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Le bilan partagé de médication de Madame Blanche
PROPOSER UN BILAN DE MÉDICATION
Monique Blanche a 78 ans. Ancienne employée de bureau, elle vit avec son époux dans un immeuble récent avec ascenseur, situé dans le centre-ville. Elle se déplace difficilement à l’aide de deux cannes anglaises et sort très peu. C’est le plus souvent son époux qui vient à l’officine chercher ses médicaments, mais aujourd’hui Mme Blanche a décidé de venir à la pharmacie chercher le renouvellement de ses traitements (olmésartan, fluoxétine, bromazépam, lévothyroxine, bimatoprost). Alors que cela fait plusieurs mois que vous ne l’aviez pas vue, il vous paraît nettement perceptible que la patiente a pris du poids. M adame Blanche est éligible au bilan de médication en raison de son âge (78 ans) et de son traitement qui comporte 8 principes actifs déjà délivrés depuis plus de 6 mois.
Vous savez que Mme Blanche est une patiente hypothyroïdienne et hypertendue, qu’elle souffre de gonarthrose et de douleurs d’hallux valgus et qu’elle est traitée pour dépression depuis environ 2 ans.
Son médecin traitant est le Dr Margot, avec qui vous avez déjà échangé quant à l’intérêt des bilans de médication et qui s’avère y être favorable. Mme Blanche la consulte pour le renouvellement des traitements antidépresseur, antiglaucomateux et de lévothyroxine, initialement prescrits par les spécialistes. Vous savez d’ailleurs que la patiente n’a pas vu son endocrinologue ni son psychiatre depuis près de 2 ans et son ophtalmologiste depuis plus de 1 an. Par ailleurs Mme Blanche poursuit son traitement par olmésartran malgré le fait qu’il ne soit plus remboursé.
Lors du renouvellement d’ordonnance, vous profitez de la présence de Mme Blanche pour lui proposer un bilan de médication et pour lui en présenter les grandes lignes. Vous lui remettez le document d’information élaboré par l’Assurance maladie*.
Elle se montre intéressée mais s’enquiert de savoir si son médecin « verra cela d’un bon œil ». Après l’avoir rassurée à ce sujet, vous obtenez son accord.
Vous finalisez l’adhésion de Mme Blanche sur le site internet ameli.fr, et lui remettez un exemplaire papier du bulletin d’adhésion en ligne. Vous conservez un exemplaire électronique de l’accord.
Une date de rendez-vous est fixée pour le premier entretien (le 23 mai). Afin de préparer celui-ci, vous imprimez le dossier pharmaceutique (DP) de la patiente avec son accord. Vous vérifiez que Mme Blanche a un dossier médical partagé (DMP). Dans le cas contraire, lui en proposer un.
Vous demandez à Mme Blanche d’apporter ses ordonnances en cours, ses boîtes de médicaments entamées ou non, les médicaments ou produits de santé achetés ou pris occasionnellement ces derniers mois, ses dernières analyses biologiques et sa carte Vitale.
L’ENTRETIEN DE RECUEIL DE DONNÉES
Le but de cet entretien de recueil des informations est de mieux comprendre les particularités de la patiente, ses habitudes de vie, son environnement. Le jour de l’entretien, vous disposez d’un formulaire en quatre parties pour le recueil des informations fourni par l’Assurance maladie à remplir à partir des réponses ou du discours spontané de la patiente. Ces données permettent de vérifier que : – les conseils de prise des traitements peuvent être appliqués et qu’ils sont pertinents et réalistes ; – le traitement est adapté à l’état physiologique de la patiente.
Il peut être utile de synthétiser à la suite de chacun des tableaux les actions à envisager, de façon à gagner du temps lors de l’étape suivante d’analyse des traitements.
LA PREMIÈRE FICHE EST REMPLIE À PARTIR DES RÉPONSES DE LA PATIENTE ET DES DOCUMENTS MÉDICAUX DISPONIBLES.
