurent que le déremboursement ne changera rien à leur façon de se soigner », même si ceux qui ont des prescriptions plus conséquentes s’inquiètent pour leur budget. Selon un sondage Odexa de décembre 2018, 63 % des Français continueraient d’acheter des produits malgré le déremboursement.
Une baisse du chiffre d’affaires
L’autre impact concerne les industriels et les officinaux. Selon Boiron, lorsqu’un médicament est déremboursé, son chiffre d’affaires chute de moitié la première année et encore d’autant la seconde. Cette baisse drastique pourrait conduire à des licenciements. Boiron emploie 2 500 personnes en France et Weleda environ 400. Selon l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (Uspo), « avec un taux de 15 %, l’objectif d’un reste à charge zéro par l’Assurance maladie serait atteint en raison de la franchise à la boîte de 0,50 €. En effet, le prix de chaque tube granule et dose permet dans ces conditions de passer en dessous du seuil de remboursement ». Un tube de granules coûtant environ 2,30 €, l’Assurance maladie rembourse actuellement 0,69 € (taux de 30 %), mais avec la franchise de 0,50 € par tube, elle ne verse que 0,19 € aux patients ! De plus, le déremboursement partiel n’aurait pas « les effets négatifs du déremboursement brutal sur un marché qui perd des volumes de façon importante tous les ans ». Entre mars 2018 et mars 2019, les ventes d’unités ont baissé de 9 %. Une étude de l’institut Xerfi observe qu’en cas d’entrée de l’homéopathie sur le marché de l’OTC, « le segment subirait toutefois un recul des volumes de vente ». L’autre syndicat de titulaires, la Fédération des pharmaciens d’officine (FSPF), regrette ce déremboursement, qui aura « des conséquences économiques importantes sur les officines, en particulier sur celles rendant un service de proximité, déjà fragilisées ». La FSPF demande « une compensation conventionnelle dans les plus brefs délais ».
Repères
→ 18 mars 2019 : un collectif de médecins publie une tribune sur le site internet du Figaro, visant notamment l’homéopathie, l’acupuncture et plus généralement les pratiques non scientifiques, en qualifiant ces thérapies dites « alternatives » de dangereuses.
→ Mi-juin 2019 : la ministre Agnès Buzyn envisage un déremboursement.
→ 1er août 2019 : la ministre de la Santé saisit la Haute autorité de santé pour qu’elle évalue les médicaments homéopathiques. La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2019, parue en 2018, prévoit de fixer les prises en charge des médicaments homéopathiques par décret en Conseil d’État.
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