RECUEIL DES TRAITEMENTS
Il est nécessaire de recueillir l’ensemble des médicaments prescrits ou non car le bilan partagé de médication doit être exhaustif pour être pertinent. Cette fiche peut être enrichie d’un historique médicamenteux pour prendre en compte les traitements qui n’ont pas été efficaces par le passé (ou responsables d’événements indésirables). La fiche peut être complétée par les antécédents médicaux de la patiente, ses pathologies, ses examens biologiques, et en collectant les données soit d’après les renseignements donnés par le médecin, soit au niveau du dossier médical partagé (DMP), soit à partir des documents et des connaissances de la patiente.
LA POSITION DE LA PATIENTE VIS-À-VIS DE SON TRAITEMENT
Il s’agit d’évaluer la compréhension de la patiente vis-à-vis de son traitement, ce qu’elle prend effectivement (en plus et en moins par rapport aux traitements prescrits) et pourquoi (ressenti d’effets indésirables, non-perception de la nécessité du traitement, etc.).
Le questionnaire d’adhésion médicamenteuse complète la fiche précédente. Il permet d’identifier des failles dans l’organisation (ruptures de traitement car oubli de renouvellement d’ordonnance, oubli de prise car absence de rappels programmés), de mesurer la capacité à gérer correctement les oublis, etc.
Les réponses de Mme Blanche totalisent 4 points.
BESOINS FONDAMENTAUX DE LA PATIENTE
Les quatre fiches de recueil précédentes apportent de nombreux éléments sur le traitement et le patient, mais il est intéressant de s’interroger sur quelques points qui définissent l’autonomie du patient sur les plans physiques, psychologiques et sociaux.
Les points proposés sont issus du concept des 14 besoins fondamentaux identifiés par l’infirmière américaine Virginia Henderson.
Pour compléter le bilan de médication, 8 d’entre eux peuvent être explorés : besoin de respirer, de boire et de manger, d’éliminer, de se mouvoir et de maintenir une bonne posture, de dormir et de se reposer, de se vêtir et de se dévêtir, de communiquer et, enfin, de se divertir. Se poser les 8 questions ci-contre permet d’envisager des pistes d’actions à la frontière entre le médical et le social, mais qui peuvent s’avérer indispensables pour la bonne prise en charge globale du patient.
ANALYSE DES TRAITEMENTS
RAPPEL DU CONTEXTE
Deuxième étape du bilan partagé de médication, l’analyse pharmaceutique s’effectue en l’absence de la patiente, à partir des informations recensées pendant l’entretien de recueil de données. Mme Blanche souffre de plusieurs pathologies chroniques :
– hypertension artérielle
– dépression
– hypothyroïdie
– glaucome
– gonarthrose.
La patiente prend par ailleurs Uvédose et régulièrement, en automédication, du lactulose et éventuellement du bisacodyl pour traiter une constipation récurrente.
Lors du recueil des informations, plusieurs points de vigilance ont été notés pouvant être classés en 3 groupes :
A VOIR AVEC LE PATIENT
Suggérer une alimentation plus équilibrée et moins calorique en raison de la prise de poids. Une réduction pondérale est conseillée dans la gonarthrose. Proposer d’enrichir l’alimentation en fibres pour lutter contre la constipation. Déconseiller les laxatifs stimulants qui peuvent perturber la kaliémie et induire une dépendance.
Réexpliquer les modalités d’instillation du collyre et éventuellement proposer l’utilisation d’un dispositif d’aide à l’administration des collyres (type Opticare) qui permet de diminuer la pression à appliquer sur le flacon.
Proposer des moyens mnémotechniques pour améliorer l’observance dans l’alternance du dosage de Levothyrox ou un pilulier hebdomadaire et revoir le moment de prise par rapport au repas.
Rappeler que la consommation de vin peut majorer l’effet sédatif du bromazépam et de la fluoxétine.
Explorer l’évolution de l’intensité de la douleur arthrosique dans la journée pour adapter le traitement.
Alerter sur les risques d’automédication.
A VOIR AVEC LE MÉDECIN
Prise en charge de la dépression : s’interroger sur la pertinence d’un traitement anxiolytique au long cours.
Prise en charge de l’arthrose et des douleurs d’hallux valgus : intensifier la prise en charge des douleurs.
Prise en charge de l’hypothyroïdie : s’interroger sur la valeur de TSH anormalement élevée et la présence de signes patents d’hypothyroïdie (fatigue, prise de poids, constipation).
Difficulté à avaler l’olmésartan et à instiller le collyre, problème de sécheresse oculaire.
A ÉTUDIER LORS DE L’ANALYSE
Envisager un collyre antiglaucomateux sans chlorure de benzalkonium irritant.
S’interroger sur la possible origine iatrogène de la somnolence.
ANALYSE PHARMACOLOGIQUE
L’analyse pharmacologique de l’ensemble des traitements a pour but de réduire le risque iatrogène. En fonction de la complexité du cas, elle nécessite une démarche plus ou moins poussée.
A partir de la liste des médicaments de la patiente classés par pathologie, les questions suivantes peuvent se poser :
– La prescription est-elle cohérente ?
– Le médicament est-il adapté à l’âge de la patiente ?
– La posologie est-elle adaptée ?
– Le médicament est-il bien toléré ?
– Une surveillance est-elle nécessaire ?
– Le médicament est-il bien pris par la patiente ?
TRAITEMENT DE L’HYPERTENSION ARTÉRIELLE
LA PRESCRIPTION DE CE TRAITEMENT EST-ELLE COHÉRENTE ?
L’objectif de la prise en charge est d’abaisser la pression systolique pour réduire le risque de complications (AVC, infarctus du myocarde, insuffisance cardiaque, démences, etc.). Selon les recommandations de la Haute Autorité de santé de 2016, entre 60 et 80 ans, l’objectif tensionnel est le même que chez l’adulte jeune (pression systolique < 140 mm Hg et pression diastolique < 90 mm Hg).
L’olmésartan est un antagoniste des récepteurs à l’angiotensine II (ARA II). Depuis le 2 janvier 2017, les spécialités à base d’olmésartan ne sont plus remboursées par l’Assurance maladie, car bien qu’ayant une efficacité prouvée dans la diminution de la pression artérielle, elles n’ont pas démontré d’action sur les événements cardiovasculaires ni sur la mortalité. De plus l’olmésartan peut-être à l’origine d’effets indésirables graves (enthéropathies).
EXISTE-T-IL DES CONTRE-INDICATIONS ? LE TRAITEMENT EST-IL ADAPTÉ À UN PATIENT ÂGÉ ?
Mme Blanche n’a pas de problème d’obstruction de voie biliaire qui contre-indiquerait l’olmésartan.
LES POSOLOGIES SONT-ELLES ADAPTÉES ?
Selon le RCP, si la clairance est supérieure à 60 ml/min, aucune adaptation posologique n’est à prévoir chez le sujet âgé et la posologie d’olmésartan peut être portée à 40 mg/jour. A cette posologie, la pression artérielle doit être étroitement surveillée chez le patient âgé. La clairance de Mme Blanche étant supérieure à 60 ml/min, cette posologie est possible.Publicité
LE TRAITEMENT EST-IL BIEN TOLÉRÉ ?
Mme Blanche semble bien tolérer ce traitement en dépit de sa posologie maximale. Elle ne se plaint ni de céphalées ni d’étourdissements, et ne rapporte pas de manifestations d’hypotension orthostatique.
L’olmésartan peut en outre être très rarement responsable d’entéropathies sévères (1 cas sur 10 000). Cet effet indésirable propre à la molécule et non retrouvé avec les autres ARA II se manifeste par une diarrhée chronique, une perte de poids, une déshydratation et une hypokaliémie. Mme Blanche, qui prend du poids et souffre de constipation chronique, n’est pas concernée par cet effet indésirable.
LE TRAITEMENT NÉCESSITE-T-IL UNE SURVEILLANCE PARTICULIÈRE ?
La pression artérielle doit être étroitement surveillée afin de s’assurer que l’objectif tensionnel est atteint, mais aussi afin de rechercher une hypotension (et ce d’autant plus que l’olmésartan est ici prescrit à dose maximale). La mesure de la pression artérielle réalisée à l’officine lors du premier entretien indiquait une tension normale (134/85 mm Hg).
La fonction rénale doit être surveillée pour s’assurer que la dose continue à être adaptée à la patiente. D’après le guide PAPA (Prescription médicamenteuses adaptées aux personnes âgées), le rythme (en mois) de contrôle du bilan rénal est obtenu en divisant le débit de filtration glomérulaire (DFG) par 10 (dans le cas de Mme Blanche, dont la clairance est de 64 ml/min, surveillance tous les 6 mois). L’ionogramme sanguin (natrémie, kaliémie) doit être également surveillé, ce qui n’a pas été le cas lors de la dernière analyse. Ce point devra être discuté avec le médecin.
LE MÉDICAMENT EST-IL BIEN PRIS PAR LA PATIENTE ?
Mme Blanche a du mal à avaler le comprimé d’Alteis qu’elle trouve trop gros. Le RCP précise qu’il ne peut être mâché. La consultation de la liste des médicaments écrasables de l’Omedit Normandie (téléchargeable sur omedit.normandie.fr /liste-des-medicaments-ecrasables), mise à jour en janvier 2018, confirme que les comprimés d’Alteis ne sont pas écrasables (absence d’étude de biodisponibilité dans ces conditions).
Cela sera à évoquer lors de la synthèse de bilan et le choix d’une autre molécule antagoniste des récepteurs à l’angiotensine II, non responsable d’entéropathie et remboursée par la Sécurité sociale, à envisager avec le médecin.
TRAITEMENT DE L’HYPOTHYROÏDIE
LA PRESCRIPTION DE CE TRAITEMENT EST-ELLE COHÉRENTE ?
La prise en charge de l’hypothyroïdie repose sur un traitement substitutif par hormone thyroïdienne. La lévothyroxine (LT4), précurseur de la forme active triiodothyronine (LT3), est la molécule de choix, du fait de sa longue demi-vie permettant une seule prise quotidienne.
EXISTE-T-IL DES CONTRE-INDICATIONS CHEZ CETTE PATIENTE ? LE TRAITEMENT EST-IL ADAPTÉ À UN PATIENT ÂGÉ ?
Mme Blanche ne souffrant pas de cardiopathies ni d’arythmies non contrôlées, il n’y a pas de contre-indications au Levothyrox.
LES POSOLOGIES SONT-ELLES ADAPTÉES ?
L’objectif du traitement est l’euthyroïdie clinique et biologique. La concentration de TSH anormalement élevée, ainsi que la prise de poids, la constipation, la fatigue et la somnolence sont révélatrices d’une hypothyroïdie. Il faut donc en rechercher la cause : sous-dosage (d’autant que Mme Blanche a pris du poids et que la posologie dépend essentiellement du poids du patient), mauvaise observance, non-respect de l’administration à jeun, interactions, etc.
LE TRAITEMENT EST-IL BIEN TOLÉRÉ ?
Les effets indésirables éventuels seraient des signes d’hyperthyroïdie (tachycardie, nervosité, insomnie), ce qui ne concerne pas Mme Blanche.
LE TRAITEMENT NÉCESSITE-T-IL UNE SURVEILLANCE PARTICULIÈRE ?
Une fois le bon dosage en lévothyroxine déterminé, un traitement par Levothyrox nécessite généralement un bilan thyroïdien tous les 6 mois. Les contrôles doivent être plus fréquents (tous les 3 mois voire mensuels) tant que le traitement n’est pas équilibré.
LE MÉDICAMENT EST-IL BIEN PRIS PAR LA PATIENTE ?
Mme Blanche a confié oublier parfois de prendre le dosage 150 µg et poursuivre le dosage 100 µg plus de cinq jours consécutifs. Elle a aussi indiqué prendre souvent son Levothyrox juste avant son petit-déjeuner, voire même pendant, car elle préfère commencer par Alteis qu’elle a « plus de mal à avaler ». Or, le bol alimentaire diminue la biodisponibilité de la lévothyroxine. Les erreurs dans l’alternance de dosage et les modalités d’administration peuvent en partie expliquer l’hypothyroïdie. Mais la valeur très élevée de la concentration de TSH doit amener aussi à envisager une posologie inadaptée.
TRAITEMENT DES TROUBLES PSYCHIATRIQUES
LA PRESCRIPTION DE CE TRAITEMENT EST-ELLE COHÉRENTE ?
Mme Blanche est traitée au long cours par fluoxétine et bromazépam dont la prescription est reconduite tous les 3 mois par le médecin généraliste. Dans le traitement de la dépression, les inhibiteurs séléctifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), comme la fluoxétine, sont recommandés en première intention.
En revanche, d’après le guide PAPA, la coprescription de benzodiazépines, anxiolytiques, n’est pas recommandée, excepté en cas d’anxiété invalidante associée. Dans une telle situation, cette prescription peut s’envisager sur une durée très brève et en choisissant une molécule à demi-vie courte. En effet, les benzodiazépines à demi-vie longue (≥ 20 heures) sont inadaptées en gériatrie. Le bromazépam a une demi-vie de 20 heures.
EXISTE-T-IL DES CONTRE-INDICATIONS CHEZ CETTE PATIENTE ? LE TRAITEMENT EST-IL ADAPTÉ À UN PATIENT ÂGÉ ?
Les benzodiazépines doivent être utilisées avec prudence chez le sujet âgé en raison du risque de sédation et de chutes.
Si ici la prescription de benzodiazépine pouvait être justifiée au début de la prise en charge de la dépression, son utilisation au long cours est inappropriée en gériatrie. La pertinence du maintien de cette prescription est à soulever.
LES POSOLOGIES SONT-ELLES ADAPTÉES ?
La posologie de fluoxétine recommandée chez l’adulte et le sujet âgé est de 20 mg/jour. Elle peut être portée jusqu’à 60 mg/jour. La durée de traitement est de 1 an minimum après rémission des signes cliniques. Cela fait 2 ans que Mme Blanche est sous antidépresseur. Il faudrait s’assurer de l’état dépressif et vérifier que l’hypothyroïdie ne soit pas à l’origine des troubles de l’humeur de Mme Blanche. Il serait judicieux de la réorienter vers son psychiatre pour réévaluer son état dépressif et son traitement.
Concernant le bromazépam, d’après le RCP, son utilisation pour traiter l’anxiété en psychiatrie chez les malades ambulatoires s’établit entre 6 et 18 mg. La posologie est adaptée, mais la durée de traitement doit être réévaluée.
Le site internet Stopp-Start (stoppstart.free.fr), qui liste les médicaments à arrêter chez le sujet âgé (ou à initier en fonction de la pathologie), rappelle qu’un traitement par benzodiazépine perdurant plus de 4 semaines n’est pas indiqué (voir ci-contre). S’il est envisagé, l’arrêt devra être progressif pour éviter un syndrome de sevrage.
LE TRAITEMENT EST-IL BIEN TOLÉRÉ ?
Si la fatigue et la somnolence diurne dont se plaint Mme Blanche peuvent être en grande partie expliquées par l’hypothyroïdie, elles peuvent aussi être exacerbées par la benzodiazépine.
LE TRAITEMENT NÉCESSITE-T-IL UNE SURVEILLANCE PARTICULIÈRE ?
Chez le sujet âgé traité par ISRS, une surveillance rigoureuse de la natrémie est nécessaire en raison du risque d’hyponatrémie pouvant induire une confusion. Le site Stopp-Start rappelle que le traitement doit être réévalué en présence d’hyponatrémie concomitante.
LE TRAITEMENT EST-IL BIEN PRIS PAR LA PATIENTE ?
Oui.
TRAITEMENT DU GLAUCOME À ANGLE OUVERT
LA PRESCRIPTION DE CE TRAITEMENT EST-ELLE COHÉRENTE ?
L’objectif est de freiner voire de stopper la dégradation du nerf optique pour maintenir la fonction visuelle en abaissant la pression intraoculaire.
Le bimatoprost (Lumigan) est un analogue de prostaglandines qui permet d’augmenter l’élimination de l’humeur aqueuse en relâchant le muscle ciliaire. Les analogues de prostaglandines sont recommandés en première intention dans le glaucome à angle ouvert.
EXISTE-T-IL DES CONTRE-INDICATIONS CHEZ CETTE PATIENTE ? LE TRAITEMENT EST-IL ADAPTÉ À UN PATIENT ÂGÉ ?
Il n’y a pas de contre-indications à l’utilisation d’analogues de prostaglandines chez Mme Blanche.
LES POSOLOGIES SONT-ELLES ADAPTÉES ?
La posologie de 1 goutte par jour est correcte. Il est recommandé d’instiller les analogues de prostaglandines de préférence le soir, pour une meilleure efficacité.
LE TRAITEMENT EST-IL BIEN TOLÉRÉ ?
Mme Blanche se plaint de sécheresse et d’irritation oculaires, insuffisamment corrigées par le lubrifiant oculaire (Optive, carboxymethylcellulose sodique). Si tous les collyres antiglaucomateux peuvent être responsables d’irritation locale, la présence de chlorure de benzalkonium dans Lumigan altère davantage le film lacrymal du fait de son effet détergent.
LE TRAITEMENT NÉCESSITE-T-IL UNE SURVEILLANCE PARTICULIÈRE ?
En général, un traitement antiglaucomateux requiert une surveillance ophtalmologique (contrôle de la pression intraoculaire, examen du nerf optique, mesure du champ visuel) bisannuel.
Mme Blanche n’a pas revu son ophtalmologiste depuis 1 an et demi. Or, la patiente est en hypothyroïdie, ce qui constitue un facteur aggravant du glaucome à angle ouvert.
Il est donc nécessaire de la réorienter vers son ophtalmologiste.
LE MÉDICAMENT EST-IL BIEN PRIS PAR LA PATIENTE ?
Mme Blanche rencontre des difficultés pratiques à presser le flacon. Un changement de collyre pourrait améliorer l’observance et la tolérance. En effet, le remplacement du bimatoprost par du latanoprost en unidoses (Monoprost) sans chlorure de benzalkonium pourrait être intéressant pour s’affranchir du problème d’irritation et de rigidité du flacon multidose.
TRAITEMENT DE LA DOULEUR ARTHROSIQUE
LA PRESCRIPTION DE CE TRAITEMENT EST-ELLE COHÉRENTE ?
Le paracétamol est le traitement médicamenteux de première intention. Les aides techniques à la marche réduisent la douleur en cas de gonarthrose. Cependant en cas d’atteinte bilatérale importante, un déambulateur est mieux adapté que des cannes anglaises.
EXISTE-T-IL DES CONTRE-INDICATIONS CHEZ CETTE PATIENTE ? LE TRAITEMENT EST-IL ADAPTÉ À UN PATIENT ÂGÉ ?
Mme Blanche ne souffre pas d’insuffisance hépatique qui contre-indiquerait l’usage du paracétamol.
LE TRAITEMENT EST-IL BIEN PRIS ET BIEN TOLÉRÉ ?
Oui. Toutefois, les douleurs de Mme Blanche sont insuffisamment soulagées et cela a des conséquences non négligeables sur sa qualité de vie (limitation de la marche et répercussion sur sa vie sociale, aggravation de la dépression).
LES POSOLOGIES SONT-ELLES ADAPTÉES ?
La posologie maximale journalière du paracétamol est de 4 g par jour.
Compte tenu de la fonction rénale de Mme Blanche, cette posologie pourrait s’envisager pour mieux la soulager.
PRÉVENTION DU DÉFICIT EN VITAMINE D
LA PRESCRIPTION DE CE TRAITEMENT EST-ELLE COHÉRENTE ?
La prescription de vitamine D tous les 2 mois est pertinente en prévention d’un déficit, fréquent chez les sujets âgés, surtout chez ceux ayant une exposition solaire quasi nulle, ce qui est le cas de Mme Blanche qui vit confinée au domicile. Cette supplémentation permet de prévenir les risques de perte osseuse.
AUTOMÉDICATION PAR LACTULOSE ET BISACODYL
LA PRISE DE CES TRAITEMENTS EST-ELLE COHÉRENTE ?
L’objectif de cette automédication par Mme Blanche est de traiter ses problèmes de constipation. Lorsque le lactulose s’avère insuffisamment efficace, elle prend du bisacodyl le soir, qui agit très rapidement et fait effet dès le lendemain matin.
Ces traitements sont-ils adaptés à un patient âgé ?
Le lactulose est un laxatif osmotique, adapté à un patient âgé. Il agit en créant un appel d’eau dans la lumière intestinale.
En revanche, le bisacodyl est un laxatif stimulant, considéré comme inapproprié en gériatrie. En effet, c’est un laxatif d’action drastique qui stimule le péristaltisme par irritation de la muqueuse intestinale. Il expose au risque de dépendance et de troubles hydroélectrolytiques. Or, une hypokaliémie survenant chez cette patiente sous fluoxétine (susceptible d’allonger l’espace QT) pourrait majorer le risque de troubles de rythme cardiaque.
PAR QUOI LES REMPLACER ?
Il faut avant tout impérativement promouvoir des conseils hygiénodiététiques et corriger l’hypothyroïdie de Mme Blanche.
EXISTE-T-IL UN RISQUE D’INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES ?
Le site internet Thériaque (theriaque.org) propose un simulateur d’interactions (analyse d’ordonnances). Renseignée avec les médicaments pris par Mme Blanche, l’analyse ne montre pas d’interactions cliniquement significatives.
SYNTHÈSE DE L’ ANALYSE
La fiche d’analyse est conçue pour retranscrire l’intégralité des remarques issues de l’entretien avec la patiente et de l’analyse des traitements. Elle permet d’établir une synthèse des actions à mener. Cette fiche est à adresser au médecin traitant. Elle peut être envoyée par messagerie sécurisée et enregistrée dans le dossier de la patiente.
Un contact téléphonique avec le médecin peut être envisagé si le contexte s’y prête.
POINTS PRIORITAIRES À TRANSMETTRE AU MÉDECIN :
– Hypothyroïdie biologique et clinique patente à corriger, défaut d’observance du Levothyrox ;
– Difficulté à avaler Alteis ;
– Réévaluation du traitement antidépresseur et de l’état dépressif ;
– Nécessité d’un suivi ophtalmique du glaucome et suggestion de remplacement du Lumigan par une forme sans conservateur ;
– Réévaluation des douleurs arthrosiques ;
– Contrôle du ionogramme sanguin (risque d’hyperkaliémie lié à l’ARA II ou d’hypokaliémie du fait de la prise de bisacodyl, risque d’hyponatrémie lié à l’antidépresseur).
ENTRETIEN DE SUIVI D’OBSERVANCE
Six mois plus tard, Mme Blanche est revue pour l’entretien de suivi d’observance. Elle a entre-temps reconsulté son médecin traitant, son endocrinologue et son psychiatre.
CORRECTION DE L’HYPOTHYROÏDIE
Au vu de la TSH, l’endocrinologue a décidé de passer au dosage 150 µg en continu. Cela facilite l’observance de Mme Blanche qui n’a plus à se soucier de l’alternance.
Un bilan thyroïdien est prévu dans 2 mois.
TRAITEMENT DE LA DÉPRESSION
Le psychiatre a discuté avec Mme Blanche de l’arrêt du traitement par bromazépam en lui expliquant que celui-ci se ferait progressivement. Cependant, il préfère attendre que le traitement thyroïdien soit équilibré et a demandé à la revoir quand elle sera en euthyroïdie.
TRAITEMENT DU GLAUCOME
Mme Blanche n’a pas encore revu l’ophtalmologiste estimant que ce n’est pas la peine, car elle supporte bien le Monoprost et elle arrive à le mettre toute seule. Il convient de lui réexpliquer l’importance du suivi ophtalmique pour vérifier sa pression intraoculaire, l’état du nerf optique et l’efficacité du traitement.
POIDS
L’endocrinologue a adressé Mme Blanche à une diététicienne pour des conseils nutritionnels adaptés à sa dysthyroïdie et à son âge. Mme Blanche souffre de tous ces déplacements et n’a pas encore vu la diététicienne. Elle ne prend plus de poids, mais n’en a pas encore perdu.
DOULEURS
Mme Blanche prend maintenant 4 g de paracétamol par jour. Les douleurs sont atténuées mais toujours présentes. Elle utilise désormais un déambulateur, s’y est bien habituée, trouve que cela facilite ses déplacements, mais la marche reste douloureuse. La généraliste a décidé de l’orienter vers un rhumatologue.
TRAITEMENT LAXATIF
Mme Blanche prend tous les jours du lactulose et n’a plus recours au bisacodyl. Il est nécessaire de l’informer qu’elle doit surveiller son transit et que, lorsqu’elle sera en euthyroïdie, elle n’aura probablement plus besoin de laxatif.
QUESTIONNAIRE D’ADHÉSION THÉRAPEUTIQUE
Le questionnaire d’adhésion médicamenteuse est à nouveau rempli. Le nouveau score est de 6 sur 6, traduisant une nette amélioration de l’adhésion thérapeutique (ancien score : 4).
ENTRETIEN-CONSEIL AVEC LE PATIENT
L’entretien-conseil de Mme Blanche a lieu à l’occasion de la délivrance d’une nouvelle ordonnance prescrite par le Dr Margot, le traitement de bromazépam du 14/03/2019 étant arrivé à terme. Entre-temps, vous aviez eu un échange téléphonique avec le Dr Margot, qui s’était montrée intéressée au dossier de Mme Blanche et qui a modifié sa prescription. Mme Blanche vous rapporte que son médecin lui a prescrit une prise de sang et lui a conseillé de revoir ses spécialistes. Elle ajoute que cela ne l’arrange pas car c’est pour elle très fatigant de se déplacer.
Cet entretien est l’occasion de faire le point sur les changements de prescriptions et de proposer à la patiente les ajustements évoqués au cours du bilan.
SENSIBILISER
Les signes de dysthyroïdies doivent être connus. Il est également utile de permettre à Mme Blanche de comprendre ce qui est dosé aux cours des analyses médicales et notamment l’intérêt du dosage de la TSH.
La consultation régulière des spécialistes est nécessaire pour le suivi de ses pathologies et leur prise en charge adéquate.
Le losartan désormais prescrit est un comprimé moins gros que l’olmésartan et remboursé par l’Assurance maladie.
La posologie de paracétamol a été augmentée pour mieux soulager les douleurs.
Le collyre antiglaucomateux a été changé pour une présentation sans conservateur, moins irritante et avec un conditionnement plus souple. L’administration du collyre lubrifiant devra être poursuivie car les analogues de prostaglandines peuvent provoquer des irritations.
CONSEILLER
Levothyrox doit être pris de préférence le matin à jeun.
Un contrôle régulier du poids et une alimentation équilibrée, enrichie en fibres, sont conseillés.
Pour éviter les oublis, l’affichage d’un calendrier dans la cuisine peut être suggéré avec les jours de prise de Levothyrox 150 µg coloriés en rouge.
L’utilisation d’un déambulateur pourrait être utile à Mme Blanche pour faciliter ses déplacements (à discuter avec le médecin traitant). L’aménagement de l’habitat pourrait aussi être proposé en prévention des chutes.
DÉCONSEILLER
La prise de bisacodyl doit être proscrite.
Il est souhaitable d’éviter la consommation d’alcool pour ne pas majorer l’effet sédatif des psychotropes.
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